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Une dette publique insoutenable

Une dette publique insoutenable

 

Les mesures annoncées par le premier ministre lors de son discours de politique générale risquent de ne pas suffire. L’environnement économique est tel que la France atteint le seuil où la dette produit de la dette qui produit de la dette… Une situation désormais intenable. L’incapacité récurrente des pouvoirs publics français à ramener le déficit dans les critères de Maastricht a été aggravée par les deux grandes crises des subprimes en 2008 et celle du Covid-19 en 2020. En conséquence de l’accumulation de 44 années de déficit excessif depuis 1980, date à laquelle les finances publiques étaient à l’équilibre et la dette à 20 %, l’endettement public s’élevait fin 2023 à 112 % du PIB soit le double de la limite de 60 % du PIB fixée par le Pacte de stabilité et de croissance dûment ratifié par la France. Pire encore, depuis début janvier nous assistons à une succession de révisions à la hausse du déficit public pour 2024, initialement attendu à 4,4 % soit déjà à l’époque le pire de la zone euro après l’Italie. Le ministère des Finances l’a depuis fortement revu à la hausse d’abord en mars dernier à 5,7 % pour finalement avouer juste avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2025 qu’il s’établira sans doute au-delà de 6 %.

par Éric Pichet
Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School dans « the Conversation » 
Nous avions déjà souligné ici l’impuissance chronique des gouvernements successifs à respecter les objectifs pourtant modestes des lois de finances mais la divergence entre déficit attendu et réalisé n’a jamais été aussi forte alors que doit débuter – avec retard – l’examen du budget 2025 par une Assemblée nationale extraordinairement divisée et polarisée. Parallèlement, Paris, sous procédure pour déficit excessif depuis juillet dernier devait soumettre à Bruxelles un plan pluriannuel de réduction de son déficit le 20 septembre avant d’obtenir in extremis un délai supplémentaire au 31 octobre.

La gravité de la situation n’a pas encore été prise en compte par les agences de notation mais elle l’est déjà par les marchés obligataires puisque la France emprunte désormais à 5 ans non seulement à un taux plus élevé que le Portugal et l’Espagne mais même que la Grèce. Ils remplissent ainsi un rôle très utile de lanceurs d’alerte que n’a jamais su assumer le Haut Conseil des finances publiques depuis sa création par le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de 2012, comme nous l’avions rappelé dès 2014 puis à maintes reprises. La Commission européenne a elle aussi toujours fait preuve de laxisme vis-à-vis des dérives budgétaires françaises.

Le déficit nominal, publié régulièrement par l’Insee doit, depuis l’application des critères de Maastricht, rester en dessous de 3 % ce qui ne s’est pas produit depuis 2018. Pour tenir compte de l’évolution du cycle économique et éviter de faire plonger les pays de l’UE d’une récession temporaire à une profonde dépression, le Pacte de stabilité et de croissance a progressivement retenu le critère du déficit structurel, à savoir le déficit hors dégradation liée à un ralentissement économique conjoncturel. Le problème vient du fait que ce solde structurel ne peut qu’être estimé, à la différence du déficit nominal dont le calcul par l’Insee est incontestable.

Ainsi en 2021 nous estimions, comme la Commission européenne, le déficit structurel français autour de 5 % soit très loin de l’évaluation fantaisiste de Bercy et surtout très au-delà de l’objectif fixé par le traité de 0,5 % du PIB. S’il reste supérieur à 5 % du PIB aujourd’hui c’est parce que le pays n’a toujours pas engagé de véritables réformes structurelles à l’exception de celle des retraites d’avril 2023 si décriée malgré des résultats modestes.

En France, les gouvernements successifs n’ont jamais su, depuis 1981, tirer profit des périodes de croissance pour rétablir l’équilibre des comptes publics, chaque période de récession se traduisant par une flambée spectaculaire de la dette suivie systématiquement d’un effet de cliquet.

