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Une loi pour protéger les consommateurs des arnaques énergétiques

Une loi pour protéger les consommateurs des arnaques énergétiques Annonce le ministre de l’énergie et de l’industrie.

Interview dans la tribune

 

Question à Roland Lescure ministre de l’énergie et de l’industrie: À propos des pompes à chaleur, les arnaques à l’installation se multiplient. Que comptez-vous faire pour protéger les consommateurs ?

Il est hors de question que quelques individus mettent à bas cette stratégie ambitieuse au prétexte de s’enrichir. Nous serons intraitables, et l’ensemble des ministères concernés y travaille. Des annonces devraient être faites prochainement, notamment pour renforcer les contrôles. Chez les fournisseurs d’énergie aussi, il y a eu des comportements de voyous. L’État [par l'intermédiaire de la Commission de régulation de l'énergie, la CRE] a donc engagé trois enquêtes sur trois fournisseurs. Nous allons tout faire pour sanctionner les comportements déviants. La loi viendra par ailleurs renforcer le pouvoir de contrôle de l’Etat, pour mettre un terme à ces comportements.

Ces mesures devaient constituer un des volets du projet de loi relatif à la souveraineté énergétique, qui n’est plus à l’agenda. Il y a aura donc un nouveau projet de loi ?

Nous allons évaluer les chemins. Cette année, nous avons déjà adopté l’extension du TRV [tarif réglementé de ventes] d’électricité à toutes les très petites entreprises via une proposition de loi votée à l’unanimité. L’objectif est de faire adopter les mesures souhaitées, mais pas forcément au même moment. Celles-ci concernent la protection des consommateurs, la régulation du marché de l’électricité, les grandes orientations de production et nos barrages.

Selon Les Échos, la facture des six futurs réacteurs nucléaires EPR2 aurait déjà grimpé de 30 % pour s’établir à 67,4 milliards d’euros, contre les 51,7 milliards annoncés initialement par EDF. Comment expliquer un tel dérapage, et faut-il en redouter d’autres ?

Le chantier n’a pas encore démarré donc on ne peut pas parler de dérapage. En revanche, ces vingt dernières années, l’industrie nucléaire n’a pas brillé par sa capacité à livrer dans les temps et en respectant les budgets. Mais le management a évolué, les relations avec les industriels aussi, et j’ai confiance en EDF. Pour autant, faisons-nous un chèque en blanc ? Non. Nous avons organisé une gouvernance au sein de l’État pour surveiller de très près tous les projets, avec la mise en place d’un Conseil de politique nucléaire et d’une délégation interministérielle au nouveau nucléaire, qui va challenger tous les chiffrages et la conduite des opérations. J’entends que les estimations d’EDF sont réévaluées. Mais elles n’ont été ni validées, ni échelonnées dans le temps, ni financées. Or, le coût du financement et la durée de construction joueront énormément. Par ailleurs, l’entreprise s’est engagée dans un programme d’optimisation du projet et de ses coûts. Tout cela sera évalué en temps et en heure lorsque nous aurons des projets suffisamment finalisés. Nous ne signerons pas de chèque sans avoir eu de devis détaillé.

 Jacques Delors, un précieux héritage 

 Jacques Delors, un précieux héritage 

Dans une tribune au « Monde », l’ex-ministre de la justice rend hommage à l’ancien président de la Commission européenne, auprès de qui elle a travaillé quand il était ministre des finances. Elle souligne son sérieux en matière économique et son engagement pour la construction de l’Union européenne.

Sa conception exigeante de la politique, son œuvre européenne visionnaire et pragmatique, sa méthode de négociation, son engagement social et son réalisme économique, son attention à la jeunesse, ses qualités humaines méritent les hommages unanimes qu’a reçus Jacques Delors après son décès, mercredi 27 décembre 2023.

Dès mon arrivée à son cabinet de ministre des finances, en février 1982, j’ai été impressionnée par son total engagement dans sa mission. Travailleur acharné, il vérifiait tout, confrontait les opinions, donnait des directives précises, exerçait une vigilance sourcilleuse sur les réactions du microcosme politique, informait lui-même la presse, vivait intensément l’évolution désastreuse des réserves de la Banque de France que je lui apportais trois fois par jour dans son bureau [le franc était alors massivement attaqué sur le marché des changes].

S’il a imposé la « rigueur » [en 1983], c’est qu’il était devenu impossible d’y échapper pour éviter le recours humiliant au Fonds monétaire international : les réserves de change avaient fondu, les capacités d’emprunts internationaux à des taux acceptables étaient taries, la France était devenue le jouet de la spéculation.

A ces tourments professionnels s’ajoutait un drame intime : la perte de son fils [en 1982, alors qu’il n’avait que 29 ans]. En ces jours de deuil, les yeux rougis de chagrin et d’insomnie, il était présent à son bureau, assumant toutes ses obligations.

En mars 1983, il a obtenu de l’Allemagne qu’elle réévalue le mark afin de limiter la dévaluation du franc, la troisième en deux ans ! Grâce à lui, la France a retrouvé la confiance des investisseurs et son autonomie. Je revois Jacques Delors et François Mitterrand côte à côte au G7 à Williamsburg, en juin 1983 : ces deux dirigeants avaient conquis le respect de leurs pairs ; la France était écoutée des chefs des principales économies de la planète.

En 1984, Jacques Delors, artisan du compromis sur la contribution britannique au budget européen, a conquis l’estime de Margaret Thatcher et la reconnaissance des chefs d’Etat européens, soulagés de voir réglé le principal contentieux qui paralysait l’Europe. A Fontainebleau, en juin 1984, la première initiative conjointe de François Mitterrand et Helmut Kohl a été de proposer que Jacques Delors soit le futur président de la Commission.

Jacques Delors, politique mais pas politicien

Jacques Delors, politique mais pas politicien

Interview de Pascal Lamy Commissaire européen pour le commerce de 1999 à 2004 et directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de 2005 à 2013; Pascal Lamy avait été, auparavant, le directeur de cabinet de Jacques Delors à la présidence de la Commission européenne.( dans l’Opinion)

Jacques Delors restera comme l’un des acteurs majeurs de la construction européenne. Quelles étaient les racines de son engagement ?
Plusieurs éléments ont façonné sa sensibilité : la guerre, qui a marqué son adolescence, le personnalisme de Mounier et de la revue Esprit, le syndicalisme, la religion. Il ne supportait pas les gens qui portent leur croix en bandoulière, mais dans sa vie privée, la religion a toujours compté, il était un homme de foi. Or anthropologiquement, il y a une forme de parenté entre l’édification ecclésiale et la construction européenne.

