Grand débat: «opération de communication politique» (Chantal Jouanno)
La présidente de la commission nationale du débat public dénonce les conditions d’organisation du Grand débat dans Challenges. «Ils ont confondu débat public et campagne électorale. Écouter, cela n’est pas convaincre. Ni faire de la pédagogie» juge l’ex-ministre des Sports de Nicolas Sarkozy. ll est clair que Macron ne se situe pas dans une démarche de grand débat mais dans une démarche de campagne électorale avec les artifices habituels qui consistent notamment à enfumer son auditoire. Première observation son public est savamment choisi. On veut donner l’impression qu’il s’agit de gens ordinaires en réalité les participants ont été sélectionnés en tolérant seulement une petite dose de contradicteurs. Pas étonnant la réunion d la Drôme était organisée par un ministre ! Trois exemples de la rhétorique sulfureuse de Macron. Quand un intervenant lui parle de la disparité fiscale faisant allusion aux paradis fiscaux à l’intérieur même de l’UE, Macron glisse doucement sur le terrain social pour regretter les disparités qui faussent la concurrence. Des disparités qui existent évidemment mais qui n’ont rien à voir avec la question posée. Autre exemple la question de la dévalorisation du patrimoine dans les territoires économiquement très défavorisés. Macon prend l’exemple du TGV pour souligner au contraire les plus-values que provoque l’arrivée du TGV. Il évoque la taxation possible de cette plus-value. Ensuite il parle d’une vague mutualisation entre les plus-values et les moins values. On se demande bien par quel mécanisme et dans quelle ampleur quand on sait que dans les zones défavorisées le prix de l’immobilier a perdu 50 % en 10 ans. Que vient faire le TGV dans cette affaire ? Autre exemple encore celui de la défense de l’administration. Quand un intervenant pose la question du coût de cette administration, des sureffectifs et de cette énorme technocratie qui en faite gouverne le pays, Macron se lance dans l’éloge de quelques hauts fonctionnaires exemplaires qui pourraient gagner beaucoup plus dans le privé. Encore une manière de dévier fondamentale du poids de la cathédrale administrative qui étouffe la compétitivité et la liberté. Bref c’est la manipulation permanente classique dans les campagnes électorales où l’essentiel est d’enfumer les participants. Notons aussi les conditions du débat On permet aux participants de poser une question pendant une minute seulement alors que le président va s’octroyer le temps de 10 à 15 minutes pour disserter sur la réponse. Au passage glissant discrètement d’un sujet à un autre et finissant toujours sur un propos qui fait l’unanimité ou presque mais qui peut n’avoir pas grand-chose à voir avec le thème initial abordé. A noter que parmi les réserves de Jouanno, il y en a une qui semble justifier à elle seule les raisons pour lesquelles la CNDP n’aurait pas pu assumer cette mission. Soumise à des règles très strictes en matière d’organisation d’une telle consultation, la CNDP n’aurait pas pu accepter celles fixées par le gouvernement. «L’exécutif voulait pouvoir relire et corriger le rapport final!», explique la présidente.