Un gouvernement technocratique sans idéal
«Ce gouvernement technocratique n’a aucun idéal. Il dirige le pays comme un manager une entreprise, en faisant reposer la pérennité de celle-ci sur la rentabilité» Par Alain Houpert, Sénateur LR. ( dans l’Opinion)
Il y a quelques jours, le président de la République appelait les Français au sacrifice au nom de la liberté. Ce 24 août, le chef de l’Etat est allé plus loin, annonçant la fin d’une insouciance, d’une époque, de l’abondance. En résumé, la fin de l’espoir pour les générations futures. Par ces propos martiaux, le chef de l’Etat cherche surtout à préparer les esprits à l’échec cuisant de sa politique libérale, antisociale et menée avec violence à l’égard des Français.
Derrière cette injonction à oublier le monde d’avant pour un monde d’après, fait de sacrifices et de désespoir, Emmanuel Macron révèle l’anéantissement de la pensée politique au profit d’une pensée froide analytique qui, si elle est apte à compter, est inapte à proposer un idéal et des solutions. Derrière cette posture, qu’il souhaiterait être celle d’un homme d’Etat, n’hésitant pas à utiliser le pays au service de sa gloire et de sa postérité, demeure un comportement dangereux pour la nation et l’esprit même des Français. La nation, disait Renan, ce sont des êtres différents conduits vers un même idéal. Dans la France macroniste, l’idéal n’a plus de pilote.
Déjà en mars 2020, le chef de l’Etat, face à une épidémie qu’il avait appelé une guerre, avait exhorté les Français à la peur. Aujourd’hui, il les enjoint de nouveau à craindre l’avenir. Jamais, durant ces deux années, Emmanuel Macron n’a appelé au courage des Français, comme le firent ceux dont il semble rêver le destin : Winston Churchill, le général de Gaulle… Pourquoi ?
Parce qu’à la différence des grands hommes qui conduisirent la France plongée dans de grands tourments, ce gouvernement technocratique n’a aucun idéal. Il dirige le pays comme un manager une entreprise, en faisant reposer la pérennité de celle-ci sur la rentabilité. Sans jamais se soucier du long terme, sans jamais se poser la question de la condition humaine.
Il y a quelques jours, Olivier Dussopt, ministre du Travail, enterrait la sociale démocratie, appelant au progressisme, soit la sujétion de l’homme aux ambitions économiques du pays. Aujourd’hui, le chef de l’Etat appelle à enterrer la France, à oublier le modèle démocratique au profit du pragmatisme, l’idéal humaniste au profit de la gestion comptable du pays.
« Devant l’échec de sa politique sur un plan diplomatique, économique, social, Emmanuel Macron accusait hier l’Europe. Aujourd’hui, il accuse le climat mondial »
Ces propos sont-ils audibles de la part d’un président de la République garant des institutions et, de fait, d’un modèle républicain construit depuis des décennies par la volonté des Français.
Ces propos sont-ils dignes de la part d’un homme qui se voudrait d’Etat ou d’un homme qui se rêve politique ? Quel est le but de tous ces discours belliqueux à l’égard des pays étrangers, des affronts aux dirigeants d’Afrique ? Quel avenir offrir à la France dans un monde où notre modèle démocratique subit depuis cinq ans les attaques incessantes de ceux censés le défendre ? Les Français ne veulent pas s’isoler sur la scène internationale. Les Français ne veulent pas de cette guerre à laquelle le président de la République semble rêver le matin en se rasant, allant jusqu’à supprimer, en plein chaos international, le corps diplomatique, une fierté nationale, qui est la seule clef viable d’une négociation entre dirigeants.
Les Français ne veulent pas d’un pays administré le plus souvent contre leurs intérêts, mais rêvent d’une nation guidée.
Devant l’échec de sa politique sur un plan diplomatique, économique, social, Emmanuel Macron accusait hier l’Europe. Aujourd’hui, il accuse le climat mondial. Au final, derrière toutes ces excuses ne demeure qu’une seule réalité : après avoir entaché la souveraineté de la France, le président de la République enterre un modèle qui fut la lumière de l’Europe durant des siècles, reléguant les discours francophiles à des postures nationalistes.
Aujourd’hui, Emmanuel Macron tente de nous faire croire qu’aimer la France, c’est être déconnecté des enjeux du monde parce que dans ce monde globalisé, lui et son gouvernement ont été incapables de défendre le modèle français. Aimer la France, ce n’est pas haïr l’autre. Aimer la France, c’est la rêver prestigieuse dans la grande marche du monde et certainement pas demander à son peuple de la sacrifier au profit d’un nouvel ordre mondial qui serait inévitable.
Alain Houpert est sénateur LR de la Côte-d’Or, membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.