Quels étaient les traits les plus marquants de sa personnalité ?

Jacques Delors, c’était d’abord la primauté de la pensée, une pensée sociale-démocrate classique, nordique. Y compris dans sa dimension environnementale, arrivée plus tard car son côté « paysan corrézien » ne collait pas au départ avec les écolos. C’était une capacité à tracer une route, un agenda, assorti d’une ferme volonté de le mettre en pratique. C’était aussi le soin apporté à comprendre et à convaincre. Ce qui le caractérisait, c’était la simplicité, dans le dessein, dans la parole, dans le comportement. Mais il était extrêmement complexe, sensible, susceptible. Il n’avait pas la peau épaisse des politiques endurcis.

Il a présidé la Commission européenne pendant dix ans. Quelles furent les réalisations majeures de son mandat ?
Le grand marché intérieur de 1992 c’est-à-dire la disparition des frontières, la monnaie unique, la redistribution via les fonds structurels, les adhésions espagnole et portugaise, Erasmus, les autoroutes de l’information, le mini-plan Marshall pour l’Europe de l’Est. La soutenabilité économique, sociale, et environnementale qu’il voyait comme la marque de fabrique de l’Union des Européens. Ce qu’il faut d’abord retenir, c’est la cohérence de ces réalisations, c’est cela qui faisait sa force et lui permettait d’obtenir l’adhésion des Etats membres. Delors était bien plus profondément politique qu’on ne voulait bien le dire en France. Mais il n’aimait pas le sang, la bagarre, les coups de couteau dans le dos, il était très mal à l’aise dans ce monde de carnivores menteurs, qui n’est pas celui de Bruxelles. La Commission était peuplée d’herbivores sincères. Delors aurait fait un très bon Premier ministre en Belgique, au Danemark ou aux Pays Bas, car les mœurs politiques y diffèrent des mœurs latines ou shakespeariennes.

Mitterrand avait besoin de Delors et Delors de Mitterrand pour faire ce qu’ils devaient faire. ll y avait du respect entre les deux hommes

Aurait-il pu réussir sans le soutien de Kohl et Mitterrand ?
Cela ne fonctionnait pas à trois : cela fonctionnait très bien à deux entre Delors et Kohl, très bien à deux entre Mitterrand et Kohl, et par moments correctement entre Delors et Mitterrand. Mitterrand prenait Delors pour un démocrate-chrétien ambitieux, trop hésitant et trop centriste, et Delors prenait Mitterrand pour un Machiavel qui n’irait jamais au paradis. En même temps, Mitterrand avait besoin de Delors et Delors de Mitterrand pour faire ce qu’ils devaient faire. ll y avait du respect entre les deux hommes. Mais je suis sûr que Mitterrand se moquait de Delors quand il était avec ses copains, et Delors a parfois eu des mots très durs sur Mitterrand en tant qu’homme. Avec Kohl il avait plus de proximité personnelle et idéologique, c’était vraiment une amitié, alors qu’avec Mitterrand ce n’en était pas une.

Quel rôle a-t-il joué au moment de la réunification allemande ?
Delors a tout de suite vu que le vent de l’Histoire soufflait, il s’est tout de suite demandé comment faire, sur le plan opérationnel, pour avaler ce morceau de pays. On a monté les choses très rapidement pour procéder à un élargissement qui ne disait pas son nom. Sur le plan technique, c’était assez compliqué d’étendre à toute vitesse ce qu’il y avait de législation et régulation communautaires à l’Allemagne de l’Est. La task force que l’on a créée et que j’ai pilotée à l’époque avec le secrétaire général de la Commission Carlo Trojan a été un moment assez extraordinaire d’invention ; rien n’était prêt. Cela a été une aventure, et ce côté « je sens ce qui se passe et je fonce », c’était tout à fait Delors.

N’aurait-il pas fallu alors aider davantage l’Allemagne ?
Delors a proposé à Kohl de mettre sur pied un fonds spécial pour financer, au niveau européen, la réunification allemande, en mettant en avant le risque de hausse des taux d’intérêt et le fait que les Européens allaient de toute façon finir par payer. Après réflexion, Kohl a dit qu’il ne voulait pas être demandeur aussi longtemps que les pourparlers sur le traité de paix « quatre plus deux » ne seraient pas terminés, car il craignait de devoir en contrepartie faire des concessions. Il a, pour des raisons purement politiques, écarté ce qui était une proposition économique hyper rationnelle. De fait, les taux d’intérêt ont grimpé, et comme on était dans une zone monétaire qui n’était pas aussi structurée qu’après Maastricht, on a tous payé. Delors avait vu juste !

Vous avez été pendant dix ans son directeur de cabinet à la Commission. Comment fonctionnait votre collaboration ?
Je le connaissais très bien, il me connaissait très bien, on avait travaillé ensemble, y compris dans des conditions de température et de pression un peu particulières entre 1981 et 1983 au gouvernement, et donc je savais ce qu’il faisait bien et pas bien, et vice-versa, et mon boulot était de l’aider à faire bien ce qu’il faisait bien et de faire à sa place ce qu’il ne faisait pas bien.

Le « pas bien » c’était quoi ?
Ce n’était pas un manager, cela ne l’intéressait pas de faire de l’organisation. Lui exerçait le magistère de la pensée, de la stratégie, mais il fallait quelqu’un qui fasse le turbin, qui accommode cela avec la réalité. J’ai pris à ses côtés ce mix entre le goût pour les idées, la spéculation, les initiatives, et le souci que cela laisse une trace dans la direction que l’on souhaite. La plupart des gens qui ont travaillé avec lui ont fini par prendre ce pli. « L’idéal » mais aussi « le réel ».

Beaucoup d’Européens gardent une grande nostalgie de ces années Delors.
Plus le temps passe plus cette période apparaît comme l’âge d’or, comme le paradis perdu. Ce qui est frappant, c’est que Delors est adulé à Bruxelles pour tout ce qu’il y a fait, mais parfois critiqué en France pour ce qu’il n’a pas fait, à savoir se porter candidat à l’élection présidentielle.

