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La France est-elle de droite ? ( Vincent Tiberj)

La France est-elle de droite ? ( Vincent Tiberj)

Franceinfo a interrogé le chercheur Vincent Tiberj  qui vient de publier l’ouvrage « La droitisation française, mythe et réalités : comment citoyens et électeurs divergent ».Ce professeur des universités et chercheur au Centre Emile-Durkheim estime dans son dernier ouvrage, La droitisation française, mythe et réalités : comment citoyens et électeurs divergent (PUF, 2024), que l’idée d’une France penchant à droite constitue à la fois « une réalité, par en haut » et « un mythe, par en bas ». Le chercheur a analysé un grand nombre d’enquêtes d’opinion sur la durée pour développer cette thèse qu’il qualifie lui-même de « contre-intuitive ».

 Aux dernières élections législatives, deux tiers des voix sont allées au centre droit, à la droite et à l’extrême droite. Cela ne montre-t-il pas que la France est de droite ?

Vincent Tiberj : Les électeurs et les citoyens ne peuvent plus être considérés comme des synonymes. Lorsque vous aviez des niveaux de participation extrêmement forts, comme au début de la Ve République, vous pouviez estimer que les « absents avaient tort ». C’était une abstention sociologique, qui montrait la mauvaise intégration des individus. Mais depuis, on a une abstention qui a changé de nature.

Il y a un abstentionnisme de rupture, de rejet de l’ensemble du spectre, particulièrement visible parmi les catégories populaires. Les anciens ouvriers du baby-boom continuent à voter, mais ça décroche dans les générations d’après. Il y a une vraie cassure. Ce ne sont pas des « sans opinion », mais il y a une vraie démission à l’endroit de la scène électorale. Et il y a un troisième type d’abstention, que l’on trouve surtout parmi les diplômés du supérieur. Là, voter ne suffit plus. C’est une mise à distance du vote comme moyen de s’exprimer. Par contre, ces catégories participent à travers des associations, des pétitions, des manifestations.

On se retrouve dans une situation où il reste des citoyens-électeurs accrochés, mais ceux-ci ne sont plus représentatifs. Par ailleurs, on les trouve plutôt chez les baby-boomers, et notamment parmi les plus riches, les classes moyennes. Du coup, en matière de valeurs, le barycentre de ces générations est plus conservateur.

On est aussi dans un monde où 40 à 50% des répondants ne se sentent proches d’aucun parti. Il faut très clairement comprendre qu’un vote, ce n’est plus un blanc-seing. Quand vous avez presque 50% des ouvriers qui ne sont pas allés voter aux législatives, vous ne pouvez pas vous proclamer comme le parti des ouvriers, même quand vous avez une majorité parmi les voix exprimées. Les partis qui souffrent le plus de cette « grande démission » sont les formations de gauche.

Donc la France qui vote est de droite ?

Il y a un autre point à avoir en tête : l’élection est une question, c’est vieux comme la science politique. L’élection ne sera pas la même, selon les sujets qu’on met en avant. Si vous parlez d’immigration dans la campagne, vous n’aurez pas les mêmes réponses que si vous parlez de la réforme des retraites, du modèle social. Chaque élection se déroule sur un terrain et quand vous êtes un parti, vous avez tout intérêt à jouer à domicile. Quand vous êtes le Rassemblement national, vous avez envie qu’on parle d’immigration, de sécurité, et à votre manière.

Lors des législatives, au premier tour, les gens ont voté par rapport aux questions d’immigration, d’insécurité, mais aussi sur la politique économique du gouvernement. Et au second tour, cette fois-ci, c’était pour ou contre le RN, sur la question du libéralisme culturel. Je pense que le vote RN est minoritaire en France, ce qu’ont prouvé les législatives. En revanche, il y a chez les gens qui votent RN une vraie adhésion, un nombre considérable de gens qui considèrent que c’est la solution. Et avec la droitisation par le haut, le vote RN est devenu acceptable. Il y a eu tout un travail politique, médiatique, de normalisation du RN auprès d’électeurs conservateurs.

Qu’appelez-vous « la droitisation par le haut » ? 

