Transport aérien : changer de modèle !!! (Karima Delli)
Par Karima Delli, députée européenne, présidente de la commission transport et tourisme du parlement européen dans la Tribune
la députée Européenne issu d’Europe écologie les Verts propose de changer de modèle avant qu’il ne soit trop tard. Si le constat est classique par contre on a du mal à distinguer la nature du modèle proposé. Pour résumer utiliser le train , diminuer la flotte . C’est un peu court comme contenu de politique aérienne surtout de la part de la présidente de la commission transport et tourisme du Parlement européen.
Contradiction supplémentaire, Europe écologie les Verts s’est récemment associé aux manifestations contre la liaison ferroviaire Lyon Turin( après y avoir été favorable). Il y a lieu de s’inquiéter avec des propositions aussi creuses et tout aussi contradictoires. Exemple encore la réduction de la flotte qui vise à limiter évidemment la demande mais va favoriser une hausse des prix. Des prix accessibles désormais qu’aux plus favorisés !
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D’après le GIEC, une hausse des températures comprise entre 1,5 et 2 degrés est déjà acquise. Les conséquences seront funestes puisqu’elles vont changer les équilibres climatiques : davantage d’épisodes caniculaires favorisant des feux de forêt incontrôlables, des réfugiés climatiques… Le véritable enjeu est de circonscrire le phénomène au maximum, car il est fort probable que ces prévisions sont sous-estimées.
Pendant ce temps-là, l’industrie du transport aérien continue comme avant. L’un des seuls secteurs à ne pas avoir baissé ses émissions de CO2 depuis 1990 est même en train de programmer son expansion dans des proportions totalement exorbitantes. Le trafic passager pourrait doubler d’ici 2030 tandis que la flotte d’avions serait doublée en vingt ans. Au Salon du Bourget, les commandes volent de record en record.
Cette course à la croissance obéit à de vieilles règles économiques néolibérales bien connues : toute offre crée sa propre demande, et les rendements croissants. Autrement dit, plus on est gros, plus on fait grossir le marché.
Et les compagnies aériennes ne se privent pas de stimuler cette demande par tous les moyens: des prix ultra-attractifs, imbattables poussant l’anomalie à ce qu’ils soient moins chers que le train. De sorte que prendre un vol est devenu un acte consumériste comme un autre. En aucun cas, un aller-retour à 50 euros ne reflète le coût environnemental de ce qu’il puise en ressources naturelles. Or, il est temps de reconnaître que les dégâts environnementaux représentent une dette que nous léguons à nos enfants.
Ni les compagnies aériennes ni les régulateurs publics ne semblent avoir pris conscience de l’impact environnemental de cette course insensée aux volumes. L’Europe a bien fini par imposer quelques règles comme les quotas de CO2 ou l’obligation d’acheter des carburants alternatifs.
Il existe pourtant de nombreuses solutions pragmatiques qui visent à responsabiliser les comportements. Elles seules permettront d’échapper à des mesures extrêmes comme les quotas de vols.
D’abord, l’avion dispose d’alternatives crédibles, décarbonées et efficaces. Le train par exemple ! Le marché européen des vols intracontinentaux représente la moitié des vols… Il est facile d’imaginer que ce sont des liaisons parfaitement substituables par le train. Il faudrait néanmoins une nouvelle volonté politique pour rénover le réseau ferré européen, réinvestir dans un plan de liaisons transfrontalières plus ambitieuses et réhabiliter le train de nuit… Il faudra également revoir le modèle de financement du réseau ferroviaire (en taxant le kérosène par exemple). La prise de conscience citoyenne qu’une ou deux heures de plus passées dans un trajet pour économiser des millions de tonnes de CO2 fera le reste.
L’autre levier que nous avons identifié a, en plus du désastre environnemental qu’il provoque, une portée sociale symbolique très forte: les jets privés. Les chiffres illustrent l’extrême absurdité de la situation. Deux des trois liaisons les plus fréquentes en jets privés disposent d’alternatives ferroviaires de haute qualité: Paris-Genève et Paris-Londres. Le comble revient aux équipes de football qui, pour relier Lyon ou Nantes à Paris soit moins de deux heures de train, prennent des jets privés. D’après Greenpeace, un jet privé émet entre 5 et 14 fois plus de CO2 par passager qu’un vol commercial classique, et 50 fois plus que le train.
Enfin, il est temps d’interroger notre rapport à la distance. Cette culture du toujours plus loin, toujours plus vite, est une impasse environnementale. Dans l’imaginaire collectif, partir aux antipodes est devenu l’expression d’un accomplissement social. Notre responsabilité collective est pourtant de repenser la fréquence et la distance de nos vols. Le tourisme responsable et citoyen que je défends ne peut s’évaluer selon un critère de distance, mais de qualité environnementale.
Les compagnies aériennes feraient, elles aussi, mieux d’interroger la viabilité de leur modèle fondé sur les volumes. Il est scientifiquement prouvé qu’à terme, les ressources fossiles ne suivront pas, ce qui provoquera immanquablement une explosion des prix du carburant. Les compagnies n’auront alors pas le choix que de réduire la voilure de leur flotte, et il est peu probable qu’elles échappent à une grave crise structurelle due à la dette cumulée pour financer ces flottes gigantesques. Le modèle défendu par certaines compagnies n’est pas seulement une impasse environnementale, il est économiquement condamné.