Retraite: des dérapages financiers complètement incontrôlés
Il est probable que certains députés de la république en marche commencent à sentir le vent du boulet de la probable défaite en 2022. En dépit du récent appel à l’unité lancée par le président de la république, deux députés LREM, piliers de la commission des Finances de l’Assemblée ont lancé une sorte de mise en demeure au Premier ministre sur la faisabilité de la réforme en raison notamment des nombreux dérapages financiers peu ou mal évalués.
Emilie Cariou et Laurent Saint-Martin ont officiellement demandé des clarifications sur les impacts budgétaires des différentes compensations ». Exemple: l’augmentation des salaires des enseignants-chercheurs ou les baisses de CSG des avocats et autres professions indépendantes. Il faudrait aussi sans doute et surtout parler du salaire des enseignants.
Quel est le surcoût annuel du budget pour l’Etat? Quel est le calendrier de montée en charges? Quels sont les enseignants ciblés? Qu’adviendra-t-il des autres enseignants? Et pour les avocats et indépendants, quels sont les montants annuels de perte de cotisations et contributions sociales? Comment sera financée la réduction de ces recettes?
Une quinzaine de questions, car « rien n’est clair », a pointé Emilie Cariou au Monde. « Rien qu’avec les questions de cette lettre, on est sûrement déjà sur un paquet de milliards », estime la députée. Ce qui semblerait confirmer une absence totale de maîtrise du dérapage financier des différents mesures d’exception ou de transition. Un dérapage qui viendrait s’ajouter aux déficits déjà prévus par le comité d’orientation des retraites. Des déficits cependant relativement fluctuant selon l’environnement politique !
D’après les derniers calculs du COR (PDF), il manquerait entre 7,9 et 17,2 milliards d’euros dans les caisses du système de retraites en 2025, soit entre 0,3 et 0,7% du PIB. En juin, dans son rapport annuel (PDF), le COR tablait sur un déficit d’environ 10 milliards d’euros en 2022, soit 0,4% du PIB. Si l’on remonte à son précédent rapport annuel (document PDF), en 2018, le COR ne prévoyait qu’un déficit de 5 milliards d’euros, soit 0,2% du PIB.
En 2016, le COR envisageait même un retour à l’équilibre (document PDF) « dès le milieu des années 2020″. Fort de cette estimation, le candidat à la présidentielle Emmanuel Macron affirmait en mars 2017 dans un entretien au Point que »le problème de nos retraites, dans les prochaines années, n’est plus financier ». Un an plus tard, les évaluations du COR repoussent cette perspective à 2036, dans le plus optimiste des scénarios. Une nouvelle année s’écoule et cet horizon s’éloigne encore un peu : à 2042, dans le meilleur des cas. De toute manière, avec les exceptions et les transitions tous les calculs seront à refaire et en plus à relativiser compte tenu des incertitudes notamment concernant la croissance.