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Industrie de défense française : mise en danger par l’Allemagne

Industrie de défense française : mise en danger par l’Allemagne

 

 

 

Spécialiste de géopolitique, auteur de nombreux ouvrages, Aymeric Chauprade a été député européen FN avant de s’en éloigner

Le programme franco-allemand SCAF (Système de combat aérien du futur) résume à lui seul l’histoire étrange d’une grande nation scientifique et industrielle, la France, qui, sous la double emprise de son obsession idéologique et de son complexe d’infériorité, s’apprête à détruire l’un de ses derniers atouts : son industrie de défense.

Entre 2012 et 2017, deux vieilles nations de poids géopolitique comparable, la France et le Royaume-Uni, deux ex-puissances coloniales, lassées de leurs guerres séculaires depuis le Moyen-Âge, alliées des deux grandes guerres du XXe siècle, discutent pour imaginer ensemble l’avion de combat du futur. Paris et Londres ont signé les accords de Lancaster House en 2010, et ont tout intérêt à unir leurs forces. Des démonstrateurs voient le jour, le Dassault Neuron en 2012, le BAE Systems Taranis en 2013. Au sommet franco-britannique d’Amiens, en 2016, les deux pays s’accordent pour réaliser ensemble un démonstrateur. Puis tout s’arrête.

Que s’est-il passé ? Un nouveau président est élu en France, qui, comme ses prédécesseurs, pense que l’habit présidentiel est indissociable du « pas de deux » avec la chancelière allemande, laquelle est trop maligne pour ne pas comprendre que le moment est venu de briser dans son élan la coopération franco-britannique.

Tellement bon. Le 13 juillet 2017, Angela Merkel et Emmanuel Macron annoncent leur intention de développer conjointement plusieurs systèmes d’armes. Les Allemands et les Français feraient ensemble l’avion de combat du futur (un système de combat aérien constitué d’un futur avion habité de nouvelle génération, entouré d’un essaim de drones), le char lourd de combat du futur, le drone européen du futur, le drone maritime du futur…

Même si les Espagnols et les Italiens ne sont pas oubliés, les Français et les Allemands se répartissent les leaderships sur les différents programmes. C’est tellement bon pour un Français de se sentir l’égal d’un Allemand et au-dessus d’un Italien ou d’un Espagnol, et de tous les autres…

Les Français, qui ne croient plus guère aux chars lourds depuis la fin de la Guerre froide, donnent aux Allemands le leadership du MGCS (Main Ground Combat System), mais ils gardent naturellement la main sur le SCAF (Système de combat aérien du futur) pour une raison évidente : dans cet aréopage industriel, Dassault Aviation est le seul industriel à savoir fabriquer un avion de combat.

Dès 2017, les industriels français ne sont pas dupes, mais ils obéissent le petit doigt sur la couture du pantalon à la volonté (idéologique) du Politique, lequel tient entre ses mains les deniers nécessaires pour lancer les études, les démonstrateurs… A Paris, et quels que soient les états-majors politiques, du PS aux LR en passant par LREM, l’idéologie franco-allemande est puissante ; on a le droit de la maudire en privé, mais jamais de la critiquer en public. Tant pis si pour la réalité, « l’avenir est européen donc franco-allemand ». Le Brexit vient d’ailleurs donner encore plus d’eau au moulin des thuriféraires du « moteur franco-allemand ».

Supériorité. 5 février 2021, Sommet franco-allemand, crise majeure sur les programmes communs de défense… Arrive donc ce qui devait arriver : les Allemands reprochent aux Français de ne pas avancer sur le char, tandis que les Français reprochent aux Allemands de ne pas avancer sur l’avion. Les Allemands veulent tout rediscuter : ils exigent davantage sur la propriété intellectuelle ; ce qu’ils veulent en réalité, c’est que les Français transfèrent la technologie qu’ils n’ont pas dans le domaine de l’aviation de combat.

Certains à Paris découvrent « l’eau chaude » : l’Allemagne est en train de se servir de ses alliances pour combler son retard en matière d’industrie de défense. Plus faible économiquement que l’Allemagne, la France est en train d’offrir aux Allemands, sur un plateau, le seul avantage comparatif qu’elle conservait : sa supériorité dans le domaine de la défense !

Une alliance industrielle de défense entre la France et l’Allemagne n’a aucun sens : la première a tout à perdre, la seconde tout à gagner.

La crise révèle pourtant bien plus qu’une simple friction d’ego sur un partage de compétences. En vérité, l’Allemagne et la France n’ont pas les mêmes objectifs géopolitiques et leurs besoins militaires sont, fort logiquement, très différents. On peut se rassurer en répétant que bâtir des systèmes d’armes ensemble ne va pas de soi et exige des sacrifices de part et d’autre ; ce serait vrai si le problème n’était pas bien plus profond que cela ! La vérité est qu’une alliance industrielle de défense entre la France et l’Allemagne n’a aucun sens : la première a tout à perdre, la seconde tout à gagner en utilisant l’alliance comme un sas de transfert de technologies.

Certes l’Allemagne dispose aussi de technologies de qualité, sauf que nous n’en avons pas besoin ! Nous savons tout faire seuls, avec nos propres industries : un avion de combat, un moteur ultra-performant, un cloud, des drones, un système de systèmes…

Puissance continentale, l’Allemagne reste profondément attachée à l’OTAN. Son armée est une composante du bloc transatlantique dirigé par Washington, prête à participer à une guerre de haute intensité contre la Russie. Face à la Russie, les Etats-Unis ont besoin de chars lourds prépositionnés en Allemagne, donc de chars allemands. Certes la France a encore des chars lourds (l’excellent char Leclerc) mais elle a abandonné depuis longtemps le modèle de la Guerre froide et n’a projeté ses chars ni en Afghanistan ni en Afrique. L’armée de terre française mise maintenant sur la mobilité des blindés à roue du programme SCORPION (le Griffon et le Jaguar), elle préfère les missiles aux canons des chars lourds.

De temps en temps, pour que l’on ne doute pas trop de notre volonté otanienne, nous mettons à disposition quelques Leclerc pour des manœuvres anti-russes dans les pays Baltes, mais tout cela n’est pas sérieux. Ce qui est sérieux, c’est le Mali (là où meurent nos soldats, ne l’oublions pas), ce sont nos frappes contre l’Etat islamique, c’est la nécessité de devoir naviguer dans toutes les mers et les océans là où le drapeau français flotte, des Caraïbes jusqu’au Pacifique Sud en passant par l’océan Indien.

Besoins opérationnels. L’Allemagne, elle, n’est ni membre du Conseil de sécurité de l’ONU, ni une puissance nucléaire ; elle ne se projette pas en Afrique et n’a pas à protéger un espace maritime comme celui de la France (le deuxième derrière les Etats-Unis). L’Allemagne n’a pas besoin que son chasseur de combat du futur soit capable de se poser sur un porte-avions pour être projeté au Moyen-Orient ou en Afrique, ou qu’il soit prêt à emporter des missiles à tête nucléaire.

Nos besoins opérationnels sont encore ceux d’un pays qui agit de manière souveraine sur des théâtres où il entend garder une influence. Nous voulons dissuader et nous projeter, car nous voulons rester une puissance crédible dans un monde de plus en plus multipolaire et où notre influence dépendra de plus en plus de notre capacité à défendre des gouvernements contre des forces islamistes, et à protéger des espaces maritimes contre les nouvelles poussées impériales, en Méditerranée comme mer de Chine orientale ou dans le canal du Mozambique.

Au-delà de l’incompatibilité des buts géopolitiques entre Paris et Berlin, laquelle fonde une incompatibilité en termes de coopération industrielle de défense, s’ajoutent des divergences graves en matière de règles d’exportation des armes. A quoi bon développer des armes avec un partenaire dont on sait déjà qu’il n’a pas la même philosophie pour les vendre ? Nous avons (finalement, et après, il faut le dire, beaucoup d’obstacles mis sur notre chemin par nos alliés américains) exporté notre Rafale, et nous continuerons à le faire.

Où avons-nous exporté ? Vers des pays qui cherchaient une troisième voie entre les Américains et les Russes. En Inde, en Grèce (car les Américains sont à la fois avec les Grecs et les Turcs), et demain dans tous les pays qui voudront se donner cette marge de manœuvre géopolitique qu’offre l’armement français.

Gauchisme et atlantisme. Compte tenu de la nature du système politique allemand, du poids du Bundestag dans la décision d’exportation allemande, mais aussi du poids de la gauche allemande pacifiste au Bundestag, qui peut imaginer une politique d’exportation cohérente d’éventuels matériels de défense franco-allemand ? Comment une telle politique d’exportation pourrait-elle échapper à la double action du gauchisme et de l’atlantisme, à la fois au Bundestag et au Parlement européen ?

Dassault sait faire des avions de combat, Safran des moteurs. Nous avons profusion d’industries françaises qui disposent de toutes les compétences.

Aujourd’hui, on a certes le droit de critiquer les choix français d’exportation d’armement mais personne ne pourra leur reprocher leur cohérence avec nos choix géopolitiques : nous voulons limiter l’expansionnisme d’Erdogan de la Libye jusqu’à la Méditerranée orientale, et l’influence de ses alliés, les Frères musulmans : il est alors logique de renforcer militairement les Grecs, les Emiratis, les Egyptiens.