Macron a tenté lors de son premier quinquennat ce que Delors a dit qu’il ne pouvait pas faire et qu’il aurait voulu faire. Mais ça ne marche plus. Delors n’a donc probablement pas eu tort de ne pas se lancer dans la course présidentielle
Il n’a jamais mis à exécution ses menaces répétées de démission, à Paris ou Bruxelles.
Delors avait un côté titi parigot, avec cet accent qu’il prenait parfois, des formules, le goût pour le foot, le vélo ; il avait un côté « popu » qui n’était pas du tout affecté. C’était un gars des faubourgs, avec par moments cette espèce de gouaille, ce côté un peu destructeur, un peu provocateur, un peu « je les emmerde ». Les bras d’honneur, on ne savait jamais si c’était du lard ou du cochon, quelle était la partie de lui-même qui en était à l’origine, si c’était de l’énervement, de la fatigue, de la tactique soigneusement distillée, ou juste son caractère malicieux.

Retrouve-t-on une part de Delors chez Emmanuel Macron ?
Oui, beaucoup. Il y a la dimension européenne, la dimension des réformes, la cohérence de la pensée qui résulte d’un long travail, l’idée qu’il faut mettre la droite et la gauche ensemble pour obtenir des résultats. Si vous écoutez les raisons officielles que Delors avançait pour ne pas avoir été candidat en décembre 1994, Macron a tenté lors de son premier quinquennat ce que Delors a dit qu’il ne pouvait pas faire et qu’il aurait voulu faire. Mais ça ne marche plus. Delors n’a donc probablement pas eu tort de ne pas se lancer dans la course présidentielle. Ce sont des personnalités très différentes. A la différence de Macron, Delors ne croyait pas à la thaumaturgie de la Ve République. Par ailleurs Macron est passé par chez Chevènement, Delors pas.

Il était exactement à l’intersection du centre droit et du centre gauche, tels qu’ils s’exprimaient jusqu’à récemment presque partout dans divers spectres politiques, en Belgique, en Italie, en Allemagne et ailleurs
Faut-il voir en Delors un démocrate-chrétien ou un social-démocrate chrétien ?
Il était à la jonction des deux, c’est d’ailleurs pour cela qu’il était aussi central en Europe et que l’Europe était aussi centrale chez lui ; il était exactement à l’intersection du centre droit et du centre gauche, tels qu’ils s’exprimaient jusqu’à récemment presque partout dans divers spectres politiques, en Belgique, en Italie, en Allemagne et ailleurs. Delors c’était ça, c’était ce point d’intersection dans un tissu français qui n’en est absolument pas coutumier car il a été chamboulé par le communisme et par le gaullisme, c’est une plante qui n’a jamais vraiment pris en France, et que les Français ne connaissent pas bien. Mais c’est une pensée qui durera. Je ne crois pas qu’il y ait des « Deloristes », mais il y a des « Deloriens » comme il y a eu des « Pasteuriens ».

Pour une écologie de la joie (Jacques Tassin)

Pour  une écologie de la joie (Jacques Tassin)

Dans une interwiew dans le Monde, le chercheur Jacques Tassin défend la nécessité dune ecologie joyeuse. .

Chercheur en écologie végétale au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), auteur de plusieurs essais, dont A quoi pensent les plantes ? (Odile Jacob, 2016), Jacques Tassin vient de publier Pour une écologie du sensible.

La raison, écrivez-vous, « est allée trop loin, trop seule » et, en s’isolant du sensible, a fait de nous « des étrangers sur notre Terre ». A quand remonte cette rupture ?

Le processus trouve son aboutissement chez Descartes, qui écrit, dans ses Méditations métaphysiques (1641) : « J’ai une claire et distincte idée de moi-même, en tant que je suis seulement une chose qui pense et non étendue », et ajoute : « J’ai une idée distincte du corps, en tant qu’il est seulement une chose étendue et qui ne pense point. » Cela remonte loin, on peut aller jusqu’à Démocrite ou Platon, dont on retrouve la conception géométrique du monde, au début de l’ère moderne, chez Galilée, mais Descartes est le point d’aboutissement de cette histoire. Le fil du sensible s’effilochait déjà. Il a fini par se rompre.

Vous parlez d’un malentendu sur la nature même de la raison…

Oui, parce que, en réalité, comme le philosophe Maurice Merleau-Ponty [1908-1961] l’a démontré, la raison commence par le sensible. Elle se manifeste en aval de ce que nos sens nous permettent d’en percevoir. La raison vient ensuite, en relais, ou en surplomb. Je ne dis d’ailleurs pas qu’il faudrait y renoncer. Surtout pas. La raison est une force. Nous sommes naturellement de pauvres singes plutôt démunis et, sans elle, nous aurions du mal à nous débrouiller. Mais le sensible est une disposition à aller de l’avant, vers ce qui n’est pas soi, en établissant une continuité avec l’ensemble du vivant : s’en couper nous éloigne du monde. Je cite le livre de Bruno Latour, Où atterrir ? [La Découverte, 2017]. Nous nous sommes mis en position satellitaire, loin de la Terre, loin des réalités, qui sont d’abord sensibles. Certes, l’humanité pilote bien la matière, si je puis dire. La raison est efficace. Mais on en reste là, loin de la vie, et il est urgent d’atterrir.

Vous critiquez les approches qui dominent aujourd’hui l’écologie, aussi bien scientifiques que politiques. En quoi vous paraissent-elles insuffisantes ?

Elles demeurent dans une appréhension conceptuelle, quantifiée, du vivant, une sorte d’approche comptable. C’est ce que j’observe dans l’usage du terme paradoxal de « biodiversité » : comment un mot suffirait-il à contenir toute la diversité du vivant ? Il ne faut pas s’étonner que cette « biodiversité » disparaisse sous nos yeux, si nous remplaçons ce qui est devant nous par un concept. Quand j’ai eu la chance de faire partie de l’IPBES, la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques, je me suis aperçu que les scientifiques procédaient de leur manière coutumière : ils allaient dans le sens du recueil de données, de la numérisation, de la quantification. C’est un niveau très faible d’appréhension du vivant.

Retraites : « un calendrier loufoque » (Jacques Attali )

Retraites :  « un calendrier loufoque » (Jacques Attali )

A juste titre , L’économiste Jacques Attali dénonce le calendrier complètement surréaliste et même loufoque de la réforme des retraites  (samedi 14 décembre sur franceinfo) . Il propose par ailleurs d’inscrire cette réforme dans la constitution pour en garantir la stabilité. . « On est dans une situation complètement surréaliste, juge-t-il, parce qu’on a un Premier ministre qui le 11 décembre annonce qu’il va déposer un projet de loi le 22 janvier, pour une réforme qui entrerait en vigueur au plus tôt en 2024. C’est-à-dire après la fin du mandat du président de la République. Donc le calendrier est loufoque », a affirmé Jacques Attali.

