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Une alternative au libéralisme pur et dur (Alexis Karklins‑Marchay)

Une alternative au libéralisme pur et dur ! (Alexis Karklins‑Marchay)

L’essayiste Alexis Karklins-Marchay retrace dans « Pour un libéralisme humaniste » (*), une histoire vivante de l’ordolibéralisme qui s’opposait dès les années 1930 au « laissez-faire » autrichien et anglo-saxon et au keynésianisme, et contribua après-guerre au redressement de l’Allemagne. L’auteur franco-américain invite à (re)découvrir ses propositions dont certaines peuvent inspirer pour lutter contre les inégalités ou encore répondre aux nouveaux défis posés par le dérèglement climatique et les dommages environnementaux. intreview dans La Tribune.

- Dans votre livre, vous écrivez : « Les défenseurs du libéralisme doivent faire preuve de lucidité: l’opinion est tellement remontée contre ses dérives que la formulation de contre-arguments, même rationnels, ne suffit pas à le réhabiliter ». Comment expliquez-vous que l’on en soit arrivé là ? A quelles dérives faites-vous allusion ?

ALEXIS KARKLINS-MARCHAY – Le libéralisme théorisé par Friedrich Hayek et Milton Friedman, incarné politiquement par Margaret Thatcher au Royaume-Uni et Ronald Reagan aux Etats-Unis, et diffusé internationalement à travers le « consensus de Washington » est devenue l’idéologie dominante du libéralisme, celui du « laissez-faire » aux yeux de ses détracteurs. Malgré cela, la libéralisation des échanges depuis 50 ans a permis un développement économique exceptionnel, qui a réduit l’extrême pauvreté. Des pays du Tiers-Monde sont devenus des pays émergents. Ces faits sont documentés. Pourtant, ils sont inaudibles. Pourquoi ? D’abord certains problèmes demeurent comme les inégalités, qui sont socialement déstabilisatrices. Ensuite, à partir d’un certain niveau de prospérité, la question n’est pas de savoir si l’on va manger à sa faim mais si l’on est heureux. Car malgré la hausse des revenus, malgré les mécanismes de redistribution, nombre de personnes ont un sentiment d’insatisfaction qu’ils attribuent au libéralisme qui ne se soucierait que de rentabilité, particulièrement en France, pourtant le pays le moins libéral parmi les pays occidentaux. Ensuite, de nouveaux problèmes sont apparus comme la destruction de l’environnement et le dérèglement climatique attribués eux aussi au néolibéralisme.

Or vous prenez ces critiques au sérieux…

Elles sont caricaturales, mais il faut les entendre. Car que proposent-elles comme alternatives: la décroissance et la sortie du capitalisme. Or ça a déjà été testé ! L’URSS et les dizaines d’expériences collectivistes ont été économiquement et politiquement catastrophiques. Quant à une plus grande intervention de l’État, si la dépense publique était la condition du bien-être, la France, qui connaîtra en 2024 sa 50ᵉ année consécutive de déficit budgétaire, serait un pays en excellente santé! L’autre critique est celle nationaliste et souverainiste du retour aux frontières. Elle cible le libre-échange et la mondialisation, incarnés selon eux par la Commission européenne, coupable de la mort de nos industries et de nos territoires. Ils ne rejettent pas l’économie de marché, et prônent le protectionnisme. Or, historiquement, ce protectionnisme conduit tôt ou tard à des échecs et à la faillite.

Vous proposez une troisième voie qui est un courant libéral méconnu: l’ordolibéralisme. Qu’a-t-il de spécifique?

Je répondrai en deux temps, sur son origine puis son contenu. L’ordolibéralisme est né en Allemagne au début des années 1930, en réponse à la critique systématique adressée au libéralisme après la crise de 1929. A l’époque, l’interventionnisme de l’Etat apparaît comme la seule solution pour sortir de la crise : le New Deal de Franklin Roosevelt aux États-Unis et, malheureusement, l’arrivée des nazis au pouvoir en Allemagne à partir de 1933. Des juristes et des économistes allemands pensent qu’un certain libéralisme a atteint ses limites. Ils critiquent tant l’interventionnisme que le libéralisme du laissez-faire, qu’ils jugent responsable de la crise de 1929. C’est un débat théorique important, car les libéraux partisans de l’ordre spontané comme l’autrichien Friedrich Hayek estiment non sans raisons que la crise a été aggravée par la réaction des Etats, à cause de politiques monétaires expansionnistes. Ces divisions apparaîtront notamment lors du fameux colloque Lippmann à Paris en 1938.

A ce moment-là, le débat est seulement théorique ?

Oui, c’est un libéralisme bien tempéré qui en défend les valeurs cardinales. Les ordolibéraux se réfèrent à Adam Smith, critiquent l’étatisme et la planification, défendent la propriété privée et le statut de l’entrepreneur, la liberté des prix et une gestion budgétaire et monétaire rigoureuse. Ils prônent la concurrence, car elle stimule l’activité économique et élimine les rentes. Ils réhabilitent l’Etat – pas celui de l’État providence et du keynésianisme – qu’ils ne cantonnent pas aux seules missions régaliennes : police, justice, armée. Ils lui confèrent également un rôle central pour réguler la concurrence et limiter la tentation de certains groupes de prendre le pouvoir pour se constituer en monopoles, ces derniers apparaissant comme un danger non seulement pour le consommateur mais aussi pour la démocratie. Selon leur vision, l’État accompagne aussi les transformations de la société via la formation, l’apprentissage, l’innovation, les infrastructures. Toutefois, les ordolibéraux fixent deux conditions à l’action de l’État: il intervient seulement pour adapter et non pas conserver, par exemple en évitant d’aider une industrie moribonde qui s’avère inutilement coûteuse ou en finançant l’adaptation du pays par exemple aux transformations technologiques. La deuxième condition est la compatibilité des mesures prises avec l’économie de marché. Ainsi, ils s’opposent au blocage des prix qui ne réduit pas l’inflation mais crée des phénomènes de pénurie qui au contraire l’alimentent. L’ordolibéralisme accepte aussi le principe de redistribution par l’État si les inégalités sont trop importantes et menacent la cohésion de la société, notamment par une fiscalité progressive, mais sûrement pas au niveau qu’elle atteint aujourd’hui en France. De même, en cas de dépression économique et de perte de confiance, ils sont favorables à une politique publique de soutien à la demande. Enfin, sur le plan politique, l’ordolibéralisme est décentralisateur et défend le principe de subsidiarité, car un État trop centralisé n’a de cesse d’étendre ses champs de compétence. C’est une critique de la démagogie politique.

A la différence de Hayek qui voyait dans le marché une ordre spontané naturel, l’ordolibéralisme y voit une institution humaine sujette aux dérives ?

Oui. Wilhelm Röpke, l’un de ses penseurs majeurs, constate que la transformation permanente de la société par l’économie de marché conduit à l’exclusion de certaines personnes. Il faut donc les accompagner. En cela, l’ordolibéralisme est davantage une philosophie de la société qu’une théorie économique.

La lutte contre l’inflation est centrale chez eux ?

Oui, ils sont convaincus que l’inflation est défavorable à l’égalité dans la société parce que ce sont les plus modestes qui en pâtissent le plus, qu’elle déstabilise l’économie en réduisant la visibilité des acteurs économiques, ce qui les rend moins enclins par exemple à investir ou à consommer. Les ordolibéraux, rappelons-le, ont fait l’expérience de l’hyperinflation des années 1920 qui a totalement déstabilisé l’économie et la société allemandes.

Aujourd’hui, des gouvernements, par exemple en France, prennent des mesures pour gommer la hausse des prix. N’est-ce pas démagogique d’un point de vue ordolibéral?

C’est vrai mais vouloir aider les ménages les plus modestes est compréhensible. Je distingue néanmoins l’ordolibéralisme et la social-démocratie. Cette dernière tendra à centraliser ses décisions, alors que l’ordolibéralisme est totalement décentralisé. C’est pourquoi il voit dans l’économie de marché un bon système, alors que les sociaux-démocrates l’adoptent par défaut. Il s’oppose à l’État providence qui coûte très cher en créant des trappes à dépendance, où tout le monde paye sans savoir pourquoi, car les mesures ne sont pas ciblées. La crainte des ordolibéraux, c’est l’accroissement permanent de l’État, le transformant en Léviathan. En France, il est vrai, depuis des décennies, les gouvernements règlent les problèmes en faisant des chèques. Pour l’ordolibéralisme, c’est une solution illusoire qui déresponsabilise les individus.

Une autre différence avec les autres libéralismes, c’est la place centrale de l’éthique, dans lequel vous voyez un humanisme. L’économiste Alexander Rüstow que vous citez dit : « Ces institutions non-marchandes comme la famille, l’Etat et les valeurs spirituelles, éthiques, esthétiques et culturelles sont au-dessus de la simple sphère marchande »…

Si l’ordolibéralisme naît en Allemagne, il s’inscrit dans l’histoire de la culture européenne qui plonge ses racines dans la Grèce antique, se nourrit de la scolastique, de la théologie protestante et catholique, mais aussi des Lumières, notamment allemandes, l’Aufklärung, dont la figure centrale est Emmanuel Kant. C’est une réflexion sur la dignité et l’émancipation humaine, sur l’éthique en société. Pour les ordolibéraux, une économie de marché ne peut fonctionner qu’avec des êtres éthiques. Car soit vous vous régulez vous-même, soit c’est l’Etat qui vous régule. Rappelons que ce sont des années où il y a une massification de la société, un phénomène qu’analyse le philosophe espagnol José Ortega y Gasset, ami des ordolibéraux, dans un livre important « La révolte des masses », publié en 1929. Et la réponse à la massification, c’est l’éthique individuelle. Dans le grand livre du chef de file des ordolibéraux, Wilhelm Röpke, « Au-delà de l’offre et de la demande », une phrase résume bien ce point de vue : « L’économie de marché est une condition nécessaire mais non suffisante. Une société libre, juste et ordonnée ».

