Archive pour le Tag 'l’Afrique'

L’Afrique attend toujours des transformations structurelles

L’Afrique attend toujours des transformations structurelles

 

Même si les situations sont contrastées d’un pays à l’autre, l’Afrique dans son ensemble affiche globalement un taux de croissance stable. Mais la dette publique augmente rapidement. Le secteur privé – africain comme non africain – est insuffisamment associé à l’investissement dans les transformations structurelles ; et le continent est affecté par des conflits régionaux persistants, ainsi que par les effets toujours plus sensibles du changement climatique. Face aux chocs économiques mondiaux – hausse des prix, conflits, changement climatique – l’économie continentale africaine fait preuve d’une résilience remarquable. En témoigne la progression soutenue du PIB moyen en Afrique, qui affiche un taux de croissance relativement stable (+3,0 % en 2024 contre +3,3 % en 2023) selon les calculs de l’Agence française de développement (AFD), basés sur les dernières estimations du Fonds monétaire international (FMI). Cette croissance tient, d’une part, à la hausse de la consommation privée et au recul de l’inflation ; d’autre part, à l’efficacité des politiques conçues pour minimiser les effets des chocs économiques et favoriser la croissance.

 

par 

Françoise Rivière
Responsable de la Cellule Economie et Stratégie, département Afrique, AFD, Agence Française de Développement (AFD)

Julia Brouillard
Économiste principale à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), Agence Française de Développement (AFD) dans The Conversation 

 

 

À l’échelle nationale, les divergences de trajectoire de croissance restent marquées par la désormais classique différenciation de structure économique entre les pays riches en ressources naturelles, davantage soumis aux aléas des cours des matières premières, et les autres, dont l’économie est plus diversifiée et la croissance du PIB plus solide.

Les conflits armés représentent un autre facteur majeur de divergence de croissance : là où ils sévissent, la croissance s’effondre, comme on le constate en observant les taux de croissance négatifs au Soudan et au Soudan du Sud en 2023.
Le FMI prévoit un rebond de la croissance pour 2025, avec une augmentation du PIB réel de 4,2 %, portée par la diminution attendue des facteurs pesant sur la croissance mondiale. Au niveau continental, toutefois, les risques pesant sur la croissance sont nombreux : multiplication des conflits régionaux, instabilité politique et, surtout, chocs climatiques à répétition pèsent sur des ressources limitées et pourraient accroître les tensions sociales.

Les transformations structurelles nécessaires n’ont pas encore eu lieu
À court terme, l’inflation – 24 % en 2024 en Afrique selon le FMI – continue à éroder les gains économiques réalisés ces dernières années. Elle reflète la persistance des prix élevés des denrées alimentaires et les déséquilibres entre l’offre et la demande sur les marchés alimentaires nationaux et mondiaux, et limite les marges de manœuvre monétaire des banques centrales africaines.

À moyen terme, les fruits de la croissance économique se sont révélés limités. Alors que le PIB réel a augmenté en moyenne de 3,3 % par an entre 1980 et 2020, le PIB réel par habitant n’a progressé que de 0,9 % sur la même période, la croissance économique étant structurellement inférieure à la croissance démographique. Selon la Banque africaine de développement (BAfD), d’ici à 2030, en l’absence de mesures visant à inverser la courbe de la pauvreté, près de 9 personnes extrêmement pauvres sur 10 dans le monde vivront en Afrique.

Par ailleurs, le changement structurel qui s’amorce depuis les années 1990 se traduit par une relative réaffectation des activités économiques et de l’emploi de l’agriculture vers d’autres secteurs peu productifs (services de commerce et de détail), plutôt que vers une industrie manufacturière plus compétitive et porteuse de davantage de croissance. En 2020, selon la Banque mondiale (BM), le secteur de l’agriculture concentre 46 % des emplois (57 % en 1991), le secteur des services 40 % (30 % en 1991) et le secteur industriel 14 % (13 % en 1991).

Aux défis structurels s’ajoutent les défis liés au changement climatique, un phénomène qui affecte tout particulièrement le continent. L’année 2023 a été marquée par de nombreuses catastrophes naturelles : cyclones au Malawi et Mozambique, sécheresses et crues dans la Corne de l’Afrique, dans le bassin du Congo et dans certaines zones d’Afrique centrale. Les impacts économiques à moyen terme sont massifs : entre 1986 et 2018, indique la BafD, le changement climatique a entraîné une réduction estimée entre 5 % et 15 % par an de la croissance du PIB par habitant.

Les besoins de financement du continent restent un sujet majeur pour la croissance africaine. Selon la Climate Policy Initiative, la mise en œuvre des objectifs de lutte contre le changement climatique nécessiterait à elle seule de mobiliser 2 800 milliards de dollars US entre 2020 et 2030. Or les flux financiers extérieurs classiques ne suffisent pas à combler les besoins de financement africains. L’Afrique n’attire que 2 % des flux mondiaux en investissements directs étrangers. Quant à l’aide publique au développement (APD), elle représente une part de plus en plus faible du PIB africain.

Les États africains ont procédé, ces dernières années, à une diversification coûteuse de leurs sources de financement, se tournant vers des financements bilatéraux (notamment chinois) et vers les marchés financiers. La dette publique est ainsi passée de 31 % du PIB en 2010 à 67 % en 2023 selon la BafD, portée par le resserrement des conditions financières mondiales (augmentation des taux d’intérêt, resserrement du crédit et augmentation de la prime de risque en particulier) et l’accroissement des dépenses liées notamment à la gestion de la pandémie de Covid, mais également aux chocs climatiques.

À court terme, les pays africains consacrent donc une part de plus en plus importante de leurs ressources budgétaires au service de la dette publique. Ainsi, de considérables remboursements de la dette publique extérieure en Afrique subsaharienne sont arrivés à échéance en 2024 (5,9 milliards USD en euro-obligations) ou arriveront à échéance en 2025 (6,2 milliards USD en 2025). À moyen terme, le haut niveau d’endettement, associé à des coûts de financement élevés, pousse les États africains à réduire certaines de leurs dépenses publiques essentielles et à réaffecter au service de la dette des fonds censés financer leur développement, ce qui met en péril les perspectives de croissance pour les générations futures.

De nouvelles sources de financement pour la transition ont récemment vu le jour, sans qu’elles soient suffisantes pour répondre aux besoins existants et à venir. Au-delà de ses programmes classiques, le FMI a notamment mis en place depuis octobre 2022, à destination des pays éligibles – pour l’essentiel des pays à faible revenu –, une facilité de résilience et de durabilité (Resilience and Sustainability Facility) visant à financer la lutte contre le changement climatique et les pandémies.