Il y a bien plus de symétrie, et donc de synergies potentielles, entre ces deux ex-puissances coloniales, aujourd’hui puissances ultramarines, que sont la France et l’Angleterre, qu’entre la France et l’Allemagne. Qu’est-ce donc qui commande alors ce tropisme fusionnel avec l’Allemagne, au point d’être prêt à livrer à nos amis allemands notre fruit défendu le plus précieux : la BITDF (Base industrielle et technologique de défense française) ?

Irréversible. Dassault sait faire des avions de combat, Safran des moteurs d’avions de combat. Et nous avons, dans notre écosystème de défense, tous les industriels à disposition pour faire des drones, un cloud, un système de systèmes… Nous avons profusion d’industries françaises qui disposent de toutes les compétences. Pour des développements ciblés, nous avons les Britanniques et nous savons que la coopération bilatérale avec eux fonctionnera car ils sont imperméables à l’idéologie et ne s’engagent que s’ils y ont intérêt.

Le Président Macron doit faire un choix : soit il poursuit, comme si de rien était, à l’abri du discours confortable de l’idéologie franco-allemande, et il appuie alors sur le bouton irréversible du transfert de nos avantages aux Allemands, déshabillant ainsi la souveraineté industrielle française avec comme seul résultat l’effacement du retard allemand. Soit il profite du « reset » économique mondial qui se prépare pour relancer une grande politique industrielle de défense française.

Comment ? En annonçant qu’une large coalition d’industriels français va travailler sans frein pour inventer et produire l’avion du futur français, le successeur du Rafale en 2040, lequel sera de facto une réussite européenne et mondiale.

Armement : l’Allemagne veut piller la France

Armement : l’Allemagne veut piller la France

 

Inutile de tourner autour du pot les difficultés de la coopération franco-allemande viennent essentiellement des velléités hégémoniques de l’Allemagne sur  la totalité du matériel militaire y compris dans des domaines où la France est nettement en avance. C’est le point de vue de Vauban  (groupement d’une vingtaine d’experts du secteur )

 

Tribune

 

En avril 1933, quelques mois seulement après l’arrivée d’Hitler par les urnes au pouvoir, Jacques Bainville, le grand historien des relations franco-allemandes, écrivait que « l’histoire des deux peuples se poursuit. Elle offre, dans cette phase qui finit et dans celle qui commence, ce caractère redoutable que jamais les Français n’ont si peu compris les Allemands. Leurs raisonnements et leurs sentiments nous échappent« . Trente ans plus tard, la même incompréhension demeurait : le préambule interprétatif imposé par le Bundestag le 15 juin 1963 au Traité de l’Élysée, en rappelant les buts de la politique étrangère allemande – la défense commune dans le cadre de l’Alliance de l’Atlantique nord, l’intégration des forces armées des États membres du pacte et l’abaissement des frontières douanières entre la CEE et le monde anglo-saxon – défaisait l’esprit et la lettre même d’un Traité, centré sur l’autonomie d’une défense franco-allemande et le marché douanier

Cinquante-six ans plus tard, la même séquence se déroule : le Traité d’Aix la Chapelle du 22 janvier 2019, censé mettre sur les rails une coopération franco-allemande régénérée se heurtait de nouveau aux fondamentaux allemands : par trois déclarations successives, dont a du mal à croire qu’elles n’ont pas été visées auparavant par la Chancelière, la ministre de la Défense, Mme Annegret Kramp-Karrenbauer, mettait fin brutalement aux chimères de M. Macron sur l’autonomie européenne dans la défense, en rappelant que l’OTAN demeurait la pierre angulaire de la défense de l’Europe et que l’autonomie stratégique européenne était une illusion. Si le fond n’a pas surpris les observateurs, la forme des propos et leur ton ont étonné et démontré nettement l’agacement allemand face aux obstinations utopiques des dirigeants français.

France et Allemagne, deux destins très différents

L’ironie de l’Histoire des deux peuples, d’Adenauer continuée à Angela Merkel, est que précisément l’échec de la politique allemande d’Emmanuel Macron partage la même cause première que celle qui a fait échouer l’alliance franco-allemande voulue par De Gaulle : le destin fondamentalement différent de la France et de l’Allemagne.

1/ Paris, une vocation mondiale ; Berlin, une vocation continentale
Paris aurait dû d’abord comprendre que sa vocation est mondiale quand celle de l’Allemagne n’est que continentale. La grande erreur géopolitique des dirigeants français depuis la mort de Georges Pompidou aurait été de faire de l’Europe l’horizon indépassable de la France et de l’Allemagne, son allié exclusif. Or, nul n’est plus faux et contraire à la vocation de la France. Son Histoire comme sa géographie en ont fait une grande puissance mondiale dont les intérêts sont autant en Méditerranée que dans le nouvel axe indo-Pacifique, qui se construit.

En ce sens, Athènes, New-Dehli, Jakarta ou Canberra sont des alliés plus conformes à la vocation mondiale de Paris que Berlin, dont le rayonnement n’est ni politique, ni géographique, mais uniquement mercantile (avec la Chine, les Etats-Unis et la Russie). Cette erreur française de se focaliser uniquement sur l’Allemagne en Europe n’est pas commise par l’Allemagne qui n’envisage la France que comme un partenaire comme un autre, à côté des Pays-Bas, de la Norvège, de l’Espagne, etc…

2/ Allemagne : récupérer les leviers du pouvoir
Paris aurait dû comprendre après que la diplomatie n’est pas affaire d’altruisme mais exclusivement de réalisme. Si en France, on parle de « couple franco-allemand », de « moteur franco-allemand », de « solidarité franco-allemande », en Allemagne, on ne parle que le langage du réalisme mercantile. A la doctrine de Mme Goulard, fondée sur un altruisme français consenti au nom d’une Europe fédérale, Berlin oppose la Realpolitik la plus dure. La déclaration de Mme Merkel en clôture du conseil franco-allemand de défense du 5 février en a été l’illustration : le Mali a été évoqué comme le programme de modernisation du Tigre, mais l’essentiel des propos de la Chancelière visaient à imposer la renégociation des accords bilatéraux et notamment la parité que l’Allemagne exige pour elle sans la respecter pour les autres.

L’Allemagne, et c’est son bon droit, mène la politique de ses intérêts : si elle n’écoute pas encore ses modernes Haushofer [1] mais en prépare le terrain idéologiquement [2], nul ne peut ignorer que Berlin a pour ambition de récupérer peu à peu les leviers d’un véritable pouvoir : la connaissance (par le spatial) et l’influence (par un siège au conseil de sécurité des Nations-Unies).

3/ Des doctrines militaires radicalement différentes
Paris aurait dû comprendre ensuite que la doctrine militaire ne convergera jamais avec celle de Berlin. Armée expéditionnaire, la France mène une Blitzkrieg dynamique contre l’islamisme qui est la seule vraie menace de l’Europe ; armée parlementaire, la Bundeswehr reste l’arme au pied face à la Russie dans une Sitzkrieg dépassée. Armée autonome, l’armée française s’affranchit des pesanteurs d’une OTAN mort cliniquement ; armée intégrée à l’OTAN dès sa création en 1956, la Bundeswehr est une armée stationnaire aux concepts d’emploi dépassés, erronés et aux équipements obsolètes, impropres à faire la guerre d’aujourd’hui et de demain. Puissance complète, la France possède une force de frappe à la fois nucléaire et conventionnelle, là où l’Allemagne n’a de capacités qu’imposées par l’OTAN. En un mot comme en cent : la France fait la guerre, l’Allemagne est grabataire.

Alors que la France a besoin d’un char mobile, léger et polyvalent (combat urbain et combat blindé), l’Allemagne en demeure au concept du Leopard, une masse compacte face à l’Est dans l’optique d’une nouvelle bataille de Koursk. Alors que la France a besoin d’un avion capable de porter son missile nucléaire aéroportée, de disposer d’une capacité d’entrer en premier dans des théâtres d’opération de grande intensité et de mener sur des milliers de kilomètres opérations de projection (au Mali comme en Indo-pacifique), l’Allemagne en reste à la coopération statique au sein d’une OTAN sclérosée : cela s’appelle le Framework Nations Concept et ne sert à rien face à l’islamisme ou aux menées du Grand Turc ou de la Chine le long des routes de la soie.

4/ Ce qui est allemand, n’est pas négociable
Paris aurait dû comprendre enfin que l’industrie de défense n’est pas considérée de la même manière en Allemagne. Même si elle n’a pas le caractère stratégique qu’on lui accorde à Paris, Berlin sait parfaitement bien la défendre. Dans le domaine de la politique industrielle, là où Paris multiplie les fonds, aussi ridiculement dotés qu’inutiles à sauver les fleurons des PME et PMI françaises, Berlin n’hésite pas à investir rapidement 464 millions d’euros dans Hensoldt, à soutenir OHB en dépit de ses déficiences techniques, à défendre Rheinmetall, jugé comme le pivot des consolidations allemandes, et garnir le carnet de commandes de TKMS par des opérations à la moralité douteuse (sous-marins et corvettes avec Israël) ou avec des pays qu’elle juge pourtant autoritaire (Égypte et Algérie).