Cette inconscience s’est même accentuée après la crise des subprimes grâce à des circonstances exceptionnellement favorables. À partir de 2008 en effet, les banques centrales ont ramené leurs taux directeurs à des niveaux proches de zéro, voire négatifs, ce qui était totalement inédit. Par contagion, les taux obligataires ont suivi la tendance puisque l’État français a même pu emprunter à 10 ans à taux négatif pendant quelques années. D’où la situation paradoxale et lénifiante d’une forte hausse de la dette concomitante à une diminution régulière de la charge de la dette publique (les intérêts versés sur la dette publique) passée de 3 % du PIB en 2008 à seulement 1,7 % en 2023.

Comble du paradoxe, la remontée des taux d’intérêt obligataires autour de 3 % en 2022 et 2023 s’est traduite par une baisse du ratio dette publique sur PIB passé de 118 % du PIB au plus haut en 2021 à 112 % fin 2023 car la charge de la dette ne remontera que progressivement au fil des remplacements des emprunts émis il y a quelques années alors que l’inflation s’est brutalement envolée de 5,2 % en 2022 puis de 4,9 % en 2023 ce qui a immédiatement gonflé les recettes publiques.

L’inflation refluant désormais en dessous de l’objectif de long terme de la BCE de 2 % par an, les circonstances exceptionnelles des deux dernières années disparaissent et le risque d’un effet boule de neige sur la dette du fait de déficits incontrôlables devient patent.

Selon l’équation de soutenabilité de la dette, cette dernière est stabilisée par rapport au PIB tant que le taux de croissance nominale de la dette égale celui du PIB en valeur. Ainsi aujourd’hui, avec une dette publique de 112 % du PIB et une croissance du PIB en valeur de 3 % (1 % en volume +2 % d’inflation), la dette en pourcentage est stable si le déficit ne dépasse pas 3,3 %. Or, il est de plus de 6 % cette année et attendu par le Gouvernement (de manière excessivement optimiste) à 5 % en 2025. Il est donc certain que la dette va reprendre son ascension en 2024 et 2025 et donc que la charge d’intérêts va s’envoler.

Pour stopper l’emballement de l’effet boule de neige déjà enclenché, il n’y a qu’une seule solution : atteindre au plus vite le déficit stabilisant la dette de 3,3 %. Compte tenu de la charge d’intérêts actuelle d’environ 2 % du PIB cela implique nécessairement de ramener le déficit primaire (hors charge d’intérêts) de 4 % actuellement à seulement 1,3 % du PIB soit un effort structurel de 2,7 % du PIB en 2024 et même de 3,7 % en 2025 car le déficit s’établirait sans correction à 7 % l’an prochain.

En clair, cela signifie qu’il faudrait faire un effort de 112 milliards d’euros en 2025 soit deux fois plus que prévu dans le projet de lois de finances pour 2025… une prévision déjà particulièrement optimiste. Il est évident que l’effort extraordinaire annoncé de 60 milliards dont 20 milliards sous forme de hausse d’impôts et 40 milliards de coupes dans les dépenses n’empêchera pas la dette publique de croître et ne stoppera pas l’effet boule de neige.

Le pays n’est donc qu’au début d’un long et douloureux chemin déjà balisé par la Grèce, le Portugal, l’Espagne et l’Italie (les fameux PIGS) qui sont contraints de dégager depuis plusieurs années un excédent primaire afin de réduire leur endettement via la baisse du niveau de vie de leurs citoyens (de 30 % en Grèce) ou en coupant dans leurs dépenses d’investissement et en supportant un fort taux de chômage des jeunes comme en Italie. La question de la dette publique restera donc centrale dans le débat politique des prochaines années d’autant qu’à la dette financière s’ajoute la dette écologique qui bien que les émissions de CO2 diminuent chaque année progresse toujours de l’ordre de 40 milliards d’euros par an. Sans oublier le passif social lié aux droits à retraite dans le secteur public qui n’est pas provisionné…

Une dette publique insoutenable

Une dette publique insoutenable

 

