Archive pour le Tag 'l’Europe'

Page 13 sur 19

Défense: Quelles relations entre la France et l’Europe

Défense: Quelles relations entre la France et l’Europe

 

« Il ne sert à rien de proposer depuis 2017 quantités d’initiatives toutes plus ou moins rejetées par nos partenaires européens et de n’en tirer aucune conséquence » Cédric Perrin, sénateur LR du Territoire de Belfort.(l’Opinion, extrait)

 

La taxonomie européenne est dans l’actualité. Ainsi, la question de l’inclusion ou non de l’énergie d’origine nucléaire parmi les énergies permettant de lutter contre le réchauffement climatique est très fortement débattue à l’Union européenne (UE). Pour la France, l’enjeu est crucial.

Mais la question de la taxonomie ne concerne pas seulement le domaine civil. Elle concerne également notre base industrielle et technologique de défense, dont le renforcement au niveau européen est, rappelons-le, l’une des pierres angulaires de la volonté d’affirmation d’une souveraineté européenne affichée par le Président de la République depuis 2017.

Sur ce dernier aspect, qu’il soit permis de s’attarder sur les projets actuels de taxonomie porté par l’Union européenne (UE). Deux initiatives sont à souligner. D’abord dans la lignée du règlement du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables — usuellement appelé règlement sur la taxonomie — la Commission européenne semble vouloir étendre les critères dits « ESG » à une série de nouveaux critères sociaux, parmi lesquels les droits de l’homme. Ensuite, la Commission travaille à la définition d’un écolabel de la finance durable, qui exclurait les entreprises réalisant plus de 5 % de leur chiffre d’affaires dans le domaine de la production ou du commerce d’armes conventionnelles et/ou de produits militaires utilisés pour le combat. De telles initiatives, à l’égard desquelles les Etats membres sont largement marginalisés, sont graves, pour au moins deux raisons.

Graves pour l’UE, d’abord. De deux choses l’une. Soit l’UE persévère à méconnaître la dangerosité du monde, se confit dans la facilité d’un parapluie otanien dont elle fait mine de ne pas comprendre le prix, enfin pense que les seuls combats à mener se situent sur le terrain de ce qu’elle appelle les valeurs, sans arriver à créer d’ailleurs de consensus en son sein sur ce qu’elle entend par-là. C’est son droit, et les peuples et les Etats qui la composent sont souverains. Mais, elle sera alors condamnée à être le terrain de jeu de prédateurs qui ont compris que le soft power, pour être crédible, doit être solidement construit sur du hard power. Soit, comme la France y pousse notamment depuis 2017, elle fait de la recherche d’une plus grande autonomie stratégique et donc capacitaire, une priorité. Il y a lieu d’être inquiet quand l’on considère à quel point les projets de taxonomie visés supra paraissent bien constituer le énième avatar d’une litanie de renoncements et de blocages européens (difficultés du SCAF, réduction à la portion congrue du fonds européen de défense, achat systématique par de nombreux États européens de matériel américain etc.).

Graves pour notre pays ensuite, car elles témoignent de la part de nos autorités d’un désintérêt inquiétant. La France, à cet égard, doit faire montre de cohérence. Il ne sert à rien de proposer depuis 2017 quantités d’initiatives toutes plus ou moins rejetées par nos partenaires européens et de n’en tirer aucune conséquence. Il est facile de taper du poing sur la table en fustigeant il y a quelques jours le refus de nos partenaires européens de débattre avec la Russie, et, là encore, de n’en tirer aucune leçon, notamment vis-à-vis de Berlin, qui n’a pas les mêmes intérêts que nous, et s’en cache de moins en moins. Il est plus difficile d’expliquer l’ampleur et la continuité des renoncements des plus hautes autorités françaises dès lors qu’il s’agirait, au nom de nos intérêts, de fâcher Berlin ou Bruxelles.

 

Cedric Perrin est sénateur LR, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.

Michel Barnier pour une taxe carbone aux frontières de l’Europe

Michel Barnier pour une taxe carbone aux frontières de l’Europe

 

 

 

Michel Barnier, l’ex-négociateur du Brexit candidat à la primaire de la droite pour la présidentielle de 2022, se dit favorable à l’instauration d’une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne, dans une tribune au Journal du Dimanche. Le problème c’est qu’il aurait pu davantage faire avancer ce dossier quand il était commissaire européen bien davantage que comme candidat à la candidature en 2022 où il a peu de chances.

 

«Une taxe carbone aux frontières de l’Union est absolument indispensable, non seulement pour des raisons financières, mais parce qu’elle permettra de rétablir une concurrence équitable entre l’Europe, qui taxe désormais lourdement le carbone, et des partenaires commerciaux qui ne le taxent pas, ou si peu», estime l’ancien ministre de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.

Présidence française de l’Europe : une portée limitée

Présidence française de l’Europe : une portée limitée

Un article de Mathieu Solal dans l’Opinion qui relativise la portée de la présidence française en Europe au premier semestre 2022 (extrait)

Le séminaire parisien du groupe parlementaire européen Renew Europe s’est achevé mercredi, à l’issue de trois jours de discussions marqués par des rencontres avec le Président de la République Emmanuel Macron et plusieurs membres du gouvernement. Dans sa déclaration finale, Renew a proposé de travailler sur un accord de coalition « pour clarifier et renforcer la majorité parlementaire avec les groupes qui partagent nos valeurs » au niveau européen, sans toutefois préciser l’identité desdits groupes.

« Nous défendons la souveraineté européenne et l’autonomie stratégique européenne », ont affirmé mercredi les députés européens du groupe Renew, réunis depuis lundi à Paris pour leur séminaire de rentrée. « Souveraineté » et « autonomie stratégique » : deux concepts empruntés au vocabulaire macronien, et qui ont habituellement tendance à hérisser le poil des députés libéraux nordiques du groupe.

« Beaucoup de délégations ont voulu être gentilles avec Renaissance… La bienveillance du retour des vacances probablement », sourit une source interne du groupe. Au-delà de la bonne humeur et du soleil parisien, le soutien affiché par le groupe suggère surtout une mise en ordre de bataille à l’approche de deux rendez-vous cruciaux pour Renew, et qui risquent fort de se télescoper : la présidence française du Conseil de l’UE au premier semestre 2022, et l’élection présidentielle, dont les deux tours sont prévus au mois d’avril.