L’ordolibéralisme a débouché sur une application politique en 1948 dans une Allemagne dévastée et occupée, grâce à des hommes comme Wilhelm Röpke, Ludwig Erhard, un futur chancelier, Walter Eucken, membre de l’école de Fribourg qui fut le foyer de l’ordolibéralisme, ou encore Alfred Müller-Armack. Certains avaient été des opposants de la première heure au nazisme. Vous montrez que le volontarisme de ces hommes a changé le destin de l’Allemagne…

Oui, certaines conditions l’ont permis. En 1948, l’Allemagne est complètement exsangue. Walter Eucken dit que le pays est retourné économiquement à un état primitif. On compte 3 millions de sans-abris et plusieurs millions de réfugiés. Les grands centres industriels sont détruits, la production est à l’arrêt ou très réduite. Les Allemands ont de l’épargne mais ne peuvent pas la dépenser car il y a pénurie de produits. Le troc a remplacé le commerce, les Allemands passent leur temps à faire la queue pour manger et ne peuvent pas travailler. L’inflation est colossale, la monnaie n’a plus de valeur. Malgré ce contexte, ces responsables vont libérer les prix qui sont bloqués, et ne pas céder face aux critiques! Car pendant plusieurs mois, les prix continuent de monter. Une grande grève est organisée durant l’année. Ludwig Erhard, soutenu par le chancelier Konrad Adenauer, tient bon. Dans le même temps, les ordolibéraux multiplient les tribunes dans les journaux pour justifier le bien-fondé de cette politique. Et en 1949, les premiers résultats arrivent, les prix et le chômage vont baisser durant les années suivantes.

Une politique qui a structuré l’Allemagne de l’Ouest?

Absolument, mais pas uniquement. L’ordolibéralisme a aussi contribué à la reconstruction italienne, notamment sous l’impulsion de l’économiste Luigi Einaudi, qui occupera les postes de gouverneur de la Banque centrale d’Italie, ministre du Budget et président de la République italienne après guerre. C’était un ami de Wilhelm Röpke. Ce courant va s’incarner en Europe dans la démocratie chrétienne. Autre exemple, moins connu, la France a connu son moment influencé par l’ordolibéralisme en 1958, grâce aux travaux du grand économiste libéral français, Jacques Rueff. Présent au colloque Lippmann, ce n’est pas une ordolibéral mais il en est très proche. Il a notamment préfacé le livre de Ludwig Erhard « La prospérité pour tous ». Il a vu le succès allemand basé d’ailleurs sur des recettes libérales classiques : rigueur budgétaire et monétaire, libéralisation des prix, rétablissement des conditions d’un marché libre, et exigence de mesures qui profitent aux plus pauvres. C’est ce qu’il va proposer à la tête de la commission où il a été nommé par le général de Gaulle sur recommandation de Georges Pompidou pour travailler avec Antoine Pinay, ministre des Finances. Car malgré la reconstruction, l’économie française n’était plus compétitive en 1958. Le plan Pinay-Rueff d’inspiration libérale sera adopté par de Gaulle, il permettra à l’économie française de connaître une décennie de très forte croissance, l’une des plus fortes de toute l’Europe, débouchant sur les fameuses « Trente Glorieuses ».

Votre plaidoyer ne vous empêche pas de formuler quelques critiques à l’égard de l’ordolibéralisme…

Oui. D’abord, certaines recommandations, trop systématiques, tournent au dogme, par exemple la nécessité de veiller à une concurrence permanente, avec cette obsession du « small is beautiful ». Ne s’est-on pas pas privé en Europe de constituer des géants industriels ? Même s’il défendait la « destruction créatrice », Joseph Schumpeter n’était pas contre l’idée qu’il y ait des grandes entreprises, jugeant qu’elles pouvaient être aussi innovantes, même en position de force.

D’autant que les PME dépendent aussi pour leurs activités de grands groupes qui sont des donneurs d’ordre…

Il ne faut pas se leurrer, pour exister sur certains marchés, on ne peut pas faire la chasse aux grandes entreprises par principe. Même la Suisse, modèle pour les ordolibéraux, a des grandes entreprises. Son taux d’industrialisation est même supérieur à celui de la France.

Vous faites également une critique qui va au-delà de l’économie?

Oui, elle porte sur une forme de conservatisme décliniste en matière de culture. Par exemple, Röpke trouvait scandaleux que les Beatles aient reçu l’ordre du British Empire. Pour lui, ce n’était pas de la culture. Les ordolibéraux ont un aspect élitiste qui me gêne.

N’est-ce pas ce que reprochent au libéralisme ses détracteurs, une forme d’élitisme?

Je ne le pense pas. 50 % des Français ont plutôt une bonne image du libéralisme, selon une enquête d’opinion récente de l’IFOP. Le libéralisme ce n’est pas seulement le chef d’entreprise, c’est aussi moins de bureaucratie. Tout dépend de ce qu’on met derrière le concept. Dans l’ordolibéralisme, il y a une dimension culturelle, intellectuelle et spirituelle qui exige en revanche une attitude éthique de l’individu qui va au-delà des simples mécanismes économiques du pouvoir d’achat des consommateurs, notamment les plus modestes. Ce qui a pu conduire certains de ses représentants à se réfugier dans une forme de conservatisme qui n’est plus de mise aujourd’hui. Mais sa visée humaniste, elle, est plus que jamais d’actualité.

_____

(*) Alexis Karklins-Marchay « Pour un libéralisme humaniste », préface de Nicolas Dufourcq, éditions les Presses de la Cité, 330 pages, 22 euros.

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Karklins Cover

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Robert Jules
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Commentaires
3
PAFO à écrit le 10/06/2023 à 1:05
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Le libéralisme est du même ordre que le communisme, une simple utopie. Le modèle français d’après guerre avait cette qualité qui était de préserver une certaine résilience par des monopoles d’état dans les secteurs vitaux de notre société. Nous n’avo…
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Churchill à écrit le 09/06/2023 à 21:47
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Ya bcp de vrai, sauf que Haye et consors ( et marx d’ailleurs aussi) faut les lire avec les lunettes de l’époque.. Concernant les monetaristes, le pb est la masse monétaire, le reste est un peu accessoire, et on a fait n’importe quoi avec de pse…
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Dossier 51 à écrit le 09/06/2023 à 18:35
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Nietzsche qui était favorable au libéralisme disait que dès que née une institution libérale elle ne l’est plus. Le libéralisme c’est comme le communisme, on nous en parle tout le temps, on l’expose comme cause de tous les maux alors que nous n’en av…
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Economie-Libéralisme et protectionnisme : la leçon de Biden à la France !

Economie-Libéralisme et protectionnisme : la leçon de Biden à la France !

Biden donne une leçon de libéralisme et de concurrence dont la France ferait bien de s’inspirer. Par Eugène Daronnat, Membre du Comité Exécutif d’Objectif France.( Dans la Tribune, extrait)

Il avait été décrit comme timide. A 78 ans, beaucoup de commentateurs pensaient que le mandat de Joe Biden allait être un mandat de transition. A peine élu, les scénarios sur la prise de pouvoir de Kamala Harris en cours de Présidence étaient déjà évoqués. Celui que l’on surnommait « sleepy Joe » a pris à contre-courant la plupart des observateurs, marquant une véritable rupture avec la présidence de Donald Trump, et le réveil des Etats-Unis sur la scène internationale, notamment à travers le retour du multilatéralisme.

En première ligne sur la nouvelle fiscalité sur les multinationales, le Président Américain a confirmé que c’était bien grâce aux Etats-Unis, et aux Etats-Unis seulement que ces avancées avaient été rendues possibles, même s’il ne faut pas être dupe sur les intérêts défendus par les Américains dans cette affaire : les Etats-Unis seront en effet le 1er bénéficiaire de cette mesure visant à faire payer l’impôt sur les sociétés dans le pays d’origine des entreprises « délocalisant » leur fiscalité à l’étranger.

Joe Biden s’est trouvé beaucoup de soutiens en France quand il a décidé d’augmenter la fiscalité sur les entreprises, en faisant passer l’impôt sur les sociétés de 21% à 28% (il était de 28% en France en 2020). Augmenter les impôts, le rêve Français devenu réalité outre-Atlantique, quelques semaines après que les Etats-Unis aient réalisé un plan d’investissement de plusieurs centaines de milliards de dollars, avec des chèques de relance directement adressés aux ménages américains.

Le Président Américain a surpris son monde ces dernières semaines, avec un décret visant à renforcer la concurrence dans l’économie américaine. Inaudible en France où les termes concurrence et libéralisme sont des épouvantails, Joe Biden se place dans la lignée de la tradition américaine, avec une économie ouverte, libérale, mais qui pour autant n’oublie pas sa finalité : servir le consommateur.