Accélérer le financement privé pour favoriser une croissance inclusive et diversifier les sources de financement est au cœur des modèles de développement promus par plusieurs institutions internationales. Selon le FMI, d’ici à la fin de la décennie, le secteur privé pourrait apporter chaque année des financements supplémentaires en faveur des infrastructures équivalant à 3 % du PIB de l’Afrique subsaharienne.

Le développement du secteur privé africain reste toutefois, à ce stade, limité. Symptomatique du peu d’attention porté jusque-là au secteur, peu de pays rendent compte de la part de l’investissement privé dans leurs statistiques. Selon les données disponibles, en 2020 l’investissement privé représente en moyenne 13 % du PIB avec des situations très diversifiées : le ratio investissement privé/PIB est de 7,4 % en Sierra Leone, face à 16,5 % en Côte d’Ivoire ou même 28,4 % au Sénégal.

Le développement du secteur reste largement entravé par la corruption et l’informalité. Selon les estimations de la BAfD, la corruption coûte à l’Afrique 148 milliards USD par an. Surtout, le très haut niveau d’informalité du secteur privé (estimé par la BM à 36 % du PIB et à 70 % de l’emploi en Afrique subsaharienne) limite l’assiette sur laquelle les États africains peuvent mettre le privé à contribution. Au niveau international, le secteur privé n’investit que faiblement dans les économies nationales africaines, du fait de la perception des risques associés à l’investissement en Afrique, notamment les risques monétaires et institutionnels.

Le rôle de catalyseur des institutions financières internationales pour le développement du secteur privé et la confiance des acteurs internationaux reste sans doute crucial. Dans ce domaine, alors que la Société financière internationale, filiale de la Banque mondiale dédiée au développement du secteur privé, opère de longue date en Afrique, l’extension des activités de la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD) sur le continent semble confirmer la priorité donnée au développement d’un secteur privé africain.

Immigration via l’Afrique de l’Ouest: + 541%

Immigration via l’Afrique de l’Ouest: + 541%

 

D’après Frontex, l’agence de surveillance des frontières extérieures de l’Union. À la lire, «le nombre de passages irréguliers à la frontière vers l’Union européenne au cours des deux premiers mois de 2024 a atteint 31.200, un niveau similaire à celui d’il y a un an». Mais avec de très fortes disparités selon les routes.

Ainsi,  des disparités s’accentuent, selon les axes de migration empruntés. Ainsi, «la Méditerranée centrale a connu la plus forte baisse des détections de passages irréguliers parmi les grandes routes (-70%)», avec un peu plus de 4300 passages de migrants détectés. Là, les principaux exilés sont issus du Bangladesh, de Syrie et de Tunisie. Frontex se félicite également de la baisse des flux sur la route des Balkans (-65%), avec un peu plus de 3000 passages détectés.

 

En revanche, la situation se dégrade sérieusement via l’ Afrique de l’Ouest Avec une progression de plus de 500 % en deux mois.

 

Société-Immigration : l’Afrique , premier continent d’origine en France, 60% du Maghreb

Société-Immigration : l’Afrique , premier continent d’origine en France, 60% du Maghreb

L’Afrique est le premier continent d’origine des immigrés en France. En 2023, 3,5 millions d’immigrés, soit près d’un sur deux (48%), sont nés en Afrique. Parmi eux, six sur dix viennent du Maghreb (35% du Maroc et de Tunisie, 26% d’Algérie), contre neuf sur dix en 1968.

Les immigrés d’Europe, au nombre de 2,4 millions, représentent pour leur part 32% de la population immigrée totale. Un quart d’entre eux arrivent du Portugal, 22% de l’Espagne et de l’Italie. Troisième continent d’origine, l’Asie représente un million d’immigrés, soit 14% du total, tandis que 6 % viennent d’Amérique ou d’Océanie.

Les immigrés nés en Afrique viennent pour près de la moitié (46%) dans le but de rejoindre un membre de leur famille, 22% pour suivre des études, 23% pour trouver un travail et 11% pour fuir l’insécurité ou les troubles politiques. Parmi les immigrés nés en Europe, 37% sont venus pour travailler, 34% pour rejoindre leur famille, 16% pour étudier et 8% pour fuir l’insécurité. Les immigrés asiatiques viennent pour leur part d’abord pour un motif familial (43%), puis sécuritaire (25%), étudiant (23%) et professionnel (14%).

Immigration : l’Afrique , premier continent d’origine en France.

 

Immigration : l’Afrique , premier continent d’origine en France.

L’Afrique est le premier continent d’origine des immigrés en France. En 2023, 3,5 millions d’immigrés, soit près d’un sur deux (48%), sont nés en Afrique. Parmi eux, six sur dix viennent du Maghreb (35% du Maroc et de Tunisie, 26% d’Algérie), contre neuf sur dix en 1968.

Les immigrés d’Europe, au nombre de 2,4 millions, représentent pour leur part 32% de la population immigrée totale. Un quart d’entre eux arrivent du Portugal, 22% de l’Espagne et de l’Italie. Troisième continent d’origine, l’Asie représente un million d’immigrés, soit 14% du total, tandis que 6 % viennent d’Amérique ou d’Océanie.

Les immigrés nés en Afrique viennent pour près de la moitié (46%) dans le but de rejoindre un membre de leur famille, 22% pour suivre des études, 23% pour trouver un travail et 11% pour fuir l’insécurité ou les troubles politiques. Parmi les immigrés nés en Europe, 37% sont venus pour travailler, 34% pour rejoindre leur famille, 16% pour étudier et 8% pour fuir l’insécurité. Les immigrés asiatiques viennent pour leur part d’abord pour un motif familial (43%), puis sécuritaire (25%), étudiant (23%) et professionnel (14%).

 

 

G7: Quelle solidarité avec l’Afrique ?

G7:  Quelle solidarité avec l’Afrique ?

A l’occasion du 50ᵉ sommet du G7, du 13 au 15 juin en Italie, le chef de l’Etat africain  a exhorté, dans une tribune au « Monde », les dirigeants des principaux pays donateurs à réformer l’architecture financière mondiale.

 


Le changement climatique continue de ravager l’Afrique, qui endure des conditions météorologiques extrêmes et des catastrophes naturelles à une échelle sans précédent. Mon propre pays, le Kenya, vient tout juste de connaître sa plus longue sécheresse jamais observée, pour ensuite subir des inondations dévastatrices qui ont fait 289 morts et touché plus de 800 000 personnes. Dans le même temps, le Malawi, la Zambie et le Zimbabwe ont récemment souffert d’une sécheresse sévère, qui a exposé plusieurs millions de personnes à la famine, tandis que la région du Sahel a été frappée par une vague de chaleur écrasante, qui a fait plus de 100 morts au Mali.

