Archive pour le Tag 'l’Europe'

Sécurité économique : La menace américaine sur l’Europe

Sécurité économique : La menace américaine sur l’Europe

 

L’Europe doit se préparer à ce que les Etats-Unis privilégient la coercition à son égard au détriment de la coopération dans la guerre économique qu’ils livrent face à la Chine, analysent les chercheurs Matt Ferchen et Frans-Paul van der Putten, dans une tribune au « Monde ».

 

Jusqu’aux élections américaines, les pays qui représentaient les dangers les plus immédiats pour la sécurité économique européenne étaient la Russie et la Chine. Désormais, c’est le futur gouvernement américain qui fait peser la plus grande menace sur la nouvelle stratégie de l’Union européenne (UE) en la matière.

Dans leur combat contre le géant chinois, les Etats-Unis ont montré à l’Europe deux visages d’apparence opposée : l’un coercitif, l’autre coopératif. D’abord, sous la première administration Trump [2017-2021], alors que la guerre commerciale entre Washington et Pékin allait crescendo, les Etats-Unis ont contraint, non sans quelques manœuvres d’intimidation, les gouvernements et les entreprises d’Europe à prendre part à leur politique de découplage vis-à-vis de la Chine.

Ils ont notamment poussé les gouvernements européens à adopter des restrictions contre Huawei, le grand fournisseur chinois d’infrastructures 5G. Ensuite, sous l’administration Biden, les Etats-Unis ont tourné le dos à ces méthodes purement coercitives. Ils ont préféré la voie diplomatique, optant pour une coopération avec l’Europe, au nom d’une sécurité économique partagée et d’une atténuation des risques avec la Chine.

Economie-L’Europe bête à manger du foin ?

Economie-L’Europe bête à manger du foin ?

 

Personne ne doit en douter, le monde est entré cette semaine dans un moment de bascule historique. La réélection triomphale de Donald Trump, qui a pratiquement fait le grand Chelem avec une incertitude encore sur l’obtention de la chambre des Représentants, offre au 47ème président des Etats-Unis un boulevard pour mettre en œuvre son programme de rupture. Et en matière économique, cela va secouer sérieusement la planète si la nouvelle administration applique le traitement de choc du programme « Make America great again ». Par rapport au premier mandat, Trump affiche l’intention d’aller beaucoup plus loin dans le tournant protectionniste avec, à la clef, des hausses massives de tarifs douaniers qui risquent de faire entrer le monde dans une nouvelle guerre commerciale.

 

par Philippe Mabille dans La Tribune

Pour l’Europe, qui n’a pas voulu voir venir cette nouvelle révolution Trump, l’heure est grave tant le risque est grand de voir le décrochage s’aggraver. Réunis en Sommet à Budapest, les 27 commencent à se réveiller : Ursula von der Leyen, la présidente de la nouvelle Commission européenne, présentera un pacte industriel vert dans les 100 premiers jours de son mandat. Alors que le protectionnisme américain risque d’attiser la concurrence chinoise en Europe, déjà très sensible dans le secteur de l’automobile électrique, le plan d’investissement de Mario Draghi de 800 milliards d’euros par an (oui par an !) revient sur le devant de la scène, mais bute toujours sur le même obstacle, son financement. L’Allemagne, en pleine crise politique et les pays frugaux restent plus que rétifs à un financement par un emprunt européen comme pendant le Covid.

 

Du coup, c’est vers l’investissement privé et la mobilisation de l’épargne européenne que les regards se tournent. Et si l’élection de Donald Trump accélérait les projets d’achèvement du marché intérieur, seul moyen à l’échelle de résister à l’affrontement Etats-Unis/Chine ? Union bancaire, Union des marchés de capitaux, marché unique des télécoms, du numérique ou de l’énergie, investissements communs dans la défense pour compenser le probable retrait américain… Il y a pour l’Europe du grain à moudre, à condition qu’elle ne se montre pas bête à manger du foin. Emmanuel Macron, le président français, fait sienne une formule employée par Thierry Breton, l’ancien commissaire européen, sur la naïveté dont a fait preuve jusqu’ici l’Europe, cause principale de son déclin. « Le monde est fait de carnivores et d’herbivores. Si on décide de rester des herbivores, les carnivores gagneront et ce serait pas mal au moins de décider de rester des omnivores »…

Le sursaut européen aura-t-il lieu ? A vrai dire, l’Europe n’a pas le choix, sauf à devoir renoncer à financer son généreux modèle social. « L’Europe est seule face à son destin », disait dans La Tribune dimanche Thierry Breton. Il est plus que temps de changer ce destin, sinon, la colère qui a fait gagner Trump de l’autre côté de l’Atlantique pourrait bien nous rattraper.

Les carnivores, en tout cas eux, sont déjà les gagnants de la victoire de Trump. Le décrochage Europe/Etats-Unis se lit aussi sur les indices boursiers avec 4 points d’écart mercredi entre les marchés européens, en baisse, et américains, en hausse. Make Wall Street Great Again… Le carnivore en chef, Elon Musk, a vu sa fortune faire un bond de près de 25 milliards en un jour.

Et il n’est pas le seul : la rédaction de La Tribune a fait les comptes : la victoire de Trump a permis aux dix plus grandes fortunes mondiales d’enregistrer des gains records. Avec Trump à la Maison Blanche, Elon Musk est en orbite. Non seulement le fantasque propriétaire de X et ses 200 millions d’abonnés a contribué à faire élire le Républicain, mais il pourrait avoir un rôle officiel dans la nouvelle administration.

Autre vainqueur, Nvidia, le fabricant de microprocesseurs, qui est devenu du jour au lendemain la première capitalisation mondiale, profitant des perspectives mirobolantes d’accélération des investissement dans l’IA, qui selon Trump promet un nouvel « âge d’or » à l’Amérique.

N’oublions pas dans la liste des carnivores, l’industrie pétrolière et gazière, qui jubile alors que le président réélu va probablement à nouveau sortir les Etats-Unis des accords de Paris sur le climat. Et parie sur la puissance énergétique américaine pour relancer la machine économique.

Alors qu’aux Etats-Unis, un protectionnisme XXL va protéger les constructeurs américains, en Europe, le secteur auto s’enfonce dans la crise avec des plans sociaux et des fermetures d’usines à la pelle. Le choc des deux sites fermés par Michelin a mis en émoi le pays autant que l’annonce par Volkswagen du possible arrêt de trois usines en Allemagne.

La crise politique ouverte en Allemagne où la coalition a explosé ne dit rien de bon sur un sursaut rapide de l’Europe. La France n’est pas seule à expérimenter une instabilité politique majeure, et cela tombe au pire moment. Pendant que les Etats-Unis se dotent d’un homme fort et d’un gouvernement stable, les pays leaders en Europe s’enfoncent dans les divisions. Il est peut-être temps en France de sortir des faux débats sur l’explosion de la dette, qui oblige l’ancien ministre des finances Bruno Le Maire à revendiquer sa bonne foi.

Pressé de sortir de la séquence budgétaire qui l’enferme dans un rôle de père fouettard, Michel Barnier tente de redonner du temps long à sa politique en confiant à ses ministre la construction d’un projet que le Premier ministre voit se déployer en 2025, voire au-delà jusque la fin de l’actuelle législature (2029), horizon du retour du déficit public sous les 3%. Et 3% du PIB de déficit, rappelons-le, ce ne serait que la moitié du chemin.

Parmi les pistes nouvelles explorées, c’est le retour du travailler plus. Mais à la différence de Nicolas Sarkozy, ce ne sera pas forcément pour gagner plus, mais déjà pour conserver notre modèle social. Plusieurs options sont sur la table pour faire travailler davantage les Français. Pas sûr que tous entendent cet appel au sacrifice, même pour éviter le déclin inexorable annoncé.

Trump : Offre-t-il une opportunité à l’Europe ?

Trump : Offre-t-il une opportunité à l’Europe ?

 

Alexandra de Hoop Scheffer, politiste : « L’élection de Donald Trump offre aux Européens une opportunité de s’adapter aux nouvelles réalités géopolitiques ».  L’Union européenne doit accélérer sa réflexion sur le nouveau modèle de sécurité et sur son rôle dans la compétition stratégique entre les Etats-Unis et la Chine, analyse la politiste dans une tribune au « Monde ».