Une situation qui ne doit rien au hasard, comme l’explique Sébastien Maillard, directeur de l’Institut Jacques Delors : « La France aurait pu faire le choix d’échanger avec les Tchèques, qui doivent prendre la relève au second semestre. L’option a été écartée pendant le mandat de François Hollande, et la question n’a plus été soulevée depuis. C’est donc un choix délibéré et qui peut paraître gênant en créant une collision entre les deux événements, mais qui est surtout vue politiquement comme le meilleur moyen d’asseoir la stature européenne du Président à un moment-clé. »

Le début de l’année 2022 devrait donc donner lieu à de grands discours sur les progrès réalisés par l’Union européenne depuis l’élection d’Emmanuel Macron, à un bilan de son discours de la Sorbonne et à une défense des réalisations telles que le plan de relance européen et l’achat en commun de vaccins. Le Président devrait aussi capitaliser sur la Conférence sur l’avenir de l’Europe pour énoncer sa vision des prochaines étapes à franchir après son éventuelle réélection. Un bilan et une vision, une mise en valeur du passé et une projection vers le futur : voilà le programme, quitte à laisser passer au second plan le présent législatif de la présidence française du Conseil.

« D’une présidence semestrielle, on passe à une présidence quasi-trimestrielle, d’autant plus qu’à partir de mi-mars, le devoir de réserve obligera les ministres à faire très attention »

« L’agenda est contrarié, confirme Sébastien Maillard. D’une présidence semestrielle, on passe à une présidence quasi-trimestrielle, d’autant plus qu’à partir de mi-mars, le devoir de réserve obligera les ministres à faire très attention à la manière dont ils gèrent la présidence. » Interdits de donner à penser que l’Etat soutient le Président-candidat, les ministres devront en effet laisser leur enthousiasme au vestiaire en cas d’obtention d’accord. Ils pourraient même pour certains renoncer à présider les réunions du Conseil et se faire remplacer par le Représentant permanent de la France à Bruxelles, Philippe Léglise-Costa. L’impulsion politique nécessaire à des compromis sur les dossiers délicats risque ainsi de manquer à l’appel, au moins jusqu’à fin avril, d’autant plus que le secrétaire d’Etat aux affaires européennes Clément Beaune est pressenti pour se présenter aux élections législatives, selon deux sources bien informées.

La probable absence d’un gouvernement allemand pendant les premiers mois de la présidence française devrait finir obscurcir les perspectives d’accords sur les propositions législatives majeures telles que le paquet climat ou les législations sur le numérique. Si la plupart des interlocuteurs français préfèrent logiquement botter en touche quand on les interroge sur les ambitions de la présidence, la délégation Renaissance au Parlement européen peine, dans sa majorité, à comprendre la difficulté de la situation.

« Certains eurodéputés français arrivés au Parlement en 2019 voudraient mettre la barre très haut en termes d’ambition, confirme la source interne à Renew. Beaucoup essaient de leur expliquer qu’il est difficile de faire en sorte que les accords tombent au bon moment, surtout au vu des circonstances dans lesquelles se tiendra la présidence française. Il vaut mieux éviter d’afficher des attentes démesurées. »

Un message qui n’est manifestement pas reçu cinq sur cinq par l’eurodéputée MoDem Marie-Pierre Vedrenne, qui a beaucoup communiqué ces derniers jours sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, voué à taxer les marchandises produites à l’étranger et exportées vers l’UE. « Ce mécanisme est révélateur de l’Europe qui s’affirme comme une puissance verte et comme vecteur d’un nouveau modèle de mondialisation qui passe par une juste concurrence, explique-t-elle à l’Opinion. Il concrétisera la fin de la naïveté. »

Ce dispositif n’a été proposé que le 14 juillet dernier, et le dossier, touffu, semble politiquement délicat étant donné les réticences de l’industrie européenne qui refuse de renoncer à ses quotas gratuits d’émission carbone, et celles des partenaires commerciaux de l’UE, dont les Etats-Unis. Un accord sous présidence française paraît donc bien improbable.

Un nouvel élan pour l’Europe

Un nouvel élan  pour l’Europe

 

Par le député européen  Dacian Ciolos   (dans l’Opinion)

Cette semaine, notre groupe politique Renew Europe effectue sa rentrée parlementaire à Paris à l’invitation de la délégation des eurodéputés Renaissance, à quelques mois du lancement de la présidence française de l’Union européenne. Ce sera l’occasion d’échanger avec le Président de la République Emmanuel Macron et les membres de son gouvernement à propos des priorités de cette présidence très attendue.

Cette rentrée parlementaire est particulièrement importante, elle intervient alors que nous approchons de la mi-mandat de l’actuelle législature du Parlement européen. Il est déjà temps d’établir un premier bilan de notre activité parlementaire.

Notre groupe, qui rassemble la famille libérale, centriste, démocrate et progressiste s’est fixé des objectifs ambitieux lors de sa création en juin 2019. Beaucoup de choses ont déjà été accomplies avec l’adoption par exemple du Pacte vert mais aussi du plan de relance européen devenu nécessaire avec la crise sanitaire. Je dois mentionner également le mécanisme de conditionnalité sur l’état de droit dont nous avons été les initiateurs. La défense de l’état de droit et des valeurs fondamentales est au cœur de nos priorités.

Ce premier bilan doit nous permettre de fixer nos priorités pour la seconde partie du mandat, dans la perspective des élections européennes de 2024. Notre famille politique est incontournable dans la vie parlementaire européenne. Nous sommes à l’œuvre quotidiennement pour construire des majorités avec nos partenaires proeuropéens. Nous souhaitons poursuivre dans cette direction et renforcer notre action. Notre détermination est plus forte que jamais pour faire progresser la construction européenne.

Les populistes, les illibéraux, les mouvements extrémistes ont beau jeu de vouloir exploiter les crises et les faiblesses de l’Union européenne. Cela ne nous déstabilise en rien, bien au contraire. Les crises que traverse et subit l’Europe nous imposent un devoir de réflexion afin d’être en mesure d’adapter les politiques européennes aux nouvelles réalités du monde.

La pandémie de la Covid 19 a bousculé l’Europe, ses premières réponses ont été hésitantes mais aujourd’hui nous devons constater que l’UE a su apporter les réponses adéquates. Et notre groupe a présenté des propositions très précises pour donner corps à l’Europe de la santé. Sur le front de la politique étrangère, de sécurité et de défense, qu’il soit dit clairement que la procrastination ne peut pas tenir lieu de politique.

La crise afghane, la débâcle devrais-je dire, doit nous conduire à prendre enfin la mesure de la dépendance de l’Union européenne à l’égard de ses partenaires. Il nous faut agir et doter l’Europe des outils qui lui permettront d’être un acteur géopolitique autonome et respecté. Ces débats se dérouleront aussi dans le cadre de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, qui rendra ses premières conclusions sous présidence française. Nous aurons l’occasion d’en débattre cette semaine à Paris avec nos amis français. La Déclaration de Paris qui sera publiée à l’issue de nos travaux sera notre boussole pour les mois à venir.