Dans ce décret, il est notamment écrit : « La promesse américaine d’une prospérité large et durable découle d’une économie ouverte et compétitive ».

Puis ensuite : « Pour les travailleurs, un marché compétitif créé plus d’emplois de qualité, avec la liberté économique de changer de travail ou de négocier un meilleur salaire ». Nous sommes loin d’une politique de nivellement par le bas !

Concrètement, ce texte prévoit l’ouverture à la concurrence de secteurs dans lesquels les Américains ont peu de choix. Baisse des prix des médicaments, possibilité d’accéder à un nouveau fournisseur d’accès à internet, plus de transparence dans la présentation de certains services : par des mesures concrètes, Joe Biden souhaite montrer que « le capitalisme sans concurrence, ce n’est plus du capitalisme, c’est de l’exploitation. ». Son administration évalue à plusieurs milliers de dollars par an la perte d’argent pour les ménages, liée à une trop grande concentration de l’économie.

 

Les Etats-Unis vivent plus que nous une situation d’inégalités économique et patrimoniales, avec une scission claire entre les gagnants et les perdants de la mondialisation. Avec ces annonces, Joe Biden prend une orientation assumée : seule la concurrence, l’économie ouverte (en intérieur) permettront à toute une génération d’américains d’accéder à la prospérité.

Loin des caricatures du libéralisme en France, le Président des Etats-Unis nous montre que le (véritable) libéralisme, ce n’est pas la loi du plus fort, c’est l’intérêt du plus faible.

Il s’agit d’une véritable leçon pour la France, alors que notre logiciel de pensée nous pousse à croire que plus de normes, plus de lois, plus de textes contribuent à nous protéger. C’est exactement le contraire.

La seule complexité administrative se fait aujourd’hui clairement au détriment des plus faibles. Ceux qui ont les moyens de comprendre, d’interpréter des procédures, des textes de loi tirent leur épingle du jeu, les autres sont condamnés à échouer. Pour honorer sa promesse d’égalité, la France ferait bien de s’inspirer de Joe Biden, en convoquant une révolution administrative, avec le retour de plus de liberté, de plus de transparence.

Car en France plus qu’ailleurs, le système économique est sclérosé. De manière symétrique, en France plus qu’ailleurs, le système politique est paralysé. Il est temps de réconcilier le consommateur, le citoyen avec un système économique, démocratique qui ne se fasse plus dans l’intérêt de quelques-uns, au détriment de tous. Dans tout cela, le rôle de l’Etat n’est pas d’être omniprésent, mais de créer les conditions pour que chacun puisse s’accomplir, quel que soit son héritage patrimonial, culturel, éducatif.

C’est cela que nous apprend Joe Biden. La prospérité est à la portée de tous.

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En première ligne sur la nouvelle fiscalité sur les multinationales, le Président Américain a confirmé que c’était bien grâce aux Etats-Unis, et aux Etats-Unis seulement que ces avancées avaient été rendues possibles, même s’il ne faut pas être dupe sur les intérêts défendus par les Américains dans cette affaire : les Etats-Unis seront en effet le 1er bénéficiaire de cette mesure visant à faire payer l’impôt sur les sociétés dans le pays d’origine des entreprises « délocalisant » leur fiscalité à l’étranger.

Joe Biden s’est trouvé beaucoup de soutiens en France quand il a décidé d’augmenter la fiscalité sur les entreprises, en faisant passer l’impôt sur les sociétés de 21% à 28% (il était de 28% en France en 2020). Augmenter les impôts, le rêve Français devenu réalité outre-Atlantique, quelques semaines après que les Etats-Unis aient réalisé un plan d’investissement de plusieurs centaines de milliards de dollars, avec des chèques de relance directement adressés aux ménages américains.

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Dans ce décret, il est notamment écrit : « La promesse américaine d’une prospérité large et durable découle d’une économie ouverte et compétitive ».

Puis ensuite : « Pour les travailleurs, un marché compétitif créé plus d’emplois de qualité, avec la liberté économique de changer de travail ou de négocier un meilleur salaire ». Nous sommes loin d’une politique de nivellement par le bas !

Concrètement, ce texte prévoit l’ouverture à la concurrence de secteurs dans lesquels les Américains ont peu de choix. Baisse des prix des médicaments, possibilité d’accéder à un nouveau fournisseur d’accès à internet, plus de transparence dans la présentation de certains services : par des mesures concrètes, Joe Biden souhaite montrer que « le capitalisme sans concurrence, ce n’est plus du capitalisme, c’est de l’exploitation. ». Son administration évalue à plusieurs milliers de dollars par an la perte d’argent pour les ménages, liée à une trop grande concentration de l’économie.

 

Les Etats-Unis vivent plus que nous une situation d’inégalités économique et patrimoniales, avec une scission claire entre les gagnants et les perdants de la mondialisation. Avec ces annonces, Joe Biden prend une orientation assumée : seule la concurrence, l’économie ouverte (en intérieur) permettront à toute une génération d’américains d’accéder à la prospérité.

Loin des caricatures du libéralisme en France, le Président des Etats-Unis nous montre que le (véritable) libéralisme, ce n’est pas la loi du plus fort, c’est l’intérêt du plus faible.

Il s’agit d’une véritable leçon pour la France, alors que notre logiciel de pensée nous pousse à croire que plus de normes, plus de lois, plus de textes contribuent à nous protéger. C’est exactement le contraire.

La seule complexité administrative se fait aujourd’hui clairement au détriment des plus faibles. Ceux qui ont les moyens de comprendre, d’interpréter des procédures, des textes de loi tirent leur épingle du jeu, les autres sont condamnés à échouer. Pour honorer sa promesse d’égalité, la France ferait bien de s’inspirer de Joe Biden, en convoquant une révolution administrative, avec le retour de plus de liberté, de plus de transparence.

Car en France plus qu’ailleurs, le système économique est sclérosé. De manière symétrique, en France plus qu’ailleurs, le système politique est paralysé. Il est temps de réconcilier le consommateur, le citoyen avec un système économique, démocratique qui ne se fasse plus dans l’intérêt de quelques-uns, au détriment de tous. Dans tout cela, le rôle de l’Etat n’est pas d’être omniprésent, mais de créer les conditions pour que chacun puisse s’accomplir, quel que soit son héritage patrimonial, culturel, éducatif.

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Le libéralisme n’est pas mort ! (Patrick Artus)

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L’économiste Patrick Artus veut sans doute curieusement rassurer ou se rassurer lui-même et rejette, dans sa chronique au « Monde », l’idée que l’intervention massive des Etats dans le fonctionnement de l’économie soit le signe d’un retour à l’économie dirigée, il s’agit plutôt d’un réajustement des « incitations » visant à aider les acteurs économiques dans leurs choix.

Un argumentaire quand même un peu simpliste car le choix n’est sans doute pas entre un dirigisme étatique et un libéralisme sans régulation. NDLR

Chronique

La crise du Covid-19 a conduit, dans tous les pays de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), à des interventions massives des banques centrales et des Etats dans le fonctionnement des économies et dans les choix des agents économiques. Il a donc été affirmé que la pandémie avait sonné la fin du libéralisme économique, c’est-à-dire d’un système où les ménages et les entreprises poursuivent librement leurs objectifs, et ne sont pas empêchés par les Etats de faire les choix qui leur paraissent opportuns.

Les banques centrales des pays développés ont choisi de maintenir des taux d’intérêt très bas (les taux d’intérêt à dix ans dans l’OCDE sont aujourd’hui en moyenne inférieurs à 1 %, alors que la croissance nominale va être d’au moins 7 % en 2021), en achetant des quantités massives d’obligations. Cela a permis aux Etats de générer des déficits publics (au moins 13 % du produit intérieur brut de l’OCDE en 2021) et des taux d’endettement publics très élevés, tout en assurant la solvabilité des emprunteurs publics et privés. Les banques centrales ont également décidé de participer à l’accélération de la transition énergétique en favorisant dans leurs financements les dettes « vertes » ou les dettes d’entreprises « vertes ».

L’intervention économique des Etats, au-delà de la définition des règles sanitaires, est tout aussi impressionnante. Les politiques budgétaires expansionnistes (transferts, subventions, financement du chômage partiel…) ont évité le recul du revenu des ménages malgré la récession : au contraire, le pouvoir d’achat du revenu des ménages de l’OCDE a progressé de 3 % en 2020. Ces aides ont également préservé les profits des entreprises.

Les Etats ont aussi garanti des crédits aux entreprises (pour près de 140 milliards d’euros en France) et ont, à travers les différents plans de relance, financé des investissements stratégiques (médicament, électronique, matériel médical), financé des relocalisations, affirmant ainsi leur volonté de moins dépendre des chaînes de valeur mondiales.

 

Enfin, aux Etats-Unis et en Europe, les gouvernements ont pris la décision d’accélérer la transition énergétique et de durcir les normes climatiques environnementales.

Banques centrales et Etats ont donc bel et bien fortement accru leurs interventions dans les décisions des ménages et des entreprises, et dans l’évolution générale de l’économie. Mais est-on passé pour autant à une économie dirigiste ?

«Le macronisme : libéralisme ou protectionnisme ? »

«Le macronisme : libéralisme ou protectionnisme ? ».

