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Réchauffement de l’Atlantique et climat

Réchauffement de l’Atlantique et climat

Canicule et réchauffement de l’Atlantique

par
Peter Ditlevsen
Professor in physics of ice, climate and earth, University of Copenhagen

Susanne Ditlevsen
Professor in statistics, University of Copenhagen

dans The Conversation

Fin juillet, une étude publiée dans Nature Communications a mis en garde contre le risque d’effondrement d’un système océanique essentiel qui fait remonter les eaux chaudes dans l’Atlantique Nord. Nommée le plus souvent par son abréviation anglaise d’AMOC, la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique était déjà connue comme étant ralentie de manière inégalée depuis 1600 ans.

Ces dernières recherches envisagent son possible effondrement entre 2025 et 2095, avec une estimation centrale de 2057 si une réduction drastique et rapide des émissions de gaz à effet de serre n’advient pas. Ce scénario, s’il s’avère exact, pourrait entraîner un climat européen dramatiquement froid avec des conséquences dévastatrices pour la vie telle que nous la connaissons. The Conversation s’est entretenu avec le physicien Peter Ditlevsen et sa sœur, la statisticienne Susanne Ditlevsen, pour discuter de leurs résultats et des controverses qu’ils n’ont pas manqué de susciter.

Comment décririez-vous l’AMOC pour ceux qui n’en ont jamais entendu parler ?

Peter Ditlevsen : l’AMOC fait partie d’une sorte de tapis roulant presque mondial qui transporte les eaux autour de la planète.

Au sud du Groenland, dans l’Atlantique Nord, nous voyons des eaux lourdes descendre et des eaux légères remonter. L’eau peut être lourde pour deux raisons. Elle peut être salée. Si l’on ajoute du sel, l’eau devient plus lourde et coule. Elle peut aussi être froide. L’eau froide est plus lourde que l’eau chaude, elle coule donc et retourne dans la partie sud de l’Atlantique.


Le mégacourant océanique de l’AMOC reste très peu connu, que ce soit par le grand public ou même par les scientifiques, avec par exemple aucune surveillance directe de l’AMOC avant 2004. Comment cela se fait-il ?

PD : Le premier problème est que l’océan est beaucoup moins connu que l’atmosphère. Tout d’abord parce que nous faisons des prévisions météorologiques permettant d’indiquer le temps qu’il fera demain et après-demain et qui concentrent beaucoup d’effort. De plus, concernant la prévision météorologique océanique, si nous pouvons observer très précisément la surface de l’océan, il est beaucoup plus difficile de pénétrer dans l’océan, notamment parce que nous ne pouvons pas vraiment transmettre de signaux.

En ce qui concerne précisément l’AMOC, il y a aussi une question de moyens financiers. C’est difficile et coûteux de le surveiller, il faut beaucoup de ressources, et bien qu’il y ait des missions scientifiques où l’on descend et où l’on obtient une idée instantanée de la situation, ce dont on a vraiment besoin, c’est une surveillance à long terme. C’est ce qui a été fait plus tôt pour le Pacifique en raison d’El Nino. En ce sens, nous avons beaucoup plus de données concernant le Pacifique central et tropical que l’Atlantique.

Mais ce manque de données concernant l’AMOC ne correspond pas à un manque d’intérêt de la part des scientifiques. Dès les années 1960, l’océanographe et physicien américain Henry Stommel a étudié l’AMOC et a déclaré que ce mégacourant pouvait osciller entre deux états différents. Un phénomène que nous avons depuis observé en étudiant les carottes de glace du Groenland depuis l’époque glaciaire.

À la grande surprise de tous, il s’est alors avéré que le climat glaciaire, en plus d’être bien sûr très froid, présentait ces énormes sauts climatiques entre un état froid et un état plus chaud, et la raison de ce phénomène n’était pas connue jusqu’à très récemment.

Aujourd’hui, le consensus converge vers l’idée que c’est en fait l’activation et la désactivation de l’AMOC qui est à l’origine de ce phénomène. Il s’agit de changements climatiques considérables, qui se produisent tous les quelques milliers d’années.

Et lorsque cela se produit, c’est extrêmement rapide. Bien que le passage de l’état « inactif » à l’état « actif » soit plus dramatique que l’inverse, la possibilité d’un arrêt auquel nous sommes maintenant confrontés est également très préoccupante […] Il est question d’une chute brutale de jusqu’à dix degrés en une décennie. Mais bien sûr, il faut être prudent avec les analogies, car le climat glaciaire est très différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. De plus, aujourd’hui, nous sommes confrontés à un refroidissement de l’AMOC, avec en arrière-plan un réchauffement du climat. C’est un peu comme si nous conduisions une voiture et que nous appuyions en même temps sur la pédale de vitesse et sur la pédale de frein.


Votre étude a logiquement attiré l’attention des médias, qui ont parfois fait l’amalgame entre l’effondrement du Gulf Stream et l’effondrement de l’AMOC. Comment avez-vous vécu cela ?

Susanne Ditlevsen : Je pense qu’il y a deux aspects à cette question. D’une part, le grand public peut confondre le Gulf Stream et l’AMOC et, dans un certain sens, il s’agit d’une simple formulation. Il existe donc un courant qui fait remonter l’eau chaude et qui risque de s’effondrer. Que nous l’appelions AMOC ou système Gulf Stream, même si le Gulf Stream en lui-même est quelque chose de différent, cela n’a pas d’importance, ce n’est qu’une question de formulation.

Mais cette différence terminologique peut générer un malentendu très préjudiciable, car le Gulf Stream stricto sensu ne peut pas s’effondrer, puisqu’il est entraîné par le vent et la rotation de la Terre. Ainsi, lorsqu’on dit que nous avons prédit l’effondrement du Gulf Stream, ils peuvent être tentés de nous traiter d’idiots. […] Je pense qu’il est important d’expliquer que nous parlons en fait de quelque chose de différent, dont nous pensons, comme beaucoup d’autres, qu’il peut s’effondrer.

La temporalité que nous avons donnée, qui s’étend de 2025 à 2095, a également été déformée. La probabilité n’est pas du tout la même sur l’ensemble de l’intervalle. Nous estimons donc qu’il est très peu probable qu’un effondrement puisse se produire dès 2025.

Il est notoirement difficile d’estimer ce que nous appelons les « queues de distribution » dans le jargon statistique. Il s’agit des probabilités les plus faibles aux extrémités de la distribution. Cependant, l’estimation centrale, située au milieu du siècle, est celle où nous pensons que le risque d’effondrement est le plus élevé si nous continuons à émettre des gaz à effet de serre au rythme actuel.

Même si nos estimations sont incertaines, le message principal est qu’il existe un risque considérable, ou du moins sous-estimé, que cet effondrement se produise beaucoup plus tôt qu’on ne le pensait.

Supposons que l’AMOC s’effondre en 2057. Comment cela se traduirait-il concrètement en Europe ?

PD : D’un point de vue climatique, l’effondrement serait probablement très rapide, c’est-à-dire qu’il s’arrêterait en quelques décennies.

Mais ce n’est pas non plus comme si une ère glaciaire se produisait en deux semaines. La région de l’Atlantique Nord et l’Europe, en particulier, se refroidiraient considérablement. L’Angleterre ressemblerait probablement au nord du Canada.

La chaleur de l’océan Pacifique qui ne serait pas transportée vers l’Atlantique Nord resterait dans les tropiques.

SD : Ce qu’il faut garder à l’esprit ici, c’est que ce dont nous parlons est très incertain. La façon dont les températures varieraient reste très incertaine, certains parlent de cinq degrés, d’autres de dix degrés, d’autres encore de plus de tempêtes, etc. Mais je pense que le message à retenir c’est que les implications seraient dévastatrices en termes de capacité à continuer à vivre comme nous le faisons aujourd’hui, et à poursuivre l’agriculture dans différents endroits. Il y aurait aussi des endroits densément peuplés où l’on ne pourrait tout simplement pas vivre.

PD : Il faut également se rappeler que nous avons du mal à faire face à des changements rapides. Historiquement, nos sociétés ont fait face aux changements en débutant de grandes migrations. Or nous savons à quel point cela est difficile pour les sociétés.

Quelles étaient vos attentes lorsque vous avez lancé ce projet ? Aviez-vous prévu ces résultats spectaculaires ?

PD : Mon but initial était de donner plus de poids à l’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), grâce à une méthodologie solide et à des observations que j’avais prévu d’ajuster par la suite. Mais il s’est avéré que nos modèles ont situé l’effondrement beaucoup plus tôt que ceux du GIEC. Évidemment, j’aurais préféré que le résultat de notre étude soit moins controversé, car nous sommes aujourd’hui attaqués de toutes parts. Mais c’est ainsi que fonctionne la science, je suppose. Et c’est aussi la raison pour laquelle Susanne s’est beaucoup impliquée, parce que l’étude nécessitait des statistiques bien meilleures que celles dont je suis capable.