Qu’est-ce qui compte dans notre discussion publique ? Ce n’est pas nécessairement ce qui se passe dans les sondages ou les sciences sociales, mais ce qu’en disent les responsables politiques et les commentateurs des plateaux télé. Je pense qu’il y a plusieurs phénomènes qui se conjuguent pour aboutir à ce que je nomme le « conservatisme d’atmosphère ». Il s’agit d’abord de penser que le pays est naturellement à droite, qu’il demande un contrôle de l’immigration, une demande de sécurité, moins d’impôts, alors que dans le même temps on veut plus de policiers et des hôpitaux qui fonctionnent.

On cherche à imposer une manière de voir la société. Les tenants de cette théorie sont aussi ceux qui peuvent en bénéficier, par exemple Les Républicains (LR). Quand vous êtes un parti en perte de vitesse, vous avez tout intérêt à faire croire que vous êtes au centre du jeu politique. Cela se fait au nom des citoyens, mais sans vraiment les prendre en compte. Il y a depuis très longtemps en politique ce hiatus, cet appel au « pays réel ».

On entend beaucoup « les Français pensent que », mais c’est étonnant comme les Français sont différents d’un commentateur à un autre. Il y a aussi des changements structurels dans ce qui constitue le débat public aujourd’hui. On se retrouve dans une situation d’éclatement des moyens de s’informer, avec la montée en puissance des chaînes de la TNT et des réseaux sociaux. Cela multiplie l’offre médiatique. Quand tout le monde était obligé de regarder TF1 et France 2, on était confronté à une information pluraliste. Même Olivier Besancenot passait sur TF1. On pouvait se confronter à de l’information politique dissonante. C’est de moins en moins le cas.

Les bulles de filtres existaient avant, mais il y a une forme d’amplification, ça touche de plus en plus de monde. Certains individus vont être confrontés à une seule partie de l’histoire. Et c’est là qu’on a une différence entre France Inter d’un côté et CNews de l’autre. Le public de France Inter est tout aussi typé politiquement que celui de CNews, mais la radio n’a jamais été condamnée par l’Arcom pour manquement au pluralisme. Il y a une volonté sur France Inter d’essayer de maintenir une forme de pluralité des points de vue, des invités. Ce que CNews ne fait pas, ce que Cyril Hanouna n’a pas fait lors de ses quinze jours d’émission sur Europe 1 avant les élections législatives.

Si, selon vous, la droitisation de la France est « une réalité, par en haut », pourquoi serait-elle « un mythe, par en bas » ?

L’un des moyens les moins biaisés de connaître la société, ce sont les sondages d’opinion, les enquêtes sociologiques. Le sondage essaye de recréer une société en miniature (avec des jeunes, des vieux, des riches, des pauvres, etc.) pour avoir un échantillon à peu près cohérent. Quand on commence à analyser ces enquêtes sur le temps long – car pour parler de droitisation, il faut un avant et un après – les choses sont beaucoup plus compliquées. Sur certaines questions de société, on a progressé : sur l’acceptation de l’homosexualité, de la diversité culturelle, la place des femmes dans la société.

Il y a aussi les questions qui ont longtemps fondé le clivage gauche-droite : la redistribution, le rôle de l’Etat dans l’économie, le modèle social. Cette dimension n’a clairement pas disparu. Nous ne sommes pas aujourd’hui sur un moment de très haute demande de redistribution, comme en 2011 ou à la fin des années 1970, mais cela reste présent chez les ouvriers, les employés. Très clairement, les plus pauvres en France ont d’abord des demandes économiques, de protection, de solidarité.

Que signifie être de droite en France, en 2024 ?

Quand je raconte les évolutions d’opinion, on me répond régulièrement : « Mais la droite est attachée à la liberté des individus, à leur épanouissement. » Effectivement, vous avez certains acteurs qui sont sur cette logique-là. Notre modèle social a été construit à la fois par la gauche et par la droite gaulliste. On pourrait donc se demander si je n’ai pas une vision caricaturale. La gauche a évolué sur un certain nombre de positions, surtout socio-économiques. La droite a évolué, par exemple, sur la question des droits des homosexuels. Rappelons-nous où était l’UMP [l'ancien nom de LR] au moment du débat sur le mariage pour tous, clairement pas du côté de la défense des droits. Donc effectivement, la gauche et la droite, ça bouge.