Les mesures annoncées par le premier ministre lors de son discours de politique générale risquent de ne pas suffire. L’environnement économique est tel que la France atteint le seuil où la dette produit de la dette qui produit de la dette… Une situation désormais intenable. L’incapacité récurrente des pouvoirs publics français à ramener le déficit dans les critères de Maastricht a été aggravée par les deux grandes crises des subprimes en 2008 et celle du Covid-19 en 2020. En conséquence de l’accumulation de 44 années de déficit excessif depuis 1980, date à laquelle les finances publiques étaient à l’équilibre et la dette à 20 %, l’endettement public s’élevait fin 2023 à 112 % du PIB soit le double de la limite de 60 % du PIB fixée par le Pacte de stabilité et de croissance dûment ratifié par la France. Pire encore, depuis début janvier nous assistons à une succession de révisions à la hausse du déficit public pour 2024, initialement attendu à 4,4 % soit déjà à l’époque le pire de la zone euro après l’Italie. Le ministère des Finances l’a depuis fortement revu à la hausse d’abord en mars dernier à 5,7 % pour finalement avouer juste avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2025 qu’il s’établira sans doute au-delà de 6 %.

par Éric Pichet
Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School dans « the Conversation » 

 
Nous avions déjà souligné ici l’impuissance chronique des gouvernements successifs à respecter les objectifs pourtant modestes des lois de finances mais la divergence entre déficit attendu et réalisé n’a jamais été aussi forte alors que doit débuter – avec retard – l’examen du budget 2025 par une Assemblée nationale extraordinairement divisée et polarisée. Parallèlement, Paris, sous procédure pour déficit excessif depuis juillet dernier devait soumettre à Bruxelles un plan pluriannuel de réduction de son déficit le 20 septembre avant d’obtenir in extremis un délai supplémentaire au 31 octobre.

La gravité de la situation n’a pas encore été prise en compte par les agences de notation mais elle l’est déjà par les marchés obligataires puisque la France emprunte désormais à 5 ans non seulement à un taux plus élevé que le Portugal et l’Espagne mais même que la Grèce. Ils remplissent ainsi un rôle très utile de lanceurs d’alerte que n’a jamais su assumer le Haut Conseil des finances publiques depuis sa création par le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de 2012, comme nous l’avions rappelé dès 2014 puis à maintes reprises. La Commission européenne a elle aussi toujours fait preuve de laxisme vis-à-vis des dérives budgétaires françaises.

Le déficit nominal, publié régulièrement par l’Insee doit, depuis l’application des critères de Maastricht, rester en dessous de 3 % ce qui ne s’est pas produit depuis 2018. Pour tenir compte de l’évolution du cycle économique et éviter de faire plonger les pays de l’UE d’une récession temporaire à une profonde dépression, le Pacte de stabilité et de croissance a progressivement retenu le critère du déficit structurel, à savoir le déficit hors dégradation liée à un ralentissement économique conjoncturel. Le problème vient du fait que ce solde structurel ne peut qu’être estimé, à la différence du déficit nominal dont le calcul par l’Insee est incontestable.

Ainsi en 2021 nous estimions, comme la Commission européenne, le déficit structurel français autour de 5 % soit très loin de l’évaluation fantaisiste de Bercy et surtout très au-delà de l’objectif fixé par le traité de 0,5 % du PIB. S’il reste supérieur à 5 % du PIB aujourd’hui c’est parce que le pays n’a toujours pas engagé de véritables réformes structurelles à l’exception de celle des retraites d’avril 2023 si décriée malgré des résultats modestes.

En France, les gouvernements successifs n’ont jamais su, depuis 1981, tirer profit des périodes de croissance pour rétablir l’équilibre des comptes publics, chaque période de récession se traduisant par une flambée spectaculaire de la dette suivie systématiquement d’un effet de cliquet.

