Nouveau gouvernement : l’épuisement du macronisme
«La physique des forces politiques s’impose à un président qui, à force de trianguler, s’est entravé lui-même et est contraint au repli.» Le Figaro
FIGARO-TRIBUNE-Arnaud Benedetti - Le gouvernement Borne II, marqué par le retour de plusieurs ministres, est le signe que le président de la République a perdu de son attractivité, affirme le spécialiste en communication.
Ce remaniement signe d’ores et déjà une forme d’impasse, pour ne pas dire d’échec. Il n’est en aucun cas à la mesure d’un rebond ou d’un renouvellement, il est contraint au millimètre près par le résultat des législatives, et d’ailleurs il ne pouvait en être autrement. Son annonce, au demeurant, n’aura jamais autant donné prise à des fuites savamment calculées, comme s’il s’agissait d’amortir une trop grande solennité qui aurait sursouligné la faiblesse des gains politiques. On a égrené les petits cailloux pour les ramasser dans un communiqué officiel.
Le secrétaire général de l’Élysée est ainsi resté dans son bureau. Ce remaniement est banal comme un changement d’équipe sous la IVe République. Emmanuel Macron a perdu de son attractivité, sa réélection s’est gagée sur une campagne empêchée, et le scrutin législatif a donné, lui, la vraie photographie du paysage politique. Le macronisme est non seulement en rétractation, il est entré en entropie (en physique, inaptitude de l’énergie contenue dans un système à fournir du travail, NDLR). On chercherait en vain le signe de conquête ou même d’extension que pourrait signifier ce gouvernement Borne II.
Le retour de Marlène Schiappa dans un énième portefeuille et le déplacement d’Olivier Véran du ministère des relations avec le Parlement au porte-parolat doivent être lus comme l’épuisement de la biodiversité macroniste.
Évidemment, les commentateurs trouveront toujours à certifier qu’il existe des éléments à relever dans ce qui constitue sur le fond un nano-événement: la promotion de deux ministres issus de la droite (Christophe Béchu et Caroline Cayeux), l’extension des missions de Gérald Darmanin, l’entrée d’un ancien socialiste Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois ou le renforcement du poids du MoDem, soit: une grosse pincée à droite, une petite à gauche, une coloration un peu plus centriste, quelques personnalités de la société civile ou de la haute fonction publique, voilà du déjà-vu dont on peut dire sans trop de risque qu’il n’impactera pas l’opinion.
Il y a quelque chose d’inévitablement usé dans une formule sans élan, ni signification autre qu’Emmanuel Macron est à cours de ressources et ne peut plus compter que sur son réduit originel. À cet égard, le retour de Marlène Schiappa dans un énième portefeuille et le déplacement d’Olivier Véran du ministère des relations avec le Parlement au porte-parolat doivent être lus comme l’épuisement de la biodiversité macroniste.
Le président acte une cartographie parlementaire dont il ne peut qu’espérer qu’elle lui permette un cabotage au gré des textes et au jour le jour.
Cette absence d’originalité et les limites qu’elle traduit font sens dans la composition de cette nouvelle équipe gouvernementale. La physique des forces politiques s’impose à un président qui, à force de trianguler, s’est entravé lui-même et est contraint au repli. De facto il acte une cartographie parlementaire dont il ne peut qu’espérer qu’elle lui permette une sorte de cabotage au gré des textes et au jour le jour.
C’est bien dans cette passe incertaine que pénètre le navire d’un pouvoir qui a bâti manifestement un édifice dans la plus grande des difficultés. Ce gouvernement, d’emblée, est frappé comme du sceau de son extrême fragilité, il est comme tissé du fil des étoffes d’une dernière partie de quinquennat, à moins qu’il n’offre comme l’image d’une transition. Il se présente à coup sûr comme l’enseigne que l’on voudrait la moins répulsive possible en vue d’une extension du domaine d’une majorité présidentielle sans réelle majorité législative.
Reste à parier sur sa durée après l’été et l’automne venant. L’incertitude de tous les instants plane déjà au-dessus d’un attelage qui ressemble plus du produit de circonstances contrariées que d’une dynamique politique.