Mais quand on regarde les logiques de vote, qu’on essaye d’analyser qui vote pour François Fillon, Valérie Pécresse ou LR en général, on observe un vote favorable au libéralisme économique et plutôt conservateur sur les questions sociétales. Cela va être différent pour Marine Le Pen, qui attire d’abord des gens sur la question de l’immigration, mais avec un vote beaucoup plus divers sur les questions socio-économiques : à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), on demande de la protection ; à Fréjus (Var), on demande avant tout moins d’Etat et plus de policiers. Pour le macronisme électoral, ce sont des libéraux libertaires, des gens très favorables au libéralisme économique, mais plutôt ouverts sur les questions de diversité, de droits individuels, de libéralisme culturel…….

 

 

Trump:  » je déteste la popstar Taylor Swift  » !

Trump:  » je déteste la popstar Taylor Swift  » !

 

 «JE DÉTESTE TAYLOR SWIFT!», a écrit en lettres majuscules sur son réseau Truth Social l’ancien président, candidat au scrutin du 5 novembre. Une réaction évidemment au soutien affiché de la chanteuse à Kamala Harris.

Trump avaient laissé entendre quil pouvait compter sur le soutien de la vedette mais cette dernière a mis les choses au point. Après le débat télévisé entre Donald Trump et Kamala Harris le 10 septembre, la star de la pop de 34 ans avait officialisé sur Instagram son soutien à la candidate démocrate, «une dirigeante douée et solide» qui «se bat pour les causes et les droits auxquels je crois».

Taylor Swift avait alors incité les «plus de 18 ans» à s’enregistrer «pour voter». D’après la presse américaine, citant le site gouvernemental Vote.com, ce soutien très attendu a aussitôt déclenché la visite sur le site de plus de 400.000 personnes cherchant des informations pour s’inscrire sur les listes électorales, un processus complexe dans certains États américains.

La retraite à 70 ans pour les fonctionnaires en Italie ?

La retraite à 70 ans pour les fonctionnaires  en Italie ?

 

La mesure est envisagée par la première ministre Italienne  basée sur le volontariat, pourrait être incluse dans le plan budgétaire en cours de discussion de l’autre côté des Alpes. Mais celle-ci est fustigée par les syndicats.

Giorgia Meloni réfléchit désormais à le retarder, pour les fonctionnaires… à 70 ans.

Dans un entretien cette semaine au journal Corriere della Serra , le ministre italien de la Fonction publique, Giovanni Zangrillo, a en effet affirmé avoir discuté avec le ministre de l’Économie Giancarlo Giorgetti de la «possibilité d’un maintien en activité jusqu’à 70 ans». «Sur la base du volontariat», a-t-il néanmoins précisé.

Pour les fonctionnaires italiens volontaires, ils passeraient ces années supplémentaires à réaliser des activités de tutorat et de coaching, ou bien à remplir des besoins qui ne pourraient pas être satisfaits autrement, selon le rapport technique du projet, qui concernerait les administrations jugeant stratégique de conserver l’expérience de certains salariés.

Football et société: La folie du foot fric

Football et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champions internationaux dans des disciplines considérées comme marginales. Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société. Mais c’est aussi parfois un moment d’union nationale qui fait oublier le reste. À condition toutefois que les excès ne fasse pas tomber les clubs français en particulier dans la faillite. NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
….la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Le retour de la crise agricole

Le retour de la crise agricole

 

Le malaise agricole n’avait pas disparu mais il était moins présent dans les médias. En fait, il s’est aggravé notamment avec des récoltes assez catastrophiques en France ( mais bien meilleures  dans d’autres pays concurrents en raison de la météo). Lors du conflit agricole récent nombre de revendications était apparues  en particulier la question de la rentabilité de l’activité. Peu de problèmes ont avancé sauf les problèmes de trésorerie et les questions de contrôle des normes. Pour le reste peu ou pratiquement pas de progrès. La question agricole a été noyée dans la vague de difficultés plus globales sur le plan social et économique. Notons aussi que le secteur souffre d’une grande division syndicale qui ne favorise pas les solutions crédibles.