Bruno Alomar, économiste, est ancien haut fonctionnaire à la direction générale de la concurrence de la Commission européenne s’interroge sur les contradictions entre les intentions initiales de Macron et ses évolutions dans la conjoncture actuelle (tribune dans l’opinion)

Au feu des responsabilités, le macronisme, qui se voulait un progressisme capable de renverser les conservatismes économiques, a-t-il perdu sa boussole ? Blairisme à la française, il avait placé au centre de son analyse l’économie française, et la nécessité absolue de la moderniser. De là toutes les réformes du début du quinquennat, depuis la transformation de l’ISF en IFI jusqu’à celle du marché du travail, en passant par la baisse de l’impôt sur les sociétés et une plus grande attention portée aux impôts de production.

Bien sûr la crise est passée par là et a considérablement remisé les ambitions initiales. Le mouvement des Gilets jaunes, l’augmentation puissante des déficits publics, la confirmation d’un déficit extérieur élevé, sont autant de pierres dans le jardin du bilan économique du pouvoir en place.

Pourtant, si une analyse objective impose de prendre en compte des rigidités qui ont pu être sous-estimées et une crise économique — comme celle de 2008 — qui n’est pas née en France, force est de constater un glissement de la doctrine économique gouvernementale. Car, en fait d’ouverture au monde et à la technologie, qui se voulaient ses marques de fabrique, voici que la politique gouvernementale emboîte le pas aux souverainistes et place au cœur de son action le concept de « souveraineté », devenu subitement à la mode. Ce faisant, c’est bien un message protectionniste que la France ne craint plus d’envoyer. Deux exemples l’attestent.

« Péril québécois ». Le premier concerne les rapprochements entre entreprises. Déjà l’affaire Alstom-Siemens en 2019 avait constitué une première alerte. Les autorités françaises, prises d’une bouffée de protectionnisme, avaient considéré le rejet de l’opération comme un « crime », suscitant l’incompréhension de la plupart de ses partenaires. Elles avaient brandi une menace chinoise non étayée. Après cette opération, pourtant présentée comme « de la dernière chance, » Alstom avait finalement — et heureusement — trouvé un autre accord avec Bombardier.

Et voici que, la semaine dernière, à la stupeur de beaucoup d’observateurs, le gouvernement interdit à Carrefour de discuter une offre amicale, alors même que l’Etat ne dispose d’aucune part au capital de ce dernier, en brandissant cette fois un risque pour la « souveraineté alimentaire », là encore peu étayé. Bruno Le Maire a d’ailleurs insisté sur le fait que faire obstacle à une offre étrangère concernant la chaîne Carrefour n’était, après tout, une question purement politique. Après le « péril jaune », le « péril québécois ».

« Le macronisme, à l’origine, n’avait pas de mots assez enthousiastes pour promouvoir la “start-up nation”. Or, la politique gouvernementale s’évertue désormais surtout à rendre les grandes entreprises américaines responsables des retards français en la matière »

Le second concerne le numérique. Le macronisme, à l’origine, n’avait pas de mots assez enthousiastes pour promouvoir la « start-up nation ». Or, la politique gouvernementale s’évertue désormais surtout à rendre les grandes entreprises américaines responsables des retards français en la matière. La France s’est ainsi enorgueillie de sa croisade pour l’imposition des Gafam, sans prendre le temps de mener sereinement une analyse coûts/avantages de leur influence globale qu’un pays comme l’Irlande, qui n’est pas moins bien géré, a pourtant faite.

Entraves. Le gouvernement se félicite aussi de pousser au niveau européen un agenda numérique souverainiste, avec comme héraut le commissaire Thierry Breton, notamment dans le domaine du droit de la concurrence (digital market act [DMA]). Ceci sans se rendre compte qu’opérer un deux poids deux mesures en défaveur de tel ou tel et au bénéfice des acteurs français c’est non seulement rompre de subtils équilibres entre Européens, mais également encourager les Etats-Unis, ou la Chine à des contre-mesures équivalentes.

Bien sûr, le gouvernement peut décider d’enfourcher le cheval du protectionnisme. Encore faut-il l’assumer et disposer d’une doctrine lisible par les agents économiques. Si la France veut faire obstacle à la liberté des capitaux, elle doit être prête à recevoir moins d’investissements directs étrangers, domaine dans lequel elle occupait le premier rang européen en 2019. Si elle souhaite empêcher les rachats de start-up européennes dans le domaine numérique sans baisser parallèlement la fiscalité pour la mettre au niveau de ses concurrents, elle le peut : qu’elle ne vienne pas ensuite se plaindre que les talents dans le domaine numérique préfèrent s’exporter.

Protéger l’économie est une chose, et tout n’est pas, soit à vendre, soit sans lien avec des intérêts de sécurité nationale. Dans le domaine militaire, la France a sans doute eu raison de s’opposer au rachat de Photonis par Teledyne. En prendre acte est une chose, et mobiliser occasionnellement les dispositifs de protection n’est pas illégitime. Prétendre en revanche poursuivre l’ouverture de l’économie française au vaste monde en multipliant, en réalité, les entraves et en assumant à mots à peine couverts un vrai glissement protectionniste en est une autre. Le « en même temps » y atteint ses limites.

Bruno Alomar, économiste, est ancien haut fonctionnaire à la direction générale de la concurrence de la Commission européenne.

«Libéralisme en question « (Marcel Gauchet)

 «Le libéralisme  en question « (Marcel Gauchet)

 «Le chiffre le plus étonnant du sondage est celui qui montre leur désamour à l’égard de l’Etat-providence. Ils ne sont que 36 % à l’apprécier – chiffre confirmé par l’image mitigée de l’Etat en général (58 % d’opinions favorables, contre 40 %)» (sondage Ifop pour l’Opinion et la Fondation Concorde)

Chronique dans l’opinion

 

 

Valeurs, rôle de l’Etat, poids du secteur public, politiques sociales, libertés, fiscalité… L’Opinion publie la cinquième édition de son sondage exclusif sur les Français et le libéralisme. Des personnalités le commentent.

L’image de l’opinion française que renvoie le sondage « Les Français et le libéralisme » est celle d’un statu quo anxieux. Les Français sont perplexes au milieu de leurs partages, et le moins que l’on puisse dire est que les responsables politiques de droite ou de gauche qui voudraient tirer de ces chiffres des indications claires sur les attentes de leurs électeurs seront déçus. La difficulté de définir une offre politique à partir de ces données n’a sans doute jamais été aussi grande.

De ce point de vue, l’élection d’Emmanuel Macron, au-delà des péripéties qui l’ont permise, n’apparaît pas rétrospectivement comme le simple fruit d’une conjoncture chanceuse. Le macronisme, dans le flou doctrinal de son « en même temps », est bel et bien en phase avec les incertitudes françaises. Cela ne lui vaut pas un niveau élevé d’adhésion ni une grande popularité. Mais cela suffit à lui assurer une plus grande acceptabilité que ses concurrents de droite et de gauche, dont la tâche paraît impossible, en dépit de la légitimité de principe que conservent leurs positions.

Les Français aiment le libéralisme (en pratique beaucoup plus qu’en théorie), ils n’aiment pas le capitalisme. Ils plébiscitent l’initiative, la responsabilité, le mérite, et même l’entreprise. Ils n’aiment guère en revanche la concurrence, les privatisations ou la mondialisation. Et sont 72 % à rejeter le capitalisme. On peut voir dans ces chiffres contrastés l’inconséquence habituelle consistant à vouloir les causes en refusant les conséquences. C’est sûrement une partie du tableau.

Les Français n’aiment pas la manière dont on leur a vendu les réformes, l’économie de marché, la mondialisation, le capitalisme

Capitalisme. Mais il y a autre chose. Ce que les Français repoussent le plus, ce sont les GAFA, c’est-à-dire un certain visage de la mondialisation capitaliste. Mais lequel ? Dira-t-on conforme à l’esprit du libéralisme la création de monopoles géants, appuyés sur l’hégémonie politique des Etats-Unis et se soustrayant aux règles en particulier fiscales des pays où ils s’installent comme en territoires conquis ?

Cela me conduit à une observation plus générale, qui me semble bien se dégager du sondage. Les Français n’aiment pas la manière dont on leur a vendu les réformes, l’économie de marché, la mondialisation, le capitalisme. Les retombées se sont révélées très différentes des promesses de papier. C’est le prix que paient aujourd’hui les représentants politiques de la droite et de la gauche, du libéralisme et du socialisme, mais aussi et surtout de l’héritage du mitterrando-chiraquisme.

Les Français sont attachés à leur tradition. Ils tiennent à leurs services publics, ils gardent une bonne image, même, des nationalisations. Ils valorisent au plus haut point la protection et la solidarité. Mais ils ne sont pas aveugles à leurs limites et à leurs défaillances. A cet égard, le chiffre le plus étonnant du sondage est celui qui montre leur désamour à l’égard de l’Etat-providence. Ils ne sont que 36 % à l’apprécier – chiffre confirmé par l’image mitigée de l’Etat en général (58 % d’opinions favorables, contre 40 %).

Si l’analyse est juste, elle donne une idée assez nette de la tâche à accomplir de la part des responsables politiques de tous bords ; sortir des mensonges démagogiques de l’ère mitterrando-chiraquienne pour définir un libéralisme socialement acceptable et un capitalisme conforme à l’esprit du libéralisme.