Cette inconscience s’est même accentuée après la crise des subprimes grâce à des circonstances exceptionnellement favorables. À partir de 2008 en effet, les banques centrales ont ramené leurs taux directeurs à des niveaux proches de zéro, voire négatifs, ce qui était totalement inédit. Par contagion, les taux obligataires ont suivi la tendance puisque l’État français a même pu emprunter à 10 ans à taux négatif pendant quelques années. D’où la situation paradoxale et lénifiante d’une forte hausse de la dette concomitante à une diminution régulière de la charge de la dette publique (les intérêts versés sur la dette publique) passée de 3 % du PIB en 2008 à seulement 1,7 % en 2023.

Comble du paradoxe, la remontée des taux d’intérêt obligataires autour de 3 % en 2022 et 2023 s’est traduite par une baisse du ratio dette publique sur PIB passé de 118 % du PIB au plus haut en 2021 à 112 % fin 2023 car la charge de la dette ne remontera que progressivement au fil des remplacements des emprunts émis il y a quelques années alors que l’inflation s’est brutalement envolée de 5,2 % en 2022 puis de 4,9 % en 2023 ce qui a immédiatement gonflé les recettes publiques.

L’inflation refluant désormais en dessous de l’objectif de long terme de la BCE de 2 % par an, les circonstances exceptionnelles des deux dernières années disparaissent et le risque d’un effet boule de neige sur la dette du fait de déficits incontrôlables devient patent.

Selon l’équation de soutenabilité de la dette, cette dernière est stabilisée par rapport au PIB tant que le taux de croissance nominale de la dette égale celui du PIB en valeur. Ainsi aujourd’hui, avec une dette publique de 112 % du PIB et une croissance du PIB en valeur de 3 % (1 % en volume +2 % d’inflation), la dette en pourcentage est stable si le déficit ne dépasse pas 3,3 %. Or, il est de plus de 6 % cette année et attendu par le Gouvernement (de manière excessivement optimiste) à 5 % en 2025. Il est donc certain que la dette va reprendre son ascension en 2024 et 2025 et donc que la charge d’intérêts va s’envoler.

Pour stopper l’emballement de l’effet boule de neige déjà enclenché, il n’y a qu’une seule solution : atteindre au plus vite le déficit stabilisant la dette de 3,3 %. Compte tenu de la charge d’intérêts actuelle d’environ 2 % du PIB cela implique nécessairement de ramener le déficit primaire (hors charge d’intérêts) de 4 % actuellement à seulement 1,3 % du PIB soit un effort structurel de 2,7 % du PIB en 2024 et même de 3,7 % en 2025 car le déficit s’établirait sans correction à 7 % l’an prochain.

En clair, cela signifie qu’il faudrait faire un effort de 112 milliards d’euros en 2025 soit deux fois plus que prévu dans le projet de lois de finances pour 2025… une prévision déjà particulièrement optimiste. Il est évident que l’effort extraordinaire annoncé de 60 milliards dont 20 milliards sous forme de hausse d’impôts et 40 milliards de coupes dans les dépenses n’empêchera pas la dette publique de croître et ne stoppera pas l’effet boule de neige.

Le pays n’est donc qu’au début d’un long et douloureux chemin déjà balisé par la Grèce, le Portugal, l’Espagne et l’Italie (les fameux PIGS) qui sont contraints de dégager depuis plusieurs années un excédent primaire afin de réduire leur endettement via la baisse du niveau de vie de leurs citoyens (de 30 % en Grèce) ou en coupant dans leurs dépenses d’investissement et en supportant un fort taux de chômage des jeunes comme en Italie. La question de la dette publique restera donc centrale dans le débat politique des prochaines années d’autant qu’à la dette financière s’ajoute la dette écologique qui bien que les émissions de CO2 diminuent chaque année progresse toujours de l’ordre de 40 milliards d’euros par an. Sans oublier le passif social lié aux droits à retraite dans le secteur public qui n’est pas provisionné…

Thomas Piketty :un modèle social et fiscal insoutenable

Thomas Piketty :un modèle social et fiscal insoutenable

Directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, Ecole d’économie de Paris

La science économique, trop centrée sur ses modèles mathématiques, doit remettre en cause plus systématiquement les inégalités, estime l’économiste dans sa chronique au Monde.