La Fnsea et Jeunes Agriculteurs suggèrent notamment une intégration obligatoire, dans les contrats entre producteurs et transformateurs, des indicateurs des coûts de production des premiers calculés par les interprofessions ou les instituts techniques, et préconisent qu’« un poids majoritaire » leur soit accordé dans la détermination du prix de vente. Une proposition beaucoup plus sérieuse que les tarifs obligatoires.
La crise agricole est aiguisée par un été catastrophique, qui a exaspéré les éleveurs comme les céréaliers. Les premiers sont confrontés à une triple flambée de maladies vétérinaires en France : la fièvre catarrhale ovine (FCO) de sérotype 3 dans le nord du pays, la FCO 8 dans le sud et la maladie hémorragique épizootique (MHE) dans le sud-ouest. Les deuxièmes craignent la pire récolte de blé tendre sur le sol français depuis 1983, selon les plus récentes estimations du cabinet Argus Media : 27% moins que la moyenne des cinq dernières années.
Or, les réponses apportées par le gouvernement démissionnaire aux difficultés des éleveurs sont jugées insuffisantes et les réformes législatives et réglementaires du secteur en cours avant la dissolution de l’Assemblée nationale (le 9 juin dernier), leur sort reste suspendu à l’inconnue des orientations du prochain gouvernement, dans un contexte, de surcroît, de restrictions budgétaires.

 

Tunisie: La démocratie en prison

Tunisie: La démocratie en prison

 

On ne fait pas dans la dentelle dans les pays qui ont du mal avec la démocratie. Récemment,  c’était vrai au Venezuela le vrai vainqueur est menacé de prison. Même chose aussi en Tunisie où l’un des candidats à l’élection du 6 octobre a également été placé en détention provisoire. Le problème c’est que le modèle russe illibéral semble faire école dans certains pays qui voient maintenant des vertus dans des formes de dictatures.

 

Le candidat à l’élection présidentielle du 6 octobre en Tunisie, Ayachi Zammel, a été placé en détention provisoire mercredi, dans le cadre d’une enquête pour des soupçons de «falsification de parrainages», ont annoncé ses avocats. Cette décision intervient aprèsl’exclusion de la course de trois autres candidats, considérés comme des rivaux sérieux du président sortant, Kais Saied – en lice pour un second mandat – par l’Autorité électorale (Isie) en début de semaine.

Le président Saied, élu démocratiquement en 2019, est accusé de dérive autoritaire depuis un coup de force le 25 juillet 2021 par lequel il s’est octroyé les pleins pouvoirs.

Il fait partie des trois candidats retenus dans une liste «définitive» dévoilée lundi par l’Isie, aux côtés de M. Saied et de Zouhair Maghzaoui, 59 ans, un ancien député de la gauche panarabiste. La justice reproche à M. Zammel d’avoir enfreint les règles sur les parrainages, comme les trois candidats écartés par l’Isie malgré la décision la semaine passée du Tribunal administratif de les réintégrer dans la course présidentielle.

Abdellatif Mekki, ancien dirigeant du mouvement islamo-conservateur Ennahdha, Mondher Zenaïdi, ancien ministre du régime Ben Ali, et Imed Daïmi, conseiller de l’ex-président Moncef Marzouki, également proche d’Ennahdha avaient été disqualifiés le 10 août avec 14 autres postulants notamment pour manque de parrainages suffisants.

 

Comme Mélenchon, Édouard Philippe fait dans la bordelisolation du pays

Comme Mélenchon, Édouard Philippe fait dans la bordelisolation du pays

 

Jusque-là ce sont surtout les insoumis évidemment en particulier Mélenchon qui s’étaient spécialisés dans la bordelisation du pays. Maintenant, c’est l’ancien premier ministre même de Macon, Édouard Philippe, qui vient avec ses gros sabots en rajouter sur la crise politique. Alors qu’on cherche désespérément un premier ministre, lui annonce sa candidature pour 2027 et même avant. En clair, il ouvre l’hypothèse d’un départ anticipé de Macron et se déclare prêt à y faire face. Bref un peu comme Mélenchon mais à sa manière sans brutalité mais sans grande élégance.

L’occasion sans doute pour lui de se rappeler à l’opinion d’autant qu’il n’avait pas laissé un souvenir impérissable comme Premier ministre notamment avec ses positions sur la réforme des retraites comme par exemple encore sur la limitation de vitesse à 80 sur certaines routes.