 

Même si à Paris, on est bien conscient de la supériorité (réelle) des systémiers français face à leurs homologues allemands, Berlin sait mieux négocier que Paris. Manœuvrant silencieusement au milieu des braillements français, lisant tout en France avec d’autant plus de facilité que, si l’Allemand n’est plus enseigné en France, le français est une langue encore parlée en Allemagne, Berlin pousse ses pions. Avec un principe, affirmé avec force par Mme Merkel le 5 février dernier dans son allocution : ce qui est allemand, n’est pas négociable (domaine terrestre) ; ce qui est français (domaine aéronautique) doit être renégocié dans le sens des intérêts allemands.

Avec une méthode : l’irruption de tiers qui déstabilise l’adversaire et le renforce. L’irruption (injustifiée) de Rheinmetall dans le programme MGCS a diminué les parts françaises et renforcé celle de l’Allemagne ; l’intégration (incompréhensible) de l’Espagne dans le programme SCAF a diminué les parts françaises dans les lead-shares et work-shares, tout en renforçant ses positions ; l’intervention régulière des syndicats (IG Metall), des comités d’entreprise d’Airbus D&S et du Bundestag, donne un moyen de négociation considérable au gouvernement allemand sur la partie française et une constante épée de Damoclès sur Paris.

Avec un objectif : si la négociation n’aboutit pas ou si l’intérêt pour la coopération a changé au profit d’autres considérations, le plan B est actionné. On l’a vu dans le domaine des missiles dans le passé ; on pourrait le voir demain avec le MGCS (via l’alliance Rheinmetall-BAe Systems), le SCAF (reconstitution de l’axe Eurofighter) ou le MAWS (avec le P-8 américain), si les négociations n’avancent comme l’Allemagne l’exige.

Même si Paris a imposé à Berlin des accords de minimis sur l’exportation d’armements, Paris s’illusionne sur le caractère ferme de cet engagement dans la future coalition allemande et ne devrait pas ignorer qu’après tout, les ventes d’armes ne pèsent que 0,06% des exportations globales du Standort Deutschland.

Allemagne, une attitude qui n’est pas choquante

Disons-le tout net : cette attitude globale de l’Allemagne n’est pas choquante. Ce qui est choquant, scandaleux et irresponsable, est la légèreté française à s’être engagée dans ces coopérations avec un partenaire qui n’a rien en commun avec la France, dont on ne connaît rien (ni langue ni culture ; ni mentalités ni constitution) parce qu’on s’est interdit même de se renseigner sur lui, d’avoir accepté la parité quand elle n’avait aucune raison d’être concédée, et d’avoir tout misé sur une stratégie sans plan de sortie. Bref, de n’avoir rien appris ni compris de l’Allemagne.

Dès 1920, pourtant, la France était avertie par le même historien : « la politique, les mœurs, la philosophie et la littérature des Allemands, voilà ce qui ne doit pas être perdu de vue, ce qui demande à être analysé avec suite et pénétration si nous ne voulons pas être encore surpris, si nous voulons profiter des chances que la situation nous apporte » [3]. Au gouvernement français de retenir cette leçon avant de s’avancer en pays inconnu et de risquer ainsi les futures capacités majeures de nos armées dans une aventure plus sentimentale que rationnelle.

[1] Père de la géopolitique allemande, 1869-1946.

[2] Voir notamment le rapport de la SWP d’août 2017 intitulé : « Ambitionierte Rahmennation : Deutschland in der Nato Die Fähigkeitsplanung der Bundeswehr und das « Framework Nations Concept », Rainer L. Glatz / Martin Zapfe, August 2017. https://www.swpberlin.org/fileadmin/contents/products/aktuell/2017A62_glt_Zapfe.pdf.

[3] Préface de l’Allemagne réaliste et romantique, éditions Fayard, page 11, mai 1920.

Armement : l’Allemagne veut s’approprier la technologie française

Armement : l’Allemagne veut s’approprier la technologie française

 

Rien ne va plus en matière de coopération franco allemande à propos des perspectives de développement du matériel militaire. Deux raisons à cela l’Allemagne préfère se mettre sous l’aile américaine afin de d’éviter des mesures de rétorsion économique contre les exportations allemandes. Seconde raison, l’Allemagne veut s’approprier des technologies militaires sur laquelle la France est en pointe notamment concernant les futurs avions.

 

 

L’Allemagne est en train de détricoter l’ensemble des coopérations avec la France et joue un jeu très inquiétant sur le projet de modernisation de l’hélicoptère de combat Tigre, le Tigre Mk3, qui reste un équipement critique pour l’armée française, et sur le projet du futur avion de patrouille maritime (programme MAWS). Sur ces deux programmes, l’armée allemande lorgne sans état d’âme du côté des Etats-Unis, plus particulièrement du côté de Boeing : des Apache AH-64E à la place des Tigre et des P-8A Poseidon à la place du programme MAWS. Si elle confirmait ses choix américains, l’Allemagne n’en sera pas à sa première déloyauté vis-à-vis de la France (missile MAST-F, observation spatiale…)

Dans le même temps, les industriels français jouent le jeu des équipiers modèles dans les programmes Eurodrone (drone MALE) et MGCS, sous leadership allemand. Ce qui n’est pas vraiment le cas des Allemands dans les négociations dans le cadre du SCAF (Système de combat aérien du futur).

 

La faiblesse du commerce extérieur français comparé à l’Allemagne

La faiblesse du commerce extérieur français comparé à l’Allemagne

 

Une chronique de Matthias Fekl est avocat, ancien ministre dans l4opinion

 

En 2020, l’effet papillon a cédé la place à l’effet pangolin, et les effets d’un battement d’ailes ont été remplacés par les conséquences imprévisibles d’un virus à diffusion mondiale. Si les économies ont souvent été placées en quasi-arrêt, avant de tourner au ralenti, l’international a été particulièrement impacté, même si l’effondrement initial a été suivi d’un impressionnant rebond à partir du troisième trimestre.

Au niveau macroéconomique, les restrictions imposées au niveau national par les Etats, voire la fermeture même des frontières, ont induit d’importantes perturbations dans les chaînes de valeur et l’organisation logistique.

Au niveau microéconomique, les entreprises ont été confrontées à de nombreuses difficultés concrètes : les variations dans les régimes généraux et les règles douanières applicables ont créé un climat d’incertitude inévitable, mais préjudiciable. Les restrictions de déplacement ont compliqué la prospection de nouveaux marchés, en tout cas selon les modalités traditionnelles, tout comme la bonne mise en œuvre des services après-vente.

Urgence. Bien sûr, les autorités ont apporté des réponses pertinentes face à l’urgence. On pense par exemple, en France, au renforcement et à la modernisation de l’assurance prospection, au soutien au volontariat international en entreprise et à l’amélioration des outils de financement à l’export. Bien sûr aussi, les entreprises ont su faire preuve d’inventivité et de capacités d’adaptation remarquables, en particulier en accélérant, pour nombre d’entre elles, des mutations en tout état de cause indispensables, notamment sur le numérique et la digitalisation.

La pandémie est venue frapper, avec la France et l’Allemagne, deux pays aux positionnements assez singulièrement distincts en termes d’insertion dans l’économie mondiale

Dans une perspective comparatiste, la pandémie est venue frapper, avec la France et l’Allemagne, deux pays aux positionnements assez singulièrement distincts en termes d’insertion dans l’économie mondiale. Certes, l’impact est sensible sur le commerce extérieur dans les deux pays. En France, les exportations de biens ont baissé de près de 16 % par rapport à 2019 et les importations de 13 %, le déficit commercial passant de près de 58 à plus de 65 milliards d’euros ; les exportations de services ont chuté de près de 18 % et les importations de près de 14 %. En Allemagne, sur la même période, les importations ont baissé de plus de 7 % et les exportations de plus de 9 %, le solde commercial atteignant son niveau le plus bas depuis 2011.

La comparaison, cependant, s’arrête là. Car si la pandémie produit partout son impact, elle vient heurter un commerce extérieur français déjà structurellement déficitaire depuis plus d’une décennie, là où l’Allemagne connaît des excédents commerciaux records, fréquemment supérieurs à 200 milliards d’euros. Même en 2020, année la plus mauvaise en une décennie, l’excédent est encore de près de 180 milliards d’euros.

« Mittelstand ». De nombreux facteurs entrent en ligne de compte pour expliquer ces différentiels. En premier lieu, l’économie allemande est largement structurée par des PME et entreprises de taille intermédiaire, souvent familiales, territorialement implantées, à la structure capitalistique ancrée, solide et durable, innovantes et ouvertes à l’international. C’est le fameux Mittelstand allemand, cœur du modèle de capitalisme rhénan et de son économie sociale de marché.

En deuxième lieu, les réformes difficiles et souvent douloureuses conduites en Allemagne ont amélioré sa compétitivité-coût. En troisième lieu, l’innovation et le positionnement sur le haut de gamme dans de nombreux secteurs ont conforté le pays dans la conquête et la consolidation de parts de marché à l’étranger.

En France, l’internationalisation de nos entreprises reste un défi constant. La « Team France Export » le sait bien qui s’attelle à ce chantier depuis de longues années. Le think tank « La Fabrique de l’exportation » vient de publier un stimulant Manifeste pour le renouveau de l’exportation française qui propose de prendre le sujet à bras-le-corps : approche stratégique des marchés mondiaux de demain, montée en gamme, digitalisation, coopération entre entreprises et structuration des filières, développement d’une véritable culture économique internationale venant irriguer toutes les réflexions et actions des entreprises… les dossiers sont nombreux, la concurrence est rude et si la pandémie permet d’accélérer certaines mutations essentielles, tout n’aura pas été perdu.