Réjouissons-nous : l’American Economic Association (AEA), principale organisation professionnelle des économistes aux Etats-Unis, vient de décerner la médaille Clark à Gabriel Zucman pour ses travaux sur la concentration des fortunes et l’évasion fiscale. Remise chaque année à un lauréat de moins de 40 ans, la distinction vient notamment récompenser des travaux novateurs démontrant l’importance considérable de l’évasion fiscale des plus riches, y compris dans les pays scandinaves, un peu vite considérés comme des modèles de vertu. Doté d’une immense capacité de travail, d’un rare souci du détail et d’un talent sans pareil pour dénicher des données nouvelles et les faire parler, Gabriel Zucman a aussi révélé l’ampleur insoupçonnée du contournement de l’impôt sur les sociétés par les multinationales de tous les pays.

Aujourd’hui directeur de l’Observatoire européen de la fiscalité, il consacre une même énergie à trouver des solutions aux maux qu’il documente. Dans l’un de ses premiers rapports, l’Observatoire a ainsi démontré que les Etats membres de l’Union européenne pourraient choisir d’aller plus loin que le taux minimal de 15 % fixé par l’Organisation de coopération et de développement économiques (trop faible et largement contournable), sans attendre l’unanimité. En imposant à chaque multinationale souhaitant exporter des biens et des services un taux de 25 % sur ses profits – le même que celui qui est payé par les producteurs installés sur le territoire national –, alors la France obtiendrait des recettes supplémentaires de 26 milliards d’euros et inciterait les autres pays à faire de même.

Le fait que l’AEA choisisse de récompenser ces travaux est important, car cela montre que le cœur de la profession commence à prendre conscience du caractère insoutenable du modèle social et fiscal actuel. Ne forçons pas le trait : les économistes ont toujours été moins monolithiques qu’on ne l’imagine parfois, y compris aux Etats-Unis. En 1919, le président de l’AEA, Irving Fisher, choisit de consacrer sa « presidential address » à la question des inégalités. Il explique sans détour à ses collègues que la concentration croissante des richesses est en passe de devenir le principal problème économique de l’Amérique, qui risque, si l’on n’y prend garde, de devenir aussi inégalitaire que la vieille Europe (alors perçue comme oligarchique et contraire à l’esprit étatsunien).

« La dette insoutenable des pays pauvres »

« La dette insoutenable des pays pauvres »

La Plate-forme française dette & développement (PFDD) qui regroupe une trentaine d’organisations de la société civile appelle, dans une tribune au « Monde », la France à défendre un cadre universel de traitement des dettes et demande une réforme en profondeur de l’architecture internationale de la dette des pays pauvres.

Tribune.

 

Les chefs d’Etat du monde entier sont invités, lundi 29 mars, à se réunir à l’ONU pour discuter de la réforme de l’architecture internationale de la dette. La communauté internationale a aujourd’hui la possibilité d’enfin apporter des réponses structurelles, alors que la crise économique mondiale déclenchée par la pandémie de Covid-19 sévit depuis plus d’un an, et plonge les pays pauvres dans une situation chaque jour plus critique, plombée par des niveaux de dette insoutenables.

Si la communauté internationale saisit cette opportunité et engage cette nécessaire réforme de l’architecture internationale de la dette, elle peut contribuer à sauver les objectifs du développement durable, et lutter contre la pauvreté et les inégalités mondiales. Si elle ne le fait pas, elle condamne les populations des pays en développement à une nouvelle décennie perdue.

Les pays pauvres sont gravement touchés par la crise. Les impacts socio-économiques de la pandémie pourraient perdurer des années, voire des décennies. Un demi-milliard de personnes pourraient tomber dans la pauvreté, entraînant une augmentation des inégalités sociales, économiques et de genre.

Les niveaux d’endettement de ces pays, qui atteignaient déjà des niveaux record avant la pandémie (deux fois plus élevés qu’à la veille de la crise financière de 2008), sont devenus complètement insoutenables dans le contexte de crise actuel. Beaucoup consacrent déjà une plus grande part de leurs maigres ressources au remboursement de leur dette qu’à la santé ou à l’éducation.