«Qu’est-ce qu’il fait ? C’est le pire timing !», souffle-t-on dans ses rangs, où l’on n’avait pas vu venir ce coup de poker de rentrée. «Il a fait ça dans son coin, sans que grand monde ne soit au courant. Comme ça, aucune fuite possible», raconte l’un de ses proches, lui-même surpris en découvrant cette annonce en début de soirée. Depuis des semaines, les regards sont plutôt braqués sur l’interminable feuilleton de Matignon, alors qu’Emmanuel Macron, sous pression, cherche toujours son prochain premier ministre.

 

Le réseau X (ex twitter) dans la tourmente financière

Le réseau X (ex twitter) dans la tourmente financière

 

Du fait de l’attitude de son nouveau propriétaire le réseau X (ex Twitter) se révèle une véritable catastrophe financière. Le milliardaire Elon Musk est en effet en train de payer son cocktail de provocations, de fausses informations et de politiques en faveur de Trump. Or la rentabilité s’écroule complètement alors que le prix d’achat du réseau s’est effectué avec un emprunt de 44 milliards.

 

Et l’entreprise a perdu la moitié de sa valeur du fait de la défection surtout des publicitaires; exemple, celui de Jack Dorsey, le cofondateur de Twitter, qui a investi 1 milliard d’euros : la valeur de sa participation, en 2024, est estimée à 280 millions de dollars. Ce dernier avait déjà exprimé des regrets après le rachat, par le patron de Tesla, du réseau social. «Elon Musk n’aurait jamais dû acheter Twitter, tout est allé de travers depuis», avait-il déclaré en mai 2023, moins d’un an après le rachat de la plateforme.

Le prince saoudien Alwaleed bin Talal a investi, lui, 1,89 milliard de dollars. La valeur de sa participation est aujourd’hui évaluée à seulement 280 millions de dollars. Le plus gros perdant restant Elon Musk lui-même. Le magnat de la tech a investi un total de 33,5 milliards de dollars. Or, la valeur de ce qu’il détient dans sa plateforme est aujourd’hui évaluée à 9,38 milliards de dollars.

 

Les « Insoumis » s’agitent toujours en demandant la destitution de Macron

Les « Insoumis » s’agitent toujours en demandant la destitution de Macron

Les « insoumis » toujours à la pointe révolutionnaire renouvellent leur volonté de destituer Macron. Une hypothèse qui n’a aucune chance d’être retenue compte tenu de la procédure mais qui a l’avantage de faire le buzz. Ce n’est sans doute pas sur le terrain juridique se posera la question du départ de Macron mais plutôt sur le terrain politique. En effet en multipliant les contradictions et en retardant la nomination d’un premier ministre, Macron a surtout commis une nouvelle faute politique dont il risque de payer le prix. Le prix surtout de la dissolution qui a enfoncé le pays dans l’immobilisme. Une fois les gouvernements provisoires épuisés après avoir été renversés se posera effectivement non  pas la destitution mais le départ volontaire de Macron ou à défaut sa paralysie complète.. Ce qui est évoqué d’ailleurs très malicieusement Édouard Philippe qui n’exclut plus une élection présidentielle avant 2027.

 

Mathilde Panot a annoncé le dépôt de la proposition de résolution visant à destituer le chef de l’État. Elle affirme que le texte sera signé par d’autres parlementaires que ceux de La France insoumise.

 

Avec cette proposition de résolution, La France insoumise (LFI) entend apporter «une réponse politique à la hauteur du coup de force antidémocratique qu’est en train de faire le président de la République». Mathilde Panot affirme que le nombre de signataires du texte «ira au-delà des rangs insoumis» (72 députés). Elle évoque notamment des «députés ultramarins» du groupe communiste et la parlementaire écologiste Sandrine Rousseau, elle aussi toujours à la pointe du combat extrémiste.

