Identité nationale : un « en même temps douteux » de Macron
Un inquiétant patchwork où le chef de l’Etat multiplie les références à des personnages historiques ennemis de la République : c’est ainsi que le président de SOS Racisme, Dominique Sopo, commente, dans une tribune, l’interview d’Emmanuel Macron à « L’Express ».
Tribune Dans une interview fleuve publiée le 22 décembre par l’hebdomadaire L’Express, Emmanuel Macron a remis en selle l’idée naguère portée par MM. Sarkozy et Fillon d’organiser des débats sur l’« identité nationale ». Certes, l’expression semble, dans son propos, critiquée. Toutefois, elle ne l’est pas sur le fond mais uniquement en ce qu’elle était porteuse de trop de « polémiques ». En outre, la filiation sur ce point avec Nicolas Sarkozy est revendiquée par l’actuel chef de l’Etat.
Alors, dans un étonnant patchwork, on verra émerger la question de la place des personnes issues de l’immigration et la nécessité réaffirmée de se projeter dans la construction européenne. Mais, plus fondamentalement, que de clins d’œil douteux faisant écho à des propos déjà tenus ou à des actes déjà posés sous ce quinquennat !
L’on apprend ainsi qu’il faut pouvoir dire que Pétain fut un grand soldat en 1917. On se demande bien qui le nie. Et cela est d’autant moins nié que le crime de Pétain – la Collaboration et son lot de morts, de trahisons, de déportations et d’exactions – fut précisément facilité par le prestige qu’il avait acquis durant la Grande Guerre.
Pétain n’a plus à être honoré
Sans le Pétain de 1917, il n’y a pas de Pétain de 1940. Alors, si le Pétain de 1917 fut un grand soldat (même si sa stature d’alors relève aussi d’une construction politique et historiographique), du fait qu’il a usé de cette grandeur pour mieux trahir son pays et la République, cette grandeur n’a plus à être honorée. Il y a bien longtemps qu’elle a été souillée par les balles, allemandes ou françaises, qui abattirent Jean Zay, Georges Mandel, Victor Basch, Missak Manouchian et tant d’autres. Bien longtemps que les flammes des fours de Birkenau ont rendu indécente sa célébration.
L’on apprend également dans cette interview qu’il ne faut pas faire comme si Charles Maurras n’avait pas existé. Là encore, qui fait comme si ce détestable concepteur de la notion d’« antisémitisme d’Etat » n’avait pas existé ? Que signifie cette expression? Faut-il y voir un lien avec l’inscription de Charles Maurras au calendrier officiel des commémorations de l’année 2018 pour les 150 ans de sa naissance ?
On lit également l’emploi de la notion d’« Etat légal ». Etrange expression qui, en écho au « pays légal » honni par Maurras qui célébrait le « pays réel », montre que, décidément, Maurras n’est pas oublié. Pour notre part, comment pourrions-nous oublier celui qui considérait que la disparition de la République en 1940 était une « divine surprise » ? Ou qui, durant des années, dénonça les « quatre Etats confédérés » dont il fallait détruire l’influence néfaste sur la France : les juifs, les métèques, les protestants et les francs-maçons ?