Le changement climatique provoque de plus en plus de sécheresses en Afrique, compromettant les approvisionnements en eau. Il détruit des vies et des moyens de subsistance, paralyse la production alimentaire et endommage des maisons ainsi que des infrastructures. Il modifie les schémas migratoires, il exacerbe les conflits et contraint ainsi des populations entières à fuir en quête de moyens de subsistance alternatifs pour survivre.
La situation est d’autant plus difficile que les Etats africains payent des taux d’intérêt jusqu’à huit fois plus élevés que ceux des prêts habituels de la Banque mondiale, ce qui rend ces pays encore plus démunis face aux défis liés au climat. Cette inégalité résulte d’un système financier international établi en 1945, époque à laquelle la plupart des Etats africains n’existaient pas encore, qui demeure biaisé en faveur des pays riches. De nombreux pays africains sont pris au piège d’un cycle perpétuel de dette, ne bénéficiant que de très peu voire d’aucune marge de manœuvre budgétaire pour le développement et les investissements dans l’atténuation ou l’adaptation au changement climatique.

Contribuer à développer l’Afrique

Contribuer à développer l’Afrique

« Il faut contribuer à financer le développement de l’Afrique » (Jean-Hervé Lorenzi)
Le Cercle des Economistes exporte ses Rencontres économiques en Afrique, plus précisément à Kigali, au Rwanda, ces 27 et 28 novembre. L’Afrique, ce continent au potentiel scruté de tous, fait aussi face à des enjeux de croissance, de financement, de formation… qui sont autant de sujets partagés avec la France. Et sur ce point, le fondateur du Cercle des Economistes à un point de vue net, précis et tranché.
dans La « Tribune »

Le Cercle des économistes, que vous avez fondé, exporte ses Rencontres, habituées à se tenir chaque mois de juillet à Aix-en-Provence, pour l’Afrique de l’Est, précisément Kigali. Sur le thème de « quelles opportunités » recèle le continent. Quelles sont-elles ?

JEAN-HERVÉ LORENZI – Il faut se persuader d’une chose : l’avenir du monde se joue en Afrique. Beaucoup de ressources se trouvent sur ce continent. Or, la France, hormis le pétrole et les grands travaux, s’est retirée de l’Afrique. La Chine, elle, a multiplié le montant de son investissement par 90 en dix ans. L’attitude de l’Allemagne, en revanche, est très intéressante, le chancelier Olaf Scholz a multiplié les déplacements dans divers pays d’Afrique, il a également réuni plusieurs chefs d’Etat africains. Concernant les réseaux bancaires, il y a eu une succession d’erreurs et de mauvaise appréciation de ce qu’il fallait faire. En revanche, si on se place dans une perspective de croissance mondiale, il faut créer une agence de notation africaine. Il faut aussi taper sur les doigts de l’OCDE qui survalorise le risque en Afrique et créer les mécanismes de stabilité africaine, comme en Europe. Il faut aider à des flux financiers qui baissent le coût du risque. Il faut, par tous les moyens, financer le développement africain.

Qu’est-ce que le France a à apprendre de l’Afrique ?

Beaucoup ! Beaucoup sur les technologies, notamment bancaires. Et comment on permet à la croissance d’atteindre un taux de 3% à 4%.

Comment les entreprises françaises peuvent-elles contribuer aux besoins de l’Afrique ?

Il faut retrouver des circuits financiers que nous n’avons plus. Il faut aider au financement des projets africains, notamment lorsque cela concerne les infrastructures. L’Allemagne, je le répète, est le pays le plus impliqué sur ce continent. Il nous faut reconstruire une vraie compétence en Afrique, reconstruire un vrai intérêt. Comme nous avons désindustrialisé la France, nous avons décidé de désinvestir en Afrique.

Vous mettez également en lumière, la place des femmes en Afrique. De ce point de vue également, la France a-t-elle à apprendre ?

Le rôle des femmes est primordial dans un continent en croissance, nombreuses sont celles qui se sont tournées vers une activité et aujourd’hui, près d’un quart d’entre elles sont chefs d’entreprises. Il est essentiel, évidemment, de soutenir les projets, sociaux et entrepreneuriaux. Mais aussi de s’assurer de développer les compétences, d’assurer leur autonomie. La France a beaucoup à apprendre de l’Afrique également sur la place des femmes dans l’économie.

«  »Ne plus ignorer l’Afrique de plus de 2 milliards d’habitants d’ici 2050 »

« Ne plus ignorer l’Afrique de plus de 2 milliards d’habitants d’ici 2050 »


À la veille de la COP28 pour le Climat, le président du Congo, Denis Sassou Nguesso, s’exprime sur l’urgence climatique et sur la nécessité de réformer les institutions internationales, afin de renforcer la voix de l’Afrique dans le concert des nations. Interview dans la Tribune.

À l’issue du Sommet des trois Bassins dédié à la protection des forêts tropicales des bassins du Congo, d’Amazonie et de l’Asie du Sud-Est, quel est le message que vous souhaitez porter lors de la COP28 de Dubaï ?

DENIS SASSOU NGUESSO – Nous n’avons jamais cessé et nous ne cesserons jamais d’alerter l’opinion internationale sur les conséquences du dérèglement climatique. Il faut agir plus vite ! Dans ce combat, nous avons toujours porté l’accent sur la responsabilité historique des pays industrialisés qui doivent faire face à leurs responsabilités.

Les pays africains payent le plus lourd tribut climatique alors qu’ils ne sont responsables que de 4 % des émissions de gaz à effet de serre. Dans un contexte mondial troublé par la Covid 19, puis par la guerre en Ukraine, les pays développés doivent aider les pays en développement, pour accompagner leur transition climatique qui exige des moyens considérables dont ils sont dépourvus. Tel est le principal message que je porterai lors de la prochaine COP28 pour le Climat. Au lendemain du Sommet des trois Bassins, les pays du Sud sont déterminés à se rendre à Dubaï pour parler d’une seule voix.

En 2017, vous lanciez l’initiative du Fonds Bleu, avec le Roi Mohammed VI du Maroc. De quelle façon ce projet a-t-il évolué ?

Effectivement, le Fonds bleu a été formalisé au Congo, à Oyo, en 2017. Un mémorandum d’entente y a été signé par plus d’une dizaine d’États pour financer des projets de lutte contre le dérèglement climatique. C’est le principal instrument financier de la Commission Climat du Bassin du Congo (CCBC, NDLR). L’étude de préfiguration du fonds a été réalisée ainsi que l’appel à projets. Ces projets ont été identifiés et maintenant, nous attendons les investisseurs qui traînent le pas (…).