Le Ghana, par exemple, dépense 11 fois plus pour honorer le service de sa dette que pour ses dépenses de santé. Si des mesures ambitieuses ne sont pas adoptées, des ressources publiques vitales vont continuer d’être dépensées pour rembourser les créanciers de ces pays (pays riches, banques multilatérales, banques privées et fonds d’investissement) au détriment des besoins sociaux, économiques ou de santé des populations.

En avril 2020, Emmanuel Macron plaidait pour des annulations massives de la dette africaine. Sous l’impulsion de la France, le Groupe des vingt pays les plus riches (G20) a lancé une initiative de suspension du service de la dette (ISSD) puis adopté un cadre commun de traitement des dettes des pays pauvres.

Hélas, ces deux mécanismes sont très loin d’apporter des réponses réelles à la crise. Pensés par et pour ces pays créanciers, ils sont destinés à simplement reporter et rééchelonner les paiements de dettes d’un nombre limité de pays pauvres, et ne prévoient aucun moyen de contraindre les créanciers privés et multilatéraux à participer.

Extraterritorialité du droit américain : atteinte insoutenable à la souveraineté des Etats (Ludovic Lassauce)

Extraterritorialité du droit américain  : atteinte insoutenable à la souveraineté des Etats (Ludovic Lassauce)

 

L’extra territorialité du droit américain à l’évidence constitue un véritable viol de la souveraineté des Etats et une sorte de nouveau colonialisme économique. En outre si chaque pays entendait agir ainsi le monde serait alors  livrer au chaos le plus total sur le plan juridique. En fait, l’imposition du droit américain à l’extérieur de ses frontières constitue un élément de sa guerre économique. Ce que Ludovic Lassauce, chef d’entreprise démontre dans une interview au Monde

« Selon un rapport parlementaire remis au Premier ministre Edouard Philippe en juin dernier, on constate

 la prolifération de lois à portée extraterritoriale (…) permettant aux autorités de la première puissance mondiale d’enquêter, de poursuivre et de condamner (…) les pratiques commerciales d’entreprises et d’individus du monde entier ». Autant de procédures qui « violent la souveraineté des pays dont ces (acteurs) sont ressortissants », conduisant à des sanctions « disproportionnées » ne poursuivant pour seul but que de les « fragiliser dans la compétition internationale ».

De fait, le tableau de chasse de l’Oncle Sam est « édifiant » et a de quoi donner le tournis. D’innombrables banques – BNP Paribas, Commerzbank, HSBC, Crédit agricole, ING, Bank of Tokyo, etc. -, mais aussi de grands fleurons industriels européens – Siemens, Alstom, Total, Volkswagen, etc. – ont ainsi eu affaire à la justice américaine.

En vingt ans, poursuivent les auteurs du rapport précité, « plusieurs dizaines de milliards de dollars d’amendes ont été réclamés (à des entités étrangères) alors même qu’aucune de (leurs pratiques incriminées) n’avait de lien direct avec le territoire des Etats-Unis ». En 2018, Royal Bank of Scotland s’est ainsi vue infliger une amende de 4,9 milliards de dollars pour ses mauvaises pratiques lors de la dernière crise financière – un comble, cette dernière s’étant principalement déclenchée en raison de l’incurie des banques… américaines. Même le célèbre secret bancaire helvète ne résiste pas à ce racket généralisé, le Crédit Suisse ayant écopé, quatre ans plus tôt, d’une amende de 2,6 milliards de dollars pour avoir aidé plusieurs milliers de ses clients à frauder le fisc américain.