L’économie française moins dynamique que l’Europe

L’économie française moins dynamique que l’Europe

 

D’après la première estimation basée sur des sondages d’entreprises européennes, cet indice a progressé ce mois-ci à 59,5, contre un niveau de 60,2 en juillet. Le signe d’une très forte expansion de l’activité: un chiffre inférieur à 50 signifie que l’activité se contracte, alors qu’à l’inverse elle progresse si le chiffre est supérieur à ce seuil.

Mais cet indicateur pour la France est seulement passé 56,6 en juillet à 55,9 en août., soit un plus bas de quatre mois.

L’activité est en expansion quand l’indice dépasse le seuil de 50 et en repli en deçà de cette valeur. Bien que l’économie tricolore a légèrement marqué le pas ces dernières semaines, l’activité demeure relativement soutenue. En effet, les résultats obtenus par IHS Markit auprès des directeurs d’achat indiquent que le rythme de la croissance du secteur privé est supérieur à sa moyenne historique du mois d’août (53,3).

Monopole de la FDJ mis en cause par l’Europe

Monopole de la FDJ mis en cause par l’Europe

le monopole des jeux accordés par le gouvernement contre le versement par la FDJ d’une contrepartie financière pourraient être sérieusement mis en cause par l’Europe. La FDJ  dû verser 380 millions à l’Etat en contrepartie de la prolongation de son monopole pendant 25 ans. La FDJ s’était vue confier cet avantage, dans le cadre de la loi Pacte qui a réformé le régime des jeux de hasard en France. L’Etat continue par ailleurs d’empocher, même après la privatisation, les recettes fiscales et sociales versées chaque année par l’opérateur de jeux.

Reste qu’on voit mal quel pourrait être la mission d’intérêt général qui justifie ce monopole des jeux attribués par le gouvernement à la FDJ.

Les mises se sont élevées l’an dernier à 16 milliards d’euros, soit une baisse un peu plus accentuée que ne le prévoyait la FDJ, tandis que le chiffre d’affaires s’est élevé à 1,9 milliard d’euros, en recul de 6%.

 Bloomberg et Factset tablaient respectivement sur un chiffre d’affaires de 1,84 milliard d’euros et un bénéfice net de 169,3 millions d’euros pour le premier, et 1,86 milliard et 171,8 millions d’euros pour le second.Le bénéfice net annuel de FDJ est finalement ressorti à 214 millions d’euros, légèrement au-dessus des anticipations lui aussi.

Les Français ( souvent pas les plus favorisés ! ) ont misé 16 milliards d’euros en 2020 dans les jeux de la FDJ, soit 7% de moins que l’année précédente.

L’Europe du rail: Un avenir ?

 L’Europe du rail: Un avenir ? 

Levier essentiel d’une politique en faveur du climat, la mobilité ferroviaire au sein de l’Union européenne renforce aussi le « sentiment d’un destin commun », estime la militante écologiste Lorelei Limousin. (le Monde extrait)
Interview 

 

 Si Lorelei Limousin boude l’avion, ce n’est pas seulement par conviction mais aussi « pour le plaisir du train ». La militante écologiste a déjà sillonné la plupart des pays européens par le rail, traversé la Russie et même rejoint la Chine en empruntant le Transsibérien. Elle a aussi transformé sa passion en métier. Après sept ans au Réseau Action Climat (RAC), à Paris, comme responsable des politiques transport, la trentenaire a rejoint le bureau européen de Greenpeace, en 2020, pour défendre le train et le climat à Bruxelles. Si elle dresse un réquisitoire sévère des politiques ferroviaires européennes depuis vingt ans, elle montre aussi que l’Union a des atouts pour remettre l’Europe du train sur ses rails. 

Est-ce si compliqué de voyager en train en Europe ?

Cela dépend du trajet, bien sûr. Pour faire un Paris-Bruxelles ou un Cologne-Amsterdam, vous n’aurez pas trop de difficultés. Les ennuis commencent quand on souhaite voyager sur de plus longues distances, entre Paris et Madrid ou Paris et Berlin, ou bien entre deux grandes villes, Marseille et Barcelone par exemple. Pour la majorité des trajets entre les capitales et les grandes villes, il n’existe plus de ligne directe, que ce soit de jour ou de nuit. Pour voyager de Paris jusqu’à Rome en train, il faut au moins douze heures, alors que le trajet se faisait autrefois en une nuit. C’est encore pire si l’on veut poursuivre son voyage dans des régions plus éloignées. Deux jours et deux nuits sont nécessaires pour rejoindre la Grèce, et le voyage revient beaucoup plus cher qu’en avion.

Comment expliquer la disparition de nombreuses liaisons existantes ?

L’Union européenne dispose d’un réseau très développé et sous-utilisé. L’infrastructure existe entre les grandes villes, pour assurer des trajets longue distance de 1 000 à 2 000 km. L’abandon de ces liaisons est la conséquence d’une volonté politique déterminée et le reflet d’un modèle de société qui valorise la surconsommation, la vitesse et l’individu. Quasiment la moitié des liaisons transfrontalières européennes ayant existé dans le passé ne sont plus opérationnelles. L’ironie de l’histoire, c’est que la SNCF et la Deutsche Bahn ont renoncé à plusieurs trains de nuit en Europe – notamment le Paris-Berlin et le Bruxelles-Copenhague – fin 2014, juste avant la COP21.

 

La tendance générale depuis des décennies est de favoriser les lignes à grande vitesse et les modes de transport routier et aérien. Les politiques publiques sont toutes allées dans le même sens, par la fiscalité, l’aménagement du territoire ou l’attribution de subventions directes. Les gouvernements ont donné la priorité à l’expansion des réseaux autoroutiers, au déploiement phénoménal du transport aérien low cost, dopé aux subventions publiques. Ils ont laissé libre cours aux campagnes publicitaires pour l’avion, qui suscitent de nouveaux désirs et occultent les impacts sur le climat. Le résultat, c’est que le rail ne représente que 7 % du transport de passagers à l’intérieur de l’Europe.

Espionnage- Pegasus: «L’Europe doit réagir »

Espionnage- Pegasus: «L’Europe doit réagir »

Spécialiste du cyber, l’ancien directeur technique de la DGSE livre à l’Opinion son analyse sur le logiciel espion israélien qui aurait été utilisé contre Emmanuel Macron ( L’Opinion, extrait)

Tribune

 

 

Emmanuel Macron a présidé jeudi matin un conseil de défense exceptionnel consacré à l’affaire Pegasus, un logiciel espion israélien qui aurait été utilisé par les services de renseignement marocains pour pirater ou tenter de pirater des téléphones de responsables politiques et journalistes français, a annoncé le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. D’après une enquête menée par un consortium de médias, dont Le Monde et Radio France, un des numéros d’Emmanuel Macron figurait parmi les cibles potentielles du logiciel Pegasus.