 

Marcel Gauchet est philosophe et historien.

 

Le subjectivisme de Hayek revisité au service d’un libéralisme vertueux

Le subjectivisme de Hayek revisité au service d’un libéralisme vertueux

Ce que tente de faire THIERRY AIMAR, enseignant à Sciences Po dans une interview à la Tribune

 

THIERRY AIMAR -Hayek est un auteur incompris parce que caricaturé. A gauche comme à droite, on présente sa pensée de façon simpliste et réductrice. A gauche, on a fait de Hayek un économiste primaire qui voudrait appliquer au monde contemporain des préceptes ultralibéraux hérités du XIXe siècle totalement inadaptés aux enjeux actuels. A droite, il a été récupéré par les conservateurs, voire des réactionnaires qui dénaturent ses analyses pour défendre des corporations privées et préserver leurs rentes. Cette double déformation du message de Hayek a nui à l’appréhension objective de son œuvre qui ne saurait d’ailleurs se résumer à sa seule dimension économique.

 

En effet, dès le premier chapitre, vous en faites un précurseur des neurosciences, ce qui est une approche pour le moins singulière Le libéralisme de Hayek s’appuie sur une conception extrêmement fouillée, subtile, complexe du cerveau humain. Il est difficile d’appréhender sa pensée économique sans la relier à un subtil ensemble de connaissances qui touchent à la philosophie, à la psychologie, aux sciences sociales en général. Et la meilleure façon de découvrir le travail de Hayek est de l’aborder chronologiquement. Or à l’origine de sa pensée, on trouve une réflexion sur le cerveau humain, en particulier sur les racines neuronales du subjectivisme. Hayek cherche à comprendre, et avec lui l’ensemble de l’école autrichienne dont il est le représentant le plus connu, le subjectivisme humain, ses contraintes, comme ses vertus. Toute sa théorie peut être interprétée comme un gigantesque effort pour coordonner au mieux les caractéristiques subjectives du cerveau humain à l’environnement social.

Qu’est-ce qui différencie le subjectivisme de l’individualisme qui caractérise généralement le libéralisme?

L’individualisme est aujourd’hui vilipendé car il est souvent associé par ses critiques à la notion de matérialisme et de consumérisme ; par ailleurs, il est présenté comme un vecteur de dislocation sociale. L’individualisme hayekien s’oppose à ces deux images : d’une part, il renvoie fondamentalement à la notion de subjectivisme, lequel exprime le fait que tout individu est un être singulier, personnalisé dont l’épanouissement exige un effort spirituel, « intropreneurial » – comme je définis le terme dans mon ouvrage – pour s’exprimer et se découvrir lui-même. L’individualisme sans subjectivisme n’est qu’une coquille vide qui transforme l’esprit de l’acteur en une caisse de résonance des opinions collectives, des tendances qui sont dans l’air du temps, comme on le voit malheureusement trop souvent sur le Net ; d’autre part, pour Hayek, tout individu est lui-même inscrit dans un environnement social et ses propres représentations ne sont jamais totalement détachées d’un héritage culturel symbolisé par ce qu’il appelle des règles de juste conduite, c’est-à-dire un ensemble de traditions de conventions qui servent d’appui aux actions individuelles. Mais à l’intérieur de ce cadre, respecter et développer les subjectivités des acteurs, y compris en permettant aux plus entrepreneuriaux d’entre eux de remettre en cause certaines normes de manière à favoriser l’évolution des règles, constitue pour Hayek la condition sine qua non de la préservation d’un ordre social apte à faire survivre des milliards d’individus.

Vous insistez sur la démarche entrepreneuriale, y a-t-il un moment dans l’histoire où elle apparaît?

Sur le terrain économique, on la voit apparaitre en Occident à la fin du XVIIIe siècle pour se développer alors de manière croissante. Mais au milieu du XIXe siècle, des premiers conflits vont apparaitre entre les entrepreneurs et la bourgeoisie rentière, aristocratique et terrienne. En Angleterre, cette opposition va se traduire par une fracture au sein du Parti whig, dont certains membres vont rejoindre les Tories conservateurs, défenseurs des intérêts des possédants, alors que d’autres vont créer puis renforcer le parti libéral mené par Richard Cobden, représentant des défricheurs d’opportunités. On retrouve aujourd’hui l’équivalent de ces conflits entre une droite patrimoniale désireuse de stabilité et un entrepreneuriat qui bouleverse par ses découvertes l’ensemble des activités et remet en question toutes les rentes de situation.

Quand vous dites entrepreneuriat, cela ne se réduit pas uniquement à l’entrepreneur économique?

Effectivement, et ce point est crucial. L’entrepreneur au sens économique du terme désigne l’individu dont la tâche est de débusquer des opportunités de profit et de permettre la formation des prix. Mais pour Hayek, l’entrepreneuriat économique est lui-même un sous-ensemble d’une fonction plus large de découverte de nouvelles pratiques permettant une meilleure mobilisation des connaissances subjectives de chacun. On trouve donc des entrepreneurs en matière d’art, de science… autant de pionniers, d’innovateurs, d’avant-gardistes qui, souvent en opposition avec leurs contemporains conservateurs, inventent dans la pratique de nouvelles façons d’économiser des ressources en permettant à chacun de mieux accéder à son propre environnement intérieur. En dernière analyse, chacun cherche à savoir qui il est. Cette dimension psychologique est fondamentale chez Hayek. En l’absence d’individus fermement décidés à découvrir leur propre territoire subjectif car conscients de cette nécessité pour parvenir à leur équilibre intérieur, le libéralisme économique et la liberté tout court n’auraient aucune utilité.

Vous soulignez le fait que Hayek défend davantage les entrepreneurs que les capitalistes. Quelle différence faites-vous entre ces fonctions?

L’entrepreneur est celui qui réduit l’ignorance dans la société, en percevant dans l’économie des opportunités de production et d’échanges de biens mutuellement favorables, mais jusqu’alors ignorées par les autres individus. Mais il ne dispose pas forcement du capital pour exploiter ces opportunités. Il a donc besoin des capitalistes qui peuvent lui prêter les facteurs productifs dont ils sont propriétaires. Hayek défend les entrepreneurs en considérant que les capitalistes doivent être à leur service. Or les intérêts des capitalistes et des entrepreneurs ne sont pas nécessairement convergents. C’est un point important chez Hayek. Il se méfie, à l’instar d’Adam Smith, des capitalistes. Car ceux-ci cherchent à maximiser leurs revenus. Or moins il y a de capital, plus il sera demandé, ce qui permet aux capitalistes de le faire payer plus cher à ceux qui veulent l’utiliser.

Cela semble paradoxal aux yeux de l’opinion commune qui, généralement, y voit une convergence…

En effet. Mais alors que la préoccupation de chaque entrepreneur est de pouvoir entrer sur les marchés et de bénéficier d’un maximum de ressources pour exploiter ses découvertes, l’intérêt de chaque capitaliste est d’essayer de s’allier aux autorités politiques pour limiter les innovations et fermer la porte aux entrepreneurs qui menacent la réalisation des activités courantes. Les capitalistes des pays de l’Ancien monde sont les premiers à prôner des protections contre le déferlement d’activités entrepreneuriales qui se développent dans les pays émergents parce qu’elles menacent leurs rentes de situations. Il ne faut donc pas mélanger l’intérêt des capitalistes et ceux des entrepreneurs. Un économiste keynésien comme Joseph Stiglitz se plaint du fait que la concurrence soit entravée par des grands groupes privés qui développent le « crony capitalism » (capitalisme de connivence). Hayek pourrait fort bien aujourd’hui rejoindre ces positions et se montrer très critique envers ces monopoles qui se sont constitués dans des secteurs stratégiques. Dans « La route de la servitude » (1944), il est le premier à dénoncer ces corporations et intérêts organisés qui s’efforcent d’installer des barrières à l’entrée sur leurs propres marchés. Hayek n’est pas simplement l’ennemi de la rente publique ; il est l’ennemi de la rente tout court.

Pourtant, la concurrence guide la politique de la Commission européenne, comme on l’a vu récemment dans le refus de la fusion entre Alstom et Siemens…

Je suis favorable à titre personnel à la décision de la Commission car elle est cohérente avec la défense des intérêts des consommateurs européens dont elle a la charge. Même s’il y a des rapports de forces au niveau international, favoriser une concentration par des moyens artificiels ne réussira pas à améliorer les choses.

Mais ne pensez-vous pas que seule la puissance publique soit en capacité de lutter contre les positions dominantes de firmes telles que les Gafam pour favoriser le retour à la concurrence?

Il est utopique de penser aujourd’hui qu’une autorité publique aura la puissance cognitive suffisante pour gagner la partie face à des groupes de dimension internationale. Ce n’est pas une réglementation ou une fiscalité de plus ou de moins qui y changera quoi que ce soit. Et cela risque d’engendrer plus d’effets pervers que d’avantages car les Etats eux-mêmes ne sont pas exempts d’intérêts particuliers dans ces affaires. Ils peuvent produire beaucoup de dégâts dans des secteurs qui ont été à la source de l’innovation ces dernières années.

D’autant que certaines sociétés comme Google proposent des services gratuits qui ont du succès auprès des usagers… Qui peut faire mieux aujourd’hui?

