Archive pour le Tag 'Lenoir)'

« Pour un respect total du secret entre avocats et clients»( Noëlle Lenoir)

« Pour un respect total du secret  entre avocats et clients»( Noëlle Lenoir)

 

 « Les avocats et leurs clients ne peuvent être laissés dans l’incertitude de la protection de la confidentialité de leurs échanges » (article dans l’Opinion)

 

Noëlle Lenoir, avocate, membre honoraire du Conseil constitutionnel, présidente de la Commission juridique du Grand Paris/Ile-de-France, Capitale économique.

 

En décembre, Henri Leclerc, l’un des plus grands avocats français, en quittant le barreau après 65 ans d’exercice, évoquait dans sa dernière plaidoirie les atteintes portées au secret professionnel de l’avocat. Sans épiloguer sur le jugement du tribunal de Paris relatif aux écoutes téléphoniques de l’ex-président de la République et de son avocat, Maître Herzog, sur lequel la Cour d’appel doit rendre une décision sereine en dépit de l’extrême sensibilité de l’affaire, chacun est conscient qu’est de nouveau posée la question de la protection du secret des correspondances entre l’avocat et son client. Il faut l’aborder de front. Les avocats et leurs clients ne peuvent être laissés dans l’incertitude de la protection de la confidentialité de leurs échanges.

La règle fixée par l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 sur la réforme des professions judiciaires et juridiques est que, « en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l’avocat et ses confrères à l’exception pour ces dernières de celles portant la mention “officielle”, les notes d’entretien et plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ».

Or, dans une décision de 2015, le Conseil constitutionnel a jugé qu’« aucune disposition constitutionnelle ne consacre spécifiquement un droit au secret des échanges et correspondances des avocats et un droit au secret des sources des journalistes ».

Jurisprudence. Cette jurisprudence contraste avec celle du Tribunal constitutionnel allemand initiée en 2007. L’affaire concernait l’enregistrement des données de connexion du téléphone portable d’un avocat dont le client, soupçonné de vol aggravé, s’était enfui. Le Tribunal a estimé que cet enregistrement méconnaissait le secret des correspondances (garanti à l’article 10 de la Loi fondamentale de la République fédérale d’Allemagne) et la liberté de choisir librement sa profession (protégée par l’article 12). Il a fait valoir que le secret des correspondances entre l’avocat et son client était la base de leur relation de confiance et répondait à un intérêt public. Le Tribunal s’est par ailleurs référé à une jurisprudence établie Outre-Rhin suivant laquelle tout prévenu ou accusé dans le cadre du procès pénal a droit au respect de sa « dignité humaine».

Cette approche rejoint celle de la Cour européenne des droits de l’homme qui souligne que la Convention européenne des droits de l’homme « accorde une protection renforcée aux échanges entre les avocats et leurs clients », le justifiant « par le fait que les avocats se voient confier une mission fondamentale dans une société démocratique : la défense des justiciables ». La Cour rappelle que prévenus ou accusés ont le droit de ne pas s’auto-incriminer et que ce droit exige de garantir la confidentialité de leurs échanges avec leurs avocats.

La protection du secret des correspondances avocat/client ne signifie bien sûr pas que les avocats – pas plus que n’importe quelle autre corporation – bénéficient d’une immunité pénale. Les interceptions téléphoniques sont possibles en Allemagne s’agissant d’un avocat fortement soupçonné d’avoir commis, non pas n’importe quelle infraction, mais une de celles spécifiquement énumérées dans la législation pénale.

La Cour de Strasbourg reconnaît aussi que l’interception des conversations téléphoniques d’un avocat peut être légitime pour « la défense de l’ordre » ; encore faut-il que l’avocat soit directement soupçonné d’une infraction et que l’interception soit ordonnée une fois que le juge s’est assuré qu’elle ne portera pas atteinte aux droits de la défense du client.

Enjeux constitutionnels. Eu égard aux enjeux constitutionnels, au sens plein du terme, du secret des correspondances avocat/client, le récent rapport de l’ancien bâtonnier du barreau de Marseille, Dominique Mattei, apparaît comme une excellente base de réflexion pour lever les incertitudes de la situation actuelle au regard des droits des justiciables. Car renforcer la protection des échanges avocat/client doit s’inscrire avant tout dans la logique de la protection des droits de la défense découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 sur la garantie des droits.