« L’Europe doit réagir très fermement » à l’affaire d’espionnage Pegasus, affirme à l’Opinion Bernard Barbier, l’ancien Directeur technique de la DGSE (2006-2013). Spécialiste de cyberdéfense et du renseignement électronique, cet ingénieur, aujourd’hui à la retraite, a dirigé l’équivalent français de la NSA américaine. « C’est une question de souveraineté : l’Europe doit avoir les capacités techniques nécessaires pour se protéger » face à des intrusions dans les téléphones portables et les ordinateurs individuels.

Pegasus est un logiciel espion très performant, mis au point et commercialisé par la société israélienne NSOUn consortium international de journalistes, Forbidden Stories, vient de révéler que plusieurs gouvernements étrangers l’utilisaient largement, contre des opposants et des journalistes. Le Maroc est soupçonné de s’en être servi pour espionner Emmanuel Macron et d’autres ministres. Un conseil de défense consacré à cette question s’est tenu ce jeudi matin à l’Elysée.

Comme Bernard Barbier, les spécialistes ne sont pas surpris par l’existence de ce logiciel. Dès 2016, le magazine 01net racontait « comment fonctionne Pegasus, ce malware qui vole toutes les données de l’iPhone ». En revanche, « l’usage incontrôlé » qui en fait par des gouvernements pose de sérieuses questions, à la fois de sécurité nationale et de libertés publiques.

Un peu de technique d’abord. Du fait du cryptage des communications, les « écoutes téléphoniques » à l’ancienne sont désormais presque totalement inefficaces. « Il faut by-passer le chiffrement et pour cela entrer au cœur du système, jusque dans les couches très basses de l’operating system » des téléphones, explique Bernard Barbier.

La société israélienne NSO a mis au point des « techniques extrêmement performantes » en la matière, en s’appuyant sur sa proximité avec les anciens personnels de l’Unité 8-200 de l’armée, l’agence de renseignement électronique. Grâce au service militaire obligatoire et à l’emploi de réservistes, il existe en Israël un vrai écosystème militaro-industriel entre les unités opérationnelles, les centres de recherche et les entreprises technologiques. NSO en est un exemple abouti. Désormais possédée par des capitaux américains, elle pèserait 2 milliards de dollars. « Il s’agit d’un transfert vers le privé de compétences étatiques », indique Bernard Barbier.

Pour pénétrer dans un téléphone portable, le logiciel Pegasus utilise les failles, les erreurs qui existent dans tous les systèmes d’exploitation : « IOS, c’est quarante millions de lignes de codes », rappelle Bernard Barbier. Ils sont régulièrement modifiés et améliorés : ce sont les « mises à jour » de votre portable. A chaque fois, le logiciel Pegasus doit s’adapter pour trouver les nouvelles portes d’entrée. NSO et ses semblables cherchent les « Zero-Day », les failles de sécurité non encore découvertes. Il existe un marché du « Zero-Day » avec des sociétés spécialisées, comme Zerodium fondée par le Français Chaoukri Bekrar. « C’est une guerre permanente » entre le glaive et le bouclier, dit l’ancien directeur technique de la DGSE.

Les grands services de renseignement, dont la DGSE en France, possèdent leurs propres systèmes pour introduire des « malwares » dans les téléphones, même sans aucune action de la part de la cible, répondre à un message, par exemple. Mais de nombreux pays ne possèdent pas de telles capacités en propre. Ils doivent faire appel à des prestataires privés, qui leur fournissent non pas la compétence technologique, mais le service plus ou moins clés en main. C’est la niche de marché de NSO qui travaillerait pour une quarantaine de pays.

Cela se fait évidemment avec l’accord des autorités politiques de l’Etat d’Israël. Ainsi, NSO ne fournit pas de services permettant d’espionner les Etats-Unis, la Russie ou la Chine. Pour l’Europe, en revanche, c’est open bar. C’est également le cas de pays arabes comme le Maroc, les Emirats arabes unis, Bahreïn, l’Arabie saoudite qui ont des liens sécuritaires avec l’Etat juif. Ce n’est pas un hasard s’il s’agit des pays ayant récemment établi des liens diplomatiques (sauf pour les Saoudiens, du moins officiellement) avec Israël.

D’autres alliés de l’Etat juif en bénéficient, comme l’Azerbaïdjan, l’Inde, le Rwanda ou, seul pays européen concerné, la Hongrie. Les experts français s’accordent à penser que les services de renseignement israéliens bénéficient des informations ainsi recueillies, via la société NSO ou d’autres intervenants sur le même marché.

La France a été sur les rangs pour faire appel à la NSO, mais le projet n’a pas abouti, du fait de très fortes oppositions au sein de l’appareil d’Etat. Dans les années 2010, la DGSI (sécurité intérieure) s’intéressait à ce logiciel, parce qu’elle ne disposait pas des mêmes capacités techniques que la DGSE (sécurité extérieure). Même si elle a progressé, la « mutualisation » des moyens d’espionnage électronique au sein de la communauté du renseignement reste un sujet complexe. A la même époque, la DGSI a acquis le logiciel américain Palantir pour l’analyse des données. Dans les services français, beaucoup estiment ce logiciel trop perméable avec la NSA américaine.

Alors que les regards sont tournés vers Pegasus, Guillaume Poupard, le directeur de l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information vient de tirer une autre sonnette d’alarme sur Lindekin contre « une vaste campagne de compromission, toujours en cours et particulièrement virulente, touchant de nombreuses entités françaises. Elle est conduite par le mode opératoire APT31. » En clair : de l’espionnage d’entreprises stratégiques par les Chinois.

L’Europe attend quoi pour créer une cryptomonnaie ?

«L’euro n’a pas d’avenir sans une version numérique ambitieuse» estime Philippe Mudry dans l’Opinion 

(Extrait)

 C’est peu dire que le temps presse. Déjà, le système financier international a senti la menace d’un bouleversement imminent avec le projet, heureusement tué dans l’œuf, de « Libra » de Facebook. Tous les jours, de nouvelles initiatives de création de cryptomonnaies rappellent le profond besoin des utilisateurs finaux de nouveaux moyens d’échanges qui se rêvent tous, peu ou prou, en devises de demain.

Surtout, le haut responsable français a mis le doigt sur la principale menace planant sur la souveraineté européenne, que fait peser la Chine avec son projet de renminbi digital déjà en phase d’expérimentation avancée. Il a le potentiel, ni plus ni moins, de faire basculer le monde de l’ère de « roi dollar » au « roi yuan ». Il a fallu deux guerres mondiales pour que le dollar accède formellement, au travers des accords de Bretton Woods, en 1944, à la suprématie qu’on lui connaît. La Chine entend emprunter une autre route, plus discrète mais pas moins efficace.

