Budget France : le oui mais de Bruxelles
C’est un oui mais de la commission de Bruxelles qui n’en pense pas moins. Un oui assez diplomatique car c’est la fin du mandat de l’actuelle commission et finalement ce sera à la prochaine commission de trancher. Il y a auusi un « mais » car la commison est lucide sur le tour de magie du gouvernement français, un tour de magie qui ne s’attaque pas aux réformes structurelles. . La Commission européenne a donc décidé de ne pas recaler le projet de budget français pour 2015, modifié in extremis par Paris ce week-end. «Après avoir pris en compte les informations et améliorations supplémentaires communiquées ces derniers jours, je ne peux pas immédiatement identifier des cas de manquement particulièrement grave (aux règles budgétaires européennes) qui nous obligeraient à considérer un avis négatif (sur un projet de budget national) à cette étape du processus», a déclaré en jargon bruxellois le vice-président de la Commission en charge du dossier, Jirky Katainen, mardi, en fin de journée. Cette étape, qui clôt trois semaines de tension, après l’agitation de la menace de sanctions, ne marque pas pour autant la fin de la bataille entre Paris et Bruxelles. Et pour cause, la Commission n’hésitera pas à mettre en évidence les insuffisances du budget français dans un avis qu’elle rendra mi-novembre, conformément à la procédure. En attendant, le président sortant de la Commission, José Manuel Barroso, «ne veut pas finir son mandat sur un clash avec Cameron et un bras de fer avec Hollande», explique une source diplomatique. D’autant que la Commission n’a jamais retoqué un projet de budget national jusqu’à présent. C’est donc la nouvelle Commission présidée par Jean-Claude Juncker, en fonction le 3 novembre, qui récupérera la patate chaude. Et, plus spécifiquement, Pierre Moscovici, le nouveau commissaire en charge des affaires économiques et financières, qui devra agir en étroite coopération avec le vice-président chargé de l’euro et du dialogue social, Valdis Dombrovskis. «L’élément positif est que la France a modifié ses chiffres, après que Hollande a affirmé qu’il ne changerait rien. Cela permet d’éviter l’escalade entre Paris et la Commission, et de retrouver un ton plus constructif», constate une source bruxelloise, parmi d’autres. Plus particulièrement, ce sont les ajustements concernant le déficit structurel (diminution de plus de 0,5 point de PIB contre 0,2 point prévu jusqu’à présent) qui auraient sauvé la France. «C‘est l’ajustement minimum», explique Zsolt Darvas du think-tank bruxellois Bruegel qui permet à «la Commission de conclure que le projet de budget 2015 est acceptable». Ce qui ne signifie pas que Paris est rentré dans les clous budgétaires. Si la Commission ferme aujourd’hui les yeux, elle n’hésitera donc pas à revenir à la charge lorsqu’elle publiera, mi-novembre, ses avis détaillés sur les projets de budget pour 2015 des États de l’eurozone. Avis qui feront l’objet d’une discussion lors de la réunion des ministres des Finances de la zone, le 21 novembre. Ensuite, tout dépendra de la direction prise par Paris. Globalement, la Commission peut constater que des efforts ont été entrepris mais qu’en raison de la détérioration de la situation économique, la France ne peut pas tenir ses engagements de réduction de son déficit budgétaire à 3 % en 2015. Dans ce cas, elle peut proposer d’étendre une nouvelle fois le délai dans une recommandation soumise à l’adoption du Conseil des ministres de l’UE. La France table déjà sur 2017. Reste à savoir si les autres États, à commencer par l’Allemagne, donneraient le feu vert. Mais si Paris n’a pas entrepris d’actions suffisantes pour corriger son déficit, la Commission peut aller plus loin et proposer au Conseil de mettre la France en demeure de prendre des mesures pour réduire son déficit. Ce fut d’ailleurs le cas pour la Belgique en 2013 qui s’en est sortie en 2014. Cette mise en demeure pourra être assortie de sanctions sous forme d’amendes. Ici encore, il revient aux États de décider. Le député européen allemand, Markus Ferber, en ligne avec le gouvernement d’Angela Merkel, n’hésite pas à rappeler que «la France a déjà eu deux années supplémentaires et n’a rien fourni».