 

Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche met fin à la parenthèse Joe Biden et place les Européens devant leurs responsabilités stratégiques. Au lendemain d’élections qui donnent aux républicains une large marge de manœuvre pour appliquer leur programme, deux questions se posent. Les Européens peuvent-ils bâtir un nouveau modèle de sécurité pour leur continent ? Et quel rôle souhaitent-ils jouer dans la compétition stratégique entre les Etats-Unis et la Chine ?

La réélection de Donald Trump oblige à accélérer une réflexion qui aurait dû être sérieusement lancée dès les années 2010. Sans alarmisme ni naïveté, les Européens doivent rapidement présenter des solutions politiques à ces deux défis.

Donald Trump conçoit l’Alliance atlantique comme une organisation permettant aux alliés de bénéficier de la protection américaine pour leur propre sécurité à moindre coût. Les dépenses européennes en matière de défense seront un des sujets brûlants des premiers échanges transatlantiques.

Plutôt que de céder à la tentation d’accords bilatéraux où chaque pays chercherait à « acheter » la protection américaine, l’Europe doit envisager une approche coordonnée par une rationalisation de sa base industrielle. C’est une priorité absolue, car elle ne peut plus se permettre de sous-traiter sa défense aux Etats-Unis. Le nouveau secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, et les autres leaders européens devront convaincre Trump que cette évolution peut être présentée comme une victoire politique aux Etats-Unis.

En parallèle, la question ukrainienne sera cruciale pour la redéfinition de l’espace de sécurité européen. Elle sera aussi le premier test pour la relation transatlantique. Donald Trump s’est présenté à ses électeurs comme celui qui pourra éviter la troisième guerre mondiale. Il ne fait aucun doute qu’un accord avec Vladimir Poutine est une priorité absolue de son agenda de politique étrangère.

Trump: Bonne ou mauvaise nouvelle pour l’Europe

Trump:  Bonne ou mauvaise nouvelle pour l’Europe

La victoire de Donald Trump pourrait représenter le coup de fouet dont les Européens ont besoin pour renforcer significativement leur unité et moins dépendre de l’éternel protecteur d’outre-Atlantique. La victoire de Donald Trump II, qui est aussi celle du nationalisme et de l’isolationnisme, a plongé la majeure partie des leaders européens dans la consternation. Durant toute la campagne, c’était l’élection de Kamala Harris que les Européens avaient espérée, souhaitée et appelée de leurs vœux. Seuls les dirigeants eurosceptiques du Vieux continent, Viktor Orban en tête, ont salué l’élection du Républicain comme 47e président des États-Unis. Le retour de Trump à la Maison Blanche, doublée de la prise par les Républicains du Sénat et de leur probable maintien en tant que premier parti à la Chambre des représentants, annonce la mise en œuvre, au cours des quatre prochaines années, d’un programme politique et diplomatique aux antipodes des objectifs européens en matière de climat, de coopération internationale et de liens transatlantiques.

 

par 

Géopoliticien, Sciences Po dans The Conversation 

Toutefois, éclairés par la présidence Trump I et instruits par les crises actuelles, les Européens ont les moyens d’exploiter les opportunités ouvertes par une présidence Trump II. À condition d’agir ensemble et vite ! Les Européens ne sont pas condamnés à subir. Ils peuvent faire du prochain mandat américain une chance pour leur autonomie stratégique. Sous certaines conditions.

L’élection de Donald Trump peut assurément devenir un cauchemar pour les Européens. Au vu de son premier mandat et de ses déclarations durant la campagne, ils savent déjà que plusieurs objectifs transatlantiques communs ne résisteront pas à son retour au pouvoir.

Le lien transatlantique redeviendra sous peu un rapport de force transactionnel : pour Donald Trump, les grandes alliances historiques des États-Unis issues de la Seconde Guerre mondiale, en Europe et en Asie, sont à la fois des fardeaux et des leviers d’action pour extorquer des concessions économiques aux Européens. N’a-t-il pas constamment accusé le Japon, l’Allemagne et l’OTAN en général de profiter indûment de la police d’assurance géopolitique américaine ? Loin de renforcer les partenariats, il cherchera à inquiéter, à diviser et à provoquer les Européens, qu’il traitera en clients, et non en alliés. Et l’UE risque de voir se creuser des clivages internes importants entre ceux qui voudront se concilier les faveurs de Trump II et ceux qui voudront y résister au prix de pressions économiques et politiques brutales. Que les Européens s’en souviennent : Trump II n’aura plus d’alliés mais des obligés régulièrement intimidés.
Cela aura une conséquence directe sur ce qui cimente l’OTAN et l’UE à l’heure actuelle : le soutien économique, militaire et diplomatique à l’Ukraine. Le candidat Trump a été très clair sur ses intentions : couper les crédits à l’Ukraine (80 milliards de dollars depuis 2022), se positionner en médiateur avec la Russie et obtenir une paix fondée sur un troc consistant en l’abandon par l’Ukraine de ses territoires de l’Est du pays en contrepartie de la fin de l’invasion russe. Là encore, la culture du rapport de force cèdera la place à l’animation du réseau d’alliés. La sécurité et la sérénité des Européens seront beaucoup moins bien garanties par une présidence Trump II sur les flancs orientaux et méridionaux du continent. La présidence Trump II estimera ne pas avoir de responsabilités à assumer, mais seulement des intérêts à promouvoir.

La cohésion de l’Occident sera également entamée dans les institutions internationales issues de la Seconde Guerre mondiale. Trump II continuera à afficher ses affinités avec des leaders en rupture avec l’Europe : Vladimir Poutine, Recep Tayyip Erdogan, Benyamin Nétanyahou, etc. Ce sera la fin du front uni à l’ONU sur l’Iran, sur la Corée du Nord ou encore sur le climat. Comme durant la première présidence Trump. Et les Européens risquent de se retrouver isolés, à mener des combats d’arrière-garde afin de préserver ce qui reste des mécanismes de coopération internationaux contestés par le Sud Global dans ses différents forums (G20, BRICS, OCS, etc.).

Quant au volet commercial, il sera marqué par la hausse des droits de douane à la fois pour le partenaire rival chinois et pour l’allié européen : Donald Trump les placera sur un pied d’égalité en raison du déficit commercial massif envers l’un et envers l’autre.

Les risques inhérents à une présidence Trump II sont massifs et immédiats pour les Européens : désinformation, intimidation, désunion, isolement et insécurité aux frontières seront le pain quotidien des prochaines années pour les Européens. Ces dangers sont, en outre, accentués par l’affaiblissement des leaders de grands pays tels que la France et l’Allemagne – qui avaient endigué le premier tsunami trumpien. La résignation est-elle pour autant de mise ?

En géopolitique comme en économie, une crise peut devenir une opportunité, à condition de la prévoir, de l’anticiper, de la préparer et de la traiter. C’est ce que vient de faire le premier ministre polonais Donald Tusk en qualifiant la victoire de Donald Trump d’oraison funèbre de la « sous-traitance géopolitique ».
Le choc de Trump II peut être paradoxalement salutaire pour les Européens. Mais cette potentielle thérapie de choc ne peut réussir que sous certaines conditions très difficiles à remplir. Que les Européens oublient un instant leurs craintes justifiées et leur déception amère !

Pour exploiter la crise géopolitique que provoque dès maintenant l’élection du candidat ouvertement nationaliste du MAGA, les Européens doivent s’imposer une discipline de fer en matière de coordination sur les principaux dossiers sécuritaires (Ukraine, Israël), économiques (IA, énergie, tarifs douaniers) et diplomatiques (sanctions, dialogue avec le Sud, organisations multilatérales).

La moindre faille dans cette coordination serait funeste car exploitée en même temps par Washington, Moscou et Pékin. Les mécanismes de coordination existent, même s’ils sont lents. Les leaders sont en place malgré leurs talons d’Achille, qu’il s’agisse de Mark Rutte à l’OTAN ou d’Ursula von der Leyen à l’UE… Cet atout est renforcé par le décalage des calendriers électoraux : l’UE est en phase de lancement de sa nouvelle mandature alors que la nouvelle administration Trump ne prendra ses fonctions qu’en janvier. Les Européens disposent de quelques semaines pour prendre position à l’avance sur tous les sujets de dissensus.