SD : Nous pensons également que cette menace d’effondrement est si préoccupante que si nous avons des données indiquant un effondrement plus précoce ou même considérablement plus précoce que ce que l’on croit généralement, nous devons le faire savoir. Mais cela ne signifie pas que nos résultats sont gravés dans le marbre. Bien entendu, ce n’est pas le cas. Parce que les données sont « bruyantes » et que nous disposons de mesures indirectes. Chaque année supplémentaire qui passe et qui est étudiée nous donne plus de données, et donc la capacité de réaliser de meilleures estimations.

Ceci étant dit, gardons quand même en tête que les changements climatiques ont d’énormes répercussions sur la Terre et des conséquences beaucoup plus importantes que ce qui avait été prévu. Il suffit de regarder les phénomènes météorologiques extrêmes que nous avons connus cet été et les nouveaux records de température. Tout cela se produit plus tôt et plus fort que ce qui avait été prévu.

La science du climat, en particulier le GIEC, a en effet tendance à faire des prévisions prudentes. Prenez, par exemple, la vitesse à laquelle les glaces de l’Arctique fondent par rapport à leur pronostic selon lequel elles ne risquent rien jusqu’en 2050 au moins.

SD : Il s’agit toujours de résultats conservateurs. Et dans ce sens, on pourrait dire que c’est l’une des raisons pour lesquelles je pense que cela donne un peu plus de crédibilité à notre étude parce que, bien sûr, nous ne voulions pas aller à l’encontre du GIEC, mais il s’est montré conservateur à bien des égards.

Comment la science peut-elle mieux comprendre les implications d’un point de basculement de l’AMOC ?

SD : Il est certain que nous avons besoin de plus de mesures de l’AMOC. Hélas, nous ne pouvons pas remonter dans le temps pour cela. Comme nous ne pouvons pas disposer de mesures très, très détaillées de l’époque préindustrielle, avant le réchauffement climatique, il est également difficile d’évaluer la variabilité naturelle et le comportement naturel avant le réchauffement climatique.

PD : D’une certaine manière, lorsque vous demandez ce qui est nécessaire, je dirais que c’est tout. C’est particulièrement vrai en ce qui concerne la modélisation. Je veux dire que ces modèles devraient au moins, dans un certain sens, reproduire ce que nous avons vu auparavant.

Certains chercheurs parviennent encore à recueillir des données passées en étudiant les sédiments. Cela ne pourrait-il pas être utile ?

PD : Oui, nous disposons d’énormes archives sédimentaires. Mais le problème est que dans le cas des échelles de temps que nous étudions, toute indication de points de basculement sera effacée. La résolution temporelle de ces enregistrements n’est tout simplement pas assez bonne.

Mais il serait évidemment incroyable que quelqu’un invente de nouveaux types de données paléo-climatiques. De temps en temps, on trouve des stalagmites et des stalactites qui semblent pouvoir être utilisées… Je pense qu’en fait ce dont nous avons vraiment besoin aujourd’hui, c’est que des jeunes chercheurs intelligents et ouverts d’esprit viennent nous rejoindre et essaient de nouvelles choses folles que les anciens pensaient impossibles.

Canicule et réchauffement de l’Atlantique

Canicule et réchauffement de l’Atlantique

par
Peter Ditlevsen
Professor in physics of ice, climate and earth, University of Copenhagen

Susanne Ditlevsen
Professor in statistics, University of Copenhagen

dans The Conversation

Fin juillet, une étude publiée dans Nature Communications a mis en garde contre le risque d’effondrement d’un système océanique essentiel qui fait remonter les eaux chaudes dans l’Atlantique Nord. Nommée le plus souvent par son abréviation anglaise d’AMOC, la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique était déjà connue comme étant ralentie de manière inégalée depuis 1600 ans.

Ces dernières recherches envisagent son possible effondrement entre 2025 et 2095, avec une estimation centrale de 2057 si une réduction drastique et rapide des émissions de gaz à effet de serre n’advient pas. Ce scénario, s’il s’avère exact, pourrait entraîner un climat européen dramatiquement froid avec des conséquences dévastatrices pour la vie telle que nous la connaissons. The Conversation s’est entretenu avec le physicien Peter Ditlevsen et sa sœur, la statisticienne Susanne Ditlevsen, pour discuter de leurs résultats et des controverses qu’ils n’ont pas manqué de susciter.

Comment décririez-vous l’AMOC pour ceux qui n’en ont jamais entendu parler ?

