Archive pour le Tag 'humains ?'

E.U: Nouveaux cas humains de grippe aviaire

E.U: Nouveaux cas humains de grippe aviaire 

 

Quatorze cas humains de grippe aviaire ont déjà été identifiés aux États-Unis depuis mars, la plupart étant liés à des épidémies en cours dans des élevages de volailles et de bovins laitiers. Il s’agit des deux premiers cas humains en Californie. Des cas précédents ont été identifiés chez des travailleurs au Texas, au Colorado et au Michigan. Le Missouri a également identifié un cas chez un patient qui n’avait pas eu de contact avec des animaux. le et de prévention des maladies (CDC) des États-Unis . Quatorze États des États-Unis ont connu ces dernières semaines une épidémie de grippe aviaire, ce qui inquiète les autorités.

 

La grippe aviaire est due à des souches virales d’influenza de type A qui n’infectent normalement que les oiseaux sauvages et la volaille domestique. Des infections dues à certaines de ces souches ont été observées chez l’homme. La transmission interhumaine est limitée, la plupart des cas sont d’origine animale, typiquement la volaille.

Les humains peuvent être infectés par le virus de la grippe aviaire par inhalation ou par contact direct avec des sécrétions (salive, muqueuses ou fèces) des oiseaux infectés. Il est probable que les virus de la grippe aviaire de toute spécificité antigénique puissent causer une grippe chez l’homme chaque fois que le virus acquiert des mutations qui lui permettent de se fixer aux sites récepteurs spécifiques à l’homme dans ses voies respiratoires. Comme tous les virus influenza sont capables de mutations génétiques rapides, il est possible que des souches aviaires acquièrent une capacité de contamination interhumaine par mutation directe ou par réassociation avec des souches humaines lors de la réplication chez un hôte humain, un animal ou un hôte aviaire. Si ces souches acquièrent la capacité de se propager efficacement d’humain à humain, une pandémie de grippe aviaire pourrait survenir.

Grippe aviaire : risque de transmission aux humains ?

 

Depuis plusieurs semaines, des cas d’infection ont été détectés dans des élevages de vaches laitières, faisant craindre l’émergence d’un virus susceptible de s’adapter à divers mammifères, et notamment les humains . Franceinfo a interrogé Benjamin Roche, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et coordinateur de l’initiative Prezode, un réseau international de prévention de l’émergence des zoonoses (des maladies transmissibles des animaux aux humains).

 Pourquoi l’épidémie en cours aux Etats-Unis se distingue-t-elle de celles que nous connaissions jusqu’ici ?

Benjamin Roche : Ce que nous observions jusqu’alors, en France et dans les nombreux pays concernés par des épidémies de grippe aviaire, c’est une circulation importante du virus, qui avait tendance à se globaliser, faisant quelques cas humains, de façon très sporadique, essentiellement chez des personnes qui travaillent dans des exploitations agricoles. Cette situation reste rare, car nous savons que les virus qui circulent chez les oiseaux ont du mal à directement s’adapter à l’homme, leur système immunitaire étant très différent du nôtre.

Ce qui est inquiétant dans l’épidémie en cours aux Etats-Unis, c’est que le virus commence à circuler dans des élevages bovins. Si le virus s’est suffisamment adapté pour circuler chez certains mammifères, le chemin à parcourir pour arriver à l’homme est plus court que si ce virus n’était adapté qu’aux oiseaux. Le risque principal, c’est qu’il s’adapte à l’homme jusqu’à un jour être capable de circuler d’humain à humain.

Le virus a été détecté dans 24 fermes américaines, dans des Etats très éloignés les uns des autres. Se peut-il que le virus circule chez d’autres espèces ?

Le fait que les cas soient assez diffus géographiquement peut laisser penser qu’un grand nombre d’événements restent non détectés et qu’il existe des circuits de transmission que l’on ne voit pas. Si on peut raisonnablement penser que l’épidémie est assez diffuse, n’oublions pas que les Etats-Unis disposent d’excellents moyens de suivi et de détection. Malheureusement, seul le temps nous dira si l’épidémie est vraiment importante.