D’après l’ancien conseiller de François Mitterrand, ce calendrier n’est pas adapté au sujet spécifique des retraites, qui est « un sujet de très long terme. On a pris deux ans pour réfléchir, on aurait pu prendre un peu plus, ne pas créer les conditions pour que ceci se passe au pire moment de l’année [la période des fêtes de fin d'année]. Je pense que le timing est absurde ».

Comment un président de la République qui, par définition, n’est que de passage, peut décider sur des sujets de très long terme ? C’est un problème profond de nos sociétés, qui renvoie à la confiance en quelqu’un aujourd’hui pour décider ce qu’il va se passer dans 40 ans.

Jacques Attali a jugé que la réforme des retraites devrait faire l’objet « d’une réforme de la Constitution ». Cela permettrait de garantir la valeur du point d’indice qui va mesurer la valeur de la retraite selon lui. « La définition de ce point, si elle n’est pas gravée dans le marbre, qui empêchera quelqu’un dans 5 ou 10 ans de le diviser par quatre ? Si on prend cette réforme vraiment au sérieux, il faut que ses principes fondamentaux soient inscrits dans la Constitution. »

Le gouvernement promet toutefois une règle d’or dans la loi, qui permettrait de stabiliser la valeur de ce point fixée par les partenaires sociaux. C’est insuffisant pour Jacques Attali :  » Une loi peut être modifiée par une autre loi. Et qui sait ce que serait la majorité parlementaire dans dix ans ? Je propose que les principes de sujets de très long terme, qui engagent notre collectivité nationale sur des décennies, soient mis dans la Constitution ».

«Jacques Chirac, un mensonge national». (Eric Le Boucher)

«Jacques Chirac, un mensonge national».  (Eric Le Boucher)

 

L’éditorialiste de l’Opinion conteste le torrent d’éloges à  l’adresse de Chirac. Il critique l’indécision de Jacques Chirac, sa versatilité, son essuie-glace permanent, la tentation communiste de la jeunesse, son travaillisme, son thatchérisme, son affichage social ensuite et, résultat, son immobilisme vient du rapport non-réglé entre politique et économie. 

Tribune :

 

 « Nous assistons en direct depuis trois jours à un mensonge national. Jacques Chirac est salué par tous avec tout le tralala, au titre, je résume, qu’« il est français ». Jacques Chirac est français « comme nous » : gaulois, gueulard, bouffeur, blagueur, dragueur. Il ressemblait aux Français à l’ancienne, il les aimait, donc on l’aime. Ajoutons qu’il avait l’ambigu mélange d’admiration et de dédain vis-à-vis des Américains et un instinct rétif vis-à-vis de l’Europe de Bruxelles. Voilà pourquoi le pays unanime pleure sa perte. On aime Chirac, comme on aime les vinyles. C’est dépassé, mais c’était bien

La vérité pourtant simple est qu’il a été le dernier président du XX siècle, qu’il a été en échec (la cohabitation) puis que réélu il a été le premier président du XXI et qu’il n’a pas su y projeter la France. Il a fait prendre un retard considérable à son pays et il a immobilisé l’Europe. Voilà son bilan. Les mandats de ses deux successeurs ont été plombés par le chômage de masse et les déficits qu’il a laissés et le troisième, Emmanuel Macron, paie cher la « fracture sociale » qu’il avait brandie comme slogan pour son élection de 1995 mais qu’il a élargie par inaction. Allez, accordons-lui l’Irak, le Vel’ d’Hiv et son musée des arts premiers. Ajoutez la vitesse sur route, si vous y tenez. Mais au total, Jacques Chirac a été le plus mauvais président de la V République, contrairement à ce que répand le torrent de guimauves déversées depuis trois jours. »

 

« Rompre avec la théorie économique dominante » (Jacques Perrin)

« Rompre avec  la théorie économique dominante » (Jacques Perrin)

Une réflexion intéressante de l’économiste Jacques Perrin dabs le Monde qui rappelle la distinction à faire entre valeurs d’échange et valeurs d’usage. Reste que pour l’instant on se limite à l’évaluation des économies à travers la valeur des biens échangées et toutes les politiques macro-économiques mais aussi sociales sont fondées sur ce concept. On voit mal comment pourrait se soustraire à la régulation par le marché qui ne prend en compte que les valeurs d’échange à moins de rééquilibrer ce marché par une régulation qui ne passe pas uniquement par les prix et la fiscalité.

« Un litre de gazole et un litre de Coca-Cola ont aujourd’hui quasiment le même prix, mais ont-ils la même valeur économique ? Après le premier étonnement suscité par la question, et sachant que les conséquences économiques et humaines d’une pénurie de pétrole ne sont pas les mêmes que celles d’une pénurie de Coca-Cola, la plupart des personnes que l’on interroge ainsi répondent assez spontanément qu’un litre de gazole n’a pas la même valeur économique qu’un litre de Coca. En revanche, pour la pensée économique dominante, qui enseigne que la valeur économique des biens et des services est donnée par leur prix, le litre de gazole et le litre de Coca ont bien la même valeur économique.

Cette affirmation théorique repose sur plusieurs croyances. La première est de croire que la valeur économique d’un bien ou d’un service peut être identifiée à sa seule valeur d’échange (son prix), gommant ainsi les aspects d’utilité et de valeur d’usage. La révolte des « gilets jaunes » témoigne avec force qu’un litre de gazole n’a pas la même valeur économique pour chacun d’entre nous : par exemple, il a plus de valeur pour une personne payée au smic et qui n’a pas d’autres moyens de transport que sa voiture que pour une personne ayant le même revenu mais pouvant utiliser des transports en commun.

La deuxième croyance est de nous considérer tous comme des Homo economicus, c’est-à-dire comme des agents cherchant à satisfaire individuellement leurs besoins en ayant à leur disposition toutes les informations pour faire des choix rationnels.

Dans un monde de plus en plus interdépendant, on ne peut plus penser la valeur économique à l’échelle d’un individu et par rapport à un seul bien ou service pris isolément, surtout lorsqu’il s’agit d’un bien comme l’énergie. Comme le rappellent les économistes institutionnalistes, ce qui est décisif, ce n’est pas que l’individu ait des besoins, mais que des hommes, liés socialement, aient des besoins.