Globalement, les engagements financiers promis par les pays riches ne sont pas tenus. Si l’on s’en tient aux informations d’organisations internationales indépendantes comme Oxfam, les aides réellement attribuées sont nettement inférieures aux chiffres publiés. Par ailleurs, ces fonds se présentent essentiellement sous forme de prêts, ce qui alourdit encore un peu plus le poids de la dette sur les pays africains.

Précisément, de quelle façon abordez-vous la question de la dette climatique ?

J’observe un certain nombre de contradictions des pays occidentaux sur le sujet de la dette climatique. Je m’interroge en particulier sur l’inadéquation des moyens financiers engagés, avec l’étendue des objectifs climatiques fixés. Il suffit de comparer leur difficulté à mobiliser les 100 milliards de dollars pour aider les pays du Sud à lutter contre le réchauffement climatique, avec la facilité qu’ils ont eue à débloquer des montants astronomiques en un temps record pour le conflit russo-ukrainien.

En septembre dernier, lors du Sommet États-Unis – Afrique, l’Union africaine obtenait un siège au G20. Dans quelle mesure, cela favorisera-t-il le poids de l’Afrique dans le débat mondial ?

Nous réclamions ce siège depuis des années. Il devrait être officialisé l’année prochaine. C’est un premier pas vers une meilleure considération du continent africain par les institutions internationales. Avec ce siège, nous ne serons plus de simples invités aux débats, mais des participants à part entière. Cela permettra à l’Afrique de s’exprimer sans laisser d’autres acteurs le faire à sa place. De toute façon, il n’est plus possible d’ignorer un continent qui abritera plus de 2 milliards d’habitants d’ici 2050.

Notre continent est jeune et notre jeunesse est de plus en plus éduquée. Notre voix dans le concert des nations doit se faire entendre. C’est le message que j’ai porté en septembre auprès de Joe Biden aux États-Unis, en juillet à Saint-Pétersbourg auprès de Vladimir Poutine, et en Chine auprès de Xi Jinping en août dernier (…).

Les rapports de force évoluent, en matière de géopolitique. La montée en puissance des BRICS illustre bien ce phénomène. Les institutions internationales, en particulier le Conseil de sécurité des Nations unies, doivent suivre cette évolution pour une meilleure représentativité des pays du Sud. Actuellement, le Conseil de sécurité est dans l’impossibilité de gérer des crises comme celles qui se déroulent en Ukraine où à Gaza. Ces institutions nées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale sont peut-être devenues obsolètes et doivent être réformées.

L’Afrique encore écartée des discussions sur les grands enjeux du monde ?

L’Afrique encore écartée des discussions sur les grands enjeux du monde ?

« Les Africains craignent de n’avoir pas leur mot à dire au moment où se réécrivent les règles du jeu d’une mondialisation en crise » Écrit dans sa chronique au Monde Marie de Vergès

Alors que les perspectives économiques de l’Afrique restent médiocres, les tensions géopolitiques et commerciales sont une menace pour les pays vulnérables, constate, dans sa chronique, la journaliste au « Monde » Marie de Vergès.

C’était l’expression consacrée pour qualifier les douloureuses années 1980 et 1990 en Afrique subsaharienne : les « décennies perdues ». Façon de résumer le cortège de crises financières et sociales traversées à l’époque par des pays subissant les répercussions de la chute des prix des matières premières et de la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis. Las, cette formule accablante est de nouveau brandie pour dépeindre les médiocres perspectives économiques au sud du Sahara.

Début octobre, dans son rapport d’automne, la Banque mondiale constatait que le produit intérieur brut par habitant avait stagné depuis 2015 dans la région : « Une décennie perdue en matière de croissance. » « L’Afrique a besoin d’une aide internationale pour éviter une décennie perdue », avertissait pour sa part dès le mois de mai, dans le Financial Times, Hanan Morsy, l’économiste en chef de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (Uneca).

Après les nombreux vents contraires des dernières années (contre-choc pétrolier, pandémie de Covid-19, guerre en Ukraine, dérèglement climatique), le continent doit aujourd’hui composer avec des taux d’intérêt élevés (inflation oblige) et donc des emprunts plus chers à rembourser. La moitié des pays à bas revenu [classification de la Banque mondiale] est désormais au bord du défaut de paiement. S’y ajoute une coopération internationale qui s’affaiblit. Et la crainte, pour les Africains, de n’avoir pas leur mot à dire au moment où se réécrivent les règles du jeu d’une mondialisation en crise.

A Marrakech, mi-octobre, lors des réunions annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, l’Afrique a pourtant semblé plus audible que jamais. A l’occasion de ces assemblées qui se tenaient pour la première fois depuis cinquante ans sur le continent, le FMI a attribué aux pays subsahariens un nouveau siège au sein de son conseil d’administration. Mais cette avancée symbolique leur garantira-t-elle d’être mieux entendus ? Pourront-ils éviter que les pays riches (Chine comprise) se focalisent sur leurs priorités, leurs propres difficultés, leurs rivalités, à leur détriment ?

La guerre en Ukraine a déjà constitué un choc majeur. Les pays africains se désolent d’avoir eu à payer si chèrement les incidences d’un conflit lointain et se trouvent bien négligés en comparaison de l’assistance massive accordée à Kiev. Désormais, ils s’inquiètent de la compétition systémique entre Pékin et Washington. N’allez pas leur demander de se ranger dans un camp si la rupture était consommée : ils risqueraient d’y perdre sur tous les tableaux, des exportations aux flux de capitaux et aux transferts de technologie.

La mutation politique de l’Afrique

La mutation politique de l’Afrique


L’Afrique est entrée dans un autre cycle historique et, dans celui-ci, la France n’est plus qu’un acteur secondaire, constate le philosophe et historien, Achille Mbembe, philosophe dans une tribune au « Monde ». Le continent se trouve ainsi confronté, selon lui, au choix entre néosouverainisme et démocratie. Les prises du pouvoir par les militaires au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et au Niger, tout comme d’autres conflits plus ou moins sanglants dans les territoires africains anciennement colonisés par la France, ne sont que des symptômes des transformations profondes que l’on a longtemps occultées et dont l’accélération soudaine prend à contre-pied nombre d’observateurs distraits. Derniers soubresauts de la longue agonie du modèle français de la décolonisation incomplète, pourrait-on arguer. Encore faut-il préciser que ces luttes sont, pour l’essentiel, portées par des forces éminemment endogènes. A tout prendre, elles annoncent la fin inéluctable d’un cycle qui, entamé au lendemain de la seconde guerre mondiale, aura duré près d’un siècle.