Deuxième sujet de différenciation forte entre les deux pays que la pandémie n’a pas modifié en profondeur : la montée en puissance constante de la Chine en tant que partenaire économique de l’Allemagne. Pour la France, l’Allemagne était en 2020, le principal client de la France (plus de 60 milliards d’euros), suivie par l’Italie et les Etats-Unis pour respectivement plus de 32 milliards d’euros. L’Allemagne était aussi le premier fournisseur de notre pays, à hauteur de 70 milliards d’euros, suivie par la Chine (plus de 56 milliards) et l’Italie (un peu plus de 39 milliards). Pour l’Allemagne, en revanche, la France n’était que le troisième client (certes pour 91 milliards d’euros), derrière la Chine (près de 96 milliards) et assez loin derrière les Etats-Unis (près de 104 milliards). La Chine est le premier fournisseur de l’Allemagne avec plus de 116 milliards d’euros et la France n’est pas dans le top 3.

Si l’ancrage européen demeure pour l’Allemagne une nécessité autant qu’un principe fondateur, son regard se porte toujours plus vers l’est et l’Asie

Projection économique. Ainsi la Chine est-elle, pour la cinquième année consécutive, le partenaire commercial le plus important de l’Allemagne. Malgré les difficultés inouïes de l’année 2020, les échanges commerciaux avec la République populaire ont ainsi augmenté de 3 % par rapport à l’année précédente pour s’établir à plus de 212 milliards d’euros. Ces chiffres illustrent à eux seuls l’étroite imbrication qui caractérise désormais les relations économiques entre l’Allemagne et la Chine, état de fait dont l’importance ne saurait être sous-estimée.

Si l’ancrage européen demeure pour l’Allemagne une nécessité autant qu’un principe fondateur, son regard se porte toujours plus vers l’est et l’Asie, débouchés chaque année plus importants pour ses produits. Là où une France au solde commercial déficitaire cherche à se protéger derrière des frontières européennes renforcées, l’Allemagne, forte d’excédents commerciaux gigantesques qui la rendent très attentive à son positionnement sur les marchés d’avenir, est davantage dans une logique de projection économique internationale, même si elle a, elle aussi, besoin de règles pour la mondialisation. Ce différentiel économique se traduit ainsi en différences d’approches géopolitiques, comme en témoigne, en période récente, le volontarisme, voire le forcing de la chancelière pour parvenir à la conclusion de l’accord d’investissement entre l’Union européenne et la Chine à la fin de la présidence allemande de l’UE.

La pandémie vient ainsi souligner certains mouvements de plus long terme à l’œuvre tant au sein des économies nationales que dans leurs internationalisations respectives – mouvements qui ne facilitent pas l’alignement spontané des intérêts et des stratégies entre la France et l’Allemagne.

Matthias Fekl est avocat, ancien ministre

L’Allemagne partenaire privilégié des États-Unis ?

L’Allemagne partenaire privilégié des États-Unis ?

 

 

Pour l’ancien ambassadeur Michel Duclos, l’Allemagne risque d’être le partenaire privilégié États-Unis ( interview dans l’Opinion)

 

 

Une semaine après la conférence de Munich sur la sécurité, qui a vu la réaffirmation du lien transatlantique, un Conseil européen extraordinaire se tient jeudi et vendredi par visioconférence. Au côté de la lutte contre la pandémie, les questions de sécurité et de défense sont au menu.

Michel Duclos est conseiller spécial géopolitique à l’Institut Montaigne.

Dans une récente note pour l’Institut Montaigne, vous évoquez un « débat entre experts américains » sur le thème « quel partenaire privilégier en Europe ? » De quoi s’agit-il ?

Pour faire « bouger » l’UE, les Américains sont toujours passés par les capitales des Etats membres, d’autant plus qu’ils sont mal à l’aise avec cette institution sui generis qu’est l’Union et que les relations bilatérales restent importantes en diplomatie, y compris pour atteindre des objectifs dans des enceintes multilatérales. Par le passé, ils ont beaucoup compté sur Londres mais ce chapitre est terminé. Sur qui s’appuyer alors ? Les Allemands, très atlantistes mais en retrait sur la Chine ? Les Français, en dehors du mainstream sur la Russie et la défense européenne mais présents sur les théâtres d’opérations et sur les enjeux globaux ? Les Britanniques, décidés à retrouver un rôle global, désireux de se rendre utiles, mais handicapés par l’affaiblissement de leurs liens avec l’UE et dont le crédit international reste incertain ? Alors que la carrière d’Angela Merkel touche en outre à sa fin, les Américains voient bien qu’Emmanuel Macron est celui qui, en Europe, a le plus d’idées, d’énergie, d’ambition, et donc qu’il fait figure de « chef de file » – même s’il est contesté. Mais, se demande-t-on dans les think-tanks outre-Atlantique et probablement désormais au sein de l’Administration, peut-on faire confiance à ce président français qui a constamment à la bouche les mots d’«autonomie stratégique » et de « dialogue avec la Russie » ? Sur le sujet capital de la Chine, le « De Gaulle qui est tapi dans Macron » – formule souvent utilisée chez les experts américains – ne va-t-il pas pousser l’Europe vers une forme d’équidistance entre Pékin et Washington ?

Quel serait le choix naturel de Washington ?

Privilégier la relation avec l’Allemagne. Mais la Chancelière inquiète : elle a poussé à l’accord sur les investissements avec la Chine et ne veut pas entendre parler de l’annulation du gazoduc russe Nord Stream 2. On peut donc imaginer un scénario dans lequel, du point de vue américain, les Français se révèlent les plus fiables. Un autre scénario serait que l’attention des Etats-Unis, revenue vers l’Europe, se détourne d’elle de nouveau.

Existe-t-il, au sein de l’Administration Biden, un « tropisme pro-allemand » comme on l’entend parfois à Paris ?

C’est très probable. L’une des forces de l’Allemagne, vue des Etats-Unis, est d’apparaître plus fédératrice que la France, plus représentative d’un axe moyen des pays européens. De manière générale, l’establishment américain connaît mieux l’Allemagne que la France. Le différentiel de poids économique se traduit aussi par un différentiel d’influence. Ce sont des fonds allemands qui financent les départements d’études européennes dans les universités américaines. Enfin et surtout, les équipes Biden proviennent largement de l’Administration Obama qui travaillait étroitement avec Berlin. Les Français ont cependant des atouts : l’excellence de la coopération politico-militaire, quelques brillants jeunes gens dans les think-tanks washingtoniens, et l’agilité diplomatique aiguisée comme membre permanent du Conseil de Sécurité.

«Compte tenu de l’envergure et de l’expérience de Mario Draghi, y compris son expérience américaine, il faut s’attendre à ce que l’Italie joue de nouveau un rôle, au moins sur les affaires économiques. De surcroît, Rome préside le G20, à un moment où la coordination de la relance mondiale va devenir cruciale»

Vu des Etats-Unis, l’Europe se résume-t-elle à l’E3 (Paris, Londres, Berlin) ?

L’Europe ne s’est jamais résumé à trois pays. Par exemple, sous Trump, la Pologne et la Hongrie comptaient à Washington. Compte tenu de l’envergure et de l’expérience de Mario Draghi, y compris son expérience américaine, il faut s’attendre à ce que l’Italie joue de nouveau un rôle, au moins sur les affaires économiques. De surcroît, Rome préside cette année le G20, à un moment où la coordination de la relance mondiale post-Covid va devenir cruciale.

L’UE, en tant que telle, peut-elle être un partenaire crédible pour Washington ?

Difficile à dire. Si l’on prend les sujets majeurs (changement climatique, numérique, Chine, commerce, voire Russie et Turquie), c’est à Bruxelles que les choses se décident. Le nouveau secrétaire d’Etat, Antony Blinken, ne s’y est pas trompé. Il a participé il y a quelques jours à une réunion virtuelle des ministres des Affaires étrangères de l’UE. En sens inverse, les affaires européennes sont jusqu’à présent vues à Washington par le prisme de l’Otan. De surcroît, la polyarchie qui dirige Bruxelles se prête mal à un dialogue de haut niveau avec Washington. On voit mal la présidente de la Commission négocier directement dans le Bureau ovale la taxation des Gafa. Il serait donc utile que la France et l’Allemagne jouent un rôle de porte-parole officieux et organisent le dialogue Europe/Etats-Unis, en impliquant des partenaires comme les Italiens, et en prenant garde au fait que le Royaume-Uni pourrait jouer un rôle de nuisance.

Industrie de défense française : le risque d’une appropriation par l’Allemagne

Industrie de défense française : le risque d’une appropriation par l’Allemagne

Par  d’Aymeric Chauprade,  spécialiste de géopolitique, auteur de nombreux ouvrages, Aymeric Chauprade a été député européen FN avant de s’en éloigner ( tribune dans l’Opinion)

 

 

Le programme franco-allemand SCAF (Système de combat aérien du futur) résume à lui seul l’histoire étrange d’une grande nation scientifique et industrielle, la France, qui, sous la double emprise de son obsession idéologique et de son complexe d’infériorité, s’apprête à détruire l’un de ses derniers atouts : son industrie de défense.

Entre 2012 et 2017, deux vieilles nations de poids géopolitique comparable, la France et le Royaume-Uni, deux ex-puissances coloniales, lassées de leurs guerres séculaires depuis le Moyen-Âge, alliées des deux grandes guerres du XXe siècle, discutent pour imaginer ensemble l’avion de combat du futur. Paris et Londres ont signé les accords de Lancaster House en 2010, et ont tout intérêt à unir leurs forces. Des démonstrateurs voient le jour, le Dassault Neuron en 2012, le BAE Systems Taranis en 2013. Au sommet franco-britannique d’Amiens, en 2016, les deux pays s’accordent pour réaliser ensemble un démonstrateur. Puis tout s’arrête.

Que s’est-il passé ? Un nouveau président est élu en France, qui, comme ses prédécesseurs, pense que l’habit présidentiel est indissociable du « pas de deux » avec la chancelière allemande, laquelle est trop maligne pour ne pas comprendre que le moment est venu de briser dans son élan la coopération franco-britannique.

Tellement bon. Le 13 juillet 2017, Angela Merkel et Emmanuel Macron annoncent leur intention de développer conjointement plusieurs systèmes d’armes. Les Allemands et les Français feraient ensemble l’avion de combat du futur (un système de combat aérien constitué d’un futur avion habité de nouvelle génération, entouré d’un essaim de drones), le char lourd de combat du futur, le drone européen du futur, le drone maritime du futur…

Même si les Espagnols et les Italiens ne sont pas oubliés, les Français et les Allemands se répartissent les leaderships sur les différents programmes. C’est tellement bon pour un Français de se sentir l’égal d’un Allemand et au-dessus d’un Italien ou d’un Espagnol, et de tous les autres…

Les Français, qui ne croient plus guère aux chars lourds depuis la fin de la Guerre froide, donnent aux Allemands le leadership du MGCS (Main Ground Combat System), mais ils gardent naturellement la main sur le SCAF (Système de combat aérien du futur) pour une raison évidente : dans cet aréopage industriel, Dassault Aviation est le seul industriel à savoir fabriquer un avion de combat.

Dès 2017, les industriels français ne sont pas dupes, mais ils obéissent le petit doigt sur la couture du pantalon à la volonté (idéologique) du Politique, lequel tient entre ses mains les deniers nécessaires pour lancer les études, les démonstrateurs… A Paris, et quels que soient les états-majors politiques, du PS aux LR en passant par LREM, l’idéologie franco-allemande est puissante ; on a le droit de la maudire en privé, mais jamais de la critiquer en public. Tant pis si pour la réalité, « l’avenir est européen donc franco-allemand ». Le Brexit vient d’ailleurs donner encore plus d’eau au moulin des thuriféraires du « moteur franco-allemand ».

Supériorité. 5 février 2021, Sommet franco-allemand, crise majeure sur les programmes communs de défense… Arrive donc ce qui devait arriver : les Allemands reprochent aux Français de ne pas avancer sur le char, tandis que les Français reprochent aux Allemands de ne pas avancer sur l’avion. Les Allemands veulent tout rediscuter : ils exigent davantage sur la propriété intellectuelle ; ce qu’ils veulent en réalité, c’est que les Français transfèrent la technologie qu’ils n’ont pas dans le domaine de l’aviation de combat.

Certains à Paris découvrent « l’eau chaude » : l’Allemagne est en train de se servir de ses alliances pour combler son retard en matière d’industrie de défense. Plus faible économiquement que l’Allemagne, la France est en train d’offrir aux Allemands, sur un plateau, le seul avantage comparatif qu’elle conservait : sa supériorité dans le domaine de la défense !

Une alliance industrielle de défense entre la France et l’Allemagne n’a aucun sens : la première a tout à perdre, la seconde tout à gagner.

La crise révèle pourtant bien plus qu’une simple friction d’ego sur un partage de compétences. En vérité, l’Allemagne et la France n’ont pas les mêmes objectifs géopolitiques et leurs besoins militaires sont, fort logiquement, très différents. On peut se rassurer en répétant que bâtir des systèmes d’armes ensemble ne va pas de soi et exige des sacrifices de part et d’autre ; ce serait vrai si le problème n’était pas bien plus profond que cela ! La vérité est qu’une alliance industrielle de défense entre la France et l’Allemagne n’a aucun sens : la première a tout à perdre, la seconde tout à gagner en utilisant l’alliance comme un sas de transfert de technologies.

Certes l’Allemagne dispose aussi de technologies de qualité, sauf que nous n’en avons pas besoin ! Nous savons tout faire seuls, avec nos propres industries : un avion de combat, un moteur ultra-performant, un cloud, des drones, un système de systèmes…

Puissance continentale, l’Allemagne reste profondément attachée à l’OTAN. Son armée est une composante du bloc transatlantique dirigé par Washington, prête à participer à une guerre de haute intensité contre la Russie. Face à la Russie, les Etats-Unis ont besoin de chars lourds prépositionnés en Allemagne, donc de chars allemands. Certes la France a encore des chars lourds (l’excellent char Leclerc) mais elle a abandonné depuis longtemps le modèle de la Guerre froide et n’a projeté ses chars ni en Afghanistan ni en Afrique. L’armée de terre française mise maintenant sur la mobilité des blindés à roue du programme SCORPION (le Griffon et le Jaguar), elle préfère les missiles aux canons des chars lourds.

De temps en temps, pour que l’on ne doute pas trop de notre volonté otanienne, nous mettons à disposition quelques Leclerc pour des manœuvres anti-russes dans les pays Baltes, mais tout cela n’est pas sérieux. Ce qui est sérieux, c’est le Mali (là où meurent nos soldats, ne l’oublions pas), ce sont nos frappes contre l’Etat islamique, c’est la nécessité de devoir naviguer dans toutes les mers et les océans là où le drapeau français flotte, des Caraïbes jusqu’au Pacifique Sud en passant par l’océan Indien.

Besoins opérationnels. L’Allemagne, elle, n’est ni membre du Conseil de sécurité de l’ONU, ni une puissance nucléaire ; elle ne se projette pas en Afrique et n’a pas à protéger un espace maritime comme celui de la France (le deuxième derrière les Etats-Unis). L’Allemagne n’a pas besoin que son chasseur de combat du futur soit capable de se poser sur un porte-avions pour être projeté au Moyen-Orient ou en Afrique, ou qu’il soit prêt à emporter des missiles à tête nucléaire.

Nos besoins opérationnels sont encore ceux d’un pays qui agit de manière souveraine sur des théâtres où il entend garder une influence. Nous voulons dissuader et nous projeter, car nous voulons rester une puissance crédible dans un monde de plus en plus multipolaire et où notre influence dépendra de plus en plus de notre capacité à défendre des gouvernements contre des forces islamistes, et à protéger des espaces maritimes contre les nouvelles poussées impériales, en Méditerranée comme mer de Chine orientale ou dans le canal du Mozambique.

Au-delà de l’incompatibilité des buts géopolitiques entre Paris et Berlin, laquelle fonde une incompatibilité en termes de coopération industrielle de défense, s’ajoutent des divergences graves en matière de règles d’exportation des armes. A quoi bon développer des armes avec un partenaire dont on sait déjà qu’il n’a pas la même philosophie pour les vendre ? Nous avons (finalement, et après, il faut le dire, beaucoup d’obstacles mis sur notre chemin par nos alliés américains) exporté notre Rafale, et nous continuerons à le faire.

Où avons-nous exporté ? Vers des pays qui cherchaient une troisième voie entre les Américains et les Russes. En Inde, en Grèce (car les Américains sont à la fois avec les Grecs et les Turcs), et demain dans tous les pays qui voudront se donner cette marge de manœuvre géopolitique qu’offre l’armement français.

Gauchisme et atlantisme. Compte tenu de la nature du système politique allemand, du poids du Bundestag dans la décision d’exportation allemande, mais aussi du poids de la gauche allemande pacifiste au Bundestag, qui peut imaginer une politique d’exportation cohérente d’éventuels matériels de défense franco-allemand ? Comment une telle politique d’exportation pourrait-elle échapper à la double action du gauchisme et de l’atlantisme, à la fois au Bundestag et au Parlement européen ?

Dassault sait faire des avions de combat, Safran des moteurs. Nous avons profusion d’industries françaises qui disposent de toutes les compétences.

Aujourd’hui, on a certes le droit de critiquer les choix français d’exportation d’armement mais personne ne pourra leur reprocher leur cohérence avec nos choix géopolitiques : nous voulons limiter l’expansionnisme d’Erdogan de la Libye jusqu’à la Méditerranée orientale, et l’influence de ses alliés, les Frères musulmans : il est alors logique de renforcer militairement les Grecs, les Emiratis, les Egyptiens.

Il y a bien plus de symétrie, et donc de synergies potentielles, entre ces deux ex-puissances coloniales, aujourd’hui puissances ultramarines, que sont la France et l’Angleterre, qu’entre la France et l’Allemagne. Qu’est-ce donc qui commande alors ce tropisme fusionnel avec l’Allemagne, au point d’être prêt à livrer à nos amis allemands notre fruit défendu le plus précieux : la BITDF (Base industrielle et technologique de défense française) ?

Irréversible. Dassault sait faire des avions de combat, Safran des moteurs d’avions de combat. Et nous avons, dans notre écosystème de défense, tous les industriels à disposition pour faire des drones, un cloud, un système de systèmes… Nous avons profusion d’industries françaises qui disposent de toutes les compétences. Pour des développements ciblés, nous avons les Britanniques et nous savons que la coopération bilatérale avec eux fonctionnera car ils sont imperméables à l’idéologie et ne s’engagent que s’ils y ont intérêt.

Le Président Macron doit faire un choix : soit il poursuit, comme si de rien était, à l’abri du discours confortable de l’idéologie franco-allemande, et il appuie alors sur le bouton irréversible du transfert de nos avantages aux Allemands, déshabillant ainsi la souveraineté industrielle française avec comme seul résultat l’effacement du retard allemand. Soit il profite du « reset » économique mondial qui se prépare pour relancer une grande politique industrielle de défense française.

Comment ? En annonçant qu’une large coalition d’industriels français va travailler sans frein pour inventer et produire l’avion du futur français, le successeur du Rafale en 2040, lequel sera de facto une réussite européenne et mondiale.

Industrie de défense: Le vrai combat entre la France et l’Allemagne

Industrie de défense: Le vrai combat entre la France et l’Allemagne

 

Jean Dominique Merchet  dans  un article de l’Opinion explique les enjeux industriels des différends entre la France et l’Allemagne .

Le conseil franco-allemand de défense et de sécurité, se réunit ce vendredi 5 février par visio-conférence, autour d’Emmanuel Macron et d’Angela Merkel, avec leurs ministres de la défense et des affaires étrangères. Selon l’Elysée, cette réunion portera sur « le renforcement de la souveraineté européenne ». La précédente réunion du conseil franco-allemand de défense et de sécurité (CFADS) s’était tenue le 16 octobre 2019 à Toulouse.

Entre la France et l’Allemagne, « ça coince à tous les étages » sur la défense, assure un bon connaisseur du dossier. Malentendus, incompréhensions réciproques et divergences de visions ou d’intérêts dominent la relation bilatérale entre les deux capitales, malgré les éléments de langage positifs et volontaristes réitérés à foison.

On l’a encore vu vendredi 5 février à l’occasion de la réunion du conseil franco-allemand de défense et de sécurité, par visioconférence, entre Emmanuel Macron et Angela Merkel, en présence des ministres de la Défense et des Affaires étrangères. Les programmes industriels en coopération, la question de l’« autonomie stratégique » portée par la France et le lien transatlantique, les opérations en Afrique ou ailleurs, rien n’est facile… « Et ne l’a jamais été », ajoutent tous les familiers du franco-allemand.

Cette « relation a franchi, avec le traité d’Aix-la-Chapelle [2019], un nouveau palier, notamment grâce à̀ un rapprochement industriel », lit-on dans l’Actualisation stratégique 2021, le nouveau document de référence du ministère français des Armées. Où en sommes-nous en matière de programmes communs ?

Projets d’armement. Le cœur de la relation se décline en deux acronymes : SCAF et MGCS, deux grands projets d’armement dans le domaine aérien et terrestre annoncés en juillet 2017 et qui peinent à se concrétiser. Le Système de combat aérien du futur (Scaf) doit être l’avion de combat de demain et tout son environnement. La phase 1A du programme a été lancée en février 2020 pour une durée de dix-huit mois. Rendez-vous donc à l’été prochain pour la suivante, qui doit déboucher sur la commande ferme d’un « démonstrateur » capable de voler en 2026.

Les professionnels comptaient sur le salon du Bourget pour l’annoncer, mais celui-ci est annulé pour cause de pandémie. Le partage des tâches entre les deux pays, auxquels il faut désormais ajouter l’Espagne, s’avère complexe, d’autant que l’industrie française a, dans l’aéronautique, des compétences supérieures à celles de l’allemande.

En principe, la France – et Dassault Aviation – a le leadership, mais Outre-Rhin, on espère profiter du Scaf pour progresser notamment dans le domaine numérique (le combat cloud) ou les commandes de vol. Un sujet qui crispe les Français. La question des brevets sur les technologies innovantes reste délicate entre les entreprises concernées. Ajoutez à cela le fait que chaque étape du programme doit être systématiquement approuvée par le Bundestag (Parlement allemand), ce qui oblige à rediscuter des termes à chaque étape et parfois, à faire monter les enchères.

Le sujet est d’autant plus sensible que, parallèlement, un autre programme est en cours, celui du char du futur MGCS (Main Ground Combat System). Fort de leur succès avec les blindés Leopard et le poids de leur industrie (Rheinmetall, Krauss-Maffei Wegmann), les Allemands comptent se tailler la part du lion. Sauf à donner la moitié du gâteau à l’un et les deux tiers à l’autre, le français Nexter risque donc de faire les frais du partage industriel. La France perdrait ainsi, pour la première fois depuis 1915, sa capacité à concevoir, développer et produire un char de combat.

Fusil d’assaut. C’est déjà le cas dans l’armement léger, avec l’abandon de la filière de fusil d’assaut Famas au profit de l’allemand Heckler&Koch. Dans les blindés, les résistances des ingénieurs et de nombreux militaires français, qui aimeraient des engins à la fois moins lourds et plus innovants, sont fortes. L’évolution de la gouvernance de KNDS, l’alliance de Nexter et de Krauss-Maffei, ne les rassure pas avec la nomination, en décembre, de l’Allemand Frank Haun.

D’autres pays européens, comme la Pologne ou l’Italie, frappent à la porte de ce programme, mais la situation est tellement compliquée entre Paris et Berlin que les deux capitales ne veulent pas rajouter d’autres partenaires. Au risque de voir apparaître des programmes concurrents, comme c’est déjà le cas dans l’aéronautique. A côté de Scaf, les Britanniques – qui étaient engagés avec les Français jusqu’en 2017 – développent le Tempest en coopération avec l’Italie et la Suède. Verra-t-on, comme dans les années 80, les Européens se doter de deux avions de combat alors que les Américains sont toujours extrêmement présents sur ce terrain ? Le risque existe.

La question des exportations d’armement semble provisoirement résolue entre les deux pays, suite au Traité d’Aix-la-Chapelle de 2019. Les Français, moins regardants que les Allemands, craignaient en effet que ceux-ci ne bloquent l’exportation de matériels produits en commun pour des raisons politiques et humanitaires. Toutefois, l’éventuelle arrivée des Verts – sensibles à ce sujet – dans la prochaine coalition à Berlin inquiète la partie française.

En matière navale, enfin, la coopération franco-allemande est totalement inexistante, les deux pays étant même à couteaux tirés sur le marché des sous-marins. Des tensions existent également dans le domaine spatial. Naguère leader incontesté, la France va ainsi céder à l’Allemagne la place de premier contributeur (23 % contre 18,5 %) au sein de l’Agence spatiale européenne.

Industrie de défense. Comme le dit le député (LR) Jean-Louis Thieriot, qui estime « vitale » la coopération entre les deux pays, « nous, Français, avons une industrie de défense et les Allemands ont une défense de l’industrie ». L’analyse est très juste, même si le secteur de l’armement n’est pas aussi stratégique en Allemagne qu’il ne l’est en France, en comparaison de l’industrie automobile par exemple.

Reste que là où les politiques et les militaires français pensent d’abord « opérations » et rôle de la France dans le monde, leurs homologues d’outre-Rhin réfléchissent en terme « capacitaires ». Et donc industriels. Pas moins de douze pays européens utilisent, par exemple, le char Léopard 2, alors que la France n’est parvenue à exporter son Leclerc qu’aux Emirats arabes unis, à perte qui plus est. L’Allemagne est également parvenu à fédérer autour d’elle, et à bas bruit, une vingtaine de pays européens dans le cadre de son concept de « Nation cadre » (Framework Nation) en poussant l’intégration des structures militaires, notamment dans le cadre de l’Otan.

Brexit: le Royaume-Uni et l’Allemagne paye les conséquences

Brexit: le Royaume-Uni et l’Allemagne paye les conséquences

Les deux économistes Dorothea Bohnekamp et Holger Müller constatent, dans une tribune au « Monde », le fort recul des investissements et des échanges entre Berlin et Londres symptomatique de la désintégration des relations économiques entre les deux pays qui s‘accélère depuis cinq ans.

Tribune. 

 

Le refus du transporteur allemand DB Schenker de livrer des marchandises outre-Manche en raison de nombreux obstacles commerciaux et réglementaires apparus malgré le traité de libre-échange passé entre l’Union européenne (UE) et le Royaume-Uni paraît symptomatique de la désintégration des relations économiques entre le Royaume-Uni et l’Allemagne, qui s‘accélère depuis cinq ans.

Il a fallu peu de temps pour que les relations commerciales entre les deux pays pâtissent de l’impact du Brexit : entre 2015 et 2019, les exportations allemandes à destination de la Grande-Bretagne, en baisse de plus de 11 %, ont relégué l’économie britannique de la troisième à la cinquième place dans le commerce extérieur allemand.