Il faut rappeler que le pétrole, ressource énergétique non renouvelable et productrice de gaz à effet de serre, a structuré depuis des décennies nos modes de production et d’organisation de la division du travail au niveau international, et qu’il a aussi structuré nos façons de consommer, de se loger, de se déplacer, et plus généralement d’organiser nos territoires. Depuis des décennies, le prix du pétrole sur le marché international n’a jamais traduit la place structurante et grandissante qu’il prenait dans les économies des pays développés, il n’a jamais permis de prendre en compte sa valeur économique sociétale. »

 

Jacques Chérèque, un des acteurs essentiels du recentrage de la CFDT

Jacques Chérèque, un des acteurs essentiels  du recentrage de la CFDT

Officiellement on retiendra de Jacques Chérèque (le père de François, ancien secrétaire général de la CFDT) qu’il fut secrétaire de la fédération de la métallurgie, qu’il a aussi été ministre et qu’il contribué à la reconversion de la sidérurgie de Lorraine. Cependant ce n’est peut-être pas ce qui est à mettre le plus crédit car Jacques Chérèque ;  c’est surtout celui qui a contribué à opérer le recentrage de la CFDT c’est-à-dire une organisation de masse à vocation majoritaire dépolitisée. Une stratégie qui a payé puisque la CFDT est devenue le premier syndicat de France. Logiquement Jacques Chérèque était programmé pour succéder au charismatique Edmond Maire, il en fut empêché précisément car trop marqué par sa vision réformiste. Les gauchistes et autres crypto marxistes à l’époque avaient un pouvoir de nuisance important dans l’organisation, par la suite ils sont partis notamment vers Sud. Jacques Chérèque était aussi partisan par exemple d’une réduction du temps de travail mais non compensé financièrement, c’est-à-dire un vrai partage du travail. C’est grâce à des hommes comme Jacques Chérèque que l’organisation a su se débarrasser de ce virus gauchiste et utopiste pour se consacrer totalement à la défense des travailleurs mais à la différence d’autres syndicats avec la volonté d’aboutir. Il aura fallu presque 40 ans pour que la CFDT recueille les fruits de son changement de stratégie en devenant la principale force syndicale du pays. Le syndicaliste Jacques Chérèque, figure de la CFDT qui fut également ministre chargé de l‘Aménagement du territoire et des Reconversions sous François Mitterrand, est mort à l’âge de 89 ans, a annoncé dimanche le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger. “Jacques Chérèque, un homme remarquable et un syndicaliste authentique nous a quittés, la CFDT est une nouvelle fois en deuil en 2017”, écrit le leader syndical sur son compte Twitter. Le fils de Jacques Chérèque et ancien numéro un du syndicat, François Chérèque, est mort en tout début d‘année. “Je rends hommage à Jacques, à son engagement toute sa vie pour une société plus juste. Pensées et condoléances pour sa famille et ses proches”, ajoute-t-il. Dans un communiqué distinct, la CFDT salue un “grand militant qui a eu le cran de comprendre que l‘avenir de la région Lorraine pouvait passer par une fermeture d‘usine, à condition que l‘on sache anticiper, reconvertir et bien sûr se battre, parfois dans l‘adversité syndicale totale, même violente”. “C‘est un grand monsieur qui s‘est éteint, porteur d‘une vision d‘avenir, profondément attaché à la personne humaine, animé en permanence par la quête de sens, avec le souci de traduire ses valeurs en actes”, ajoute le syndicat.

« L’implosion de l’Euro» ? (Jacques Sapir)

« L’implosion de l’Euro» ? (Jacques Sapir)

À l’heure de la montée du populisme certains économistes en profitent pour donner un caractère scientifique à des analyses qui préconisent la sortie de l’euro. C’est le cas  Jacques Sapir  Économiste, directeur d’études à l’EHESS, . qui dans une interview au Figaro prévoit et encourage l’implosion de la monnaie unique. Des propos très discutables d’abord parce qu’il n’est n’existe pas de caractère vraiment scientifique à l’analyse économique, une science sociale parfois  approximative compte tenu de l’incapacité qu’il y a à prévoir la réaction des acteurs. Ceci étant  ces réflexions méritent  d’être lues  notamment pour souligner leurs contradictions. Jacques Sapir souligne en effet qu’un de l’euro se traduirait par une dépréciation d’une monnaie italienne indépendante de 25 %. Mais il oublie de préciser que cela entraînerait une inflation de -20 % qui affecterait le pouvoir d’achat des ménages et donc la consommation sur laquelle repose en grande partie la croissance, donc l’emploi. Certes on objectera que la politique européenne actuelle souffre de graves insuffisances et qu’elle est responsable de la croissance molle. Mais avec les propositions de Jacques Sapir  la situation économique et sociale se dégraderait encore davantage. Un équilibre est sans doute à trouver entre les positions des europhiles trop béats des jeux refile un peu BA et les anti- européens irresponsables.

Interview de Jacques sa pire dans le Figaro :


FIGAROVOX. – Ce dimanche, a lieu en Italie le référendum sur la réforme constitutionnelle souhaitée par le président du Conseil des ministres Matteo Renzi. Quels en sont les enjeux?

Jacques SAPIR. – Les enjeux sont en réalité à la fois locaux et européens. L’Italie traverse depuis de nombreuses années une crise grave. Cette crise ne prend pas la forme aiguë de la crise grecque ; elle est plus sourde mais elle n’en est pas moins profonde. On constate que l’introduction de la monnaie unique a tué l’économie italienne. On le voit quand on regarde la croissance et surtout la croissance par habitant. Aujourd’hui, l’Italie est au niveau qu’elle avait atteint en 2000. Autrement dit, ces seize dernières années n’ont vu aucune croissance. La faible croissance enregistrée de 2000 à 2007 a été entièrement détruite par les années suivantes. Le constat est encore pire si l’on regarde la croissance par habitant. En PIB par tête, l’Italie est aujourd’hui revenue au niveau de 1997. Ceci n’est le fait d’une crise brutale comme en Grèce. La productivité du travail, dont la croissance était comparable à celle de la France et de l’Allemagne de 1971 à 1999, stagne depuis 2000. L’écart s’est massivement ouvert avec ses voisins immédiats. Si l’on prend 1999 comme indice 100, on est en 2015 à 117 en Allemagne et en France, mais à 104,5 seulement en Italie. La raison de cette situation est, comme dans le cas de la France, l’écart qui s’est créé entre le taux de change virtuel du Deutsche Mark, que l’on peut calculer par l’évolution de la productivité et de l’inflation en Allemagne, et le taux de change virtuel de la Lire. Une étude du Fond Monétaire International montre que le Mark est virtuellement sous-évalué de 15% (au taux de change de l’euro) quand la Lire est, elle, surévaluée de 10%. Cet écart de 25% est la cause de biens des malheurs de l’économie italienne, tout comme pour le cas de la France où cet écart atteint 21%.