Certes, il existe toujours des bases militaires au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Gabon, au Tchad et à Djibouti. Le franc CFA n’a toujours pas été aboli, et l’Agence française de développement est loin d’avoir achevé sa mue. Entre-temps, les centres culturels français ont changé de nom. Nonobstant la permanence de ces vestiges d’un temps révolu, la France ne décide plus de tout dans ses anciennes possessions coloniales. Au demeurant, la plupart de ces outils et bien d’autres sont dorénavant désuets. Le temps est peut-être venu de s’en débarrasser, et en bon ordre.

Le hiatus serait ainsi clos. Placés pour une fois devant leurs responsabilités, les Africains ne disposeraient plus d’aucune échappatoire. La décolonisation serait parachevée et, surtout, actée. Car l’étau que la France maintenait sur ses anciennes colonies s’est largement desserré en ce début de siècle, parfois en dépit de sa volonté. Dans le tournant historique en cours, celle-ci n’est plus qu’un acteur secondaire. Non pas parce qu’elle aurait été évincée par la Russie ou par la Chine, épouvantails que savent bien agiter ses ennemis et pourfendeurs locaux dans le but de mieux la rançonner, mais parce que, dans un mouvement inédit et périlleux d’autorecentrage, dont beaucoup peinent à prendre toute la mesure, l’Afrique est entrée dans un autre cycle historique.

Mue par des forces, pour l’essentiel autochtones, elle est en train de se retourner sur elle-même. Pour qui veut comprendre les ressorts profonds de ce pivotage, les luttes multiformes qu’il entraîne et son inscription dans la longue durée, il faut changer de grille d’analyse et partir d’autres postulats. Il faut surtout commencer par prendre au sérieux les compréhensions que les sociétés africaines elles-mêmes ont désormais de leur vie historique propre. Le continent fait en effet l’expérience de transformations multiples et simultanées. D’ampleur variable, elles touchent tous les ordres de la société et se traduisent par des ruptures en cascade.

Les dictatures et la Russie menacent toute l’Afrique de l’Ouest

Les dictatures et la Russie menacent toute l’Afrique de l’Ouest

Progressivement les dictatures se développent en Afrique sur un terrain de pauvreté et de corruption. Les deux aspects sont intimement liés. En effet, la classe dirigeante et les élites en général se partagent le gâteau de la richesse nationale au détriment notamment des plus défavorisés. Du coup, certains politiciens encore plus véreux que les autres attribuent cette situation au néocolonialisme de l’occident.

La réalité est plus complexe car si effectivement les pays occidentaux se désintéressent du développement au profit seulement de l’exploitation de richesses, la Chine ou la Russie pille manière autrement outrageuse les pays considérés au point soit de les mettre en tutelle, soit même d’installé des gouvernements complices.

Cela vaut surtout pour les pays pauvres comme le Niger où le pouvoir d’achat ne dépasse pas autour de 40 à 50 € par mois et/ou la moitié de la population souffre de malnutrition. Des pays comme le Sénégal était présenté jusque-là comme des modèles de démocratie ; mais les événements récents avec notamment l’emprisonnement du chef de l’opposition et les risques de prolongation du mandat du président actuel ont fait basculer ce pays dans une certaine instabilité. Côte d’Ivoire exceptée, la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest ne parviennent pas à surmonter la question de la pauvreté.

Des pays qui constituent donc des terreaux pour les discours les plus démagogiques et les plus invraisemblables. Préférer la présence des Russes à l’Occident relève de la plus grande tartuferie surtout au nom de la lutte contre le néocolonialisme. Quand on sait que la Russie elle-même n’est pas capable de nourrir ses républiques éloignées et qu’elle soumet le pays à la plus dure des dictatures sans parler évidemment de l’envahissement extérieur notamment de l’Ukraine.

Les crises que connaissent les pays pauvres de l’Afrique sont à imputer à une grande ignorance autant qu’à la pauvreté. Et ces pays sont condamnés à s’appauvrir encore davantage ce qui débouchera inévitablement sur de nouveaux troubles sociaux et politiques. Bref, le cercle vicieux et mortifère pour toute l’Afrique de l’Ouest et même au-delà. On imagine mal en effet des investisseurs s’installer durablement dans des pays soumis à une telle instabilité politique et économique.

L’Afrique, Futur exemple de Metropolisation !

L’Afrique, Futur exemple de Metropolisation !

Comment le développement urbain en Afrique peut-il réussir ? Nous aimerions proposer trois suggestions basées sur notre travail de recherche au MIT Senseable City Lab. Ainsi, les partenaires internationaux de l’Afrique devraient voir sa rapide urbanisation non pas comme un problème qu’ils devraient aider à résoudre, mais comme une opportunité de faire progresser l’urbanité elle-même. Par Carlo Ratti, Senseable City Lab du MIT dans la Tribune

Un article intéressant car il illustre bien la religion de la métropolitisation qui tue les territoires des pays développés et qui constituent souvent une question particulièrement difficile à gérer dans les pays pauvres. Dans les pays en développement, on ne saurait traiter simplement que de l’urbanisme organisé. Il faut aussi prendre en compte ces immenses ghettos souvent plus étendus que la ville elle-même où se cumulent les problèmes de santé, d’insécurité et de pauvreté tandis que la désertification des territoires conduit à renforcer le poids des importations et la vie chère en même temps NDLR

On a beaucoup parlé de la croissance vertigineuse des villes du monde, mais beaucoup ignorent à quoi elle ressemble réellement. Sous l’effet conjugué des naissances et de l’exode rural, la population urbaine mondiale s’enrichit de l’équivalent d’un nouveau Londres toutes les trois semaines. Mais cette croissance n’a pas lieu à Londres même, ni dans aucune des villes de l’Occident industriel dont la démographie est stagnante. Pendant des décennies, elle s’est produite en Chine, où le gouvernement a déplacé des centaines de millions de personnes des zones rurales vers des villes démesurées, mais cette tendance s’est finalement stabilisée.

Aujourd’hui, le centre de gravité urbain est l’Afrique, où près d’un milliard de citadins pourraient apparaître d’ici 2050. Pourtant, beaucoup trop d’architectes et d’urbanistes du Nord global sont déconnectés de cette réalité. Ceux qui s’engagent considèrent souvent l’Afrique à travers un prisme dépassé, privilégiant les « meilleures pratiques » du passé au lieu d’embrasser le rôle du continent dans la construction de l’avenir. Comment la communauté internationale peut-elle s’associer aux dirigeants et aux innovateurs urbains africains pour rendre les villes du continent, qui connaissent une croissance rapide, plus vivable, plus productive et plus durable ?