Elle consiste à se souvenir d’une règle absolue en matière monétaire : qui possède la monnaie dominante s’assure de la domination financière. Les destins de Londres et de New York sont là pour la rappeler. Pour y parvenir, outre une ouverture progressive des marchés financiers chinois de plus en plus poussée, il s’agit de convertir la masse chinoise à un usage numérique de sa monnaie, une évolution déjà en cours, pour l’étendre ensuite, grâce à l’architecture digitale ainsi créée, à d’autres usagers, étrangers cette fois.

Quant à l’Europe elle n’a toujours pas ouvert concrètement le chantier de la création de l’euro numérique, qui seul peut permettre à ses choix digitaux et aux principes démocratiques qu’ils reflètent, en matière de protection des données personnelles, mais aussi plus généralement de régulation financière, d’être sérieusement pris en compte.

L’Europe sait pourtant ce qu’une domination monétaire étrangère veut dire. Quoiqu’alliée des Etats-Unis, elle a dû subir les conséquences de son « privilège exorbitant » dénoncé par la France dès les années 1960 et dont la plus fameuse illustration, et la plus funeste, demeure l’abandon unilatéral de la convertibilité du dollar en or, le 15 août 1971. Veut-elle vraiment un système monétaire et financier sous domination chinoise ? Si la réponse est négative, il faut agir, sans aucun délai.

Armement : l’Allemagne trahit encore l’Europe

Armement : l’Allemagne trahit encore l’Europe

 

L’encre de l’accord pour l’avion de chasse commun était à peine sèche que l’Allemagne fait à nouveau valoir son point de vue nationaliste en matière d’armement. L’accord pour la grande chasse a été arraché après d’éprouvantes négociations qui ont démontré que l’Allemagne était surtout intéressée par la maîtrise de la technologie française. Pour les autres équipements militaires, l’Allemagne retourne ainsi que démon : européenne quand ça arrange , atlantiste pour ne pas gêner les États-Unis. La décision de l’Allemagne d’acheter aux Etats-Unis cinq avions P-8A Poseidon (Boeing) pour 1,43 milliard d’euros, a très fortement agacé en France, jusqu’à l’Élysée, pourtant jusqu’ici très germanophile. Mais là, trop c’est trop. La décision ne passe pas vraiment comme d’ailleurs les incertitudes sur d’autres programmes en coopération avec l’Allemagne, notamment le Tigre Mark 3, qui est une priorité de l’armée de terre. D’autant qu’en France, personne ne croit vraiment à l’achat de cinq avions P-8A Poseidon en tant que « solution provisoire » en remplacement des vieux P-3C Orion de l’armée de l’air allemande. Clairement, Paris estime s’être fait roulé par Berlin.

Extraditions leaders catalans : le conseil de l’Europe pour l’apaisement

Extraditions leaders catalans : le conseil de l’Europe pour l’apaisement

Les démons fascisants travaillent toujours un peu l’Espagne.-Cet entêtement à poursuivre juridiquement les indépendantistes catalans qui avaient organisé un référendum. Des indépendantistes arrêtés, jetés en prison ou exilés. Le conseil de l’Europe demande enfin l’apaisement pour mettre fin à la chasse aux sorcières vis-à-vis de responsables qui certes ont organisé un référendum illégal mais non provoqué aucun désordre mortel. Les manifestations des indépendantistes sont en effet demeuré très pacifiques. Dans une résolution adoptée par l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), l’organisation paneuropéenne appelle le gouvernement espagnol à «envisager de gracier, ou de libérer de toute autre manière», les politiques catalans condamnés pour leur participation «dans l’organisation du référendum anticonstitutionnel» de 2017 «et des manifestations pacifiques de grande envergure qui l’ont accompagné».

 

Le texte adopté par l’APCE invite encore Madrid «à entamer un dialogue ouvert et constructif avec l’ensemble des forces politiques de Catalogne, y compris celles qui s’opposent à l’indépendance, afin de renforcer la qualité de la démocratie espagnole, et de trouver un compromis qui permette à l’Espagne (…) de régler les différends politiques (…) sans recours au droit pénal, mais dans le plein respect de l’ordre constitutionnel» espagnol.

L’Europe trop passive

L’Europe trop passive

« La réalité que l’on s’est cachée toutes ces dernières années, c’est que la multipolarité appelée de nos vœux ne veut pas forcément dire un monde apaisé »

 

Interview du politologue Thibault Muzergues dans l’Opinion.

 

 

Politologue, Thibault Muzergues est directeur du programme Europe du think-tank américain International Republican Institute (IRI). Son dernier ouvrage Europe, champ de bataille. De la guerre impossible à une paix impossible (Editions Le bord de l’eau, 312 pages, 27 euros) sortira le 4 juin.

A vous lire, tout concourt à ce que l’Europe connaisse prochainement une guerre…

Il n’y a pas de fatalité et il ne faut pas tomber dans le surpessimisme. Ce que j’essaie de dire, c’est qu’il y a de vrais risques. La réalité que l’on s’est cachée toutes ces dernières années, c’est que le monde est redevenu dangereux et que la multipolarité appelée de nos vœux ne veut pas forcément dire un monde apaisé. Bien au contraire ! Nous payons des contradictions que nous avons ouvertement ignorées ces vingt dernières années. Nous entrons dans une zone de danger, mais cela ne veut pas dire non plus qu’une guerre est inévitable. Le risque a toujours existé, seulement nous ne nous en rendions pas compte. La question, aujourd’hui, est de savoir comment faire pour limiter ce risque.

De tous les nuages que vous pointez, quels sont les plus dangereux ?

On ne peut pas le savoir avec certitude. Si vous posez la question à des gens de droite, à un Espagnol ou à un Italien, ils vous répondront que c’est l’immigration, donc sous-entendu l’islam, voire les minorités. Pour d’autres, comme les Lituaniens ou les Lettons, ce sera la Russie qui s’est lancée clairement dans une politique révisionniste de ses frontières. Nous avons une géographie qui fait que nous sommes cernés par des menaces potentielles. Si on veut que l’on nous laisse tranquille, il faut construire des protections à tous les niveaux. Nous avons aussi un problème à l’intérieur de nos sociétés archipélisées à qui il faut redonner de la cohérence. Il faut trouver un bon mix entre identité nationale et identité européenne. Il faut se muscler et créer des anticorps pour pouvoir faire face à toutes ces menaces. L’adage latin « Si tu veux la paix, prépare la guerre » est toujours d’actualité. On l’a oublié.

Quelles formes pourraient prendre ces menaces ?

La possibilité d’une guerre interétatique est réelle comme on l’a vu, l’été dernier, en Méditerranée orientale entre la Grèce et la France d’un côté, et la Turquie de l’autre. Néanmoins, le scénario le plus probable en Europe verrait l’intervention d’acteurs locaux dans une fausse guerre civile ou dans une guerre civile complète. Aujourd’hui, on peut faire la guerre à moindre coût comme on le voit en Ukraine où la Russie impose une guerre de « basse intensité », sans engager ses chars ou ses avions de combat.