L’autre atout des Européens tient au contenu de leurs intérêts. En Ukraine, à eux de prendre le relais de l’aide américaine notamment militaire et de proposer rapidement un plan de cessez-le-feu et de négociation qui prendra de court la présidence Trump et coupera court aux plans de paix, très favorables à Moscou, avancés par le Sud Global. Dans les rapports avec la Chine, à eux de proposer une autre voie que la guerre tarifaire annoncée par Trump. Tenir un cap ferme mais moins belliqueux que Washington sera finalement aisé avec Pékin : l’UE n’est que le partenaire, pas le rival de la RPC.

Sur les rapports avec le Sud Global, les Européens doivent jouer la carte de la différence : ne pas hésiter à proposer une option alternative aux États-Unis, oser les concurrencer au Moyen-Orient par un bras de fer avec Israël, appeler une fois encore à une maîtrise par la négociation du programme nucléaire iranien, etc. La crédibilité des Européens dans le Sud sera objectivement favorisée par le discrédit que les États-Unis risquent fort de subir dans ces régions sous Trump II.

Enfin, face à une administration américaine sans complexe pour intimider ses partenaires européens, il faudra identifier des points sur lesquels ne pas céder : sur la gestion des données, sur l’IA, sur la diversification des sources d’énergie.

Aujourd’hui, avec une coordination renforcée et un agenda européen bien identifié, les Européens sont capables non seulement de résister mais aussi d’en imposer à une administration Trump II.
Pour les Européens, la période de transition jusqu’au 20 janvier 2025 sera un test de cohésion, de rapidité et de sang froid. Durant ces deux mois, l’administration Biden passera le relais à l’administration Trump. Et, pendant ce temps, le candidat devenu président élu sans être président au sens plein multipliera les prises de position d’autant plus tonitruantes qu’elles ne seront pas traduites dans la réalité.

Aux Européens de le prendre de vitesse et de se positionner sur l’Ukraine, le Moyen-Orient, le commerce international et les organisations multilatérales avant et par différence avec lui. Ne perdons pas de temps : l’élection de Donald Trump peut précipiter la maturité européenne.

Avec Trump, la fin de l’Europe ?

Avec Trump, la fin de l’Europe ?

Les rapports de force que Donald Trump devrait engager avec l’Europe ne seront pas « que » commerciaux, technologiques ou militaires. Ils porteront aussi sur la propagation des ressorts idéologiques et stratégiques qui ont « fait » sa victoire et consolideront la doxa des extrêmes droites. A terme, c’est la démocratie « en » et « de » l’Europe qui est en péril. 

Le champagne ne coule pas à flots dans les seuls bureaux de Viktor Orban à Budapest, de Robert Fico à Bratislava ou d’Eric Ciotti à Nice – l’un des rares parlementaires français à s’être publiquement prononcé en faveur de Donald Trump avant les élections. Il est sablé au sein de toutes les instances d’extrême droite en Europe – indépendamment des obédiences, des chapelles, des particularismes qu’elles représentent et qui pour l’heure fracturent leur unité politique -, tant le triomphe du candidat républicain est annonciateur, pour elles, de jours heureux. Et d’un avenir funèbre pour l’Europe.

Les rapports de force à prévoir seront d’ordres commercial – notamment avec l’instauration annoncée de nouveaux droits de douane -, énergétique, technologique, évidemment militaire et géopolitique avec en ligne de mire l’avenir de la guerre russo-ukrainienne et le spectre d’une déstabilisation des pays frontaliers en cas d’affaiblissement, lui aussi prévisible, de l’OTAN. Mais d’autres effets ceux-là sournois, souterrains, difficilement palpables, sont à redouter, qui pourraient mettre en péril le devenir même de l’Europe.

La stratégie de Donald Trump à l’égard du reste du monde est identique à celle qui a pavé sa campagne électorale : discréditer, affaiblir, anéantir l’opposant pour consolider sa propre puissance. Une stratégie valable pour lui-même comme pour les Etats-Unis, qui pourraient s’employer sans réserve à fragiliser l’Europe. Plus précisément à miner l’institution européenne (l’UE) tout en épargnant les pays européens qui, eux, constituent un marché capital pour la santé de l’économie américaine – sur laquelle il a fondé sa doxa.

A cette fin, il semble inéluctable que Donald Trump et son administration esquiveront le dialogue direct avec l’UE au profit de relations bilatérales auprès de chaque pays. Cette méthode, logique avec sa culture anti-universaliste, son hostilité au multilatéralisme, fut déjà prégnante lors de son premier mandat. Et elle épouse l’adage simpliste mais « efficace » de diviser pour mieux régner - le Premier ministre Michel Barnier n’est pas dupe, qui dans ses premières réactions met en garde les Européens contre la tentation du « chacun pour soi ».

Ses répercussions sont à plusieurs détentes. Les régimes « pro-Trump » pourraient être privilégiés, dopés aux opportunités commerciales et aux subsides américains, consolidant alors leur économie et, consubstantiellement, leur idéologie. Or sur quels ressorts la victoire du milliardaire s’est-elle fondée ? La xénophobie, le racisme, la chasse aux immigrés, le discrédit des minorités, le rejet des oppositions. Le nationalisme, la tentation isolationniste voire sécessioniste. Le climato-scepticisme et le climato-dénialisme. L’évangélisme dérégulateur, la culture de l’individualisme, le mythe consumériste et matérialiste. La résurgence masculiniste, l’aliénation des libertés dictée par le fanatisme religieux et la défense de la « civilisation judéo-chrétienne ». La consécration de la post-vérité, l’outrance verbale, la rhétorique du simplisme disqualifiant celle de la complexité. La dépréciation systématique des élites, des experts et de l’état de droit. Le couronnement de l’hubris et le mythe de la figure libératrice…

Oui, la liste est longue des ressorts qui ont « construit » le triomphe de Trump et qu’il s’emploiera à propager en Europe – l’ensorcellement technologiste, anthropocentriste et scientiste connait une symptomatique illustration avec l’axe Giorgia Meloni/Elon Musk. Ressorts qui caractérisent déjà plusieurs régimes au sein de l’UE – à des degrés divers, outre la Hongrie et la Slovaquie, l’Italie et l’Autriche. Et ressorts auxquels il faut ajouter deux autres, non moins délétères : la parole décomplexée et la banalisation de l’impensable qu’incarnent le successeur de Joe Biden vont sédimenter encore plus puissamment dans chacun des pays d’Europe où les formations d’extrême droite poursuivent leur enracinement. Certaines, comme le Rassemblement national en France, étant même aux portes du pouvoir - laquelle n’a pas attendu le séisme de ce 5 novembre américain pour appuyer sa propre infusion des consciences de cette efficace méthode de légitimation via la normalisation. L’exemple Trump est prêt à ramifier les esprits européens. C’est-à-dire à contaminer les consciences et à polariser, à séquestrer les futurs débats politiques et électoraux.

Ce qui vient de se produire outre-Atlantique constitue bel et bien un péril pour la stabilité et l’avenir de la démocratie en Europe. Les moins pessimistes argueront que ces menaces exercées sur le continent en général et l’Union européenne en particulier peuvent susciter un sursaut, propice à solidariser davantage les pays de l’UE, à les contraindre à une prise de conscience des retards et des dysfonctionnements qui les pénalisent sur la scène internationale. C’est négliger un anachronisme insoluble : le temps, long, d’une supposée réaction disqualifie l’hypothèse face au temps, presque instantané, des mesures que l’administration américaine – soutenue par un Sénat lui aussi « bleu » – est susceptible de déployer brutalement.

L’écart de puissance (politique, économique, financière, technologique, militaire) entre les Etats-Unis et l’Europe n’est pas nouvelle. Les conséquences sont mesurées lorsque les régimes des deux rives de l’océan s’accordent globalement sur un même mantra démocratique, sur une conception globalement partagée des enjeux pour la planète. Elles sont annonciatrices d’un inconnu potentiellement tragique lorsque ces visions divergent radicalement. Du réchauffement climatique au Proche-Orient en passant par Taïwan et bien sûr l’Ukraine, certaines raisons d’être saisi de tétanie sont d’ores et déjà évidentes. Celles qui noircissent l’avenir civilisationnel de l’Europe sont moins spectaculaires. Mais pas moins dévastatrices. La démocratie en Europe et la démocratie de l’Europe semblent désormais, comme jamais depuis la Seconde Guerre mondiale, menacées.