Alors qu’une fenêtre d’opportunité s’est ouverte en cette période d’après-Brexit pour renforcer le rôle de Paris comme place de droit au niveau européen, il importe plus que jamais de rassurer aussi les étrangers qui s’installent ou investissent dans notre pays et qui peuvent être, comme quiconque, confrontés à des procédures pénales.

Noëlle Lenoir, avocate, membre honoraire du Conseil constitutionnel, présidente de la Commission juridique du Grand Paris/Ile-de-France, Capitale économique.

« Macron, un peu spinozien » ? (Frédéric Lenoir)

« Macron, un peu spinozien » ? (Frédéric Lenoir)

Dans une intreview au JDD, le philosophe Frédéric Lenoir, auteur du « Miracle Spinoza », analyse les grands faits dactualités et le profil de Macron (extraits).

 

 

Les six premiers mois d’Emmanuel Macron à l’Elysée ont-ils révélé un Président véritablement philosophe?
Il a une solide formation philosophique et un souci de compréhension rationnelle du monde. Face à deux adversaires, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, qui ont beaucoup joué sur les émotions, lui a fait preuve de contrôle durant la campagne et a prôné l’apaisement. En ce sens-là, il ressemble plus au modèle de l’homme politique spinozien. Certes, depuis son élection, il a eu des propos un peu triviaux. Même chez un être rationnel, il y a toujours une dimension émotionnelle qui prend parfois le dessus. Sans parler de l’excuse de sa jeunesse!

La première année du mandat de Donald Trump a été un déferlement de propos rageurs. Qu’en dirait ce philosophe des émotions?
La peur et la colère de la moitié des électeurs américains ont conduit à l’élection de Trump. Le système démocratique ne nous protège pas d’une irrationalité politique liée à ce que Spinoza appelle nos passions tristes : colère, peur, ­jalousie, ressentiment. Pour que la démocratie fonctionne, le cadre juridique n’est pas suffisant : il faut aussi nous libérer de l’esclavage des émotions.

 

L’optimisation fiscale dévoilée par les « Paradise Papers » questionne l’égalité devant l’impôt, un pilier du contrat démocratique. Spinoza peut-il consoler le contribuable moyen troublé par la fuite de super-riches?
A 23 ans, il a été exclu de la communauté juive pour hérésie, il s’est retrouvé seul, sans famille, sans argent. Au lieu de rechercher la richesse, la gloire, les honneurs, il s’est mis en quête d’un bien non soumis aux vicissitudes de l’existence. Il l’a trouvé dans la fréquentation de ses amis, dans la réflexion philosophique, dans la dégustation de choses simples de la vie, dans une sorte de sobriété heureuse. A titre personnel, je gagne bien ma vie et cela ne me gêne pas de payer des impôts pour vivre dans une société plus juste et harmonieuse. Je pense, comme lui, que le bonheur individuel et le bonheur collectif vont de pair.

 

Spinoza soutient qu’on peut vaincre le mal en s’attaquant à ses causes profondes. Deux ans après le 13 novembre, comment l’éradiquer dans les têtes?
La cause profonde du mal, c’est l’ignorance. Avec des idées plus justes, les comportements seront plus éthiques. L’enseignement des connaissances fondamentales est nécessaire, mais insuffisant. Il est urgent d’apprendre aussi aux enfants à penser, à démasquer les manipulations religieuses ou consuméristes, les théories complotistes, à débattre de manière démocratique sans s’invectiver. C’est pourquoi j’ai créé une fondation [Seve] qui vise à développer les ateliers à visée philosophique dans les écoles primaires. L’autre remède, c’est la vie même. Il ne faut pas s’arrêter de vivre sous prétexte de menace terroriste. Spinoza a été persécuté, calomnié, on a tenté de l’assassiner, mais cela ne l’a pas empêché de cultiver la joie et il n’a jamais renoncé à une seule de ses idées.

Le Miracle Spinoza, Fayard, 234 p., 19 euros.

 




L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol