La société française du vieillissement
La France fait face à un vieillissement démographique qui bouleverse son économie. Marc Fiorentino dans La Tribune explore les conséquences de cette transition, entre croissance stagnante et défis financiers.
Les chiffres publiés par l’Institut national d’études démographiques sont édifiants. Et ils ont un impact sur l’économie française et sur votre argent. Le constat est sans appel : la transition démographique est en marche. Un changement majeur de plus après les transitions écologique et militaire.
La France n’est plus une exception démographique. Le taux de fécondité, qui a longuement résisté, chute de façon spectaculaire. Le renouvellement de la population n’est plus assuré. Avec un taux de 1,62 en 2024, nous restons en tête du peloton des pays développés alors que la Corée du Sud est à 0,60, le Japon et l’Allemagne respectivement à 1,38 et à 1,35 et l’Italie et l’Espagne autour de 1,20. Mais la situation se dégrade rapidement.
Notre solde naturel, différence entre le nombre de naissances et de décès, n’est plus que de 17 000. Il était encore de 140 000 en 2019. Mais il sera négatif d’ici à 2030. Et la population française baissera d’ici une vingtaine d’années alors que celle d’à peu près tous les pays développés a déjà commencé à chuter : l’immigration, sujet ô combien sensible, explique notre relative résilience.
L’exemple japonais nous offre la chance de pouvoir nous projeter pour analyser les conséquences de cette transition démographique. Le Japon est confronté depuis près de trente ans au vieillissement de sa population et à l’effondrement des naissances. Trois décennies durant lesquelles le Japon n’a cessé de se battre contre la déflation et une croissance économique proche de zéro.
Pour compenser les effets de la démographie, le pays a multiplié des plans de relance qui ont propulsé sa dette au-dessus de 200 % du PIB. Heureusement pour le Japon, la dette est détenue par ses habitants, ce qui a permis de maintenir des taux de financement à des niveaux anormalement bas.
Ce ne sera pas notre cas. Un pays sans enfants et peuplé de seniors est un pays à croissance molle ou nulle ; où la charge des retraites et le poids des dépenses sociales explosent ; où le déficit et la dette ne peuvent que déraper.
Un pays sans enfants et peuplé de seniors est un pays à croissance molle ou nulle.
Et contrairement à ceux des autres « transitions », les effets de ce changement sont prévisibles. Et inéluctables. Les incitations au « réarmement démographique », une expression chère à notre président, ont échoué partout dans le monde. Il faut donc agir au plus vite.
Mais revenons à votre argent. Ce contexte favorisera les entreprises de services aux personnes âgées, secteur en pleine mutation après la tourmente qui a touché celui des maisons de retraite. Il favorisera aussi les placements de taux d’intérêt du fait du poids de la déflation et de la baisse des taux, malgré la hausse de la dette. Mais il pèsera sur la croissance et donc sur les résultats des entreprises.
Nous avons toutes les données en main pour nous adapter à cette nouvelle révolution. L’ère du baby-boom est terminée. Voici venue l’heure du vieillissement. Vieillissement de la population, vieillissement de l’économie et… vieillissement de vos placements. Après le vert de l’écologie, le kaki du militaire, l’heure du gris a sonné.