En effet, nous devrions considérer l’Afrique comme le prochain laboratoire urbain du monde, où la forme des villes – adaptées à la diversité du continent et à ses défis du XXIe siècle – est encore en train d’être élaborée. C’est l’esprit que Lesley Lokko apporte à la Biennale de Venise 2023 sur le thème de l’Afrique, dont le titre est « Le laboratoire du futur. » Cet événement, qui ouvrira le 20 mai, représente l’avant-garde de l’architecture africaine et que l’avant-garde de l’architecture en général.. L’expression « ville du futur » évoque normalement des métropoles riches et puissantes comme Singapour ou Séoul, mais en réalité, elle pourrait ressembler davantage à Nairobi et Lagos. Ces villes sont en première ligne de nos défis modernes – pauvreté, inégalité, changement climatique, migration massive, et plus encore – et c’est là qu’ils seront résolus.

Comment le développement urbain en Afrique peut-il réussir? Nous aimerions proposer trois suggestions basées sur notre travail de recherche au MIT Senseable City Lab.

Tout d’abord, nous devons abandonner les meilleures pratiques du passé. Le chemin de développement de la plupart des villes africaines ne ressemble ni à celui de Londres ni à celui de Pékin, et les pays riches doivent résister à la tendance néocoloniale qui consiste à pousser l’Afrique à se construire à son image. La dépendance à l’égard des meilleures pratiques ralentit le rythme de l’innovation, une erreur particulièrement coûteuse alors que les défis de notre époque évoluent avec une rapidité sans précédent. Nous devons adopter l’expérimentation, d’abord à la petite échelle. Des pratiques administratives comme la « ville de charte » de Paul Romer, adaptées à grande et petite échelle, peuvent permettre aux dirigeants urbains de tester de nouvelles façons de faire la ville.

Deuxièmement, pour gérer le rythme rapide du changement, les villes africaines peuvent profiter de la révolution numérique pour mesurer les interventions et les réponses. Les dirigeants municipaux en Afrique ne disposent souvent pas des infrastructures de collecte de données disponibles dans les régions plus riches, où le Big data et l’Internet des objets nous offrent des outils bon marché pour suivre la vie d’une ville et évaluer le succès de différentes politiques, ce qui nous permet de comprendre même les métropoles les plus complexes. Pourtant, les données citoyennes et la collecte de données mobiles peuvent permettre aux administrateurs municipaux de mesurer la pollution de l’air, le trafic, l’efficacité énergétique des bâtiments, et bien d’autres choses encore. L’analyse des données par l’IA pourrait éventuellement nous permettre de repérer des modèles que les yeux humains ne pourraient jamais voir, nous aidant ainsi à résoudre des problèmes apparemment insolubles.

Troisièmement, en dehors du domaine numérique, il existe de nombreuses opportunités pour les villes africaines d’expérimenter dans le domaine physique. Nous sommes à l’aube d’une révolution dans la construction abordable et durable, et – dans le contexte du changement climatique – les villes africaines pourraient en être les bénéficiaires principales. Les changements démographiques et les catastrophes naturelles rendent la construction de logements plus flexible et rapide une nécessité, mais les bâtiments préfabriqués actuels sont presque universellement (et à juste titre) associés à la mauvaise qualité. Les villes africaines et leurs partenaires pourraient utiliser les nouvelles avancées dans les techniques de construction modulaire et préfabriquée qui exploitent la conception assistée par ordinateur (CAO) et les matériaux légers et de haute qualité comme le bois lamellé-croisé (CLT). La combinaison de ces avancées permet de fabriquer en usine un bâtiment durable en pièces, puis de l’expédier sur un chantier de construction et de l’assembler en quelques jours. En outre, chaque tonne de CLT stocke 1,8 tonne de CO2, l’éliminant ainsi de l’atmosphère.

Ainsi, les partenaires internationaux de l’Afrique devraient voir sa rapide urbanisation non pas comme un problème qu’ils devraient aider à résoudre, mais comme une opportunité de faire progresser l’urbanité elle-même.

De nombreux économistes observent que les pays pauvres peuvent économiquement faire un « saute-mouton » (leapfrog) leurs voisins plus riches grâce à l’adaptation rapide de nouvelles technologies et techniques. La gestion des villes ne fait pas exception. Les métropoles africaines peuvent être les premières à s’adapter et à adopter, montrant ainsi la voie au monde entier.!!!

Dette de l’Afrique: une menace démocratique

Dette de l’Afrique: une menace démocratique


Face à l’assèchement des liquidités auquel est confronté un nombre croissant de pays du continent, l’économiste bissau-guinéen plaide, dans une tribune au « Monde », pour une réforme systémique.

Les effets de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, imposée de manière unilatérale par le président américain Donald Trump alors que le monde subissait encore les conséquences de la crise financière des subprimes de 2008-2009, ont eu un fort impact sur les pays africains. Les principales exportations du continent sont les matières premières. Lorsque la demande ralentit, le commerce génère moins de revenus pour les économies qui comptent sur ces entrées plus que sur tout autre apport de capitaux externes, y compris les investissements, les envois de fonds de la diaspora ou l’aide publique au développement.

La plupart des pays africains ont pour priorité le respect des obligations extérieures plutôt que les réformes internes et la satisfaction des besoins sociaux. Compte tenu de la faiblesse de leurs recettes fiscales, il leur est difficile de compenser une forte variation des revenus externes. Pour toutes ces raisons, la croissance en 2019, avec une hausse du PIB de 3,4 % , s’est révélée inférieure au record de 5 % enregistré en moyenne par an au cours de la décennie précédente. C’était déjà un signe inquiétant.

Lorsque, en mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que l’épidémie de Covid-19 pouvait être considérée comme une pandémie, l’Afrique était unanimement perçue comme la région la moins préparée pour faire face aux conséquences dévastatrices qui en découleraient. Heureusement, les prédictions alarmistes se sont révélées exagérées, l’énorme résilience de la population africaine ayant été sous-estimée. Cependant, la situation financière déjà fragile s’est détériorée immédiatement.

Dépréciation des devises
Les pays africains ont vu le service de la dette libellé en devises augmenter en raison de la dépréciation de leurs devises. Les marges budgétaires déjà limitées ont été consommées par les réponses d’urgence à la pandémie. Les confinements ont paralysé les économies et la demande extérieure de matières premières s’est évaporée. Des plans de relance ont été rapidement mis en place par les économies les plus riches, parfois jusqu’à 10 % de leur PIB, mais l’Afrique n’a pu mobiliser que 68 milliards de dollars en 2020 (64 milliards d’euros) et 62 milliards de dollars supplémentaires en 2021, soit moins de 2 % de son PIB. Le service de la dette a commencé à devenir problématique.