 

Quelles sont les conséquences de cette crise italienne?

En Italie, il y a désormais le sentiment que cette situation ne peut plus durer.

Cette crise a donc des conséquences internes mais aussi européennes. En Italie, il y a désormais le sentiment que cette situation ne peut plus durer. Les différentes réformes, que ce soit celles mises en œuvre par le gouvernement de Mario Monti ou celles appliquées par l’actuel Premier ministre, Matteo Renzi, ont durement frappé la population mais n’ont pu relancer la machine économique. La montée des mauvaises dettes dans le bilan des banques italiennes, qui est la cause principale des problèmes qu’elles connaissent, vient de là. Cette crise est aggravée par le fait que les principaux actionnaires de ces banques sont des personnes privées, et non des «investisseurs institutionnels» comme c’est le cas en France. Une crise ouverte de ces banques, leur faillite, ruinerait des centaines de milliers d’Italiens. La gestion de cette crise bancaire a montré une classe politique italienne qui n’a guère changé depuis les années 1990. Il pourrait ne pas y avoir d’autres choix pour l’Italie qu’une sortie en catastrophe de l’euro. C’est l’une des raisons qui ont poussé Matteo Renzi à soumettre un projet de réforme constitutionnel à référendum. S’il voit son projet accepté, il aura les mains libres pour procéder à une réforme bancaire et il pourra redessiner un système politique à sa mesure. S’il échoue, la réforme bancaire n’aura pas lieu, en tous les cas pas comme il le souhaite, et il n’aura plus d’autres choix que de supplier l’Allemagne de procéder à une politique de relance massive s’il veut sauver l’économie italienne. Comme il y a de très faibles chances qu’il soit écouté à Berlin, il pourrait ne pas y avoir d’autres choix pour l’Italie qu’une sortie en catastrophe de l’euro. Cette sortie ne serait pas faite par Renzi lui-même. On pense qu’en cas de succès du «non» au référendum, son gouvernement tomberait assez rapidement, et cela ouvrirait la voie à de nouvelles élections où des partis eurosceptiques, comme le Mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo, la Ligue (ex «Ligue du Nord») de Salvini, voire Forza Italia, la parti de Berlusconi, pourraient avoir la majorité. On voit donc comment la situation italienne pourrait, dans les jours et les semaines qui viennent, avoir des conséquences considérables sur la situation de l’Union européenne, mais avant tout de la zone Euro. Si nous avons un succès du «Non», les investisseurs se retireront d’Italie, mais aussi – et le phénomène de contagion va jouer très vite – de France et d’Espagne. Les taux remonteront, en dépit de l’action de la Banque Centrale Européenne. Nous connaîtrons un nouvel épisode de la crise de l’euro, mais dans une situation politique où l’Union européenne, déjà affaiblie par le «Brexit» et par l’élection de Donald Trump, n’aura probablement plus les moyens de réagir.

 

Dans quelle mesure le scénario d’un Italexit est-il vraiment crédible?

On s’apercevra que les traités sont, en période de crise, ce que Bismarck en disait : des chiffons de papier. Il faut ici distinguer la sortie de l’euro d’une éventuelle sortie de l’Union européenne. L’Italie a un besoin vital de recouvrer sa souveraineté monétaire. C’est pour son économie, comme dans une moindre mesure pour l’économie française, une question de vie ou de mort. Mais, une sortie de l’euro, qui est aujourd’hui sérieusement envisagée dans les milieux industriels italiens, et l’on sait que le MEDEF italien, la Cofindustria, y est en sous-main favorable, n’implique nullement une sortie automatique de l’UE. Le plus grand pragmatisme régnera alors. On peut toujours prétendre qu’on ne peut sortir de l’euro sans sortir de l’UE. Mais, en réalité, cela n’est pas vrai. Les pays de l’UE ont intérêt à ce que l’Italie reste, et l’on s’apercevra que les traités sont, en période de crise, ce que Bismarck en disait: des chiffons de papier. Néanmoins, il est clair que cette sortie de l’Italie de l’euro, si elle se concrétisait, affaiblirait considérablement l’Union européenne. Cette dernière n’aurait alors guère le choix que de se réformer de manière fondamentale, en convoquant tous les pays membres à un nouveau traité fondateur, ou d’exploser.

 

La zone Euro pourrait-elle résister au choc de la sortie de la troisième économie qu’est l’Italie de l’Union économique et monétaire?

 

Économiquement, la réponse est clairement non. L’Italie n’est pas la Grèce. Elle pèse d’un poids considérablement plus lourd dans la zone euro ; l’Italie est le troisième pays de la zone euro. Mais, le problème n’est pas purement économique. Admettons que l’Italie soit dans l’obligation d’abandonner l’euro à l’été prochain, ou à l’automne, ce qui est une possibilité qu’il faut prendre au sérieux en cas de victoire du «non», on peut douter de ce que les dirigeants politiques des autres pays de la zone euro en tirent immédiatement les conséquences, et décident de dissoudre cette dernière. Pour les dirigeants allemands, ils n’y ont clairement pas intérêt. Une dissolution de la zone euro entraînerait une forte appréciation du Mark (sans doute de 20%, voire plus) qui ferait disparaître l’immense excédent commercial dont jouit l’Allemagne. Les dirigeants français, quant à eux, s’opposeraient à cette dissolution dans un premier car ils sont idéologiquement persuadés qu’un retour aux monnaies nationales est une catastrophe, et ils sont désormais politiquement dépendants de l’Allemagne, du moins pour des dirigeants issus du PS et des «Républicains». Le risque est donc que la France soit un facteur de blocage politique, symétrique à l’Allemagne qui sera quant à elle un facteur de blocage économique. Mais, cette position ne saurait être tenue très longtemps. En effet, avec une Italie quittant l’Euro, et dépréciant sa monnaie d’au moins 25% (s’il n’y a pas d’appréciation de la monnaie allemande), le choc concurrentiel sur la France sera considérable, et ses conséquences catastrophiques. Si ce choc se combine aux effets récessifs de la politique de François Fillon, on pourrait avoir une baisse de la croissance de -1,5% à -2,5%, et une hausse du chômage pour la seule année 2018 de 500 000 à 700 000 nouveaux chômeurs au moins, pouvant atteindre et même dépasser le million (avec les chômeurs «induits» par les chômeurs «directs»).

 

Quels pourraient justement être les effets de cette crise italienne en France?

Le référendum italien du 4 décembre constitue le véritable prélude à l’élection présidentielle français. Je suis persuadé que le gouvernement français sera contraint, à terme, d’envisager une sortie de la France de l’Euro. Mais, plus il tardera et plus le coût en termes de chômage et de casse économique sera élevé. L’hypothèse la plus favorable serait l’élection d’un Président favorable à une sortie de l’euro, et l’on sait que trois candidats défendent peu ou prou cette position, soit Marine le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Nicolas Dupont-Aignan. Si nous avions, à l’été 2017, un Président convaincu qu’il faut sortir de l’euro, nous pourrions exercer, de concert avec les Italiens, une pression décisive pour obtenir que les Allemands acceptent l’idée d’une dissolution ordonnée de la zone euro. Cette dissolution ordonnée se traduirait par une moindre dépréciation des monnaies de la France, de l’Italie, de l’Espagne et du Portugal, car dans le même temps on aurait une appréciation du Mark allemand. L’excédent commercial allemand disparaîtrait, et alimenterait une croissance forte dans les autres pays, qui permettrait à la fois de régler la crise bancaire italienne et de relancer les économies des différents pays d’Europe du Sud. Admettons maintenant que le gouvernement allemand ne veuille pas entendre raison, nous serions de toute manière dans une bien meilleure position, avec un Président convaincu qu’une sortie de l’euro est nécessaire, pour nous entendre avec le gouvernement italien et quitter la zone euro, évitant par là même le choc que provoquerait une sortie de la seule Italie sur la France si cette dernière persistait à vouloir rester dans la zone euro. Une conséquence de cela est donc que le référendum italien du 4 décembre constitue en réalité le véritable prélude à l’élection présidentielle français. Si le «non» l’emporte, cela rendra immédiatement obsolète le programme économique de François Fillon (mais aussi celui d’Emmanuel Macron et d’un quelconque candidat issus du PS) avant même qu’il ne puisse être appliqué. Dès lors, soit François Fillon en prendra conscience, et considérera que les nouvelles circonstances appellent un changement radical de son programme économique incluant une sortie de l’euro, soit il donnera de fait un avantage décisif aux candidats qui défendent, eux et depuis longtemps, l’idée d’une sortie de l’euro et il perdra l’élection présidentielle.

 

 

Jacques Cheminade, le fonctionnaire qui s’ennuyait enfin candidat en 2017

Jacques Cheminade, le fonctionnaire qui s’ennuyait enfin candidat en  2017

On ne compte plus les velléités de candidature pour la présidentielle de 2017 on doit compter sans doute maintenant une vingtaine de prétendants, avec tout ceux qui vont se déclarer prochainement on  devrait parvenir à une trentaine. Manquait  évidemment à ce festival démocratique la candidature de l’incontournable Jacques Cheminade l’ancien fonctionnaire qui s’ennuyait au ministère des affaires étrangères et qui est au moins le mérite ses déclarations anachroniques de mettre un peu rire dans un système un peu tristounet. On objectera que la démocratie française ne se grandit pas en laissant des hurluberlus se présenter aux présidentielles. Cheminade qui a comparé Obama à Hitler et qui développent les thèses les plus tordues dans tous les domaines s’est qualifié lui-même de gaulliste de gauche. Comme beaucoup d’énarques qui s’ennuient dans les ministères, Cheminade, aujourd’hui en retraite avaient mis met un peu de diversité dans sa vie de fonctionnaire. Facile quand c’est l’Etat qui paye la note. Il n’est pas le seul ainsi à faire de la politique (si le mot est ici approprié). Raymond Barre en son temps avait souhaité que les fonctionnaires choisissent le service de l’Etat ou la politique mais pas les deux. Il n’a pas été entendu puisque la plupart des politiques sont eux-mêmes fonctionnaires. Du coup la société politique n’est pas du tout représentative de la sociologie française et nos politiques ont bien du mal à comprendre ce qu’est l’économie réelle et les problèmes sociaux qui en découlent. Le candidat de Solidarité et Progrès (pas vraiment un micro-parti plutôt un nano-parti) à l’élection présidentielle s’était  qualifié de « gaulliste de gauche » 1, une voie que Jacques Cheminade a lui-même estimé « difficile ». « Je n’ai pas de modèle en tant que tel, mais je me considère comme un mélange de De Gaulle et Mendès-France (tu parles !!!), deux hommes politiques qui ne se sont jamais entendus », a-t-il répété. Jacques Cheminade, énarque « comme d’autres » souhaite « faire sauter le verrou financier » et réduire l’influence de Wall Street et la City. Dans son programme figure également le souhait de coloniser la Lune et Mars. « C’est une entreprise sérieuse à long terme », a confié le candidat. « C’est l’affaire de deux générations. S’il n’y avait pas d’espace, il n’y aurait pas de cœur artificiel, pas de téléphone portable ni d’ordinateur », a-t-il développé.

Crise en France : un manque de vision (Jacques Attali)

Crise en France : un manque de vision (Jacques Attali)

 

Jacques Attali n’a sans doute pas tort  de déplorer l’immobilisme qui se nourrit du manque de vision concernant l’avenir. Jacques Attali est souvent pertinent dans ses analyses et dans certaines de ces propositions. Ceci étant comme tous ceux qui font métier de prospective il s’est aussi souvent trompé. Il a cependant le mérite d’ouvrir le champ des possibles st d’inviter à la réflexion. On peut cependant regretter ce ton professoral et cette manie d’avoir une réponse à tout là où parfois il faudrait autoriser l’interrogation. En conclusion intéressant certes mais un peu agaçant).

Interview de Jacques Attali dans le JDD

Un manque de vision ?
Sans vision du monde, on ne réforme rien… Le grand blocage dans lequel nous sommes est dû à cela : les partis dits de gouvernement n’ont absolument aucune idée de ce que doit être la France dans 20 ans. Faute de vision, c’est toujours la paralysie, parce que nul n’accepte de remettre en cause ses acquis de peur de ne rien gagner en échange. Aujourd’hui tout le monde est pour l’environnement et pour la sécurité. Entre ces deux projets sectoriels, celui des écologistes et du Front National, il y a un vide. Un grand vide… Les deux partis de gouvernement ne réfléchissent plus à l’avenir. Au lieu d’avoir une réflexion à long terme et une stratégie, ils ne sont plus capables que de tactique.