 

Paralympiques: Or argent et bronze pour la France

 

Or, argent et bronze pour la France. Nathalie Benoît accroche la troisième place en para-aviron PR1 Skiff. Quelques minutes plus tard, les Bleus en quatre de pointe l’imitent. L’aviron pouvoyeur de médailles en ce dimanche matin. La journée va se calmer avant de s’emballer en milieu d’après-midi. En poursuite individuelle, Marie Patouillet s’impose sur le 3000m C5 face à… sa compatriote Heïdi Gaugain. L’or et l’argent d’un coup, avant un nouveau titre quelques secondes plus tard. Tanguy de la Forest est sacré en para-tir sportif, 10m carabine à air en position couchée R5. Plus tard, Emeline Pierre décroche également l’or en paranatation, sur le 100m nage libre (S10). En soirée, l’athlétisme a été (enfin) pourvoyeur de plusieurs médailles. D’abord Gloria Agblemagnon en argent au lancer du poids, avant une autre deuxième place : celle de Timothée Adolphe et de son guide Jeffrey Lami sur le 400m (T11). En toute fin de soirée, Manon Genest a décroché le bronze au saut en longueur.

Budget : le ministère de la Transition écologique s’oppose bien tardivement aux économies

Budget : le ministère de la Transition écologique s’oppose bien tardivement aux économies

Sans doute un nouveau coup de pub pour Christophe Bechu qui bien tardivement fait savoir qu’il s’oppose à la diminution des crédits du ministère de l’écologie dont il détenait le portefeuille.

Il y a déjà longtemps que circulent à l’intérieur des administrations les perspectives de crédit incluant les économies à réaliser pour diminuer le déficit.

C’est très récemment que le ministre déclare que « Les orientations évoquées ne permettraient pas de garantir un financement efficace de la transition écologique. Le cabinet du ministre a évidemment eu l’occasion de faire part de son opposition à ces hypothèses de financement », a poursuivi la source au ministère.

L es crédits de la Transition écologique seraient amputés de 1,5 milliard d’euros pour le fonds vert et de 1 milliard pour l’électrification des véhicules, selon les informations de Contexte. Le budget de ce fonds passerait ainsi de 2,5 milliards d’euros à 1 milliard en 2025.

Le budget de l’Agence de la transition écologique (Ademe) consacré aux collectivités et aux entreprises passerait notamment  de 1,373 milliard à 900 millions d’euros.

De toute manière ce décompte comptable consacré à l’écologie mérite discussion dans la mesure où les problèmes de l’environnement  doivent être pris en charge bien davantage par la quasi-totalité des autres ministères. Exemples:  production d’énergie, industrie, logement, transport, aménagement du territoire etc.

Au total, les lettres-plafonds de Matignon reproduisent à l’euro près pour 2025 les dépenses de 2024 (492 milliards d’euros), ce qui engendrerait, selon Matignon, une économie d’environ 10 milliards d’euros, rien qu’en ne les indexant pas sur une inflation prévisible autour de 2% l’an prochain.

 

Société- »Panem et circenses  » : la martingale politique pour la France !

Société- »Panem et circenses «  : la martingale politique pour la France !

 

La recette n’est pas nouvelle sous l’empire romain déjà on considérait  que le bonheur des peuples était conditionné par la satisfaction de jouir suffisamment de pain et des jeux ( panem et circenses). En France, les JO ont été l’occasion pour une société qui  doute sérieusement d’elle-même et qui craint son déclassement de découvrir à nouveau la joie des jeux. Une ambiance qui tranche avec la tristesse voire le tragique de la situation économique et politique. Dommage que le jeux ne soient qu’une parenthèse !

Au plan économique en  effet,  la France se dirige lentement mais sûrement vers une faillite financière qui rappelle celle de la Grèce et au plan politique le pays pourrait connaître une crise institutionnelle du fait de la paralysie de toutes les institutions,  présidence de la république y compris.

Le pays souffre d’immobilisme car noyauté par une élite incompétente et condescendante dont Macron représente sans doute l’exemple le plus caractéristique. La France a livré le pays aux énarques et autres diplômés d’instituts politiques . Ni technocrates véritablement, ni techniciens ni même très cultivés, les énarques ont mis la main sur les postes clés de l’économie et de la politique. La plupart mettraient en faillite en moins de six mois la moindre épicerie si on leur en confiait la gestion. Du coup,  les Français attendent désespérément le pain dont une grande partie est désormais financée par la dette. Faute de pain suffisant et mieux réparti, l’opinion se gave pour un temps de l’heureuse parenthèse des jeux.