« La seule solution, c’est la réforme pour retrouver de la cohésion dans la société, même si, comme le disait Tocqueville, “le moment le plus dangereux pour un gouvernement en difficulté, c’est le moment où il se réforme” »

Où pourrait se dérouler la prochaine guerre ?

Plutôt dans les Balkans où les dirigeants recommencent à jouer avec le feu, en évoquant un redécoupage des frontières. La France n’est pas immune non plus. Il y a de telles tensions au sein de l’Hexagone que l’on pourrait voir des gens armés prêts à en découdre. Pas seulement dans les banlieues, mais aussi chez les militaires retraités ou d’active comme on l’a vu, récemment, dans les lettres ouvertes parues dans Valeurs Actuelles. Il y a un climat qui peut facilement dégénérer en guerre civile larvée.

Que faut-il faire ?

Ne rien toucher aujourd’hui, c’est assurément aller vers une guerre à terme. Si on ne fait rien en France comme en Europe, nous aurons une société sclérosée qui va continuer à se faire marcher sur les pieds par d’autres puissances comme on l’a vu avec le piratage par le Bélarus d’un avion européen. Et au final, ce sera la guerre assurée. La seule solution, c’est la réforme pour retrouver de la cohésion dans la société, même si, comme le disait Tocqueville, « le moment le plus dangereux pour un gouvernement en difficulté, c’est le moment où il se réforme ». Quitte à choisir, autant prendre le risque d’une réforme, en ayant conscience des risques. Il faut réformer aussi l’Alliance Atlantique. Car il ne peut pas y avoir de paix durable en Europe si les Américains ne sont pas impliqués. Il faut, enfin, effectuer un saut fédéral européen. Je n’entends pas, par là, un pouvoir central fort à Bruxelles, mais une fédération d’Etats nations.

Sur quel modèle ?

Il y a la Suisse, les Etats-Unis ou l’Autriche-Hongrie avec le modèle réformé imaginé par les élites viennoises dans les années 1900-1910 avant qu’il ne soit réduit à néant par l’assassinat de Sarajevo. Très bien pensé, le plan de fédéralisation de l’empire ne remettait pas en cause l’ensemble habsbourgeois. Il sanctuarisait même territorialement les nationalités. On peut apprendre aussi de ce qui se passe en Inde.

Vous allez faire hurler les souverainistes !

Quand j’entends Marine Le Pen dire qu’elle veut avoir de bonnes relations avec la Russie qui passe son temps à vouloir détruire l’Union européenne, je ne sais pas vraiment de quel côté sont les souverainistes. Car, la France et les autres pays européens ne pourront être vraiment souverains que s’ils se mettent ensemble pour exister ensemble dans un monde violent d’Etats-continents comme les Etats-Unis, la Chine et l’Inde. Pour survivre dans ce cadre-là, on a besoin de l’Europe. Vendre la souveraineté de son pays au plus offrant comme le fait le Hongrois Viktor Orban aux intérêts chinois n’est pas le meilleur exemple.

Cela passe aussi par un réarmement comme le demandent les Etats-Unis ?

C’est un débat récurrent. On a une vraie fenêtre pour créer une armée européenne sachant qu’il y a des vraies synergies au sein de l’Otan. Les moments dangereux sont ceux qui sont pleins d’opportunités. Or, nous sommes dans un moment dangereux où tout peut basculer.

« On a tendance à prendre nos voisins pour des ennemis absolus ou pour des alliés objectifs. Or, ils ne sont ni l’un, ni l’autre. Ils sont à la fois des partenaires et des rivaux »

D’où doit venir l’impulsion ?

La réalité, aujourd’hui et depuis des années, c’est qu’il y a un leader incontesté en Europe, l’Allemagne. La France est numéro deux. Elle peut donner des impulsions, mais il faut convaincre l’Allemagne, dans le cadre d’une vraie coopération comme cela s’est fait depuis l’après-guerre. Quand Paris essaie d’agir seul, cela se termine à chaque fois avec les intérêts allemands qui priment. En revanche, quand la France s’allie avec des pays comme l’Italie pour faire pression sur l’Allemagne, cette dernière cède comme cela s’est vu avec le « recovery fund ». Paris doit jouer un rôle de pivot entre l’Europe du sud et l’Europe du nord.

Que fait-on avec le Royaume-Uni post-Brexit ?

Ce serait une terrible erreur de ne pas garder les Britanniques dans l’architecture sécuritaire de l’Union européenne. Sans le Royaume-Uni, on se retrouverait avec une menace sur notre flanc nord-ouest alors que nous sommes déjà menacés au sud, à l’est et au sud-est. Il faut donc trouver de nouvelles pistes de coopération. Et, malgré les tensions comme dans les îles anglo-normandes, en l’Irlande du Nord, voire en l’Ecosse, les Anglais sont demandeurs. Seulement, il va falloir mener un gros travail diplomatique. Car si le Royaume-Uni affiche des taux de croissance beaucoup plus élevés que l’UE, il estimera que sa stratégie était la bonne et pourrait avoir la tentation de jouer sur le long terme la division entre Européens. S’il devient inamical, il faudra lui répondre.

De manière globale, quelle attitude adopter vis-à-vis des voisins de l’Union européenne ?

Il ne faut pas être angélique. On a tendance à prendre nos voisins pour des ennemis absolus ou pour des alliés objectifs. Or, ils ne sont ni l’un, ni l’autre. Ils sont à la fois des partenaires et des rivaux. Il faut donc adapter son comportement en fonction de l’humeur. Vladimir Poutine est clairement dans une logique de confrontation avec l’UE. Il faut pouvoir relever le gant et avoir une logique de confrontation avec lui. On a vu ces dernières années que dialoguer avec la Russie sans demander de contreparties était inefficace. La France et l’Europe n’ont absolument rien obtenu en retour et cela a permis à Poutine de respirer. On doit trouver l’équilibre entre les intérêts commerciaux et l’intérêt supérieur de l’Europe. Pour s’assurer qu’un avion de ligne européen ne puisse être piraté, il faut travailler sur le renseignement et imposer de véritables sanctions. Quand on est confronté à des actes de non-paix — car ce ne sont pas des actes de guerre —, il faut y répondre par des actes de non-paix. Il y a une symétrie à avoir. Or, l’Europe a trop longtemps répondu par la passivité complète.

Numérique: Éviter la mise à l’écart de l’Europe.

Numérique: Éviter la mise à l’écart de l’Europe.

Par Cyrille Dalmont (Institut Thomas-More) dans l’OPINION 

Chronique

 

Avec la défense et le spatial, le numérique est le domaine dans lequel le déclassement géoéconomique et géostratégique européen est le plus frappant. D’un côté, des discours, des conférences de presse, des tweets vantant les mérites d’une improbable et bien brumeuse « souveraineté numérique européenne » ; de l’autre la Chine, les Etats-Unis et même la Russie qui font chaque jour usage de leur souveraineté pour préserver leurs intérêts dans une économie mondialisée et ultra-connectée et la compétition technologique mondiale acharnée.