Les conditions de développement entre l’Afrique et l’Europe

Les conditions de développement entre l’Afrique et l’Europe

Nasser Kamel : « L’Europe doit regarder de près l’idée d’emmener ses centres d’approvisionnement en Afrique »

Nasser Kamel, secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée (UpM) qui, dans cet entretien avec La Tribune Afrique, revient sur l’intérêt de dupliquer régionalement les modèles de réussite africaine. Il présente, entre autres, sa vision d’un nécessaire renforcement de la coopération économique et industrielle entre « l’Europe, l’Afrique au sens large et le Moyen-Orient » dans le monde de demain.

LA « TRIBUNE » AFRIQUE – Vous avez eu une présence très marquée à l’Aerospace African Forum. Quel est l’intérêt pour l’UpM de cette rencontre business centrée sur l’industrie aéronautique en Afrique ?

NASSER KAMEL – Cette grand-messe de l’aéronautique africaine a pu réunir plusieurs membres de l’Union pour la Méditerranée dont le Maroc qui en est également l’hôte. Et voir de près la réussite marocaine, comment ce pays a réussi en peu de temps -quatre ou cinq ans- à développer un secteur aéronautique innovant, dynamique, à la pointe de la technologie et parvenant à faire partie des chaînes d’approvisionnement de l’industrie mondiale est tout à fait intéressant. Il était donc important d’apprendre comment la stratégie marocaine est réplicable dans d’autres pays de la zone méditerranéenne.
Par ailleurs, les décideurs et industriels du secteur étaient intéressés à découvrir la vision de l’Union pour la Méditerranée vis à vis de la nécessité d’une intégration économique renforcée entre les deux rives de la Méditerranée -le Sud et le Nord. Il était donc opportun que je sois présent, afin de partager ma vision de ce que nous devrions faire pour mieux coopérer dans la région.

Face à un monde en mutation, une Europe développée et une Afrique du Nord qui progresse, comment une coopération économique efficace -notamment sur le plan industriel- peut-elle s’établir quand l’innovation technologique devient centrale, sur fond de défi climatique ?
A mon sens, il faut d’abord reconnaître qu’on est dans la région la plus affectée par les changements climatiques. En Méditerranée, on se chauffe 20 % plus rapidement que le reste du monde, mis à part l’Antarctique qui est une zone non habitée. Alors on a un défi climatique énorme dans cette région. On a d’une part, l’Union européenne (UE) qui a l’ambition d’arriver à la neutralité carbone en 2030 et à zéro émission en 2050. On a les énergies renouvelables -pour lesquelles il faut énormément de terrain et de main d’œuvre-, la production d’hydrogène vert… Tout cela nous amène à une conclusion très simple: je ne vois pas comment l’Europe va pouvoir arriver à réaliser le New Green Deal sans investir dans le renouvelable au Sud. Et on voit déjà -surtout dans deux pays de la région que sont le Maroc et l’Egypte- le nombre d’accords préliminaires de production d’hydrogène vert est impressionnant. Il reste que ces accords se traduisent par de vrais investissements. Au-delà, il faudrait aussi développer l’infrastructure en matière d’interconnexion électrique pour que le Maroc et l’Egypte et d’autres pays puissent vendre à l’Europe de l’électricité propre.
Les choses commencent à aller dans ce sens. A la COP 27, le Maroc et l’Espagne ont signé la première interconnexion à travers le Portugal, la France, voire même l’Allemagne. J’ai eu l’honneur d’y assister. L’Égypte fait à présent la même chose avec la Grèce pour atteindre le reste de l’UE, de même qu’avec l’Italie. On voit donc bien que le besoin existe et les ressources sont complémentaires. Il faut à présent investir dans la technologie, parce qu’en termes d’espaces, quand on regarde le désert qui s’étend du Maroc à l’Egypte, le potentiel est énorme. Investir dans la technologie favorisera non seulement le transfert technologique vers le Sud, une coopération renforcée et des investissements ciblés.

Le secteur privé est central dans cette démarche, mais quel rôle les gouvernements pourraient-ils jouer afin de renforcer cette coopération économique?
Pour que le secteur privé atteigne son plein potentiel, il faut créer le cadre juridique, légal et institutionnel qui lui permette de travailler et de travailler ensemble. En ce qui concerne l’énergie, il faut travailler pour créer un espace ou un marché d’énergie équitable, soutenable et facile, et qui permette les échanges. C’est le rôle des gouvernements. Il faut arriver à travailler pour une vraie zone de libre-échange commune. Nous avons aujourd’hui des accords de libre-échange entre le Maroc et l’Europe, entre l’Egypte et l’UE, la Tunisie et l’UE … Mais il faut une zone de libre-échange euro-méditerranéenne. Il faut des règles d’origine euro-méditerranéennes. Ce sont autant de chantiers sur lesquels nous travaillons avec les décideurs politiques afin d’amener la région euro-méditerranéenne à s’intégrer davantage.

Lorsque vous évoquez cette intégration, tenez-vous compte des grands projets énergétiques comme le projet de gazoduc Maroc-Nigeria (un pays du Sud du Sahara) et Algérie-Nigeria visant notamment à couvrir d’Afrique de l’Ouest, mais aussi à faciliter les livraisons de gaz vers l’Europe ?
Le gaz reste toujours une énergie de transition parce qu’elle est moins polluante que les autres énergies fossiles. Dans ce sens, ces projets sont très utiles. De plus, ils ont un effet positif par rapport à l’autosuffisance européenne surtout sur fond de guerre en Ukraine. Ces deux éléments sont importants. Il y a également le projet Egypte – Chypre – Israël – Palestine – Liban qui porte également sur le gaz, avec les capacités d’électrification existantes en Egypte et dont l’export a augmenté de manière phénoménale ces derniers douze mois.
Cette source d’énergie qui est moins polluante dans une Europe qui utilisera le gaz jusqu’à 2050 et dans un monde où on voit malheureusement que les investissements dans ce genre de projet ont beaucoup baissé au cours des dix dernières années, provoquant des pénuries énormes, comme constaté ces derniers mois. Je crois que ce projet marocain, ce projet algérien et ce projet à l’Est de la Méditerranée entre cinq pays ont tous un rôle positif dans le renforcement de l’intégration régionale. Ils favorisent la valeur ajoutée économique dans les pays du Sud et rendent l’Europe moins dépendante d’autres fournisseurs d’énergies dont le gaz.

Le financement est une question cruciale en matière de coopération économique. Comment l’abordez-vous à l’UpM?