Enfin, un virus peut s’avérer hautement pathogène pour une espèce, mais pas pour une autre. Celui-là, nous le savons, est hautement pathogène pour certaines espèces d’oiseaux. Il peut potentiellement être hautement pathogène pour les bovins, mais peut ne pas l’être pour l’homme. Ce sont des choses que nous connaissons encore assez mal. Les situations divergent en fonction de la souche, du sous-type, etc. Mais en ce qui concerne les virus de la grippe, ce sont surtout les porcs qui nous inquiètent. Ils ont des récepteurs immunitaires et antigéniques qui permettent d’assez bien répliquer les virus qui circulent chez l’oiseau, ainsi que ceux qui circulent chez l’homme. Le porc est le mammifère idéal pour opérer ce « mix » qui donnerait un virus susceptible de se transmettre entre humain.

Voir le virus chez des bovins avant de l’avoir vu chez le porc, c’est d’ailleurs une situation originale. Là encore, difficile de savoir si c’est parce que nous disposons aujourd’hui de meilleurs moyens de détections qu’autrefois, ou s’il s’agit d’un fait nouveau.

Comment le virus est-il passé des oiseaux aux vaches laitières ? Se peut-il que la transmission se soit faite par la nourriture donnée aux vaches et qui, aux Etats-Unis, peut contenir de la volaille, comme l’ont suggéré quelques chercheurs américains cités par The Telegraph ?

A ce stade, ce sont des spéculations. A ma connaissance, il n’y a pas de certitude sur la façon dont le virus a sauté entre les espèces dans ce cas précis. Et le savoir prendra sûrement du temps.

Y a-t-il des conditions d’élevage qui favorisent la propagation des virus ?

Chez les oiseaux, nous savons que l’élevage intensif est un facteur important pour le niveau de transmission. Chez les bovins, comme le cas est plutôt rare, nous n’avons pas le même niveau de connaissance du risque de transmission de la grippe aviaire. A ma connaissance, il n’y a pas de protocole spécifique chez les bovins pour la grippe aviaire, si ce n’est le respect des pratiques de bon sens bien sûr, comme le nettoyage et la décontamination de surfaces ou encore des tests réguliers.

Vous avez mentionné l’importance d’éviter que le virus ne s’adapte à l’homme, mais comment les autorités sanitaires y travaillent-elles ?

Comme nous l’avons vu lors de la pandémie de Covid-19, c’est bien d’être préparés et de répondre en cas d’épidémie, mais le mieux reste de la prévenir, en évitant que les virus n’arrivent jusqu’à l’homme. C’est ce que l’on appelle de la « prévention primaire ». Dès janvier 2021, Emmanuel Macron a annoncé le lancement de l’initiative « Prezode », qui a justement pour objectif de développer de telles stratégies de prévention à des niveaux locaux et de les connecter entre eux, à l’échelle globale. Aujourd’hui, elle rassemble 25 gouvernements et 250 institutions membres qui développent ensemble, avec l’OMS notamment, des stratégies de prévention. Il s’agit par exemple d’avoir des outils que peuvent mettre en place les politiques publiques, sur la biosécurité des élevages, par exemple.

Par ailleurs, nous savons que le niveau de circulation des virus augmente quand on observe une perte de biodiversité. Donc il faut se pencher sur les moyens de protéger la biodiversité pour limiter le risque d’émergence chez l’homme, mais aussi développer des réseaux de surveillance et former les acteurs locaux partout dans le monde.

 

Robotisation et humains: quelle complémentarité ?