Soyons justes. L’Union européenne n’est pas un Etat. Elle est une organisation internationale, sans doute plus intégrée que beaucoup d’autres, mais une organisation internationale. La souveraineté appartient à ses 27 Etats membres et sa fonction principale, comme toute organisation internationale, reste l’élaboration de normes à destination des Etats ayant ratifié ses traités. C’est ce fait précis, que personne n’ose regarder bien en face, qui interdit toute « souveraineté européenne », numérique ou pas. Pire, dans le domaine numérique, c’est le carcan du droit européen de la concurrence et sa surabondance de normes qui empêche l’émergence de Gafam européens, dont la création ne peut reposer que sur une logique de souveraineté nationale.

Quand les Etats-Unis, la Chine ou la Russie font jouer à plein les ressorts de leur puissance étatique pour promouvoir leurs géants numériques (de taille mondiale pour les Gafam et les BATX ou régionale pour le russe Yandex), l’Union européenne est, et ne peut être, qu’aux abonnés absents. Elle ne peut en effet pas imiter la Chine qui n’hésita pas, par exemple, à protéger son économie en empêchant l’implantation d’entreprises étrangères comme Amazon ou Uber (et en finançant leurs concurrentes locales Alibaba et Didi) ou à exclure purement et simplement Google de son Internet national. Pas plus que les Etats-Unis et leurs sanctions économiques contre le géant chinois Huawei ou le blocage par décret du rachat du géant américain des microprocesseurs Qualcomm par son concurrent singapourien Broadcom (invoquant des motifs de sécurité nationale).

Consommateur anonyme. Bien loin d’actes aussi lourds et significatifs, l’Union européenne se contente d’appliquer les principes du droit européen de la concurrence au profit d’un consommateur anonyme de produits importés du monde entier, affaiblissant au passage l’outil productif européen. Les règles de concurrence, pensées dans le monde d’avant, celui de la « mondialisation heureuse » et de la dérégulation des marchés des années 1990, n’ont jamais été réévaluées. L’Union s’en tient donc au strict respect des principes du droit de la concurrence d’« égalité » et de « non-discrimination » à l’encontre de quelque opérateur que ce soit.

Pour les faire respecter, elle ne dispose que d’une « politique de la règle », selon l’exacte formule du philosophe néerlandais Luuk van Middelaar. Il en est ainsi des deux projets de règlements européens, le digital services act (DSA) et le digital market act (DMA), qui doivent entrer en application d’ici 2023 et dont nous savons déjà qu’ils n’auront qu’un faible impact sur des entreprises qui sont quasiment toutes extra-européennes et dont nous sommes dépendants.

«La surabondance de normes ne protège plus ni l’économie, ni l’industrie, ni la recherche européenne mais elle interdit l’émergence d’éventuels géants du numérique et la constitution d’un environnement propice à la réindustrialisation de l’Europe»

Mais nous avons aujourd’hui atteint un point critique. Non seulement cette surabondance de normes ne protège plus ni l’économie, ni l’industrie, ni la recherche européenne mais elle interdit l’émergence d’éventuels géants du numérique sur son territoire et la constitution d’un environnement propice à la réindustrialisation de l’Europe. L’ensemble de la structure du droit européen de la concurrence depuis le traité de Maastricht repose sur l’idée que les objectifs fondamentaux des règles de l’Union consistent à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur au profit du consommateur, et oublie complètement l’outil de production.

Les résultats de cette politique jamais remise en cause sont, hélas, éloquents. Dans le top 100 des entreprises mondiales par capitalisation boursière, 57 entreprises sont américaines, 13 sont chinoises et seulement 11 sont originaires de l’Union européenne. Si l’on regarde les 10 premières capitalisations boursières mondiales, huit appartiennent à l’univers du numérique, aucune n’est européenne. Dans le top 20 mondial des entreprises du secteur technologique par chiffre d’affaires, il ne reste plus qu’une seule entreprise européenne (Deutsche Telekom). Dans le top 5 mondial des entreprises de hardware, aucune entreprise européenne. Il en va de même pour les systèmes d’exploitation, le cloud, les data centers, les smartphones, les semi-conducteurs, les puces et microprocesseurs.

De nombreuses entreprises européennes seraient aujourd’hui capables de collaborer à l’élaboration de filières numériques d’excellence qui nous permettraient de rivaliser avec les géants mondiaux du secteur. Mais, en l’absence de commandes publiques, de marchés réservés, de levées de fonds suffisantes et de vision stratégique de ce que représente la numérisation de nos sociétés, elles ne peuvent espérer y parvenir. Un parallèle illustre à lui seul ce constat : alors que le montant du dernier contrat de Microsoft avec le Pentagone s’élève à 22 milliards de dollars (succédant au contrat « Jedi » de 11 milliards de dollars), le livre blanc de la Commission européenne sur l’intelligence artificielle de février 2020 prévoit un fonds d’investissement de 100 millions d’euros à destination des PME et des start-up européennes…

Boîte de Pandore. Il est donc urgent d’ouvrir les yeux : le principal frein à l’exercice de toute « souveraineté numérique » en Europe, nationale puisque la souveraineté ne peut être que nationale, est le droit européen de la concurrence qui empêche l’émergence de champions de taille mondiale et la création d’un environnement favorable à une réindustrialisation du continent. Pour autant, tout n’est pas perdu et il est possible d’agir. Nous formulons neuf propositions qui pourraient être adoptées à droit constant (sans ouvrir la boîte de Pandore de la renégociation des traités) afin de réagir vite et fort en vue d’enrayer le déclassement numérique définitif qui nous menace.

La première proposition, pierre angulaire de toutes les autres, consiste en l’adoption d’un règlement d’exception visant à la non-application du droit européen de la concurrence dans les domaines stratégiques liés au numérique. Cela permettra de stimuler la réindustrialisation européenne, en permettant des commandes publiques massives et en protégeant les secteurs stratégiques de nos économies numérisées (domaines régaliens).

Nous proposons également de réviser le statut des groupements européens d’intérêt économique (GEIE) et de créer des zones économiques spéciales européennes (ZESE) et des groupements d’intérêt public européen (GIPE) au travers de deux nouveaux règlements européens. Cela aidera à sécuriser le marché des puces électroniques et des semi-conducteurs et à mettre en œuvre une stratégie d’innovation industrielle dans le secteur des objets connectés. Des efforts massifs pourraient ainsi être accomplis afin de réinvestir le marché des smartphones et des systèmes d’exploitation, de favoriser l’émergence de data centers et de cloud souverains de niveau mondial dans les Etats membres, et d’assurer le déploiement d’antennes 5G et de câbles sous-marins « made in Europe », en en conservant la propriété ou au minimum l’exploitation.