A l’intérieur de ce paradigme, cela semble en effet difficile. Toutefois, ces firmes ne sont pas destinées à être éternelles. Il existe une concurrence entre des paradigmes sur ces marchés: de nouvelles formes d’accès à l’information peuvent émerger d’un instant à l’autre qui rendraient obsolètes les technologies actuelles. Au regard de la croissance exponentielle des innovations, des géants comme Google ou Amazon pourraient fort bien être renversés du jour au lendemain par de nouveaux paradigmes formés dans l’esprit d’un futur Bill Gates. L’avenir étant inconnu, il est difficile d’anticiper les futures technologies qui pourront remplacer des compétences qui ne sont finalement présentes et dominantes que depuis une dizaine d’années.

Il est vrai que Google n’a à peine que 15 ans…

Oui, ce n’est rien à l’échelle historique. Avant Google, il y avait Altavista, et il y aura un après-Google, comme il y a eu un après Standard Oil de Rockfeller. En terme statistique, de nouvelles formes d’accès et de traitement de l’information seront probablement disponibles demain. Des changements de paradigme technologique peuvent réduire en quelques années des entreprises extrêmement puissantes en petites firmes enfermées dans des niches. L’histoire l’a souvent montré. On a connu un tel débat à la fin du XIXe siècle avec Rockfeller, Carnegie… Cela dit, il convient de se méfier. Les grandes firmes installées dont nous parlons sont puissantes. Elles peuvent bénéficier du soutien direct ou indirect de la puissance publique pour protéger leurs intérêts. Par ailleurs, ces monopoles trouvent un enjeu particulier car les nouvelles technologies qu’elles inventent et propagent ne se cantonnent pas à la sphère économique mais à l’intégralité de nos existences puisque nous sommes connectés du matin jusqu’au soir sur nos téléphones portables et à des réseaux sociaux chronophages qui accaparent de plus en plus nos esprits. Elles pénètrent la vie quotidienne en autorisant de moins en moins de substituts à des pratiques digitales. Cette intrusion numérique change les mentalités et peut potentiellement poser un problème pour le subjectivisme. Il faut donc l’analyser de manière attentive, mais en restant humble car l’économie contemporaine pose de nouvelles questions qui exigent des réponses inédites.

Comment favoriser alors la concurrence ?

Le problème de fond est l’identification des barrières à l’entrée d’un marché. Il faut ensuite intégrer de nombreuses données dont celui du coût de la lutte contre ces barrières. L’interventionnisme a un prix, qu’il convient de mesurer avant de faire n’importe quoi. La solution me semble plus devoir être trouvée dans la société civile. Une meilleure sensibilisation des consommateurs aux pratiques non-concurrentielles des firmes pourrait avoir des impacts bien plus efficaces qu’une énième législation qui sera rapidement détournée de sa finalité première. Cela ne signifie pas que politiquement, il faille être passif. Il importe de ne pas caricaturer une pensée libérale en la réduisant à un seul « laissez faire », qui ne voudrait s’occuper de rien. Ce n’est pas ce que pensait Friedrich Hayek. La liberté des contrats n’est pas le principe ultime du libéralisme. Certains contrats doivent être avalisés par l’autorité, d’autres non. Par exemple, on pourrait s’interroger sur la légitimité des stratégies de rachat par les grandes firmes de leurs propres actions, ou encore d’acquisition de brevets destinés ensuite à être gelés, afin qu’une innovation ne menace pas les quasi-rentes du moment. Après un examen attentif, ces pratiques pourraient être jugées comme des formes de rent-seeking ou des barrières à l’entrée à l’exploitation de découvertes entrepreneuriales. Ce sont des questions qui demandent des réponses au cas par cas, en comparant le mieux possible les gains et les coûts d’une intervention et, surtout, en faisant preuve de subtilité. Il s’agit avant tout de protéger le cœur de l’économie de marché, autrement dit la dynamique entrepreneuriale.

Depuis la crise financière de 2008, il y a une demande d’un Etat fort, censé être protecteur face aux effets de la mondialisation. Que vous inspire ce nouveau contexte ?

Rappelons que la crise financière de 2008 n’est pas le produit du libéralisme mais des banques centrales, dont Hayek se méfiait à juste titre comme de la peste car elles ont toujours été à la source des grandes crises du capitalisme contemporain. Elle résulte de politiques monétaires irresponsables, en particulier de la baisse des taux en 2001 initiée par Alan Greenspan. On se trouve aujourd’hui dans une impasse car on est incapable de remonter les taux alors même qu’il existe un déséquilibre fondamental entre l’offre d’épargne (en termes réels et non monétaires) qui se réduit de plus en plus, et des demandes de financement entrepreneurial qui s’envolent quant à elles. Cela explique le transfert massif des liquidités vers les capitalistes car les ressources réelles sont tellement rares par rapport à la masse de liquidités que les entrepreneurs sont obligés de donner davantage d’argent aux capitalistes pour pouvoir y accéder. Les inégalités de richesse en faveur de la propriété du capital, dénoncées par Paul Krugman et par Thomas Piketty, ne sont donc pas la conséquence du libéralisme, mais de politiques monétaires désordonnées qui injectent des liquidités dans des proportions beaucoup plus importantes que le volume de capital réel existant.

Sur quoi va déboucher selon vous cette politique de taux bas?

Tout le monde s’accorde sur la nécessité de les remonter mais personne ne sait comment faire. En cas de hausse, nombre d’Etats ne sauront pas comment rembourser leurs dettes qui, il faut le rappeler, augmentent d’année en année de manière globale. Il est difficile de concilier le cycle économique et le cycle politique qui a besoin de ressources à court terme. Je suis pessimiste pour la suite parce que je ne vois pas comment cette situation pourrait perdurer. La réalité empêchée de passer par la porte reviendra tôt ou tard par la fenêtre. Comme d’habitude, ce seront les travailleurs et les épargnants qui en feront les frais.

Face à cette situation, certains économistes développent une Théorie monétaire moderne (TMM), qu’en pensez-vous?

Ce n’est pas la première fois qu’on voit revenir sur la scène ce type de théories. Silvio Gesell (1862-1930) martelait déjà à son époque la nécessité d’un crédit gratuit. Pour Hayek, monétiser la dette publique, laisser perdurer les déficits correspond à une politique du « desperado », une fuite en avant pour éviter des problèmes qui, repoussés à des échéances plus lointaines, amplifieront encore plus les difficultés s’il était encore possible.

Vous avez clarifié le rapport de Hayek à la Banque centrale mais qu’en est-il de son rapport à l’Etat?

Rappelons qu’Hayek a été le premier à prôner une privatisation des banques centrales. La concurrence monétaire entre des devises émises par des opérateurs privés permettrait aux bonnes monnaies de chasser les mauvaises, à l’inverse de la loi de Gresham qui ne s’applique qu’à des devises monopolisées. Quant à l’Etat, Hayek n’est pas un anarcho-capitaliste : il ne vise pas sa suppression. Pour lui, un régulateur est nécessaire afin de définir quels types de contrats sont autorisables ou non. Mais l’Etat lui-même fait partie d’un ensemble plus vaste que j’appelle les territoires du libéralisme, dont il faut penser l’intégration pour espérer que sa politique soit efficace. L’Etat minimal ne constitue donc pas un point de départ, mais d’arrivée. Il importe qu’il y ait un contexte psychologique, sociétal, économique qui permette à l’Etat de rester libéral. S’il existe une forte demande sociale d’interventionnisme, des gens organisés qui désirent protéger des rentes de situation au détriment de la créativité entrepreneuriale, l’Etat ne pourra pas rester limité. C’est aspect est important chez Hayek. L’économie libérale ne peut se penser que dans un contexte plus large où doivent dominer des valeurs et des comportements particuliers, basés sur l’échange et non le statut, sur le respect de la subjectivité et non le règne de l’arbitraire. Sans ce terreau, toute déréglementation sauvage enclencherait alors des résultats socialement catastrophiques et n’aboutirait qu’à accroître les inégalités en favorisant les rentiers du jour. Selon moi, c’est ce qui différencie le néolibéralisme d’un libéralisme classique représenté par Hayek. Le premier considère que toute libéralisation économique produira par des effets de ruissellement bénéfiques dans toute la société. Le libéralisme classique, lui, veut d’abord s’assurer que le terreau institutionnel, social, psychologique soit adapté à ce type d’aventure. Si on veut éviter un fiasco, il faut veiller à la présence et à l’équilibre de tous les territoires nécessaires à la réussite des réformes libérales. En leur absence, elles seront détournées par des corporatismes organisés qui s’approprieront la création de valeur.