Industrie de défense: L’Europe contre la France

Industrie de défense: L’Europe contre la France 

Après avoir exploré les pièges de la résurrection de la Communauté européenne de défense de 1952, le groupe Vauban décrypte la stratégie de marginalisation de la France par l’Allemagne, l’Italie et la Grande-Bretagne avec l’alliance entre Berlin et Rome dans le domaine terrestre et l’accord de Trinity House avec Londres.

« Fidèles serviteurs de l’OTAN et de Washington, animés d’un désir de mettre la France en position d’infériorité militaire et industrielle, les coalisés se sont partagés l’Europe : à l’Allemagne, la défense du flanc Nord de l’OTAN ; à l’Italie, la défense du flanc Sud joignant théâtre de la Méditerranée orientale à l’Asie-Pacifique ; au Royaume-Uni, la Turquie, la Pologne et les pays baltes en liaison avec l’Allemagne » 

L’âme de la deuxième coalition est, sans surprise, à Berlin même. Poursuivant sa politique de champions nationaux (Diehl dans les missiles ; OHB dans le spatial ; Rheinmetall plus que KMW, dans les blindés ; Hensoldt dans l’électronique de défense ; TKMS dans le naval ; Renk et MTU dans la propulsion) et de récupération des compétences qui lui font encore défaut (propulsion spatiale, satellites d’observation et aéronautique de combat et missiles), l’Allemagne a compris depuis les années 90 qu’elle obtiendrait beaucoup plus d’une France récalcitrante en faisant des alliances de revers que par la négociation directe.

En ce sens, l’actualité récente est la réédition des années 1997 à 2000, années où Berlin a proposé à Londres des fusions de grande ampleur : Siemens avec BNFL, bourse de Francfort avec celle de Londres, DASA avec British Aerospace. A chaque fois, il s’agissait moins de forger des alliances de revers que de faire pression sur la France. Trop faible pour voir clair dans ses intérêts et le jeu de ses concurrents, trop altruiste pour voir toute la naïveté et la portée de ses actes, la France de Lionel Jospin a offert la parité à l’Allemagne dans le domaine de l’aéronautique, elle qui n’en demandait au mieux que le tiers (qu’elle pesait au demeurant très justement…).

L’Allemagne, l’âme des coalitions de revers

Avec ses alliances en Italie (dans le domaine des blindés) et au Royaume-Uni (sur l’ensemble des segments), Berlin tend à Paris de nouveau le même piège : « cédez sur le MGCS et le SCAF ou nous actionnons l’alliance de revers ». L’Europe de l’industrie d’armement qui se prépare, n’est en réalité qu’une coalition contre les thèses françaises dans la défense et son indispensable corolaire, l’armement. Nulle surprise dans ce constat : dominant ses concurrents militaires et industriels grâce à l’héritage gaullien, possédant le sceptre nucléaire qui lui ménage une place à part dans le concert des grandes nations, influente par son siège au Conseil de sécurité aux Nations-Unies et ses exportations d’armement, la France est le pays à ramener dans le rang des médiocres aigris et jaloux et de la petite bourgeoisie de la défense européenne.

Rien de nouveau sous le soleil européen puisque, si l’on en croit Alain Peyrefitte, le général De Gaulle faisait déjà cette analyse : « Pour la dominer aussi, on s’acharne à vouloir la faire entrer dans un machin supranational aux ordres de Washington. De Gaulle ne veut pas de ça. Alors, on n’est pas content, et on le dit à longueur de journée, on met la France en quarantaine. » (13 mai 1964).

Marginalisée depuis la création de KANT puis de KNDS, méprisée voire sacrifiée en France même par le gouvernement de François Hollande en 2015 avec la complicité des députés UMP, l’industrie terrestre nationale ne vit que par des îlots (canons, tourelles, obus), ayant abandonné les chars (sans que la DGA ne réagisse en 2009 lors de la suppression de la chaîne Leclerc par Luc Vigneron), les véhicules blindés chenillés (choix très contestable du tout-roues), l’artillerie à longue portée et saturante ; écrasée par la férule de Frank Haun, désormais noyé dans KNDS France sans trop oser se défendre lui-même, Nexter est menacé de disparition par la double alliance KMW/Rheinmetall au sein du MGCS et Rheinmetall/Leonardo dans l’ensemble des segments.

Aveuglé par le couple franco-allemand, Paris n’a pas accordé assez d’attention à la montée en puissance de Rheinmetall, vrai champion du terrestre allemand, qui, par commandes et acquisitions, se retrouve enraciné en plein milieu du jeu allemand (comme future actionnaire de TKMS et bras armé de la politique ukrainienne de Berlin), et de la scène européenne qu’il a conquise pas à pas : en Hongrie d’abord, puis au Royaume-Uni, en Lituanie, en Roumanie, en Ukraine, en Croatie et désormais en Italie, sans oublier d’établir la relation transatlantique (avec Lockheed Martin sur le F-35, avec Textron sur la compétition Lynx et en achetant le constructeur Loc Performance Products). La toile tissée par Rheinmetall en Europe est une véritable coalition contre les positions françaises.

Le même coup de faux se prépare avec l’accord germano-britannique de Trinity House qui, même s’il ne réalisera pas toute ses prétentions faute de compétences et de moyens, érige un axe concurrent durable et redoutable dans des domaines clés pour la France : le nucléaire, les systèmes de missile à longue portée, les drones d’accompagnement des avions de combat de future génération, la robotique terrestre, la patrouille maritime.

Fidèles serviteurs de l’OTAN et de Washington, animés d’un désir de mettre la France en position d’infériorité militaire et industrielle, les coalisés se sont partagés l’Europe : à l’Allemagne, la défense du flanc Nord de l’OTAN ; à l’Italie, la défense du flanc Sud joignant théâtre de la Méditerranée orientale à l’Asie-Pacifique ; au Royaume-Uni, la Turquie, la Pologne et les pays baltes en liaison avec l’Allemagne. Les contrats industriels suivent les diplomates, avec une moisson gigantesque de chars de combat Leopard, de véhicules blindés Boxer, de l’artillerie RCH-155, de véhicules blindés de combat d’infanterie Lynx et de chars Panther et de systèmes sol-air (22 pays membres de l’initiative allemande ESSI).

Au bilan, la France est nulle part dans cette Europe qu’elle prétend pourtant bâtir ; elle n’a pas eu le courage politique de s’opposer aux dérives illégales de la Commission européenne en pratiquant la politique de la chaise vide ; son gouvernement est un mélange instable de fédéralisme affirmé, d’atlantisme assumé et de gaullisme à éclipses : comment pourrait-il mener une autre politique que celle « du chien crevé au fil de l’eau » (De Gaulle) consistant à se couler avec facilité et confort dans le mainstream institutionnel otanien au nom de l’Ukraine ? Comme lors de la IVème République, ses partis politiques sont occupés à la tambouille politicienne et ne pensent plus le monde selon les intérêts nationaux mais selon les intérêts de l’OTAN, de l’Ukraine et d’Israël.

Alors que la France s’épuise en débats stériles politiciens dans un régime devenu instable (les deux vont de pair), ses positions stratégiques en Europe se dégradent :

  • La cohérence de son système de défense reposant sur la souveraineté nationale et la défense des intérêts nationaux, au profit d’un fédéralisme européen sous tutelle américaine décrété urgent par la guerre en Ukraine et la menace russe ;
  • Sa dissuasion nucléaire, au profit d’un projet de missile conventionnel à très longue portée et d’une défense anti-missile germano-américano-israélienne à vocation européenne, deux projets promus, comme par hasard, par l’Allemagne ;
  • Son modèle d’industries nationales, monopolistiques, seules capables de concevoir, développer, produire et maintenir des systèmes d’armes souverains, au profit de fusions industrielles européennes qui placeront les armées et l’industrie françaises en position de dépendance complète des deux Bruxelles (OTAN et Union européenne) ;
  • La conduite de ses programmes d’armement, réalisée par ses ingénieurs de l’armement dont c’est le métier et la vocation, au profit de bureaucrates européens ne connaissant rien aux domaines de l’armement mais ayant le pouvoir juridique et financier ;
  • Sa liberté souveraine d’exporter de l’armement à qui elle l’entend et sans frein autre que ses intérêts et sa morale à elle, au profit de règlements européens, spécialement édictés pour la restreindre, autre projet porté par l’Allemagne.