C’est donc un ensemble de mesures que nous proposons pour créer un véritable écosystème numérique permettant l’émergence de nouvelles entreprises de taille mondiale, à droit constant. De très nombreux professionnels sont plus que conscients du dénuement total de l’Europe dans le domaine numérique et attendent que les dirigeants européens prennent les décisions courageuses qui s’imposent.

Cyrille Dalmont, chercheur associé à l’Institut Thomas-More, vient de publier le rapport « L’impossible souveraineté numérique européenne : analyse et contre-propositions » (avril 2021).

L’Europe: Sans vision prospective

L’Europe:  Sans vision prospective

Malgré un plan de relance colossal, l’Union européenne a montré plusieurs fragilités structurelles dans sa réponse à l’épidémie de Covid-19, analyse dans une tribune au « Monde » Sylvain Kahn, spécialiste des questions européennes.

 

Tribune.

 

Cette année, le 71e anniversaire de l’Europe (9 mai 1950) est entré en écho avec le premier anniversaire du plan de relance européen, qui symbolise la colossale panoplie de politiques publiques déployée en réponse à la crise sanitaire, économique et sociale du coronavirus. Pour autant, la réponse au Covid-19 a souligné plusieurs fragilités structurelles apparues dans l’histoire récente des Européens

Ainsi, la politique vaccinale est un révélateur. Le fait de procéder à des achats groupés de vaccins a été une très bonne initiative. S’il n’y avait pas eu cette stratégie d’achats groupés de vaccins, les Etats membres de l’Union européenne auraient passé leurs commandes en ordre dispersé et se seraient concurrencés entre eux.


La Commission européenne agissant pour les Vingt-Sept a aussi cherché à obtenir les prix les plus bas possibles. Vu l’urgence sanitaire, ce fut une mauvaise idée. Mais Bruxelles a voulu négocier les prix au plus juste pour être en phase avec une partie significative de l’opinion publique européenne se défiant des bénéfices énormes que certaines entreprises pharmaceutiques allaient peut-être réaliser avec la vaccination contre l’épidémie.

Les Européens, contrairement aux Israéliens et aux Britanniques, ont enfin refusé d’utiliser la procédure dite « d’autorisation de mise sur le marché en urgence » pour les vaccins contre le Covid-19. Ils ont utilisé une autorisation de mise sur le marché conditionnelle, après avoir bien étudié les données scientifiques. Sur ce point, on ne peut pas se contenter de pointer l’administration européenne.

Cette décision prise par la Commission et les gouvernements européens tous ensemble reflète le fait que la société européenne se caractérise par une aversion au risque plus grande, et une appétence pour l’innovation ou pour la témérité moindre, qu’au Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou même en Chine. Démographiquement vieillissante, l’Europe est devenue une région du monde moins hardie qu’ailleurs.


Enfin, les Européens ont réalisé qu’en quinze ans, ils se sont débarrassés de la production de certains produits de santé de base, comme les masques. En calant leurs stratégies industrielles sur la division internationale du travail et la théorie de l’avantage comparatif des nations qu’optimise le commerce mondial, les Européens (industriels, secteur bancaire, autorités politiques, consommateurs) se sont crus habiles et économes ; ils ont été téméraires, à courte vue et sans vision stratégique ni prospective.

Plaidoyer pour l’Europe

Plaidoyer pour l’Europe

Alors que se multiplient les attaques contre l’Europe, le philosophe slovène Slavoj Zizek souligne, dans une tribune au « Monde », que son héritage, notamment celui des Lumières et de la modernité laïque, fournit les meilleurs outils pour analyser ce qui, aujourd’hui, n’y tourne pas rond.

 

Tribune.

 

Certains d’entre nous ont encore en tête l’incipit fameux du Manifeste du Parti communiste : « Un spectre hante l’Europe : le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : le pape et le tsar, Metternich et Guizot, les radicaux de France et les policiers d’Allemagne. » Les mots de Marx ne permettent-ils pas, aujourd’hui encore, de dire ce qu’est l’« Europe » dans l’opinion ? « Un spectre hante l’Europe : le spectre de l’eurocentrisme. Toutes les puissances de la vieille Europe et du nouvel ordre mondial se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : Boris Johnson et Poutine, Salvini et Orban, antiracistes pro-immigration et chantres des valeurs traditionnelles européennes, progressistes latino-américains et conservateurs arabes, sionistes de Cisjordanie et “patriotes” communistes chinois. »

 

Chaque opposant à l’Europe a sa vision de l’Europe. Le premier ministre britannique, Boris Johnson, a mis en œuvre le Brexit car la bureaucratie bruxelloise est, à ses yeux, un super-Etat qui entrave la souveraineté et la libre circulation des capitaux britanniques, quand certaines franges du Parti travailliste ont, elles aussi, soutenu la sortie de l’Union européenne (UE), convaincues que la bureaucratie bruxelloise est au service du capital international pour empêcher l’adoption de lois et la conduite d’une politique financière qui défendent les droits des travailleurs.

La gauche latino-américaine assimile l’eurocentrisme à un colonialisme blanc, et Vladimir Poutine s’efforce de saboter l’UE pour mieux permettre à la Russie d’étendre son influence au-delà des ex-pays soviétiques. Les sionistes radicaux voient d’un mauvais œil une Europe qu’ils jugent trop bienveillante envers les Palestiniens, quand certains Arabes considèrent l’obsession européenne de l’antisémitisme comme une concession faite au sionisme. Le dirigeant italien de la Ligue (extrême droite), Matteo Salvini, et le premier ministre hongrois, Viktor Orban, voient dans l’UE une communion multiculturelle qui menace les valeurs traditionnelles européennes authentiques et ouvre grandes ses portes aux immigrés issus de cultures étrangères, alors que les immigrés voient l’Europe comme une forteresse du racisme blanc qui leur interdit de s’intégrer de façon pleine et entière. Et la liste n’est pas exhaustive.

 

Car la pandémie est venue donner de nouvelles déclinaisons à ces critiques protéiformes. L’individualisme européen serait la cause du nombre élevé de cas en Europe, à mettre en regard des chiffres relativement plus modestes enregistrés par les pays d’Asie, où le sens de l’intérêt général est plus fort. L’UE a été jugée inefficace, incapable d’organiser une campagne de vaccination rapidement, au point que l’Europe a progressivement cédé au nationalisme vaccinal. Parallèlement, le continent est aussi accusé de privilégier ses populations au mépris des pays pauvres du tiers-monde… En la matière, il faut reconnaître à l’Europe que les délais de vaccination sont le prix à payer pour son attachement à ses principes : l’UE tenait à l’équitable répartition des vaccins disponibles entre ses Etats membres.

1...1112131415...19



L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol