L’entreprenariat, la clé des conditions de travail ?
Une contribution qui mérite d’être lue mais qui constitue un plaidoyer en faveur de l’entreprenariat comme solution aux conditions de travail. Même qu’il ne faut pas rejeter tous les arguments force aussi est de constater que les grandes plates-formes favorisent le développement d’un entreprenariat de sous-traitance dont les conditions de travail- voire la rémunération- est pire que dans le monde du travail classique NDLR
Selon une récente étude de l’Institut Montaigne [1], ce sont les actifs les plus satisfaits de leur travail qui souhaitent le report de l’âge de départ légal à la retraite. Les Français ne veulent pas travailler plus longtemps dans des activités qu’ils considèrent pénibles. Or, plus de six actifs sur dix considèrent que leur métier est « pénible » [2]. Lorsqu’ils atteignent la retraite, nombre d’entre eux n’auraient plus aucun goût pour leur travail depuis plusieurs années. La clef ne serait-elle pas de trouver des modes de travail qui réduisent la pénibilité, tout en favorisant la réalisation de soi ?
La notion de pénibilité évoquée dans le débat sur les retraites ne comprend pas uniquement les facteurs de risques professionnels liés à des contraintes physiques ou environnementales marquées. Elle sous-tend également le désintérêt et la perte de sens au travail que connaissent les salariés depuis quelques années, durant lesquelles le bore-out s’est installé comme maladie professionnelle aux côtés du burn-out. C’est donc bien cette question du sens qu’il faut poser et une réflexion sur des alternatives pour travailler mieux qu’il faut mener, si nous voulons faire face aux enjeux posés par l’allongement de la durée de vie de la population française [3].
Pour nos jeunes générations, cette question du sens et de l’utilité des missions du quotidien est au cœur de leurs choix professionnels [4]. Tout comme faire évoluer nos comportements de consommation vers des modes plus raisonnables et responsables, la quête de sens professionnel implique de sortir de sa zone de confort, de prendre des risques afin de trouver ce qui est une alternative durable, dans laquelle la réalisation de soi prend le pas sur la pénibilité.
Miser sur les TPE/PME doit faire partie de la solution. Clé de voûte de notre économie locale, elles sont les plus à même de mettre en place ou de poursuivre une stratégie d’impact territorial positif au niveau social, environnemental et économique. Implantées localement, elles connaissent les besoins des populations du territoire, peuvent répondre aux attentes des Français qui cherchent à travaillerlà où ils vivent, développer leur sphère d’influence auprès de partenaires locaux et donc créer un écosystème créateur de valeur au niveau territorial. Nous y trouverons des solutions bénéfiques pour notre économie tout en recréant du lien social et une réponse à cette quête de sens que poursuivent les salariés.
Face aux crises actuelles d’énergie et d’approvisionnement, les pouvoirs publics doivent plus que jamais soutenir les TPE/PME et microentreprises, pour qu’elles puissent maintenir leur activité, créer des emplois locaux et accélérer leur transition environnementale et numérique.
« Les carrières sont aujourd’hui plus fragmentées et l’autonomie comme l’indépendance sont bien plus prisées qu’auparavant »
Redonnons une place de choix aux senior.
Repenser nos modes de travail et travailler mieux, c’est également replacer les seniors au centre de nos organisations. Leur expérience et leurs connaissances doivent être valorisées et combinées aux compétences des jeunes actifs.
De plus, on estime à près de 90 000 le nombre de seniors qui se lancent chaque année dans la création d’entreprise en France, créant ainsi un cinquième des nouvelles entreprises [5]. Ils font davantage ce choix par souci d’épanouissement personnel et de valorisation du capital humain, social et financier accumulé durant leur vie, plutôt que par « nécessité ». C’est ce que confirment ces chiffres : la part de seniors au chômage depuis un an ou au chômage de longue durée lorsqu’ils se lancent dans la création d’entreprise est inférieure à 30 % du total, et 59 % d’entre eux déclarant que le secteur d’activité de l’entreprise créée est identique à celui du métier exercé précédemment [5].
Développons des circuits d’accompagnement efficaces pour les seniors qui créent leur entreprise : c’est une source de reconnaissance et d’épanouissement personnel très forte, qui remet en cause la question de la pénibilité susceptible de repousser l’âge de départ à la retraite. Et cela aura sans aucun doute possible en plus, un effet positif sur la croissance, l’emploi, le pouvoir d’achat, l’innovation et le lien social du pays.
Selon une étude de l’Institut Montaigne, les indépendants sont en moyenne plus satisfaits que les salariés du public ou du privé [6]. Les plus en phase avec leur profession sont en général chefs d’entreprise, artisans ou professions libérales. Orientons donc nos efforts vers ces professions qui ne riment pas avec pénibilité.
Enfin,le numérique a bouleversé nos modes de travail et il faut en tirer parti. Les carrières sont aujourd’hui plus fragmentées et l’autonomie comme l’indépendance sont bien plus prisées qu’auparavant. Le développement du télétravail et de l’autoentrepreneuriat a ouvert de nouvelles possibilités et suscité de nouvelles attentes : choisir son lieu de vie avant son lieu de travail, renforcer la flexibilité sur son temps de travail, retrouver un équilibre avec sa vie personnelle, changer d’activité plus facilement ou encore cumuler plusieurs emplois… Il faut prendre en compte ces changements de paradigme.
Développons ces nouveaux modes de travail au sein des entreprises et encourageons plus largement l’entrepreneuriat dès le plus jeune âge.
Edouard Dumortier est cofondateur d’AlloVoisins.