Le concept d’extraterritorialité est d’autant plus insidieux qu’il est large. Il s’applique, par exemple, aux opérations informatiques transitant par des serveurs hébergés aux Etats-Unis, ou encore à toute transaction potentiellement frauduleuse réalisée en dollars. Et les multinationales ne sont pas les seules concernées, loin s’en faut : le glaive américain s’abat aussi, périodiquement, sur des individus que Washington considère comme des adversaires politiques. A l’image de l’homme d’affaires ukrainien Dimitry Firtash, accusé de corruption en dollars et assigné, depuis plusieurs années, à résidence à Vienne, la capitale autrichienne, où il a été arrêté sous mandat américain.

Que lui est-il reproché précisément ? D’avoir corrompu des officiels indiens pour sécuriser l’obtention de mines de titane. Les Etats-Unis, qui n’ignorent pas que Firtash est un proche de l’ancien président ukrainien Viktor Ianoukovytch – et donc dans les petits papiers du Kremlin -, tentent obstinément d’arracher son extradition vers leur territoire. Membre de l’équipe de Robert Mueller en charge de faire la lumière sur les possibles ingérences russes dans la dernière campagne présidentielle américaine, Andrew Weissmann aurait proposé à Dimitry Firtash un deal : livrer des informations au sujet du Russiagate en échange de l’abandon des poursuites le concernant. Le refus de l’homme d’affaires ukrainien expliquerait l’acharnement judiciaire dont il fait l’objet – et les réticences de Vienne, pas dupe des intentions politiques de Washington, à accéder à sa demande d’extradition.

De la même manière, les États-Unis (sous l’impulsion de l’opposition à l’administration Trump), n’ont pas hésité à user d’un droit d’ingérence totalement illégitime et sans fondement sur la situation à Hong Kong, en légiférant sous prétexte de droits de l’Homme. C’est un peu l’hôpital qui se moque de la charité, quand on voit comment cette même opposition a usé de tant de subterfuges pour déstabiliser l’élection du président Trump. Respect de principes à géométrie variable… Comment peut-on avoir encore confiance en un pays censé représenter la liberté, la justice et porter les valeurs de nos démocraties occidentales avec de telles pratiques ?

En Europe, chaque entreprise, chaque individu ou presque, peut un jour tomber sous le coup de la justice américaine. Nos entreprises sont, de fait, et comme le rappellent les auteurs du dernier rapport parlementaire sur le sujet, « prises en otage par ces procédures américaines, coincées entre le marteau et l’enclume dans un processus de  »négociation » de façade, aggravé par un chantage à l’accès au marché américain ».
Cette guerre juridique est d’autant plus illégitime d’un point de vue du droit international qu’elle est unilatérale. En effet, la réciprocité semble ne pas s’appliquer lorsqu’il s’agit de ressortissants américains soupçonnés de mêmes pratiques de corruption.

Le blog de Charles Gave présente ainsi les dessous plutôt inquiétants de l’affaire ukrainienne où l’ancienne administration américaine n’a pas hésité à fermer les yeux dans l’implication de ses ressortissants. Mais, de la même manière, dans le cadre de l’échange des données fiscales entre banques et pays afin, soi-disant, d’aider à la lutte contre la fraude fiscale et le blanchiment, les États-Unis sont le seul pays n’ayant pas ratifié le traité permettant à d’autres nations de récupérer auprès de banques américaines les informations sur les comptes off-shore de leurs citoyens.

Pour répondre à cette offensive tous azimuts, le député Raphaël Gauvin propose, dans son rapport, de mieux protéger la confidentialité des avis juridiques en entreprise, en créant un statut d’avocat en entreprise, chargé, en quelque sorte, d’utiliser et retourner le droit américain contre lui-même ; de moderniser la loi de 1968, dite « de blocage » ; et d’étendre le RGPD européen aux données des personnes morales, ce qui permettrait de sanctionner les hébergeurs transmettant les données d’entreprises françaises à des autorités étrangères « en dehors des canaux de l’entraide administrative ou judiciaire ». Autant de mesures de bon sens, qu’il convient d’adopter urgemment pour nous prémunir du scandale de l’extraterritorialité du droit américain. »

 

Grèce : une politique d’austérité insoutenable (Macron)

Grèce : une politique d’austérité insoutenable (Macron)