L’un de ses acteurs les plus dynamiques, le secteur automobile, dont la vente de voitures et de composantes a enregistré une perte de 23 % en Grande-Bretagne durant cette période, se montre particulièrement vulnérable. Cette tendance baissière est appelée à s’intensifier en raison de la dévaluation de la livre sterling (de 13,5 %) face à l’euro, qui s’avère pourtant impuissante à relancer les ventes de produits britanniques en Allemagne, selon les chiffres fournis par la Chambre allemande d’industrie et de commerce.

Pire encore, la désorganisation plus récente des chaînes logistiques entre les deux pays, emblématique de leur forte imbrication industrielle, touche aujourd’hui plus de 54 % des entreprises allemandes implantées outre-Manche, poussant la moitié d’entre elles à rechercher de nouveaux sites de production, à en croire un sondage mené par la Chambre d’industrie et de commerce britannique.

Actuellement, on recense 2 267 entreprises allemandes, soit plus de 439 000 salariés, implantées au Royaume-Uni, et 79 % d’entre elles jugent la situation préoccupante, persuadées que le Royaume-Uni pourrait se classer parmi les économies peu attractives, juste avant… l’Iran !

Un rapport récent de la société d’audit Deloitte indique que le chiffre d’affaires (CA) de ces entreprises a baissé de 24 milliards d’euros depuis 2015 (– 12 %), en particulier celui des constructeurs automobiles (48 milliards de CA en 2019). Données confirmées par le cabinet KPMG, qui a sondé à l’automne 2020 des entreprises allemandes présentes en Grande-Bretagne : 33 % d’entre elles, touchées par l’effondrement du chiffre d’affaires en 2020 – lié bien sûr au Covid-19 – et les coûts supplémentaires générés par le Brexit, souhaiteraient délocaliser leur production vers l’Union européenne.

L’Allemagne prête à lâcher Navalny pour le gaz russe ?

L’Allemagne prête à lâcher Navalny  pour le gaz russe ?

 

Le nouveau leader démocrate-chrétien Armin Laschet, probable successeur de Merkel ,soutient fermement Nord Stream 2 mais son futur partenaire au pouvoir, les écologistes Verts, raidit leur opposition. C’est un peu l’éternel problème posé à l’Allemagne entre les valeurs démocratiques et le business.

Certes formellement l’Allemagne a aussi condamné l’emprisonnement de l’opposant russe à Poutine. Mais de là à menacer la Russie de sanctions économiques il y a un pas que l’Allemagne n’est peut-être pas prête de faire. Le problème c’est que le futur leader allemand doit tenir compte de son allié écologique.

L’affaire Navalny a incité les Verts à intensifier leur demande d’arrêt du pipeline et menace de paralyser le prochain chancelier, qui doit également faire face à l’opposition américaine et même aux doutes de la France, le plus proche allié de l’Allemagne.

Navalny, condamné mardi à 3-1 / 2 ans de prison après qu’un tribunal de Moscou a jugé qu’il avait violé les conditions de sa libération conditionnelle, a été arrêté le 17 janvier après son retour d’Allemagne en Russie où il a été traité pour empoisonnement avec un grade militaire. agent neurotoxique.

Sa condamnation a incité la chef des Verts Annalena Baerbock à faire pression sur le gouvernement de Merkel pour qu’il renonce au projet d’oléoduc politiquement chargé, dont la construction a été largement suspendue depuis décembre 2019 à la suite d’une menace de sanctions des États-Unis et du retrait d’une entreprise de pose de canalisations.

«Nous allons faire pression pour cela maintenant et à l’avenir», a déclaré Baerbock à la chaîne ZDF cette semaine lorsqu’on lui a demandé si le projet ne pouvait pas aller de l’avant avec son parti au sein du gouvernement allemand.

Plus de 90% du projet a été achevé et il devrait officiellement être lancé plus tard cette année.

Mais l’opposition des Verts a le poids de l’opinion des États-Unis et de nombreux autres en Europe. La dépendance du gazoduc à l’égard des services fournis par les pays bordant la mer Baltique surpeuplée signifie qu’il existe de nombreux points de pression: les retraits sous la pression américaine par des sociétés de certification de sécurité au Danemark et en Norvège pourraient encore torpiller le projet, selon une source Verte.

L’Allemagne et la Russie affirment que Nord Stream 2 n’est qu’un projet commercial. Washington a longtemps fait valoir que le gazoduc augmentera dangereusement l’influence de la Russie sur l’Europe. Le nouveau président américain Joe Biden estime qu’il s’agit d’un «mauvais accord pour l’Europe».

Notons aussi que l’union européenne et la France appelle aussi à la suspension de ce projet pour des motifs démocratiques.

Dette : l’Allemagne également pour ?

  • Dette  : l’Allemagne également pour ?
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  • En Allemagne officiellement commence à mettre en cause le principe qui limite le déficit budgétaire à 0,35 % du PIB. Dans le Figaro, l’‘économiste Nicolas Goetzmann explique ce possible revirement.
  • - En quoi consiste le débat outre-Rhin ?
  • NICOLAS GOETZMANN- L’équilibre budgétaire est un principe de valeur constitutionnelle Outre-Rhin. La règle d’or selon laquelle « les recettes et les dépenses doivent s’équilibrer » est en effet inscrite dans la loi fondamentale de la République fédérale (Art 115). Elle est renforcée en 2009, par la loi « Schuldenbremse » (« frein à l’endettement »), votée par la droite (CDU/CSU) et par la gauche (SPD).
  • La chancelière Angela Merkel a pris ses distances avec les propos du chef de la chancellerie, expliquant que la CDU continuerait de se ranger derrière la rigueur budgétaire
    • L’assouplissement des règles, évoqué en cette période de Covid-19, est avant tout une question politique en Allemagne. La discussion prend de l’ampleur ces derniers mois. Elle sera présente en vue des élections fédérales allemandes en septembre prochain, avec des volontés différentes selon les partis politiques.
    • Toutefois, au sein même de la CDU, parti majoritaire, les réactions négatives n’ont déjà pas tardé à pleuvoir après les propos du chef de la chancellerie. Dans la matinée, Eckhardt Rehberg, le monsieur Budget du parti, a notamment expliqué que la CDU continuerait de se ranger derrière la rigueur budgétaire. Il a indiqué que Helge Braun avait simplement exprimé une «opinion personnelle». Quelques plus tard, la chancelière Angela Merkel a également pris ses distances avec les propos du chef de la chancellerie, affirmant que son «opinion personnelle» n’était en rien celle du parti. En temps normal pourtant, il est rare que Helge Braun s’exprime sur ces sujets sans l’aval de la chancelière allemande.
    • Cela aurait-il une portée historique ?
      • Cette décision aurait bien une portée historique. Depuis le vote de la loi en 2009 au lendemain de la crise financière, il n’y a pas eu de précédent. Ces dernières années, la question ne s’était finalement pas posée car l’Allemagne était en excédent budgétaire.
      • Néanmoins, le ministre des Finances Olaf Scholz avait déjà évoqué l’idée en mars dernier. Il estimait surtout que le niveau d’investissement public en Allemagne est bien trop faible. Cela représente un véritable problème en terme du besoin du pays en infrastructures.
      • Cette année, le taux d’emprunt de l’Allemagne à dix ans se situe à -0.55%. En somme, les investisseurs paient pour prêter de l’argent. Il serait absurde de ne pas profiter de cette situation pour relever l’investissement public et accroître les potentiels de croissance du pays. Le « frein à l’endettement » peut constituer un obstacle pour la relance économique du pays.
      • Techniquement est-ce possible ?
        • Helge Braun estime qu’il est préférable de modifier la constitution allemande sur le déficit structurel, plutôt que de suspendre à plusieurs reprises la règle d’or à travers le parlement. Dans des circonstances exceptionnelles, le gouvernement fédéral peut demander à la chambre des députés l’autorisation de dépasser le seuil des 0,35%. En 2020, la rigueur budgétaire allemande a été mise à bas par la crise. Le pays a lancé son plan de 130 milliards d’euros pour des investissements d’avenir et une relance de la consommation, faisant alors sauter la règle du frein à l’endettement.
        • Techniquement, une telle modification de la constitution est possible. Seulement, pour réviser la constitution en Allemagne, il faut obtenir une majorité de deux tiers des députés. Dans les faits, cela semble très compliqué. Il me paraît ainsi peu probable que l’Allemagne entreprenne cette révision constitutionnelle.
        • Je pense que nous assisterons plutôt à une indulgence temporaire face à la crise, comme nous l’observons aujourd’hui au niveau européen. Les règles budgétaires issues du pacte de stabilité européen (stabilité des prix, 3% de déficit maximum, 60% d’endettement maximum également) ont été suspendues pour 2020 et 2021. Au printemps, la Commission européenne examinera si une prolongation de suspension est souhaitable pour 2022. Le Portugal, qui a pris la présidence du Conseil de l’UE en début d’année, a expliqué qu’il était préférable que les pays reviennent à leur niveau de PIB de 2019 avant de prôner à nouveau la rigueur budgétaire.
        • À mon sens, ces règles budgétaires et monétaires constituent un sérieux frein à la relance économique de l’UE. Elles sont à l’origine du déclassement européen, face aux États-Unis et à la Chine qui continuent de miser sur des investissements massifs. De 2008 à fin 2019, la croissance européenne fut comprise entre 8 et 9% en moyenne, face à un niveau de 22% aux États-Unis.
        • Comment la France doit-elle regarder ce débat Outre-Rhin ?
        • Pour comprendre le débat, il faut aussi considérer l’approche de l’Allemagne au niveau européen. Des processus européens sont en cours, avec à la fois la revue du pacte européen de croissance et la revue de politique monétaire de la BCE, dont le résultat doit être annoncé en fin d’année 2021. S’il y a un assouplissement de la politique monétaire au niveau européen pour soutenir la croissance, l’Allemagne en tant qu’Etat-membre aurait moins besoin d’assouplir ses règles budgétaires nationales pour relever ses investissements publics. Mais ce scénario demeure peu probable.
          • Je dirais que la France doit regarder favorablement le débat outre-Rhin. Les Allemands sont rigoureux, mais le conservatisme français est bien réel. Si l’on considère les dépenses publiques en milliards d’euros, et non par rapport au PIB, la progression a été plus importante en Allemagne qu’en France ces dix dernières années.
          • En Allemagne comme en France avec la crise du Covid, une augmentation d’impôts à moyen terme pourrait se présenter comme seule solution si on ne change pas les doctrines budgétaires. Pour relancer nos économies après la crise, il ne faut pas reproduire les politiques d’austérité du passé. Il ne faut plus avoir peur de dépasser les déficits, car le niveau de confiance du marché sur les dettes européennes est bien parti pour durer.