Le pire est que ces développements ont été portés par la classe politique elle-même qui les a encouragés à coup de proposition de « dialogue sur la dissuasion »« d’autonomie stratégique européenne » ou de programmes en coopération mal négociés, en mettant de côté les aspects gênants comme les divergences de doctrine, de niveau technologique et d’analyses sur les exportations.

Le pire est également que ces développements se profilent au moment même où la France, faute de limiter son gouvernement aux seuls domaines régaliens et de créer la richesse au lieu de la taxer et de la décourager, n’a plus les moyens de sa défense : comment celle-ci pourrait-elle en effet continuer de résister à la dérive des finances publiques, à la sous-estimation systématique de tous ses besoins (des capacités négligées aux infrastructures délaissées en passant par les surcoûts conjoncturels prévisibles mais ignorés) et à la mauvaise gestion de ses finances propres (comme en témoigne le montant faramineux des reports de charges) ?

Si la LPM est officiellement maintenue en apparence, ses fondements financiers, déjà minés dès sa conception par un sous-financement général, apparaissent pour ce qu’ils sont : insuffisants à porter le réarmement national de manière durable et soutenu. Faudra-t-il comme Louis XIV vendre l’argenterie royale ? Faudra-t-il vendre des biens nationaux comme la Révolution le fit dans son incurie ? Ou lui faudra-t-il écraser d’impôts les Français comme le Premier Empire s’y est résigné pour éviter l’emprunt ?

La rupture avec les deux Bruxelles est la double condition de la renaissance nationale. Face à l’Europe coalisée contre son système de défense, la France n’aura pas d’autre choix qu’un sursaut passant par une révision fondamentale du rôle de l’État, c’est-à-dire la réduction drastique de ses interventions sociales et économiques ruineuses et inefficaces, et d’une révision complète de son cadre d’alliances, afin que celles-ci la fortifient au lieu de l’atrophier.

La guerre froide n’a pas empêché ni la politique de la chaise vide ni le retrait du commandement intégré de l’OTAN, c’est-à-dire de quitter les deux Bruxelles au profit d’une politique du grand large, et pourtant le général de Gaulle qui a pris ces deux décisions majeures, n’était ni irresponsable ni irréfléchi. Les fruits de la grande politique qu’il a voulue, sont connus : un rayonnement considérable de sa diplomatie et de ses exportations d’armement.

L’Europe encore plus sur le chemin du déclin après l’élection américaine (Thierry Breton)

L’Europe sur le chemin du déclin (Thierry Breton)

Pour Thierry Breton, le Vieux Continent ne fait plus partie des priorités américaines. Et doit donc tout faire pour acquérir sa propre autonomie stratégique. (Interview dans la Tribune. S’il a quitté avec fracas son poste de commissaire européen en septembre, Thierry Breton n’en reste pas moins préoccupé par les destinées de l’UE. Deux jours avant l’élection présidentielle aux États-Unis – pays qu’il connaît bien pour avoir notamment enseigné à Harvard -, il revient pour La Tribune Dimanche sur l’impact que ce scrutin aura sur les Vingt-Sept.

LA TRIBUNE DIMANCHE — Que dit cette élection des États-Unis  ?

THIERRY BRETON — Elle est dans la continuité de ce que nous observons depuis des années  : les États-Unis restent un pays fondamentalement divisé, fracturé en deux blocs qui ne se parlent plus, ne se comprennent plus. Si un vainqueur ne se détache pas très vite, on peut s’inquiéter de ce que cette polarisation engendrera. Après, elle tient aussi beaucoup à la personnalité de Donald Trump, qui a intellectualisé cette fracture durant sa campagne avec la méthode qu’on lui connaît.


Joe Biden, qui avait promis de réconcilier le pays a donc échoué  ?

Quand il est arrivé à la Maison-Blanche, sa priorité était la réindustrialisation de l’Amérique. Derrière, il y avait l’idée de reconquérir la Rust Belt et son électorat «  déclassé  » qui vote Donald Trump. Force est de constater que cet électorat continue de préférer le républicain. Manifestement, sur ce point, Joe Biden n’a en effet pas réussi.

Pourtant tous les indicateurs montrent que l’économie américaine ne s’est jamais aussi bien portée…

Oui, et c’est bien le paradoxe. L’inflation qui a suivi la période du Covid joue encore un rôle crucial pour nombre d’Américains, notamment de la classe moyenne, qui en ressentent toujours cruellement les effets. Le coût d’accès au financement et à l’endettement auquel ils recourent massivement n’a pas encore suffisamment baissé. C’est un des éléments déterminants.

Le Trump de 2024 est-il le même que celui de 2020 ou de 2016  ?

Il paraît encore plus déterminé. S’il est élu, il sera sans doute plus rapidement opérationnel qu’en 2016, notamment pour constituer son administration. Il est très proche de la Heritage Foundation, connue pour ses thèses très à droite. Celle-ci travaille sur une liste de personnalités susceptibles de composer immédiatement son entourage.

Faut-il craindre, s’il est élu, une dérive autoritaire, un remodelage de la démocratie américaine  ?

On sait que ce remodelage avait déjà commencé lors de son premier mandat, notamment par la nomination à la Cour Suprême de juges très proches de ses thèses.

Le programme économique de Trump est peut-être plus articulé, plus simple et plus clair.

Mais au cours de ce mandat, l’administration avait réussi à contourner certaines de ses décisions. Il a déjà prévenu que, cette fois, il ne la laisserait pas faire…

Il dit qu’il est là pour changer les choses. Sans doute va-t-il tenir parole. C’est d’ailleurs une qualité que beaucoup d’Américains lui reconnaissent. L’élection d’un président aux États-Unis, première puissance économique et militaire du monde, c’est évidemment aussi l’expression d’un leadership. Et, qu’on l’apprécie ou non, Trump exprime ce leadership. Il est en phase avec une grande partie de la population américaine, qui à plus d’un tiers se retrouve explicitement dans ses thèses, ses attitudes, ses dires, y compris les plus excessifs.

Wall Street et la Silicon Valley ont aussi changé d’avis à son sujet. Comment l’expliquer  ?

C’est vrai, les milieux d’affaires s’inquiètent beaucoup moins qu’en 2016 d’une possible victoire du candidat républicain. Son programme économique est peut-être plus articulé, plus simple et plus clair que celui de sa rivale démocrate, laquelle n’a pas beaucoup détaillé le sien. Une chose est sûre, l’économie jouera, une fois encore, un rôle majeur dans cette élection.

Y a-t-il d’autres points de convergence entre Trump et Harris  ?

La lutte contre l’immigration illégale, plus massive que ce que nous connaissons en Europe, en est un. C’est un sujet majeur pour les deux candidats. Autre point commun, la Chine et le déplacement de l’épicentre des préoccupations de la Maison-Blanche vers l’Asie du Sud-Est. Quel que soit le candidat élu, nous assisterons immanquablement à un durcissement des relations entre les deux puissances.

Comment cela se traduira-t-il  ?

Par un durcissement des transferts de technologies clés ou par une augmentation significative des droits de douane, à l’instar de ceux déjà appliqués aux voitures chinoises importées aux États-Unis à hauteur de 100 %. Mais la Chine a, pour sa part, mis en place des stratégies de contournement, par exemple en implantant des usines au Mexique, en passe de devenir le premier partenaire commercial de l’Amérique devant l’Europe. Au demeurant, les deux candidats se retrouvent aussi sur la vision qu’ils ont de l’Europe.

Et quelle est-elle  ?

Il faut se rendre à l’évidence  : nous ne sommes plus une priorité pour les États‑Unis. Kamala Harris n’a pas évoqué une seule fois l’Europe pendant sa campagne. Quant à Trump, il en parle en des termes peu amènes, annonce qu’il s’apprête à instaurer des droits de douane tous azimuts avec l’Europe. Il la décrit du reste comme une «  mini-Chine  », estimant qu’elle se sert des États-Unis et n’est pas un partenaire fiable. Pour les deux candidats, l’Europe n’est plus qu’une puissance régionale. Charge à nous de démontrer le contraire.

Comment  ?

Nous devons sortir de notre naïveté, en finir avec le mythe selon lequel les États‑Unis d’aujourd’hui seraient encore ceux des années 1990. L’Amérique s’est beaucoup recentrée sur elle-même. Que ce soit avec Kamala Harris ou Donald Trump, il faudra donc que l’Europe soit de plus en plus stratégique, de plus en plus autonome, en matière de technologie, d’industrie ou de défense.

En prend-elle le chemin  ?

Nos institutions européennes, le Conseil, la Commission, le Parlement, n’ont pas encore arrêté la position à adopter à l’égard des États-Unis après le 5 novembre. De fait, c’est presque un sujet tabou. Au dernier Conseil, et alors que nous étions à trois semaines du tournant majeur de l’élection, la question n’a pas été évoquée.


Pour quelle raison  ?

Par peur que ne s’étalent les divisions. Après l’élection, certains États membres pourraient être tentés de négocier directement des accords de sécurité ou autre avec Washington. On connaît par ailleurs les relations entre le Premier ministre hongrois et Donald Trump. Quand ce dernier s’interroge sur l’UE, c’est d’abord Viktor Orbán qu’il appelle et non la présidente de la Commission ou celle du Parlement européen. On peut le regretter mais c’est comme ça. Avec Donald Trump, c’est une dimension qu’il faudra intégrer pour nous positionner à l’avenir. Avec Kamala Harris, les relations institutionnelles entre nos continents auront un caractère plus normé et conventionnel. Dans tous les cas, l’Europe devra afficher un véritable leadership de puissance et d’autonomie stratégique, imposer de façon audacieuse ses priorités et ses dossiers. C’est comme cela qu’elle avancera. Et non en recherchant je ne sais quel consensus mou, voire en priant pour l’élection – ou la non-élection – de tel ou tel candidat.

N’est-il pas incompréhensible de voir l’Europe attendre cette élection avec la même angoisse qu’il y a quatre ou huit ans ? Nous avons déjà connu un mandat Trump et savons à quoi nous attendre...

Hasard des calendriers, cette élection américaine survient à un moment où les institutions européennes elles-mêmes se renouvellent. Cela ne facilite pas les choses. En fonction du candidat élu, peut-être devra-t-on se demander si la structure et l’organisation de nos institutions, que nous sommes en train d’arrêter, sont adaptées à la nouvelle réalité transatlantique. Ce sera aux co-législateurs de le dire.

Que ce soit Kamala Harris ou Donald Trump, nous devons nous préparer à une évolution du soutien américain à l’Ukraine.

Sur l’Ukraine, l’Europe peut-elle compenser un possible arrêt de l’aide américaine  ?

Cette question va très vite nous occuper  : que ce soit Kamala Harris ou Donald Trump, nous devons nous préparer à une évolution du soutien américain, certes différente pour l’une ou l’autre, mais bien une évolution, voire un arrêt. Une chose est certaine, ce sera un test pour nous Européens. Or, j’observe une certaine lassitude des opinions publiques dans un nombre croissant d’États membres sur notre soutien à l’Ukraine. C’est inquiétant. Cela nécessitera, pour nos trois institutions, une détermination à maintenir la cohésion de tous les Européens, je dis bien tous les Européens, dans une période décisive.

Un retour de Trump à la Maison-Blanche signifierait-il la fin du multilatéralisme  ?

Il n’y a plus que l’Europe qui pousse pour le multilatéralisme tel qu’on l’a connu dans les années 2000. On le voit à l’Organisation mondiale du commerce. Ne soyons pas le dernier des Mohicans. Cela fait bien longtemps que la Chine ou les États-Unis ne respectent plus les règles de l’OMC.

Cela fait partie de cette naïveté européenne que vous décrivez  ?

Je ne sais si c’est de la naïveté ou une forme d’idéologie dépassée. Nous sommes, à certains égards, un dinosaure herbivore entouré de tyrannosaures. Bien sûr, notre marché doit rester ouvert. Mais à nos conditions. La fermeté est essentielle pour obtenir de la réciprocité. Nous avons prouvé que nous en étions capables lorsque, ensemble, nous avons mené un rude combat pour bâtir une architecture européenne inédite de régulation du numérique. Dans le même esprit, et comme nous l’avons entrepris pour les semi-conducteurs, l’industrie de défense, les vaccins, il faudra accroître notre capacité de production dans tous les secteurs stratégiques en cofinançant pour partie la transition verte et numérique. En cela, il faut suivre l’intégralité des préconisations des rapports Draghi et Letta. Je dis bien l’intégralité. En particulier, la mobilisation en commun de financements innovants massifs  : 800 milliards d’euros par an, nous dit Mario Draghi, pour restaurer notre compétitivité.

On en est encore loin…

Les États-Unis, eux, ne s’en privent pas. Ils en sont à plus de 1 000 milliards de subventions pour le seul IRA (Inflation Reduction Act) quand la Chine elle-même injecte massivement des capitaux pour relancer son économie. Nous nous trouvons à la croisée des chemins. Soit l’Europe accélère ses programmes d’autonomie stratégique, et elle a une chance de maintenir sa place. Soit elle tergiverse, et elle laissera définitivement passer le train.

Comment financer ces chantiers  ?

Par de l’investissement privé mais aussi public, comme le préconise Mario Draghi. Cela passe donc sans doute par de l’endettement commun. La mobilisation du seul budget de l’Union est illusoire. Je sais que cela ne plaît pas à certains États membres. Mais, après la crise du Covid, nous avons réussi à mettre en œuvre le plan Next Generation EU malgré les réticences. L’Allemagne, les Pays-Bas, certains des pays dits «  frugaux  », peuvent renâcler. Mais on a pu surmonter les oppositions. Les élections américaines nous mettent au pied du mur. Après la pandémie et la guerre en Ukraine, c’est un nouveau moment existentiel. Harris ou Trump  : plus que jamais, l’Europe est seule face à son destin.

Environnement politique : recyclage de Macron sur l’Europe

Environnement politique : recyclage de Macron sur l’Europe

Devant les difficultés inextricables à gouverner actuellement la France compte tenu de l’éclatement des forces politiques, Macon aurait déclaré en privé « il se démerde ». Et d’envisager désormais une action privilégiée surtout au plan de l’Europe le seul problème pour lui c’est qu’il est désormais autant discrédité à l’international et en Europe en particulier qu’en France. Et de toute manière il serait bien incapable d’imposer une disposition qui réclamerait l’accord et l’appui du Parlement français.Encore heureux qu’il n’est pas choisi de se recycler dans l’espace international où là encore il a accumulé les échecs ( notamment avec la Russie, l’Afrique ou encore avec les territoires d’outre-mer).

 

«Pour moi, la première priorité est l’échelle européenne», après avoir entrepris de nombreuses réformes économiques et sociales en France, a déclaré le chef de l’État lors d’un forum sur l’avenir de l’Europe dans la capitale allemande. «C’est là qu’on peut débloquer beaucoup de croissance et de potentiel», a-t-il plaidé.

Rapport Draghi: Les enjeux pour sauver l’Europe du déclassement

Rapport Draghi: Les enjeux pour sauver l’Europe du déclassement

Draghi  est de retour pour sauver l’Europe. Cette fois, du déclassement. Il ne s’agit pas de taire les mérites de son épais rapport, remis à la présidente de la Commission européenne qui le lui avait commandé avant d’être reconduite dans ses fonctions, car celui-ci pourrait bien tracer la voie d’une réindustrialisation, faisant résonner innovation et décarbonation, en remède aux dépendances dont souffre le vieux Continent. Mais soyons lucides et vigilants. Par Jézabel Couppey-Soubeyran, Maîtresse de conférences à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Conseillère scientifique de l’Institut Veblen, responsable scientifique de la Chaire énergie et prospérité.
( dans La Tribune)

Dans son ensemble, la préconisation revient à servir toujours plus le capitalisme financier, en élargissant les marchés de la dette, en relançant la titrisation, et en multipliant les appels à la dérégulation financière. C’est sur les rives d’un capitalisme un peu verdi mais encore plus financiarisé que Mario Draghi veut faire accoster l’Europe. Nouveaux rivages ou dangereux mirage ?

C’est un grand mérite du « rapport Draghi » que d’essayer de graver dans les esprits un ordre de grandeur rehaussé du manque d’investissements de transformation en Europe, de l’ordre de 5 points de produit intérieur brut par an. Jusqu’ici prévalaient dans le débat public des ordres de grandeurs plus petits, issus de rapports louables sur les investissements climat (comme le 2% de PIB en France du rapport « Pisani-Ferry et Mahfouz ») mais étroits dans leur perspective de transformation et n’appréhendant la transition écologique que sous l’angle du climat. Le « rapport Draghi » n’a pas une conception plus large de la transition écologique, qu’il réduit à la lutte contre le réchauffement climatique en ignorant les huit autres limites planétaires alors que six d’entre elles sont d’ores et déjà dépassées. Cependant, même si son horizon ne dépasse pas la croissance verte, il élargit la focale en attirant l’attention sur les dépendances dont souffre le Vieux continent et sur la nécessité de rebâtir une autonomie dans des secteurs stratégiques. Il en identifie dix, de l’énergie aux technologies vertes, en passant par l’automobile, les industries énergivores, les matières premières critiques ou encore les semi-conducteurs. Sur les matières premières critiques, par exemple, la dépendance à l’égard de la Chine notamment est particulièrement problématique (cf. L’économie mondiale 2025, chap IV : Matières premières critiques : vers l’autonomie stratégique européenne ? Romain Capliez, Carl Grekou, Emmanuel Hache, Valérie Mignon, Ed. La Découverte et CEPII, sept. 2024)

Autre grand mérite du « rapport Draghi », celui de relancer la perspective d’un emprunt commun, pérennisé et non plus exceptionnel, pour élargir l’espace budgétaire européen.
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De quoi peut-être réamorcer les discussions sur l’union budgétaire. L’Allemagne pourra-t-elle s’y opposer encore longtemps ? Peut-être pas. Son modèle économique est en état de souffrance et ce n’est sans doute pas qu’une fatigue passagère comme l’explique Céline Antonin dans L’économie mondiale 2025 (chap. III, ibid.). Pour axer comme elle l’entend sa politique industrielle sur la transition écologique, l’Allemagne a besoin d’investissements massifs, qui seront impossibles si elle reste enfermée dans son carcan budgétaire qu’elle impose aussi à ses partenaires européens. Dans un tel contexte, la proposition d’emprunt commun du « rapport Draghi » pourrait bien ouvrir le chemin de l’union budgétaire qui restait jusqu’ici fermé.

Cependant, au niveau financier, la lecture du « rapport Draghi » appelle à la plus grande vigilance. D’abord, l’union des marchés de capitaux qu’il appelle de ses vœux n’est autre qu’un élargissement des marchés de la dette privée, pour apporter toujours plus de carburant au capitalisme financier, au risque d’élever encore le risque de crises financières, dont on devrait pourtant avoir réalisé depuis celle de 2007-2008 à quel point celles-ci sont économiquement et socialement coûteuses. Ensuite, il contient des appels plus ou moins explicites à la dérégulation financière.

Le plus manifeste concerne le marché de la titrisation qu’il faudrait « approfondir » avec « le soutien de garanties publiques » pour « accroître la capacité de financement du secteur bancaire ». Le rapport recommande explicitement à la Commission de réduire les exigences prudentielles et les règles de transparence pour les actifs titrisés, c’est-à-dire les créances que les banques revendent à des entités financières qui les transforment en titres rémunérateurs dans lesquels diverses entreprises financières y compris des banques investissent. De façon à peine plus masquée, il appelle aussi à ne pas accepter la finalisation des accords de Bâle 3, qui visent à limiter le contournement de la réglementation des fonds propres par les grandes banques dotées de modèles qui leur permettent d’évaluer le risque de leurs actifs par elles-mêmes. Il faut croire que Mario Draghi, quand il était aux manettes de la banque centrale européenne, a bien aimé gérer la crise financière de 2007-2008 et celle des dettes souveraines entre 2010 et 2012, dont les principaux éléments déclencheurs ont précisément été l’excès de dette privée, la titrisation des crédits bancaires et la faiblesse des garde-fous …

À quoi servira donc l’embarcation proposée par le « rapport Draghi » ? Le risque est grand qu’en cours de route l’indispensable effort d’investissement auquel il exhorte passe par-dessus bord avec les bonnes intentions d’emprunt commun et que restent uniquement ses appels à la dérégulation financière, que les lobbies bancaires et financiers seront ravis d’acheminer à bon port.

Voiture électrique chinoise : l’Europe, l’idiot du village

Voiture électrique chinoise : l’Europe, l’idiot du village

Selon Renaud Kayanakis, expert transport au sein du cabinet SIA Partners, invité de franceinfo mardi 20 août, estime que l’Europe est  « un peu l’idiot du village », puisqu’elle fait partie des régions  qui taxent le moins cette industrie. 

« En Europe, les importations sont taxées à 10%, alors qu’aux États-Unis c’est 100%, en Inde, c’est entre 70% et 100%, et en Turquie, c’est 40% », détaille l’expert, « donc on revient à une situation commune qui est constatée sur d’autres marchés ».

Cette mesure nécessite encore l’aval des États membres de l’Union européenne pour être adoptée, mais la Chine a déjà annoncé s’opposer à ces surtaxes européennes, en promettant des « représailles », selon Renaud Kayanakis, « qui toucheront probablement le marché de la batterie, très dépendant de la Chine ».

« On est sur une industrie qui représente 2 500 000 emplois directs en Europe, plus de 10 000 000 d’emplois indirects donc nous avons une nécessité de préserver cette industrie et d’avoir des conditions de marché qui sont bilatérales et similaires entre les différents territoires, ce qui n’était pas possible avec ces taxes de 10% », conclut l’expert.

Politique de Défense: La Pologne achète des équipements américains avec l’argent de l’Europe

Matériel militaire: La Pologne achète des équipements américains avec l’argent de l’Europe

Depuis 2004, la Pologne a reçu près de 246 milliards d’euros du budget de l’Union européenne. Durant cette période, les cotisations versées au budget de l’UE se sont élevées à plus de 83,8 milliards d’euros. Ce qui n’empêche nullement la Pologne de privilégier l’achat d’équipements militaires américaines des industries européennes évidemment.

 

En effet, Varsovie poursuit, à coup de milliards de dollars, ses acquisitions d’équipements militaires, principalement auprès des Etats-Unis et de la Corée du Sud. Ce lundi, Varsovie a signé un accord d’une valeur de 1,13 milliard d’euros sur la production de 48 lanceurs de missiles antiaériens américains Patriot.

 

Troisième accord militaire en moins d’une semaine pour la Pologne. Varsovie a annoncé ce mardi par la voix de son ministre de la Défense avoir signé un accord définitif avec Boeing pour l’achat de 96 hélicoptères de combat Apache.

« Il s’agit de l’achat historique (…) de 96 hélicoptères d’attaque et de combat ultramodernes, les AH-64E Apache », a déclaré Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, ajoutant que la valeur de la transaction s’élevait « à 10 milliards de dollars », soit 9,14 milliards d’euros.

L’accord « change le visage des opérations de l’armée polonaise et complète » les achats précédents, a déclaré Wladyslaw Kosiniak-Kamysz. Fortement armé, AH-64E Apache est notamment destiné à combattre les chars ennemis.

Défense: La Pologne achète des équipements américains avec l’argent de l’Europe

Défense: La Pologne achète des équipements américains avec l’argent de l’Europe

Depuis 2004, la Pologne a reçu près de 246 milliards d’euros du budget de l’Union européenne. Durant cette période, les cotisations versées au budget de l’UE se sont élevées à plus de 83,8 milliards d’euros. Ce qui n’empêche nullement la Pologne de privilégier l’achat d’équipements militaires américaines des industries européennes évidemment.

 

En effet, Varsovie poursuit, à coup de milliards de dollars, ses acquisitions d’équipements militaires, principalement auprès des Etats-Unis et de la Corée du Sud. Ce lundi, Varsovie a signé un accord d’une valeur de 1,13 milliard d’euros sur la production de 48 lanceurs de missiles antiaériens américains Patriot.

 

Troisième accord militaire en moins d’une semaine pour la Pologne. Varsovie a annoncé ce mardi par la voix de son ministre de la Défense avoir signé un accord définitif avec Boeing pour l’achat de 96 hélicoptères de combat Apache.