Quels sont les principaux facteurs de paralysie?
Un pays est bloqué quand il pense que c’était mieux hier. Alors chacun se crispe sur ses avantages acquis, sa rente, ses privilèges. Si les politiques disaient voilà ce que sera la France de 2025, voilà ce que chacun y gagnera, alors les Français accepteraient de perdre un peu aujourd’hui de leurs avantages. Or nous sommes un pays aveugle face à l’avenir, avec un Front national qui n’a d’autre projet que celui d’une France imaginaire des années 50… Le pessimisme français qui en découle est à la mesure de la conscience que nous avons de nos privilèges actuels : on se crispe et on met les chariots en cercle…

«La gauche française : une crise fondamentale» (Jacques Julliard)

«La gauche française :  une crise fondamentale» (Jacques Julliard)


Dans uen interview au Figaro Jacques Julliard, historien de formation, pense que la crise de la gauche se nourrit surtout du changement  de terrains  d’action. Faute de pouvoir agir sur le terrain social la gauche ( en fait surtout le PS)  tente de reformer sur le plan sociétal. Face à l’échec économique et social on fait des réformes sur les mœurs.

FIGAROVOX. – La gauche française tiraillée entre une ligne radicale et une ligne sociale-démocrate apparaît désorientée idéologiquement. Quels sont aujourd’hui ses points d’appui doctrinaux?

Jacques JULLIARD. - La gauche française vit une crise fondamentale. Elle est née, dans notre pays, de la rencontre de deux idées: celle du progrès scientifique et technique et celle de justice sociale. C’est la conjonction de ces deux idées, et par conséquent de ces deux groupes sociaux que sont la bourgeoisie progressiste et le prolétariat qui constitue l’essence de la gauche. Aussi longtemps que les deux parties ont pu cheminer ensemble, le socialisme lui-même n’a pas eu de problème théorique majeur. Aujourd’hui, la situation est différente. Le peuple a le sentiment d’une dissociation: il pense que le progrès ne sert plus la justice sociale.  Partant de ce constat, les socialistes se divisent en deux camps. Les réalistes (dont François Hollande est le chef de file) qui considèrent que, sans croissance, il n’y a pas d’amélioration possible du revenu des individus. Les autres qui affirment que c’est une illusion et qu’il faut, dès que la gauche arrive au pouvoir, en tirer le maximum pour les plus humbles. Ce désaccord est tactique. Même Mélenchon, malgré son goût pour le tourisme révolutionnaire, ne promet pas le grand soir. Le débat est entre sociaux-démocrates de tendance libérale et sociaux-démocrates dirigistes. En définitive, la seule valeur propre qui reste à la gauche, c’est l’égalité. La preuve, c’est que personne ne la lui dispute.

Le Parti socialiste et François Hollande sont en proie à une véritable frénésie sociétale. Légiférer sur tous les aspects de l’existence de la naissance à la mort, est-ce cela le socialisme?

Tout cela est nouveau dans la philosophie socialiste. Ses racines sont collectives, sinon toujours collectivistes. Elles développent des valeurs de solidarité, d’esprit de groupe, d’esprit de classe, disait-on autrefois. Or, toutes les lois actuelles qui ont trait à la génération, à la vie privée, à la sexualité sont au contraire inspirées par un individualisme profond. Faisons un retour historique: la Révolution française est individualiste mais, quand elle rencontre au milieu du XIXe siècle le prolétariat, la gauche devient collectiviste. Aujourd’hui nous vivons un retournement diront les uns, un retour aux sources assureront les autres, mais quoi qu’il en soit la gauche ne défend plus guère que des valeurs individualistes. Elle s’est alignée sur le socialisme scandinave. Faute de faire une révolution sociale, le Parti socialiste s’efforce de faire une réforme sociétale.

 

Syrie : « La diplomatie, c’est pas dans les salons » Jacques Myard

Syrie : « La diplomatie, c’est pas dans les salons » Jacques Myard

L parlementaire persiste et signe. Il est d’autant plus ferme dans es convictions que les plus hautes autorités de l’Etat étaient informés de ce voyage. Mieux qu’elle l’ont suscité. Le dérapage c’est la médiatisation. Mais dans tous les conflits des émissaires prennent contact avec les protagonistes y compris ceux qui sont nos ennemis. C’est la diplomatie classique. (exemple lors des enlèvements de Français). D’une  certaine manière c’est l’opposition entre la diplomatie du réel et la diplomatie du virtuel ; Il y a donc beaucoup ‘hypocrisie de la part des grands leaders politiques dans cette affaire. ( interview JDD)

 

Avez-vous des regrets?
Ah non! S’il fallait refaire ce voyage, je le referais. La diplomatie, cela ne se fait pas dans les salons, mais sur le terrain. Les cris d’orfraie d’un certain nombre de « salonnards » m’indiffèrent complètement.

Quel était le sens de votre démarche?
Depuis longtemps, députés de droite comme de gauche, nous sommes un certain nombre à nous interroger sur la justesse de notre politique étrangère. Nous disons qu’il ne faut pas se tromper d‘ennemi. Cela ne signifie pas que le régime de Damas est sans responsabilités. Il a vraisemblablement du sang sur les mains. Cela dit, non seulement on a fait une énorme erreur en répétant que Bachar allait tomber « dans les quinze jours », mais force est de constater que s’il a des ennemis, il a aussi des soutiens, et qu’il contrôle 60% du territoire syrien. Et puis l’ennemi, on sait qui c’est : ce sont le terroristes de Daech.

Quelles leçons tirez-vous de votre séjour à Damas?
La première, c’est qu’il faut sortir de cette guerre – ou plutôt de cette guérilla urbaine, qui ressemblerait par moments à la bataille d’Alger – mais qu’il n’y a pas de solution militaire. Et que toute solution passe aujourd’hui par Bachar El Assad. Il est urgent que la France retrouve une politique étrangère indépendante, sans se laisser dicter notre conduite par qui que ce soit. Au regard de la défense de nos intérêts, du rôle de la Syrie et des liens historiques de la France et de la Syrie, j’ai parfois le sentiment qu’on se tire aujourd’hui une balle dans la tête. Par exemple quand je constate que le lycée français de Damas – le lycée Charles-de-Gaulle- n’a plus droit depuis deux ans à aucune subvention. Pour le reste, je réserve mes conclusions aux plus hautes autorités de l’Etat pour qui j’ai rédigé, comme c’est normal, un complet-rendu complet de notre déplacement.

 




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