En matière de financement, il est important de déterminer les secteurs en faveur desquels il faut mobiliser les fonds à moment donné. Au niveau de l’UpM, plusieurs secteurs sont concernés par des projets de soutenabilité (énergies renouvelables, le traitement de l’eau…) Dans ce sens, il suffit de fédérer les différents bailleurs de fonds et nous en avons la capacité. Nous sommes actuellement en train de travailler sur un fonds d’investissement axé sur l’économie bleue: le renouvelable, le transport maritime propre, le traitement des eaux usées, la dépollution de la Méditerranée… Notre ambition est de lancer une plateforme de 1,3 milliard d’euros. Ce n’est pas encore fait, nous sommes en pourparlers avec différents acteurs dont la BERD [Banque européenne de reconstruction et de développement], la BEI [Banque européenne d'investissement], l’Agence française de développement [AFD], l’Agence espagnole pour la coopération internationale au développement (AECID) et les pays du Sud, surtout le Maroc, l’Egypte et la Tunisie. Ces derniers sont -à ce stade- les trois pays bénéficiaires, en espérant que cela s’étende à d’autres pays du Sud, sachant que ceux-ci y mettent également des fonds. L’argent ne viendra donc pas uniquement du Nord, mais aussi du Sud. Il faut savoir que la Méditerranée est une région au sens large qui se porte très bien quand il s’agit de finance climat. C’est une région qui se débrouille mieux que beaucoup d’autres régions du monde.
Quand il s’agit d’investissements industriels et autres, c’est le secteur privé qui doit se mobiliser. Et au regard de l’industrie aéronautique et automobile au Maroc, les industries en général en Egypte ou en Tunisie dans le textile, les engrais, l’acier, l’électroménager…, il y a une montée en puissance des pays du Sud dans la production de ces produits et leur exportation vers le Nord. Mais, il faut beaucoup plus. Dans ce sens, l’Europe doit regarder de près l’idée d’emmener ses centres d’approvisionnement en Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne, car un monde où l’on dépend des chaînes d’approvisionnement de 7 000 à 8 000 Km n’est soutenable ni écologiquement, ni économiquement.

Au-delà de la dimension régionale, comment la Méditerranée se pense-t-elle dans un monde globalisé ?

La globalisation est faite pour rester, mais sous une formule différente. On dit souvent : il faut penser global et acter national, il faut penser régional et acter national, tout en intégrant la globalisation dans le processus. Mais pour que cette grande zone -qu’est l’Europe, l’Afrique au sens large et le Moyen-Orient- puisse devenir un chiffre important dans le monde de demain, elle doit s’intégrer davantage, à l’image que fait notamment la grande Asie ou ce que font les Américains avec le Mexique et le Canada. Et pour y arriver, nous avons un énorme travail à abattre. Il faut de la volonté politique et il faut que les deux rives de la Méditerranée arrivent à la conclusion que leur bien-être et leur futur dépendent d’une coopération beaucoup plus renforcée.
Propos recueillis à Casablanca par Ristel Tchounand.

Politique: Poutine veut imposer la dictature et la misère sociale à l’Afrique

Politique: Poutine veut imposer la dictature et la misère sociale à l’Afrique

Poutine est engagé dans une vaste opération de déstabilisation de l’Afrique au nom du décolonialisme . La vérité c’est qu’il veut vendre aux Africains le système de dictature en vigueur en Russie pour le substituer à la démocratie. De la même manière, il veut permettre le pillage des richesses par les oligarques russes et locaux et accentuer encore la misère sociale ( À titre indicatif le SMIC en Russie est de l’ordre de 75 € !).

Une perspective qui plaît beaucoup à certains politiciens africains qui ne seraient pas fâchés de se débarrasser complètement de la démocratie et de s’approprier encore davantage les richesses de leur pays grâce à la corruption généralisée. En outre, la perspective d’une misère sociale encore plus grande rendrait les populations encore plus soumises d’autant qu’il serait possible d’utiliser la répression pour les récalcitrants.

Pour s’en persuader, Il suffit de voir quelle est la situation concrète de la Russie qui ne cesse de s’enfoncer dans le déclin économique et démocratique.

Dans cette perspective, Sergueï Lavrov a entamé le 7 février un troisième déplacement en Afrique depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, moins d’un mois après un voyage en Afrique australe. Il effectuait, ce mardi, une première visite officielle au Mali qui doit ensuite le conduire ensuite au Maroc, en Tunisie et en Mauritanie. A Bamako, le chef de la diplomatie russe a rencontré son homologue, Aboulaye Diop, puis a eu un déjeuner de travail et une audience avec le colonel Assimi Goita, le président de la transition.

« Nos amis maliens ont des demandes précises, elles sont systématiquement satisfaites, a déclaré mardi Sergueï Lavrov à Bamako. La Russie continuera à aider le Mali à améliorer les capacités combatives de son armée, à former les militaires et les policiers ». Une déclaration qui intervient après la livraison, le 19 janvier, de nouveaux équipements pour l’aviation malienne.

Poutine veut imposer la dictature et la misère sociale à l’Afrique

Poutine veut imposer la dictature et la misère sociale à l’Afrique

Poutine est engagé dans une vaste opération de déstabilisation de l’Afrique au nom du décolonialisme . La vérité c’est qu’il veut vendre aux Africains le système de dictature en vigueur en Russie pour le substituer à la démocratie. De la même manière, il veut permettre le pillage des richesses par les oligarques russes et locaux et accentuer encore la misère sociale.

Une perspective qui plaît beaucoup à certains politiciens africains qui ne seraient pas fâchés de se débarrasser complètement de la démocratie et de s’approprier encore davantage les richesses de leur pays grâce à la corruption généralisée. En outre, la perspective d’une misère sociale encore plus grande rendrait les populations encore plus soumises d’autant qu’il serait possible d’utiliser la répression pour les récalcitrants.

Pour s’en persuader, Il suffit de voir quelle est la situation concrète de la Russie qui ne cesse de s’enfoncer dans le déclin économique et démocratique.

Dans cette perspective, Sergueï Lavrov a entamé le 7 février un troisième déplacement en Afrique depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, moins d’un mois après un voyage en Afrique australe. Il effectuait, ce mardi, une première visite officielle au Mali qui doit ensuite le conduire ensuite au Maroc, en Tunisie et en Mauritanie. A Bamako, le chef de la diplomatie russe a rencontré son homologue, Aboulaye Diop, puis a eu un déjeuner de travail et une audience avec le colonel Assimi Goita, le président de la transition.

« Nos amis maliens ont des demandes précises, elles sont systématiquement satisfaites, a déclaré mardi Sergueï Lavrov à Bamako. La Russie continuera à aider le Mali à améliorer les capacités combatives de son armée, à former les militaires et les policiers ». Une déclaration qui intervient après la livraison, le 19 janvier, de nouveaux équipements pour l’aviation malienne.

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