Robotisation et humains: quelle complémentarité ?

par
Ganesh Gowrishankar
Chercheur au Laboratoire d’Informatique, de Robotique et de Microelectronique de Montpellier, Université de Montpellier dans The Conversation

Développer des interactions entre humains et robots n’est pas seulement un défi robotique mais aussi un défi pour comprendre les humains et la société humaine : comment les humains perçoivent les robots, communiquent avec eux, se comportent autour d’eux et les acceptent (ou non). Cela devient d’autant plus important avec l’arrivée de la quatrième génération de robots, qui s’intègrent directement au corps humain.
Nous travaillons à mieux comprendre ce qu’on appelle « l’incarnation » de ces dispositifs : en effet, à mesure que ces robots en viennent à « ne faire qu’un » avec nous, ils modifient nos comportements et notre cerveau.

La première génération d’interactions humain-robot, pour l’industrie
Ce « voyage dans le temps » des robots, passés du statut de machines dangereuses à celui de partie intégrante de la société humaine, dure depuis plus de quarante ans.

Les robots sont très variés, de par leurs tailles (micrométriques voire nanométriques d’un côté, mais de taille humaine ou plus de l’autre), leurs manières de bouger et leurs fonctionnalités (industrielles, spatiales, de défense par exemple). Ici, je ne me concentre pas sur les robots eux-mêmes, mais sur les interactions entre humains et robots qui, selon moi, se sont développées sur quatre générations.

Schéma des quatre générations d’interactions
Ma vision personnelle de l’évolution de nos interactions avec les robots depuis les années 50. Ganesh Gowrishankar, Fourni par l’auteur
Les interactions entre humains et robots à grande échelle ont commencé avec l’arrivée des robots industriels, dont le premier a été introduit par General Motors en 1961. Ceux-ci se sont lentement répandus et au début des années 1980, les robots industriels étaient présents aux États-Unis, en Europe et au Japon.

Ces robots industriels ont permis d’observer la première génération d’interactions humain-robot : ils opèrent généralement dans des zones délimitées, pour s’assurer que les humains ne s’approchent pas d’eux, même par erreur.

Les robots industriels, qui ont d’abord été popularisés par les tâches d’assemblage automobile, sont maintenant utilisés pour diverses tâches, telles que le soudage, la peinture, l’assemblage, le démontage, le pick and place pour les cartes de circuits imprimés, l’emballage et l’étiquetage.

chaine d’assemblage de voitures
Robots dans une usine d’assemblage de voitures. A noter que des garde-corps sur le côté délimitent clairement l’espace de travail du robot de celui des humains. Spencer Cooper/Flickr, CC BY-ND
Travailler côte à côte
La recherche en robotique de cette période s’est concentrée sur le rapprochement des robots avec les humains, ce qui a donné lieu à une deuxième génération d’interactions humain-robot, matérialisée pour le grand public au début des années 2000, lorsque des machines, comme le Roomba et l’Aibo, ont commencé à entrer dans nos maisons.

Ces robots de deuxième génération travaillent à proximité des humains dans nos maisons et nos bureaux pour des « applications de service », telles que le nettoyage des sols, la tonte des pelouses et le nettoyage des piscines – un marché d’environ 13 milliards de dollars US en 2019. En 2009, il y avait environ 1,3 million de robots de service dans le monde ; un nombre qui avait augmenté en 2020 à environ 32 millions.

Les premiers robots à entrer dans nos maisons ne sont pas humanoïdes. Roman Pyshchyk/Shutterstock
Toutefois, bien que ces robots opèrent dans un environnement plus humain que les robots industriels, ils interagissent toujours de manière assez minimale et basique. La plupart de leurs tâches quotidiennes sont des tâches indépendantes, qui nécessitent peu d’interaction. En fait, ils essaient même souvent d’éviter les interactions avec les humains – ce qui n’est pas toujours aisé.

Interagir avec les humains
La relation entre humains et robots évolue désormais progressivement vers la troisième génération d’interactions. Les robots de la troisième génération ont la capacité d’interagir cognitivement ou socialement comme les robots dits « sociaux », mais aussi physiquement comme les exosquelettes.

un robot de rééducation
Lokomat est un robot qui peut s’attacher physiquement aux humains et peut fournir une assistance physique pendant la rééducation. Fondazione Santa Lucia, CC BY-NC-SA
Des robots capables d’assistance physique, qui pourraient être utilisés pour la rééducation et les soins aux personnes âgées, l’assistance sociale et la sécurité, ont par ailleurs été clairement identifiés comme prioritaires par les gouvernements en Europe, aux Etats-Unis ainsi qu’au Japon dès le milieu des années 2010.