Football et société: La folie du foot fric

Football et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champions internationaux dans des disciplines considérées comme marginales. Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société. Mais c’est aussi parfois un moment d’union nationale qui fait oublier le reste. NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
….la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Premier ministre : pour la CFDT aussi c’est trop long

Premier ministre : pour la CFDT aussi c’est trop long

 

La secrétaire générale de la CFDT,  «ne milite pour personne» pour Matignon mais juge que «la nomination est trop longue». «C’est aussi un enjeu de respect vis-à-vis des citoyens», dit-elle, en confirmant toutefois que son organisation ne s’associait pas à la mobilisation à laquelle doit participer une partie de la gauche le 7 septembre pour dénoncer un «coup de force» d’Emmanuel Macron.


Près de deux mois après le second tour des législatives, le chef de l’État continue ses consultations en vue de la désignation d’un nouveau Premier ministre. Marylise Léon regrette que plusieurs dossiers soient à l’arrêt, alors que «la question du pouvoir d’achat et des salaires reste le sujet numéro un des travailleurs».

Pour autant, comme annoncé vendredi à l’AFP par son N.2, Yvan Ricordeau, la CFDT ne se joint pas à l’appel de la CGT et Solidaires à manifester le 1er octobre pour réclamer l’abrogation de la réforme des retraites et une hausse des salaires. «La CFDT n’a jamais été adepte du rituel de la mobilisation de rentrée. Déjà, cela supposerait que notre action s’est arrêtée cet été», explique Marylise Léon, qui assure que son syndicat est resté «sur le terrain» tout l’été.

France: La crise d’abord du centralisme

France: La crise d’abord du centralisme

 
Peu d’experts auront sans doute observé que depuis des années la France se caractérise surtout par une gestion très pyramidale proche du centralisme démocratique chère aux marxistes mais aussi aux technocrates. La plupart des grands sujets sont bloqués au niveau central précisément parce qu’ils n’ont pas fait l’objet d’un débat décentralisé par les acteurs socio-économiques. Cette quasi absence de débat démocratique en profondeur est sans doute au cœur de notre crise politique.

Le phénomène n’est pas nouveau mais Macron s’est fait une religion de torpiller les organes intermédiaires qui permettaient d’une part de procéder à des analyses partagées et à des compromis équilibrés entre les différents intérêts. C’est ainsi par exemple que on parle aujourd’hui essentiellement de la question des salaires, de la retraite, du chômage et des conditions de travail du service public essentiellement au plan national entre responsables politiques.

Faute de discussions préalables voir même de compréhension du réel, les positions sur nombre de sujets socio-économiques se figent et souvent s’affrontent pour conduire à la paralysie. Le Conseil économique et social par exemple a souvent dénoncé l’espace de plus en plus réduit du débat social et économique en France. Du coup tout est politisé, déformé voire ridiculisé.

La France souffre de son insuffisance chronique à associer les partenaires sociaux intermédiaires pourtant indispensables pour permettre la compréhension de problématiques souvent complexes et qu’on ne peut résoudre de façon simpliste, irresponsable et démagogique.

Le problème, c’est que cette culture de centralisme démocratique domine les partis politiques de droite comme de gauche. À droite on se sert de la raison technocratique pour imposer des solutions bâclées et rapidement obsolètes. ( Ne parlons pas de l’extrême droite qui conteste le concept de syndicalisme). À gauche, en tout cas dans la gauche de coloration marxiste du NFP, c’est l’idéologie marxiste qui commande l’adhésion au centralisme démocratique.

Un seul exemple la question des salaires qui ne peut se résumer qu’au seul relèvement du SMIC qui va encore écraser les grilles de salaires. Ce débat relativement technique doit évidemment être d’abord pris en compte par les acteurs sociaux et les organisations représentatives en tenant compte bien sûr des réalités de chaque branche. Il en est de même concernant le chômage qui doit intégrer les situations particulières des branches et des régions. Toute mesure d’autorité prise sans concertation d’abord n’est pas comprise voire est rejetée et se révèle rapidement inopérante. En outre la question- réelle – du pouvoir d’achat ne peut se réduire au seul problème de l’augmentation des salaires.

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