Peter Ditlevsen : l’AMOC fait partie d’une sorte de tapis roulant presque mondial qui transporte les eaux autour de la planète.

Au sud du Groenland, dans l’Atlantique Nord, nous voyons des eaux lourdes descendre et des eaux légères remonter. L’eau peut être lourde pour deux raisons. Elle peut être salée. Si l’on ajoute du sel, l’eau devient plus lourde et coule. Elle peut aussi être froide. L’eau froide est plus lourde que l’eau chaude, elle coule donc et retourne dans la partie sud de l’Atlantique.


Le mégacourant océanique de l’AMOC reste très peu connu, que ce soit par le grand public ou même par les scientifiques, avec par exemple aucune surveillance directe de l’AMOC avant 2004. Comment cela se fait-il ?

PD : Le premier problème est que l’océan est beaucoup moins connu que l’atmosphère. Tout d’abord parce que nous faisons des prévisions météorologiques permettant d’indiquer le temps qu’il fera demain et après-demain et qui concentrent beaucoup d’effort. De plus, concernant la prévision météorologique océanique, si nous pouvons observer très précisément la surface de l’océan, il est beaucoup plus difficile de pénétrer dans l’océan, notamment parce que nous ne pouvons pas vraiment transmettre de signaux.

En ce qui concerne précisément l’AMOC, il y a aussi une question de moyens financiers. C’est difficile et coûteux de le surveiller, il faut beaucoup de ressources, et bien qu’il y ait des missions scientifiques où l’on descend et où l’on obtient une idée instantanée de la situation, ce dont on a vraiment besoin, c’est une surveillance à long terme. C’est ce qui a été fait plus tôt pour le Pacifique en raison d’El Nino. En ce sens, nous avons beaucoup plus de données concernant le Pacifique central et tropical que l’Atlantique.

Mais ce manque de données concernant l’AMOC ne correspond pas à un manque d’intérêt de la part des scientifiques. Dès les années 1960, l’océanographe et physicien américain Henry Stommel a étudié l’AMOC et a déclaré que ce mégacourant pouvait osciller entre deux états différents. Un phénomène que nous avons depuis observé en étudiant les carottes de glace du Groenland depuis l’époque glaciaire.

À la grande surprise de tous, il s’est alors avéré que le climat glaciaire, en plus d’être bien sûr très froid, présentait ces énormes sauts climatiques entre un état froid et un état plus chaud, et la raison de ce phénomène n’était pas connue jusqu’à très récemment.

Aujourd’hui, le consensus converge vers l’idée que c’est en fait l’activation et la désactivation de l’AMOC qui est à l’origine de ce phénomène. Il s’agit de changements climatiques considérables, qui se produisent tous les quelques milliers d’années.

Et lorsque cela se produit, c’est extrêmement rapide. Bien que le passage de l’état « inactif » à l’état « actif » soit plus dramatique que l’inverse, la possibilité d’un arrêt auquel nous sommes maintenant confrontés est également très préoccupante […] Il est question d’une chute brutale de jusqu’à dix degrés en une décennie. Mais bien sûr, il faut être prudent avec les analogies, car le climat glaciaire est très différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. De plus, aujourd’hui, nous sommes confrontés à un refroidissement de l’AMOC, avec en arrière-plan un réchauffement du climat. C’est un peu comme si nous conduisions une voiture et que nous appuyions en même temps sur la pédale de vitesse et sur la pédale de frein.


Votre étude a logiquement attiré l’attention des médias, qui ont parfois fait l’amalgame entre l’effondrement du Gulf Stream et l’effondrement de l’AMOC. Comment avez-vous vécu cela ?

Susanne Ditlevsen : Je pense qu’il y a deux aspects à cette question. D’une part, le grand public peut confondre le Gulf Stream et l’AMOC et, dans un certain sens, il s’agit d’une simple formulation. Il existe donc un courant qui fait remonter l’eau chaude et qui risque de s’effondrer. Que nous l’appelions AMOC ou système Gulf Stream, même si le Gulf Stream en lui-même est quelque chose de différent, cela n’a pas d’importance, ce n’est qu’une question de formulation.

Mais cette différence terminologique peut générer un malentendu très préjudiciable, car le Gulf Stream stricto sensu ne peut pas s’effondrer, puisqu’il est entraîné par le vent et la rotation de la Terre. Ainsi, lorsqu’on dit que nous avons prédit l’effondrement du Gulf Stream, ils peuvent être tentés de nous traiter d’idiots. […] Je pense qu’il est important d’expliquer que nous parlons en fait de quelque chose de différent, dont nous pensons, comme beaucoup d’autres, qu’il peut s’effondrer.