« Il s’agit de l’achat historique (…) de 96 hélicoptères d’attaque et de combat ultramodernes, les AH-64E Apache », a déclaré Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, ajoutant que la valeur de la transaction s’élevait « à 10 milliards de dollars », soit 9,14 milliards d’euros.

L’accord « change le visage des opérations de l’armée polonaise et complète » les achats précédents, a déclaré Wladyslaw Kosiniak-Kamysz. Fortement armé, AH-64E Apache est notamment destiné à combattre les chars ennemis.

JO de Paris 2024 : Record d’audience dans les médias

JO de Paris 2024 : Record d’audience dans les médias

Au total, 60 millions de téléspectateurs ont regardé les Jeux olympiques de Paris 2024 sur France Télévisions, selon des chiffres de Médiamétrie publiés ce lundi. Les radios et journaux ont également enregistré une forte hausse des audiences pendant ces deux semaines.

 « Au total, 60 millions de Français (sur une population de 68 millions, Ndlr) ont assisté aux JO sur France Télévisions, ce qui est inédit, et chaque Français en a regardé 20 heures en moyenne », a déclaré ce lundi à l’AFP le numéro 2 du groupe public, Stéphane Sitbon-Gomez.

Selon France TV, qui cite Médiamétrie, les deux plus hauts pics ont été atteints par le nageur Léon Marchand : 14,5 millions de téléspectateurs pour sa quatrième médaille d’or le 2 août et 13,5 millions pour son doublé le 31 juillet. Le troisième pic est la victoire de la France au judo par équipes avec Teddy Riner le 3 août (13 millions).

Encore un score impressionnant pour le service public. Médiamétrie a comptabilisé 17,1 millions de téléspectateurs branchés sur France 2, dimanche soir, pour regarder la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Paris 2024 qui se déroulait au Stade de France (Seine-Saint-Denis).

Un spectacle qui a toutefois attiré moins de téléspectateurs que la cérémonie d’ouverture sur la Seine, le 26 juillet. Celle-ci avait été suivie en direct par 23,2 millions de téléspectateurs en moyenne, puis revisionnée en replay par 1,2 million de personnes supplémentaires, pour un total historique de 24,4 millions.

 

Critique de l’Europe sur l’indépendance des médias

Critique de l’Europe sur l’indépendance des médias

D’après les » Échos », le rapport sur l’Etat de droit de l’UE publié mercredi pointe notamment des inquiétudes sur le manque d’indépendance de la gouvernance des médias de service public dans plusieurs pays.. Dans son rapport annuel sur l’Etat de droit publié mercredi, la Commission européenne fait à nouveau mention de fortes préoccupations concernant la liberté et le pluralisme des médias sur le Vieux Continent.

Certes le rapport note des améliorations, en un an, concernant « la sécurité et l’environnement de travail des journalistes ». Mais leurs conditions de travail et « le manque d’indépendance de la gouvernance des médias de service public restent un sujet de préoccupation dans plusieurs pays », relève-t-il.

Et il n’y a pas que les pays les plus connus en matière d’atteinte à la liberté de la presse qui sont pointés du doigt.

Des préoccupations déjà exprimées concernant l’indépendance éditoriale des médias de service public n’ont pas été résolues en Roumanie, à Malte et en Hongrie, pointe notamment la Commission qui critique aussi fortement le l’Italie.

Productivité : l’Europe et la France en panne

Productivité : l’Europe et la France en panne

 La productivité horaire a baissé dans la zone euro en 2023 : -1% contre +1,5% aux États-Unis. Cette divergence n’est pas nouvelle ; elle affecte depuis le début de la décennie 2010 plusieurs pays européens alors que les États-Unis (ou la Suisse) affichent des gains de productivité élevés et que la Corée du Sud réalise une performance exceptionnelle. La France est en queue de peloton : sa productivité horaire se situe aujourd’hui à un niveau inférieur à celui de 2015. La Fabrique de l’Industrie vient de produire une courte analyse à laquelle nous faisons ici référence.
Par Louis Gallois et Pierre-André de Chalendar (*). dans la Tribune

Cette situation est préoccupante. L’absence de gains de productivité freine la compétitivité des productions européennes et, bien sûr, françaises ; elle réduit la croissance potentielle des économies concernées. Elle caractérise leur faible dynamisme. Elle explique, au moins pour partie, la divergence des taux de croissance entre les États-Unis et l’Europe.

Ce phénomène touche tous les secteurs d’activité et en particulier l’industrie. Ses causes sont multiples et pas encore totalement élucidées par les économistes qui divergent sur leur pondération. Certaines sont conjoncturelles : en France, la croissance de l’apprentissage ou la réduction du chômage qui se traduit par l’embauche de travailleurs moins « productifs » et moins formés… D’autres causes semblent plus profondes : excès de réglementations, vitesse  insuffisante d’adaptation aux évolutions des marchés et des compétences nécessaires, politiques macroéconomiques peu favorables à la croissance au niveau européen, et surtout sans doute, investissements insuffisants notamment dans les nouvelles technologies porteuses de productivité ainsi que dans la recherche et le développement.

Le prix Nobel Paul Krugman est clair « La productivité n’est pas tout, mais à  long terme,c’est presque tout ». Cela veut dire que la reprise des gains de productivité est un  enjeu majeur pour les économies européennes et, au premier chef , pour la France où la « panne » est, semble-t-il, la plus forte.

Les causes étant multiples, il n’y a pas de remède unique. Mais on sent bien les domaines sur lesquels il faut faire porter l’effort en France : l’éducation (mathématiques, lycées pro, BTS, apprentissage), la formation, notamment pour faire face aux mutations qu’entraine la transition énergétique et écologique, la diffusion des nouvelles technologies avec une attention particulière portée aux PME, l’effort de recherche privé et public qui doit être accru le plus rapidement possible pour atteindre au moins 3% du PIB contre 2,2% actuellement (c’est dire que ce n’est pas le moment de toucher au Crédit d’Impôt Recherche !). La France doit être  présente dans la compétition technologique, aussi bien au niveau de la recherche et du développement que dans la mise en œuvre au sein des processus de production. il y a là un enjeu décisif pour la relance de la productivité, mais aussi pour la croissance et la souveraineté

Le rapport Letta n’aborde pas le sujet directement ; il évoque néanmoins le besoin d’investissement des entreprises européennes et les moyens de le financer. Il est probable que le rapport Draghi sur la compétitivité attendu avant cet été traitera plus directement de l’insuffisance de productivité européenne. L’UE doit se mobiliser sur ce qui apparait être une faiblesse majeure par rapport aux États-Unis et aux pays asiatiques ; cela concerne aussi bien les excès de réglementations,les politiques concernant les aides aux entreprises, le soutien à l’innovation et à la recherche que le réglage macroéconomique qui doit être plus favorable à la croissance.

S’agissant de la France, les pouvoirs publics ne sont pas restés inertes : réforme fructueuse de  l’apprentissage qui doit maintenant concerner plus fortement les niveaux en deçà du bac, réforme très (trop ?) prudente des lycées professionnels, programme France 2030 sur des champs technologiques majeurs… Mais il faut aller plus loin, amplifier ces efforts, en particulier sur les champs scientifiques et technologiques, leur donner une cohérence et une visibilité renforcées, en faire un véritable enjeu national. A contrario, leur remise en cause ou leur étalement dans le temps pour cause de finances publiques dégradées ne pourrait conduire qu’à aggraver le retard pris par notre pays dans une course où se joue sa compétitivité et sa capacité de croissance.

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(*) Louis Gallois est diplômé de l’Ecole des hautes études commerciales et de l’Ecole nationale d’administration (promotion Charles de Gaulle). Après une carrière dans l’administration publique, il devient successivement PDG de la Snecma (1989), d’Aérospatiale (1992), président de la SNCF (1996), et président exécutif d’EADS N.V. (2007), président du conseil de surveillance de PSA (2014-2021). Il est co-président de La Fabrique de l’industrie depuis sa création en 2011.

Pierre-André de Chalendar est diplômé de l’ESSEC et ancien Inspecteur des Finances. Son aventure industrielle au sein de Saint-Gobain, dont il devient PDG en juin 2010, débute dès 1989. Il est par ailleurs administrateur de BNP Paribas et vice-président d’Entreprises pour l’environnement (EpE), qu’il préside de 2012 à 2015.Il devient co-président de La Fabrique de l’industrie en juillet 2017.

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