L’une des critiques adressées à Hayek, notamment par les tenants d’une perspective inspirée de John Rawls, est son refus de toute « justice sociale »…

Oui, c’est le type même de faux concept à ses yeux. La position de Hayek me semble fondamentale car s’il y a bien un concept que l’on soit incapable de définir, c’est celui de justice sociale : chacun a sa propre conception du « bon » revenu. Toute discussion à ce sujet exprime des jugements de valeur qui débouchent sur des chocs de croyance et la guerre des dieux à travers laquelle chacun cherche à imposer aux autres ses propres critères. Sur le fond, la justice sociale consiste à penser que la société est responsable des situations individuelles. Or, la « société » n’existe pas, c’est un concept holiste. Que quelqu’un soit petit ou grand, beau ou laid, possesseur ou non de talents, la société n’en est pas responsable en tant que telle si elle est le résultat de l’interaction spontanée des activités individuelles. Dans ce contexte, que peut signifier alors un principe de justice sociale? Que le marché ne récompense pas justement les agents ! Mais une telle situation ne peut s’expliquer que par des barrières à l’entrée qu’il conviendrait alors d’identifier et de faire sauter. A l’opposé, si un marché fonctionne bien, s’il n’y a pas d’interférence, pas d’intérêts organisés qui manipulent la distribution des revenus, bref si la concurrence joue son rôle, chacun est nécessairement rétribué à hauteur de ce qu’il apporte à la collectivité. A partir de là, redistribuer les revenus au nom d’un principe de justice sociale (que chacun s’efforce de définir à son propre avantage) implique de prendre dans la poche de l’un une partie de sa contribution à la création de valeur pour la placer arbitrairement dans la poche de l’autre. Tout cela contribue à une société de défiance. Par ailleurs, la volonté d’appliquer un principe de justice sociale désoriente le système spontané de prix qui envoie un signal sur l’intérêt social de telle ou telle fonction. Elle désincite les acteurs à se détourner de certains métiers pour s’orienter vers de nouvelles compétences. On empêche par-delà même la bonne articulation des activités à l’évolution de la structure des besoins.

Pour autant, il existe des inégalités qui ne sont pas imputables à ceux qui sont les moins favorisés. Que propose Hayek?

C’est un aspect méconnu, mais Hayek est le pionnier du revenu d’assistance. Il l’a proposé dès 1944 dans « La route de la servitude », bien avant les débats sur le revenu minimal ou sur l’impôt négatif. Il faut évidemment veiller aux modalités de son application et ne pas enfermer les gens dans des trappes à assistance qui leur permettraient de ne plus affronter le marché s’ils en sont de nouveau capables. La catallaxie (comme Hayek l’appelle) est un jeu dont le résultat dépend de ses propres talents mais aussi du hasard. Ce dernier peut prendre la forme d’un concurrent qui émerge avec un nouveau produit. Cela fait partie des règles. Vouloir supprimer ce hasard revient à emprunter la route de la servitude, car en voulant contrôler de plus en plus les activités marchandes dans un système totalement dirigiste, vous tuez dans l’œuf toute velléité entrepreneuriale.

Pour Hayek, le marché n’est pas un jeu de dupes mais un producteur d’informations…

Oui, pour lui, le marché est tout simplement un processus de découverte et de communication sur ce que les gens pensent et savent. A travers l’entrepreneuriat, les prix issus des échanges expriment un transfert spontané des connaissances des individus à d’autres individus. Bien évidemment, il ne s’agit pas d’enregistrer passivement les prix mais de les interpréter pour savoir ce que seront les besoins futurs et construire les opportunités de demain. Cela fait partie aussi de la démarche entrepreneuriale.

Vous insistez dans votre ouvrage sur la différence entre libéralisme et conservatisme. Pourquoi?

Car les gens assimilent communément les deux. J’y vois l’origine de la haine du libéralisme, car on considère souvent que celui-ci est à la botte des privilégiés et n’a d’autre vocation que de légitimer et défendre la richesse des possédants. Comme je l’explique dans l’épilogue, en mêlant baisse de la fiscalité sur le capital, protectionnisme aux frontières et réduction de la concurrence en général, on ne fabrique pas du libéralisme mais des rentiers. Le libéralisme, ce n’est pas la protection de la rente privée.

L’un des concepts clés chez Hayek est celui d’ordre spontané, une notion difficile à appréhender, au carrefour du droit, des normes, de la tradition de l’économie… Comment la définiriez-vous?

Suivant la formule d’Adam Ferguson ayant inspiré Hayek, les ordres spontanés sont le produit de l’action des hommes, mais non de leurs desseins. Ils représentent un ensemble de valeurs, d’institutions formelles et non formelles, qui participent de ce que j’ai nommé plus haut les territoires du libéralisme. Pour qu’une politique économique libérale puisse durer et produire des résultats positifs, il importe qu’il y ait un substrat culturel, social, psychologique particulier dont l’évolution est spontanée. Pour Hayek, ce substrat ne peut être contrôlé avec succès car il contient davantage d’informations qu’aucune autorité régulatrice n’est capable d’en manipuler. Cela ne signifie pas pour autant, et Hayek a souvent été caricaturé sur ce point, que l’ordre spontané débouche nécessairement sur quelque chose de positif. Il est le premier à énoncer qu’on n’a aucune garantie sur ses issues favorables. Sur un terreau malsain, le développement spontané de l’interaction des individus peut créer des situations conflictuelles et des équilibres pervers, où les mauvais comportements chassent les bons. Pour limiter ce type de situations, Hayek considère qu’il faut développer au maximum la compétition entre des groupes différents de règles, ce qui augmente les probabilités de découvrir les meilleures pratiques et de faire disparaître les mauvaises par des processus de sélection et d’imitation. Cette démarche est préférable selon lui à une volonté de régulation centrale, qui relève de ce qu’il appelle le constructivisme. Cela est utopique et ne peut mener que tout droit au totalitarisme.

Que penserait Hayek aujourd’hui d’un phénomène comme le réchauffement climatique?

Il se demanderait comment on a pu en arriver là. Il y a évidemment une longue réflexion sur l’économie de l’environnement. Ronald Coase en 1960 a publié ce fameux article intitulé Le coût social où il prônait la privatisation de l’environnement. A l’époque, le problème ne se posait pas dans les termes aussi aigus qu’aujourd’hui. Désormais, nous avons le choix entre deux attitudes. Soit on continue à s’épuiser comme depuis 20 ans à chercher des accords internationaux limitant la production de CO2, avec tout le succès que l’on connaît ; soit on essaie d’encourager par des incitations des innovations entrepreneuriales susceptibles de dépolluer l’environnement. Peut-être suis-je trop optimiste, mais je pense qu’il serait plus efficace d’offrir des récompenses financières à des entrepreneurs capables de trouver des solutions marchandes au problème du réchauffement climatique plutôt que de compter sur des Etats incapables de s’accorder sur ces enjeux pourtant cruciaux.

« Hayek. Du cerveau à l’économie » par Thierry Aimar, éditions Michalon, 125 pages, 12 euros

Propos recueillis par Robert Jules

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(*) Thierry Aimar est maître de conférences en sciences économiques à l’université de Lorraine, et enseigne la neuroéconomie à Sciences Po. Parmi ses publications, signalons « Les Apports de l’école autrichienne d’économie. Subjectivisme, ignorance et coordination », éd. Vuibert, 316 pages, 29 euros.

Macron : un libéralisme étatique incohérent et inefficace

Macron : un libéralisme étatique incohérent et inefficace

 

 

 

: Ill est bien difficile de savoir sur quel corpus idéologique se fonde Macron pour orienter sa politique notamment dans le domaine économique. Il n’est pas inutile de rappeler que Macron n’a aucune formation ni expérience économique (hormis son passage éclair chez Rothschild où on se sert des carnets d’adresses de l’ENA dont les diplômés noyautent l’administration bien sûr mais tout autant les partis politiques et les entreprises). Macron a encore moins d’expérience politique, il n’a jamais été élu avant de devenir directement président de la république. Si l’on examine ses orientations depuis qu’il est président, on se rend compte qu’il a largement avantagé les plus aisés par exemple à travers la suppression de l’impôt sur la fortune qui se traduit par un boni de plus de près de 10 000 € pour 300 000 personnes alors que par exemple la suppression de la taxe d’habitation se traduit-elle par un boni de 200 € pour près de 18 millions de personnes. On pourrait continuer avec le fameux CICE qui aboutit à un cadeau fiscal de 40 milliards aux entreprises sans aucune contrainte d’évaluation et de résultats. Le matraquage fiscal des ménages opérés en début d’année 2018 a par ailleurs largement pesé sur le très net tassement de la croissance. On pourrait citer bien d’autres exemples de l’intervention étatique de Macron qui en faite se sert de l’appareil d’État pour des effets anti redistributif. On voit mal où est passé le socle social libéral de Macron et même sa volonté réformatrice. De ce dernier point de vue, les réformes sont à moitié bâclées, en tout cas n’ont pas l’effet escompté. Un seul exemple, les décisions prises par rapport au marché du travail ou Macron n’a pas su décentraliser jusqu’au niveau des entreprises. Le libéralisme de Macron se trouve largement entravé par sa vision jupitérienne du pouvoir. Derrière l’affichage libéral se dissimule en permanence la tentation monarchique. Une monarchie qui utilise l’État au service de ceux  qui ont permis son élection en particulier le lobby financier et les grandes entreprises. On objectera que le gouvernement a fait quelques gestes pour les plus modestes par exemple pour le niveau du minimum vieillesse qui gagne 30 € par mois, la baisse de cotisations sociales qui compensent un peu la hausse de la CSG. À l’inverse Macon a voulu matraquer la fiscalité sur le pétrole et il a clairement visé les retraités avec d’une part la CSG d’autre part la désindexation. Macron éprouve les pires difficultés à convaincre de sa volonté de corriger les excès du libéralisme et de la financiarisation de l’économie. L’étiquette de président des riches lui colle à la peau non seulement en raison de ses erreurs de langage mais surtout du contenu de sa politique. Le dernier exemple en date de cette espèce de cocktail de libéralisme étatique concerne la négociation de l’ASSEDIC ou en fait l’État veut retirer aux partenaires sociaux la liberté de négocier avec l’objectif de nationaliser cette assurance. Il faudrait développer bien d’autres aspects très contradictoires qui montrent en réalité une absence de vision et de stratégie claire. L’inefficacité économique s’ajoute à la justice sociale. Ainsi la croissance est-elle en train de s’écrouler depuis l’arrivée de Macron. Elle n’a atteint qu1, 5 % en 2018 et pour l’année en cours on dépassera difficilement 1,3 %. C’est-à-dire le seuil qui fait basculer les équilibres et qui fait redémarrer le chômage. L’épisode des gilets jaunes n’est qu’un des éléments qui font émerger le manque de pertinence et de justice de l’économie. Tout démontre que le cocktail idéologique de Macron et particulièrement sulfureux voire dangereux non seulement pour l’économie mais aussi pour la démocratie quand Macron met sous le boisseau tous les corps intermédiaires pour incarner à lui seul toutes les institutions.