 

Un accord d’investissement sino-européen préparé en douce sous l’influence de l’Allemagne

Un accord d’investissement sino-européen préparé en douce sous l’influence de l’Allemagne

 

En vérité , les discussions ont commencé il y a environ cinq ans mais c’est la signature qui paraît un peu précipitée. Une signature qui pourrait intervenir dans les jours à venir sous l’insistance de la Chine bien sûr mais aussi de l’Allemagne qui veut développer ses implantations en Chine considérée comme le marché d’avenir.

Le problème c’est que cette problématique n’a pratiquement pas été abordée publiquement en France ni dans beaucoup d’autres pays européens.

La découverte publique de cette affaire pourrait une nouvelle fois poser la question de la fâcheuse tendance de l’Allemagne a privilégié son seul business. “L’accord pourrait être bouclé dès cette semaine”, a dit la source anonyme à Reuters ( un technocrate de Bruxelles sans doute)

“Notre accès au marché sera bien meilleur, de même que la protection de nos investissements en Chine. Nous travaillons depuis des années à l’amélioration de l’accès au marché et les Chinois ont fait un grand pas en notre direction”, a ajouté la source.

Annulation des dettes des Etats : l’Allemagne dit non

Annulation des dettes des Etats : l’Allemagne dit non

 

 

À travers la voix d’Isabel Schnabel, l’une des membres du directoire de l’institution, l’Allemagne demande de cesser les appels à l’annulation des dettes des  Etats. Observons qu’officiellement les membres de la BCE n’ont jamais évoqué jusqu’à maintenant cette hypothèse douteuse. Par contre, il a été suggéré que soit créées des sortes de caisse d’amortissement national de l’endettement généré par la covid. Des sociétés nationales de gestion qui isoleraient cette dette et l’amortiraient progressivement dans le temps. Une piste plus sérieuse que la pure annulation des dettes qui viendraient mettre en cause la fiabilité financière des Etats et leur capacité d’emprunt. Des emprunts incontournables.

“Une annulation des dettes nationales constituerait une violation claire des traités européens”, a dit ‘Isabel Schnabel.

Les appels à la BCE pour qu’elle annule purement et simplement les dettes émises par des Etats de la zone euro qu’elle détient en portefeuille proviennent entre autres d’Italie, l’un des pays les plus endettés de la région par rapport au poids de son économie.

En France, des députés européens de gauche et écologistes ainsi que plusieurs économistes avaient signé en septembre une tribune commune en faveur d’une telle annulation.

Immigration : l’exemple d’intégration de l’Allemagne

Immigration : l’exemple d’intégration de l’Allemagne

 

Le directeur de l’Ofii (Office français de l’immigration et de l’intégration), Didier Leschi, auteur de « Ce grand dérangement – L’Immigration en face » était l’invité vendredi de Julian Bugier. Il est revenu sur plusieurs propositions de son ouvrage pour favoriser l’intégration des étrangers qui viennent d’arriver en France.

Invité d’Europe 1, le directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), Didier Leschi, est revenu vendredi sur plusieurs propositions de son ouvrage Ce grand dérangement – L’Immigration en face, publié aux éditions Tractent Gallimard, pour favoriser l’intégration. Pour lui, l’idée est de disperser les nouveaux arrivants sur le territoire pour qu’ils ne soient pas ghettoïsés ou encore d’instaurer des plafonds d’élèves dans les classes issues des diasporas. Et il compare notamment le système d’accueil des réfugiés en France à celui de plusieurs pays d’Europe, dont l’Allemagne.

L’exemple de l’Allemagne

« Dans ces pays européens, les personnes qui obtiennent le statut de réfugié, on les oriente vers un hébergement ou un logement dès lors qu’elles n’ont pas la capacité de travailler parce qu’elles ne connaissent pas encore la langue suffisamment ou n’ont pas la formation suffisante. Eh bien, elles sont d’une certaine manière assignées à un endroit précis. On leur dit ‘Vous ne pouvez pas quitter cet endroit tant que vous n’avez pas acquis l’autonomie’, a expliqué l’auteur de Ce grand dérangement – L’Immigration en face.

 

Avant de poursuivre : « L’idée, c’est de lutter contre les ghettos parce que notre particularité, c’est que d’une certaine manière, on laisse après les personnes aller où elles veulent en fonction de leurs affinités de liens communautaires. Et malheureusement, elles peuvent aller dans des zones où la difficulté d’accès au logement est totale et où il n’y a pas de travail. »

« Des effets sur les générations futures »

Dans son ouvrage, Didier Leschi explique également que l’immigration est un phénomène essentiellement urbain et que 66% des immigrés résident dans une ville de plus de 100.000 habitants : « Prenons la Seine-Saint-Denis par exemple. Quand on a des classes où ceux qui ont le français comme langue maternelle sont minoritaires par rapport à ceux qui n’ont pas le français comme langue maternelle, on a des difficultés scolaires qui s’accumulent », pointe-t-il du doigt.

Le directeur de l’Ofii se base également sur un rapport de la Cour des comptes concernant justement la politique de la Ville : « Elle pointe deux choses. Elle dit très clairement ‘Nous n’avons pas une politique de peuplement et donc nous laissons les personnes s’accumuler dans les mêmes zones et ça a des effets sur les générations futures en termes d’intégration scolaire’ ».

Pour lui, les réseaux sociaux ne facilitent pas non plus l’intégration des nouveaux arrivants en France : « Pendant très longtemps, les étrangers rentraient dès leur arrivée dans le bain culturel et le bain linguistique. C’est ce que les enseignants appellent ‘l’immersion totale’, à la fois dans la langue, et à partir de cette langue, dans la culture. Aujourd’hui, vous avez des immigrants qui peuvent rester en contact permanent avec leurs proches, ce qui peut être une bonne chose, mais aussi avec leur culture d’origine et cette culture d’origine, elle peut être très en contradiction avec notre propre façon de vivre. »

Alerte : Attentat à l’arme blanche dans l’ouest de l’Allemagne

Alerte : Attentat à l’arme blanche dans l’ouest de l’Allemagne

Plusieurs personnes ont été blessées jeudi soir à l’arme blanche à Oberhausen, dans l’ouest de l’Allemagne, rapporte Focus Online, ajoutant qu’un suspect a été arrêté.

BCE : l’Allemagne ne veut pas d’un nouvel assouplissement

BCE : l’Allemagne ne veut pas d’un nouvel assouplissement

 

Se fondant sans doute sur la dynamique de sa croissance notamment dans le secteur manufacturier, l’Allemagne par la voix du gouverneur de la Bundesbank, la banque centrale nationale allemande,  conteste par avance toute initiative de la BCE visant à assouplir encore la politique monétaire. Il faut noter que l’Allemagne qui a bien maîtrisé sa situation militaire enregistrera une baisse de sa croissance de 4 à 5 % quand la France verra le PIB diminuer de 9 à 10 % en 2020.

D’après l’Allemagne, les prévisions mêmes de la banque centrale européenne pourraient être améliorées ; des prévisions qui espèrent une croissance de 3,2% et une inflation de 1,3% en 2022, en soulignant que celles-ci n’intégraient pas l’impact du plan de 750 milliards d’euros de l’Union européenne ou le plan de relance de 100 milliards présenté le mois dernier par la France.

En fait,  le gouverneur de la Bundesbank s’oppose un nouveau plan de rachat d’actifs qui découlerait de l’incitation à un endettement supplémentaire pour les pays les plus endettés. De la même manière,  l’Allemagne refuse que la banque centrale fixe des objectifs de rendement obligataire.

On pourrait faire observer à l’Allemagne que le fameux plan de 750 milliards comme d’ailleurs les plans nationaux sont encore loin d’être opérationnels. En outre, ils ont surtout des objectifs à moyen et long terme et ne sont pas forcément adaptés à la situation immédiate qui va se traduire par une vague de faillites et de suppressions de postes fins 2020 début 2021.

Comme d’habitude les Allemands craignent par-dessus tout une envolée d’inflation et sont donc opposés à un laxisme dans ce domaine.

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