La temporalité que nous avons donnée, qui s’étend de 2025 à 2095, a également été déformée. La probabilité n’est pas du tout la même sur l’ensemble de l’intervalle. Nous estimons donc qu’il est très peu probable qu’un effondrement puisse se produire dès 2025.

Il est notoirement difficile d’estimer ce que nous appelons les « queues de distribution » dans le jargon statistique. Il s’agit des probabilités les plus faibles aux extrémités de la distribution. Cependant, l’estimation centrale, située au milieu du siècle, est celle où nous pensons que le risque d’effondrement est le plus élevé si nous continuons à émettre des gaz à effet de serre au rythme actuel.

Même si nos estimations sont incertaines, le message principal est qu’il existe un risque considérable, ou du moins sous-estimé, que cet effondrement se produise beaucoup plus tôt qu’on ne le pensait.

Supposons que l’AMOC s’effondre en 2057. Comment cela se traduirait-il concrètement en Europe ?

PD : D’un point de vue climatique, l’effondrement serait probablement très rapide, c’est-à-dire qu’il s’arrêterait en quelques décennies.

Mais ce n’est pas non plus comme si une ère glaciaire se produisait en deux semaines. La région de l’Atlantique Nord et l’Europe, en particulier, se refroidiraient considérablement. L’Angleterre ressemblerait probablement au nord du Canada.

La chaleur de l’océan Pacifique qui ne serait pas transportée vers l’Atlantique Nord resterait dans les tropiques.

SD : Ce qu’il faut garder à l’esprit ici, c’est que ce dont nous parlons est très incertain. La façon dont les températures varieraient reste très incertaine, certains parlent de cinq degrés, d’autres de dix degrés, d’autres encore de plus de tempêtes, etc. Mais je pense que le message à retenir c’est que les implications seraient dévastatrices en termes de capacité à continuer à vivre comme nous le faisons aujourd’hui, et à poursuivre l’agriculture dans différents endroits. Il y aurait aussi des endroits densément peuplés où l’on ne pourrait tout simplement pas vivre.

PD : Il faut également se rappeler que nous avons du mal à faire face à des changements rapides. Historiquement, nos sociétés ont fait face aux changements en débutant de grandes migrations. Or nous savons à quel point cela est difficile pour les sociétés.

Quelles étaient vos attentes lorsque vous avez lancé ce projet ? Aviez-vous prévu ces résultats spectaculaires ?

PD : Mon but initial était de donner plus de poids à l’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), grâce à une méthodologie solide et à des observations que j’avais prévu d’ajuster par la suite. Mais il s’est avéré que nos modèles ont situé l’effondrement beaucoup plus tôt que ceux du GIEC. Évidemment, j’aurais préféré que le résultat de notre étude soit moins controversé, car nous sommes aujourd’hui attaqués de toutes parts. Mais c’est ainsi que fonctionne la science, je suppose. Et c’est aussi la raison pour laquelle Susanne s’est beaucoup impliquée, parce que l’étude nécessitait des statistiques bien meilleures que celles dont je suis capable.

SD : Nous pensons également que cette menace d’effondrement est si préoccupante que si nous avons des données indiquant un effondrement plus précoce ou même considérablement plus précoce que ce que l’on croit généralement, nous devons le faire savoir. Mais cela ne signifie pas que nos résultats sont gravés dans le marbre. Bien entendu, ce n’est pas le cas. Parce que les données sont « bruyantes » et que nous disposons de mesures indirectes. Chaque année supplémentaire qui passe et qui est étudiée nous donne plus de données, et donc la capacité de réaliser de meilleures estimations.

Ceci étant dit, gardons quand même en tête que les changements climatiques ont d’énormes répercussions sur la Terre et des conséquences beaucoup plus importantes que ce qui avait été prévu. Il suffit de regarder les phénomènes météorologiques extrêmes que nous avons connus cet été et les nouveaux records de température. Tout cela se produit plus tôt et plus fort que ce qui avait été prévu.

La science du climat, en particulier le GIEC, a en effet tendance à faire des prévisions prudentes. Prenez, par exemple, la vitesse à laquelle les glaces de l’Arctique fondent par rapport à leur pronostic selon lequel elles ne risquent rien jusqu’en 2050 au moins.

SD : Il s’agit toujours de résultats conservateurs. Et dans ce sens, on pourrait dire que c’est l’une des raisons pour lesquelles je pense que cela donne un peu plus de crédibilité à notre étude parce que, bien sûr, nous ne voulions pas aller à l’encontre du GIEC, mais il s’est montré conservateur à bien des égards.

Comment la science peut-elle mieux comprendre les implications d’un point de basculement de l’AMOC ?

SD : Il est certain que nous avons besoin de plus de mesures de l’AMOC. Hélas, nous ne pouvons pas remonter dans le temps pour cela. Comme nous ne pouvons pas disposer de mesures très, très détaillées de l’époque préindustrielle, avant le réchauffement climatique, il est également difficile d’évaluer la variabilité naturelle et le comportement naturel avant le réchauffement climatique.

PD : D’une certaine manière, lorsque vous demandez ce qui est nécessaire, je dirais que c’est tout. C’est particulièrement vrai en ce qui concerne la modélisation. Je veux dire que ces modèles devraient au moins, dans un certain sens, reproduire ce que nous avons vu auparavant.

Certains chercheurs parviennent encore à recueillir des données passées en étudiant les sédiments. Cela ne pourrait-il pas être utile ?

PD : Oui, nous disposons d’énormes archives sédimentaires. Mais le problème est que dans le cas des échelles de temps que nous étudions, toute indication de points de basculement sera effacée. La résolution temporelle de ces enregistrements n’est tout simplement pas assez bonne.

Mais il serait évidemment incroyable que quelqu’un invente de nouveaux types de données paléo-climatiques. De temps en temps, on trouve des stalagmites et des stalactites qui semblent pouvoir être utilisées… Je pense qu’en fait ce dont nous avons vraiment besoin aujourd’hui, c’est que des jeunes chercheurs intelligents et ouverts d’esprit viennent nous rejoindre et essaient de nouvelles choses folles que les anciens pensaient impossibles.

Record de chaleur aussi dans l’Atlantique

Record de chaleur aussi dans l’Atlantique

Record probable des températures dans l’Atlantique en juillet selon les prévisions de l’observatoire européen Copernicus et celles de Mercator Océan international, obtenues vendredi 28 juillet par l’AFP. Selon des données préliminaires communiquées le même jour par l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), qui utilise un autre système de mesure, ce record a même déjà été battu. »Selon notre analyse, le record (…) est de 24,9°C, et a été observé le 26 juillet », a déclaré à l’AFP Xungang Yin, scientifique aux Centres nationaux pour l’information environnementale (NCEI) de l’agence américaine.

L’Atlantique Nord est devenu un point d’observation emblématique de la surchauffe des océans, sous l’effet de hausse des températures mondiales causées par les activités humaines. Selon Xungang Yin, la température de surface de l’Atlantique Nord « doit continuer à augmenter au cours du mois d’août », a-t-il prévenu, et il est donc attendu que le record annoncé vendredi par la NOAA soit de nouveau battu. La température de 24,9°C est « plus d’un degré plus chaud » que la normale pour cette période de l’année, une moyenne calculée sur 30 ans (entre 1982 et 2011), a-t-il souligné. Au niveau planétaire, la température moyenne des océans bat des records de saisons constamment depuis début avril, sous l’effet du réchauffement climatique.

La hausse de la température de l’eau, même de quelques degrés seulement, peut perturber l’équilibre délicat des écosystèmes marins et avoir des effets en cascade sur la biodiversité.

Environnement: le honteux sabordage du « Foch » dans l’Atlantique

Environnement: le honteux sabordage du « Foch » dans l’Atlantique

Le sabordage de ce «colis toxique de 30.000 tonnes» est un véritable «crime contre l’environnement».

Le gigantesque navire contenait en effet beaucoup de matières toxiques et notamment «9,6 tonnes d’amiante, une substance au potentiel toxique et cancérigène, ainsi que 644 tonnes de peinture et d’autres matières dangereuses», avait alerté le ministère fédéral du Brésil qui a multiplié les recours pour tenter d’arrêter l’opération, en vain.

«Il y a 17km de tuyauterie calorifugée avec de l’amiante et une dizaine de kilomètres de gaines en PCB», détaille pour Le Figaro l’association Robin des Bois qui se base sur l’inventaire réalisé sur le Clemenceau, le sistership du Foch, lors de son démantèlement au Royaume-Uni. «On parle aussi d’hectares d’enduits, de vernis, de peinture au plomb, etc.».

. «Plus le temps va passer, plus l’épave va se décomposer, avec tous ses produits toxiques qui vont se décomposer», indique l’association Robin des Bois. «Les matériaux ainsi désagrégés en poussières et en écailles vont devenir disponibles pour les poissons et les mammifères marins, et quantité de résidus vont également s’agréger au plancton et contaminer un nombre incalculable de ressources marines».

Plus les épaves vieillissent, plus elles se fragilisent et peuvent être potentiellement polluantes. «La décomposition est plus lente à une grande profondeur car la température de l’eau est plus basse, il y a moins d’oxygène et moins de lumière», explique aussi le plongeur et explorateur Alexis Rosenfeld. Pour lui, il aurait été plus vertueux et pragmatique de d’abord dépolluer la structure dans un chantier, puis de créer une «capsule temporelle» en eau peu profonde qui aurait fait le bonheur des plongeurs.

Chantiers de l’Atlantique-Fincantieri: projet inutile au départ et encore davantage aujourd’hui

  • Chantiers de l’Atlantique-Fincantieri: projet inutile au départ et encore davantage aujourd’hui
  • Le projet d’absorption de chantier de l’Atlantique par l’italien Fincantieri  au départ inutile l’est encore davantage aujourd’hui compte tenu de l’environnement conjoncturel. En effet ,pendant plusieurs années la demande de croisières va être affectée par la situation sanitaire même si les investissements dans ce domaine ne se décident pas du jour au lendemain et s’inscrivent dans le temps.
  • Il n’y avait aucune nécessité d’envisager ce regroupement à moins de donner des gages politiques à l’Italie pour permettre à d’autres opérateurs français de prendre des participations voire d’absorber certaines entreprises italiennes. Les chantiers de l’Atlantique disposent  de deux atouts actes assez considérables d’abord des atouts  technologiques indiscutables et une bonne productivité. Enfin le carnet de commandes des chantiers de l’Atlantique était bien garni et permettait d’espérer une bonne activité et un maintien de l’emploi.
  • Il paraît évident que la crise sanitaire va affecter pendant assez longtemps le secteur du tourisme de loisirs par bateau de croisière. Il faudra en effet des années pour que le virus disparaisse complètement notamment dans les pays un peu exotiques visités par les bateaux de croisière. Aujourd’hui ni la France ni même l’Italie insiste beaucoup sur ce projet qui risque de s’enterrer de lui-même.

Chantiers de l’Atlantique : non à Fincantieri !

Chantiers de l’Atlantique : non à Fincantieri !

Des syndicats et des personnalités contestent le projet de rachat des chantiers de l’Atlantique par l’Italien Fincantieri par ailleurs dans une alliance avec les Chinois de CSCC .

 

On insiste sur le fait que les chantiers de l’Atlantique ne connaissent pas de difficultés financières, dispose d’un solide carnet de commandes et surtout d’une technologie précieuse. Le risque c’est évidemment que les chantiers de l’Atlantique soient pillés et un jour abandonnés.

 

Le syndicat se dit notamment « en désaccord avec le contrat […] de transfert de technologie avec le chantier chinois CSCC ». Dans ce contexte, le report accordé par le gouvernement fait encore grimper d’un cran la lassitude des salariés des chantiers. « C’est un feuilleton qui ne va jamais se finir à ce rythme-là », tempête Nathalie Durant-Prinborgne. « Ça va faire trois ans que ça dure. Il est temps, pour les salariés, les sous-traitants et nos clients, que cette histoire prenne fin une bonne fois pour toutes. »

Selon Nathalie Durant-Prinborgne, en creux se dessine l’étiolement de l’activité des chantiers. « Nous avons peur de nous retrouver à ne faire que du paquebot. Et ça, nous savons que ce n’est plus possible pour un chantier comme le nôtre. » La déléguée syndicale anticipe l’absorption totale des chantiers de l’Atlantique par un de ses concurrents directs. « Nous voyons comment ça se passe quand il y a un rapprochement entre deux concurrents. Généralement il y en a toujours un qui écrase l’autre complètement », regrette-t-elle.

Chantiers de l’Atlantique : retour à la case départ ?

Chantiers de l’Atlantique : retour à la case départ ?

 

On sait que beaucoup contestent la perspective d’un rachat des chantiers de l’Atlantique par l’Italien Fincantieri . Pourtant cette opération était approuvée autant par les autorités politiques italiennes que françaises officiellement pour créer un grand opérateur européen.

Le problème c’est que cette fusion ne peut se produire sans l’accord des autorités européennes qui pour l’instant ne semblent pas favorables au regroupement. Notons que les chantiers de l’Atlantique n’étaient nullement déficitaires, qu’ils possédaient un solide carnet de commandes et surtout un savoir-faire technologique précieux.

L’accord des autorités françaises pour cette opération pourrait constituer une sorte de compensation vis à vis  prises de participation de plus en plus nombreuses des Français en Italie dans la banque et les télécoms par exemple.

L’opération en effet n’a toujours pas obtenu le feu vert de la Commission européenne qui redoute une réduction de la concurrence sur le marché mondial.

L’exécutif européen a dit au mois de juin avoir besoin de temps pour examiner l’opération qui se heurte parallèlement à l’hostilité d’une partie de la classe politique locale préoccupée par le risque de pertes d’emplois et par celui des transferts de technologie vers la Chine.

Le contexte est également défavorable, la demande pour les paquebots de croisière étant pénalisée par une crise sanitaire qui a asséché les finances des grands croisiéristes.

Basés à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), les Chantiers de l’Atlantique, ex-STX France, sont les seuls chantiers navals français capables de produire des navires de fort tonnage, comme des porte-avions et d’autres bâtiments militaires, ce qui en fait en plus un actif national stratégique.

Regroupement Chantiers de l’Atlantique – Fincantieri

Regroupement Chantiers de l’Atlantique – Fincantieri: doute de la commission!

La commission européenne demande beaucoup plus de temps examiner les conditions de l’éventuel regroupement entre les chantiers de l’Atlantique et l’italien Fincantieri La Commission européenne a suspendu ses examens le 13 mars dernier le temps que les deux sociétés lui adressent les documents qu’elle leur a réclamés.

Margrethe Vestager a expliqué lundi que les fonctionnaires chargés de ces examens éprouvaient “des difficultés à jauger les répercussions éventuelles de ce projet et ce qu’il impliquerait pour le marché.”

“Je pense donc qu’il faudra du temps”, a-t-elle ajouté. Fincantieri, qui met en avant la nécessité de faire face à la concurrence des chantiers navals asiatiques, veut acquérir auprès de l’Etat français 50% des parts des Chantiers de l’Atlantique. La grande question qui est posée est de savoir si la société italienne sera respectueuse des engagements concernant en particulier l’emploi, la recherche, la gestion et la propriété intellectuelle. Certains se posent en effet la question de savoir si l’objectif final du constructeur italien n’est pas simplement de récupérer le savoir-faire et la clientèle importante des chantiers de l’Atlantique dont la gestion est très satisfaisante.

En vertu d’un accord conclu en septembre 2017, la France a parallèlement accepté de prêter 1% des parts au groupe italien pour lui permettre de prendre le contrôle opérationnel de la compagnie sous condition d’engagements concernant l’emploi, la gouvernance et la propriété intellectuelle.

Basés à Saint-Nazaire, les Chantiers de l’Atlantique, ex-STX France, sont les seuls chantiers navals français capables de produire des navires de fort tonnage, comme des porte-avions et d’autres bâtiments militaires, ce qui en fait un actif national stratégique.

Chantiers de l’Atlantique – Fincantieri : encore un dossier bloqué

Chantiers de l’Atlantique – Fincantieri : encore un dossier bloqué

 

On se souvient que la commission européenne avait déjà bloqué de manière totalement irresponsable le regroupement d’Alstom et de Siemens dans la construction ferroviaire au motif que cela constituerait une entorse à la concurrence. Une erreur évidemment fondamentale car la concurrence vient surtout dans ce domaine de la Chine qui domine le marché. La même erreur risque de se reproduire avec l’opposition de la commission européenne au regroupement dans la construction navale des chantiers de l’Atlantique à Saint-Nazaire par l’italien.  Là encore, il s’agit d’une erreur stratégique monumentale car la concurrence dans ce domaine vient aussi d’Asie et surtout de la Corée. Le regroupement pourrait se faire mais aux conditions de la commission européenne si Fincantieri abandonne nombre de ses activités et procède à des transferts de technologie à la concurrence.

 

Finalement, on peut s’interroger sur les incohérences de la commission européenne. Certes en France on a fort légitimement discuté de l’opportunité de ce regroupement justement parce que cela opérait  un transfert de technologie vers l’italien en même temps qu’un transfert de portefeuille commercial. À la clé, le regroupement aurait été susceptible de supprimer des effectifs en France aussi une part de savoir-faire. Reste qu’on ne peut pas être d’accord sur des regroupements quand ils avantagent la France est en désaccord dans le cas contraire. De toute manière qu’il s’agisse de la construction ferroviaire ou de la construction navale des regroupements sont nécessaires pour faire face à la concurrence internationale notamment asiatique.




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