« Le populisme , maladie sénile du libéralisme » (Daniel Cohen)

« Le populisme , maladie sénile du libéralisme » (Daniel Cohen)

Daniel Cohen, économiste à l’école normale supérieure considère sur France Info que le populisme constitue la maladie sénile du libéralisme., «  Ce monde numérique nous demande de nous transformer en données que des algorithmes pourraient gérer. Et ce monde-là devient irrespirable ».   L’économiste a publié récemment Il faut dire que les temps ont changé… Chronique (fiévreuse) d’une mutation qui inquiète (Albin Michel). Selon Daniel Cohen, « la tentation des gouvernements, et ce gouvernement ne peut pas y résister, est de faire constamment des économies sur l’humain, en remplaçant des personnes par des algorithmes. On le voit déjà avec les impôts. Tant mieux si c’est plus simple, mais à condition de ne pas laisser sur le chemin les gens qui n’ont pas accès à ces technologies ».   Cette inquiétude traverse le mouvement des « gilets jaunes » : « Son cœur, selon Daniel Cohen, est une forme de désocialisation des existences humaines. On est de plus en plus seul. Le mouvement des « gilets jaunes », son centre de gravité, ce sont de petites villes où véritablement on a l’impression que le monde public, social, se rétrécit. Là où la caserne est partie, l’hôpital est partie, l’école est partie, etc. Des territoires français sont abandonnés parce qu’on cherche constamment à faire des économies. Au prix d’une solitude croissante« .   Dans son discours de vœux, le chef de l’État a prononcé une phrase qui a été peu relevée : « Le capitalisme ultralibéral et financier trop souvent guidé par le court terme et l’avidité de quelques-uns, va vers sa fin« . Daniel Cohen estime « très étonnant, très intéressant que le président de la République le dise. Je crois que c’est profondément juste. ….le libéralisme économique, celui qui monte depuis le début des années 1980 et 1990, a cherché des économies, du cost cutting général. Le populisme, c’est la pathologie de ce néolibéralisme qui ne raisonne qu’en terme d’économies à faire sur les personnes ».   …..Pour l’instant, il (Macron) a surtout fait une politique qui prenait dans la poche des uns pour mettre dans la poche des autres. Le gouvernement s’est un peu perdu dans le labyrinthe d’une politique économique et fiscale complexe (…) Il faut revenir à des paramètres plus simples (…) Si on veut définir un avenir, il faut aller au-delà des économies à faire ».

 

Le libéralisme uene valeur de gauche (Macron)

Le libéralisme uene valeur de gauche (Macron)

Macron par sa nouvelle déclaration ne va sans doute pas cinq faciliter  la tâche du parti socialiste et du gouvernement pour rassembler ce que Hollande appelle  le peuple de gauche. Macron estime en effet que le libéralisme est une valeur de gauche. Sans doute pour ceux qui concernent le libéralisme politique dont  l’objectif est notamment de favoriser les libertés individuelles et collectives;  pas sûr pour ce qui concerne le libéralisme économique et son outil opérationnel  capitalisme. Pourtant quand on analyse la pratique du parti socialiste lorsqu’il est au pouvoir il n’y a aucun doute quant à son adhésion au libéralisme économique. D’une certaine manière même la gauche s’est montrée moins étatiste que la droite avec les dénationalisations par exemple, aussi la libéralisation des marchés financiers réalisés par Bérégovoy,  la vente des les actifs du secteur nationalisé ou encore l’ouverture à la concurrence de certains secteurs. Sans parler de l’appui permanent des gouvernements socialiste  à la politique très libérale de l’Europe. Mais le terme libéralisme est cependant un tabou sémantique dans la dialectique du parti socialiste. On pratique le libéralisme économique mais il ne faut surtout pas le dire. Par Macron lui  mets=  les pieds dans le plat en appelant un chat un chat et en considérant la politique du gouvernement comme libérales et de gauche. Même Valls créateur il y a quelques jours du concept de social libéralisme est dépassé par la révolution culturelle qu’impose Macron à la gauche. On pourra cependant objecter que les moyens employés par Macron en faveur du redressement économique sont loin d’être à la hauteur de son discours. De ce point de vue la loi Macron relève davantage du bricolage et du bric à brac  que d’une véritable réforme structurelle. Mais la faute ne lui incombe pas totalement. En attendant la clarification idéologique qui devrait réduire l’écart entre son discours étatiste et sa pratique le parti socialiste patauge dans la confusion et la contradiction. Une contradiction qui par exemple l’avait amené à écarter du pouvoir Michel Rocard alors qu’il était trop moderniste et trop populaire. Le PS jusqu’à maintenant a toujours préféré les leaders au discours ringard et la langue de bois. Sans doute ce qui pourrait amener un jour la disparition du parti socialiste pour les mêmes raisons qu’a disparues la SFIO.  Lors d’un débat organisé par Le Monde, le ministre de l’Economie a donc   »assumé » son côté libéral, assurant également que l’Etat avait « trop pris de place » en France. Certains, notamment à la gauche de l’échiquier politique, ne devraient pas manquer de considérer la nouvelle sortie d’Emmanuel Macron comme une énième provocation. Le ministre de l’Economie a en effet assuré dimanche que l’Etat avait sa place en France mais que, selon lui,  il en avait « trop pris ». Tout en se revendiquant d’un certain « libéralisme » car « le libéralisme est une valeur de gauche », d’après des propos rapportés par Le Monde.  Affirmant, selon le compte-rendu publié lundi par le quotidien du soir, qu’il se situait « dans le camp du progrès » et du « libéralisme économique et politique »,  le ministre en a profité pour mettre en question une nouvelle fois le statut des fonctionnaires. « Nous devons penser la réforme des fonctionnaires », a-t-il déclaré, estimant que sans cela, leur statut serait « déchiré ».   »Il faut plus d’adaptabilité pour les entreprises, « déconflictualiser » le travail, je me méfie beaucoup des tabous », a-t-il poursuivi, jugeant qu’ »aujourd’hui la loi dit trop, il faut trouver la bonne flexisécurité sur le marché du travail ».  A propos des 35 heures, Emmanuel Macron a assuré que s’il ne souhaitait pas les abroger, il y avait aujourd’hui « une trop grande rigidité dans la définition horaire du temps de travail ».  Enfin, à propos des critiques ayant accompagné la semaine dernière ses propos sur le statut des fonctionnaires plus « adapté » et « plus justifiable compte tenu des missions », le ministre a estimé que « les réactions sur ce que j’ai pu dire montrent une gêne à accepter qu’un politique puisse réfléchir en marge de son action ».

 

Rebsamen : de la ligue communiste révolutionnaire au libéralisme économique !

Rebsamen : de la ligue communiste révolutionnaire au libéralisme économique !

Nombre de responsables politiques du PS n’ont en fait aucune ossature idéologique, beaucoup sont passés sans difficulté du gauchisme  (le Premier secrétaire du parti y compris) au socialisme mou du PS, puis à la social démocratie avant de se rallier finalement au libéralisme. Ce que prouve une intreview de Rebsamen dont il a contredit la diffusion mais qui résumait bien sa pensée. Une pensée d’apparatchik (qui a fait toute sa carrière dans les cabinets avant d’accéder à se fonctions actuelles) qui en fait suit la direction du vent. C’est le véritable drame du PS qui n’a jamais été capable de définir une ligne politique un peu claire et qui du coup slalome entre la bureaucratie étatique et le social libéralisme. Le magazine bourguignon Le Miroir a dépublié une interview du ministre du Travail, François Rebsamen, à la demande du ministère. François Rebsamen y défend « une vision libérale de l’économie », propos qu’il dit ne pas avoir tenu. Mais durant les quelques heures de publication, l’interview s’est diffusée sur les réseaux sociaux.  Qui a dit qu’il se battait « depuis longtemps pour une vision libérale de l’économie » ? Qui estime qu’il faut adapter le système social français « en renforçant les contrôles, en assouplissant les seuils la législation sur les 35 heures, en autorisant le travail le dimanche » ? Qui regrette que le secrétariat national du PS refuse « toutes ces avancées » ? Pas François Rebsamen. Du moins selon… François Rebsamen.




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