 

Macon considère sans doute à juste titre que la cure d’austérité budgétaire imposée à la Grèce est insoutenable et qu’il convient donc de revoir clairement les conditions d’apurement de la dette qui dans les conditions actuelles étouffent  l’économie.  Au-delà, Macon repose la problématique de la solidarité financière au sein de la zone euro. Il en profite aussi pour adresser une critique à l’Allemagne qui se refuse à affecter ses excédents à leur relance de la croissance. Une critique également partagée par le FMI. « On est en train de voir qu’au-delà du sujet de la restructuration de la dette, va se poser assez vite la question de la soutenabilité de la politique budgétaire imposée à la Grèce. Car la politique d’un pays ne peut avoir l’austérité budgétaire comme unique horizon », dit-il dans une interview publiée samedi par Le Monde. Les Européens ont approuvé une nouvelle aide à la Grèce, qui devrait commencer à lui être versée la semaine prochaine, après le vote par le parlement hellène de nouvelles mesures exigées par ses créanciers. Cet accord s’accompagne d’un engagement sur un allègement futur de la dette grecque dont les modalités seront discutées en 2018. Au-delà de la Grèce, Emmanuel Macron estime que la mise en place d’un mécanisme de restructuration des dettes publiques dans la zone euro est « un sujet sur lequel il faut qu’on avance ». « Mais il ne faut ouvrir ce débat que si des mécanismes de solidarité budgétaire et financière ont été instaurés préalablement, sinon on va provoquer une nouvelle fragmentation de la zone euro », ajoute-t-il. Le ministre relève que l’Allemagne, qui est demandeuse d’un tel mécanisme, « a 8,5 points de PIB d’excédent vis-à-vis du reste du monde et ne réalloue pas cette épargne dans la zone euro. »

(Avec Reuters)

« Le système mondial actuel est insoutenable », selon le pape François

« Le système mondial actuel est insoutenable », selon le pape François 

Le pape François a accordé un long entretien à Paris Match, qui lui consacre une dizaine de pages jeudi. Le souverain pontife y fait une critique en règle du système capitaliste actuel. Pour lui, « le capitalisme et le profit ne sont pas diaboliques si on ne les transforme pas en idoles. Ils ne le sont pas s’ils restent des instruments ». En revanche, insiste-t-il, « si l’argent et le profit à tout prix deviennent des fétiches qu’on adore, si l’avidité est à la base de notre système social et économique, alors nos sociétés courent à la ruine ». Pour lui, « les hommes et la création tout entière ne doivent pas être au service de l’argent : les conséquences de ce qui est en train d’arriver sont sous les yeux de tous! ».  »L’humanité doit renoncer à idolâtrer l’argent et doit replacer au centre la personne humaine, sa dignité, le bien commun, le futur des générations qui peupleront la Terre après nous », insiste-t-il auprès de la journaliste Caroline Pigozzi. Evoquant les conflits actuels, notamment en Syrie et en Irak, il appelle à agir « face à l’urgence » sans oublier de s’attaquer aux « causes ». « Demandons-nous pourquoi tant de guerres et tant de violences (…) N’oublions pas non plus l’hypocrisie de ces puissants de la terre qui parlent de paix mais qui, en sous-main, vendent des armes », fustige-t-il, appelant à « construire des modèles de développement économique qui placent au centre l’être humain et non l’argent ». Très engagé depuis le début de son pontificat dans la lutte en faveur de l’environnement, François espère que la conférence des Nations unies sur le climat prévue à Paris en décembre,   »pourra contribuer à des choix concrets, partagés et visant, pour le bien commun, le long terme ».  « Le chrétien est enclin au réalisme, non au catastrophisme. Néanmoins, justement pour cela, nous ne pouvons nous cacher une évidence : le système mondial actuel est insoutenable », estime le pape. « Notre maison commune est polluée, elle ne cesse de se détériorer. On a besoin de l’engagement de tous. Nous devons protéger l’homme de sa propre destruction », avertit François.




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