Inégalités : la responsabilité plutôt à la gauche ?
Dans une interview dans le journal 20 minutes, Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités (association privée) reproche d’abord aux médias de parler des inégalités sans véritable compétence, il propose la refondation de l’école e, propose la fusion de l’impôt sur le revenu et souligne de la responsabilité de la gauche dans l’accroissement des inégalités. . Bref pas vraiment des problématiques nouvelles et des solutions d’experts plutôt douteuses comme la proposition de noter les élèves sur 5 au lieu de 20 ou encore la fusion IR-CSG. Bref quelques idées intéressantes d’autres qui font trop l’impasse sur la dimension économique française en particulier sur la fiscalité qui tue la croissance, l’emploi en favorisant évidemment les plus grandes inégalités. « Que faire contre les inégalités ? » C’est la question que pose l’Observatoire des inégalités dans un ouvrage publié ce lundi (1). Et à laquelle il répond très concrètement, à travers les contributions de 30 experts. L’occasion de constater que des solutions, pas forcément coûteuses ni même très compliquées, existent. 20 Minutes fait le point avec Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités.
Pourquoi publier ce rapport maintenant ?
Pour deux raisons. D’abord parce que nous sommes à un an de la présidentielle. C’est donc le bon moment pour relancer le débat sur les inégalités et pour mettre certaines propositions sur la table. Ensuite parce que nous sommes excédés par la place que peuvent prendre certains commentateurs dans l’espace médiatique : ils parlent de tout sans rien dire, car ils ne bénéficient pas de connaissances sérieuses. Nous avons décidé de prendre la direction inverse en demandant des réponses concrètes aux chercheuses et chercheurs qui travaillent au quotidien sur ces questions depuis des années.
Justement, qui sont ces 30 experts à qui vous avez fait appel ?
Nous avons d’abord répertorié les principaux domaines dans lesquels s’exercent les inégalités puis nous avons cherché à sélectionner pour chacun d’entre eux un expert. Le choix n’a pas été facile car ces questions peuvent être traitées par plusieurs chercheurs. En tout cas, nous n’avons pas cherché à respecter une ligne éditoriale, proche de tel ou tel courant, mais à sélectionner les experts qui produisent les travaux les plus intéressants, les plus pertinents, les plus spécifiques dans chaque domaine.
Comment se portent les inégalités aujourd’hui ?
Cela dépend. Dans le champ des revenus, elles se sont accrues. Le partage est de moins en moins équitable depuis le milieu des années 1990 et les plus pauvres se sont même appauvris depuis le milieu des années 2000, ce qui est un phénomène nouveau. A l’inverse, le niveau a progressé dans le domaine de l’éducation y compris pour les plus modestes. L’école française est très loin d’être un modèle idéal mais dire qu’elle accroît les inégalités est absolument faux ! Idem en matière d’égalité hommes-femmes. Il reste encore beaucoup de travail, mais des avancées très importantes ont été réalisées ces 40 dernières années.
Quel est selon vous le domaine où il est le plus urgent d’agir ?
Le soutien aux jeunes démunis. Dès lors qu’une personne est considérée comme majeure d’un point de vue politique, il n’y a aucune raison qu’elle ne le soit pas également d’un point de vue économique. Les moins de 25 ans sont pourtant toujours exclus du RSA… Et ce n’est pas un problème d’argent : verser un minimum social de 500 euros aux 200.000 jeunes reconnus comme extrêmement précaires coûterait à la France 1,2 milliard d’euros. Nous sommes très loin des 46 milliards dont est doté le Pacte de responsabilité !
Quel est selon vous le domaine où il est le plus important d’agir ?
La refondation de l’école. Je ne parle pas de mettre en place de nouveaux dispositifs de soutien ou d’ajuster les effectifs dans les quartiers dits prioritaires. Car ces mesures ne servent à rien sauf à masquer le problème de fond qui réside dans la manière dont la France fait l’école. Ce qu’il faut réformer, c’est la relation maître-élèves, beaucoup trop hiérarchique, la façon d’enseigner, bien trop académique, ou encore le système de notation, qui favorise la compétition et l’échec. La France note encore sur 20 quand les autres pays notent sur 5, et elle note les enfants dès l’âge de 6 ans, quand d’autres Etats comme la Finlande n’introduisent le système de notation qu’à partir de 14 ans. Le système français est extrêmement violent pour tous ceux qui n’ont pas les meilleures notes et les études internationales prouvent que les jeunes Français sont ceux qui montrent la plus faible autonomie et la plus forte anxiété. Ne nous leurrons pas : l’objectif de ces notes est de distinguer les meilleurs élèves pour leur permettre d’intégrer les classes prépas, mais ce n’est pas de cette manière que l’on améliore le niveau de qualification d’une génération dans son ensemble. C’est donc tout une logique qui est à revoir, mais nous en sommes très loin car ceux qui tiennent le système – les professeurs mais également les catégories les plus diplômées en général – n’ont aucun intérêt à le voir changer.
Pouvez-vous nous présenter la proposition la plus innovante du rapport ?
Fusionner la CSG et l’impôt sur le revenu. C’est une évolution que nous attendons depuis longtemps et c’était une promesse du candidat François Hollande… Ce serait une belle innovation qu’elle soit enfin mise en œuvre.
Qu’allez-vous faire de ce rapport ?
Le diffuser le plus largement possible. Nous allons également le transmettre aux candidats à la présidentielle.
Justement, croyez-vous encore à la politique, aux politiques pour changer la France ?
Oui, je reste optimiste. Et puis, nous ne pouvons pas dire qu’en matière de lutte contre les inégalités, les bilans des derniers mandats, que ce soit celui de Nicolas Sarkozy ou de François Hollande, soient nuls. Des actions ont été mises en œuvre mais il est vrai qu’elles ne sont pas à la hauteur des enjeux. Si tous les courants politiques affirment vouloir lutter contre les inégalités, ils ne veulent pas les combattre de la même manière. En schématisant, la droite pense qu’il faut avant tout favoriser la liberté et que de celle-ci découlera l’égalité. La gauche pense quant à elle qu’il faut directement favoriser l’égalité entre les citoyens. Or, force est de constater que l’hypocrisie se situe plutôt à gauche. Car c’est chez elle que l’écart entre les paroles et les actes est le plus considérable. Cette hypocrisie n’est toutefois pas seulement le fait des politiques. Les classes aisées de gauche, qui se disent facilement altermondialistes, n’acceptent-elles pas, par exemple, notre système scolaire ultralibéral, qui favorise la compétition entre nos enfants ?