Une façon notamment de répondre au problème du vieillissement des populations dans ces pays développés.

Contester la définition du corps humain
Nous voyons désormais lentement l’émergence d’une quatrième génération d’interactions humain-robot, dans laquelle les robots ne sont pas seulement physiquement proches des humains, mais bien connectés au corps humain lui-même. Les robots deviennent des extensions du corps humain.

C’est le cas des dispositifs d’augmentation fonctionnelle -tels que des membres robotiques surnuméraires- ou encore des dispositifs de remplacement fonctionnels tels que les avatars de robots (qui permettent à l’homme d’utiliser un corps de robot pour lui faire réaliser des tâches précises). D’autres dispositifs peuvent également fournir une perception sensorielle supplémentaire aux humains.

Les interactions de quatrième génération sont fondamentalement différentes des autres générations en raison d’un facteur crucial : avant cette génération, l’humain et le robot sont clairement définis dans toutes leurs interactions par les limites physiques de leurs corps respectifs, mais cette frontière devient floue dans les interactions de quatrième génération, où les robots modifient et étendent le corps humain en termes de capacités motrices et sensorielles.

En particulier, les interactions de la quatrième génération devraient interférer avec ces « représentations corporelles ». On sait qu’il existe des représentations spécifiques de notre corps dans notre cerveau qui définissent la façon dont notre cerveau reconnaît notre corps. Ces représentations déterminent notre cognition et nos comportements.

Par exemple, imaginez que vous faites vos courses dans une allée d’épicerie bondée. Pendant que vous atteignez des articles avec votre main droite, vous êtes capable, très implicitement et sans même vous en rendre compte d’éviter la collision de votre bras gauche avec les autres acheteurs.

Ceci est possible car votre cerveau a une représentation de la taille, de la forme de vos membres et est conscient et surveille chacun de vos membres. Si vous tenez un panier dans votre bras (ce qui change la taille et la forme du « bras »), vous aurez plus de difficultés à éviter instinctivement les collisions, et devrez faire un effort conscient pour que le panier ne heurte rien dans votre entourage proche.

De la même manière, notre cerveau peut-il s’adapter à un membre surnuméraire, ou autre addition robotique de quatrième génération, et mettre à jour ses représentations corporelles ? C’est ce que l’on appelle l’« incarnation » en neurosciences.

Si l’incarnation de ces dispositifs peut se produire, à quelle vitesse cela se produit-il ? Quelles sont les limites de cette incarnation ? Comment cela affecte-t-il notre comportement et le cerveau lui-même ?

Les interactions humain-robot de quatrième génération ne remettent pas seulement en question l’acceptation de la machine par le cerveau de l’utilisateur, mais aussi l’acceptation de l’utilisateur dans la société : on ne sait toujours pas si notre société acceptera, par exemple des individus avec des bras robotiques supplémentaires. Cela dépendra certainement d’aspects culturels que nous essayons également d’analyser.

En réalité, les robots de troisième et quatrième génération sont si proches des humains que nous devons mieux comprendre les comportements humains et notre cerveau pour les développer.

Dans nos travaux, nous combinons donc la recherche en robotique avec les neurosciences cognitives, motrices et sociales, pour développer ce que nous croyons être la science des interactions humain-machine.

C’est seulement grâce à une compréhension holistique des individus humains, des machines qui interagissent avec eux et de la société dans laquelle ils vivent, que nous pourrons développer les futures générations de robots. Et, dans un sens, la société du futur.

Robots et humains: quelle complémentarité ?

Robots et humains: quelle complémentarité ?

par
Ganesh Gowrishankar
Chercheur au Laboratoire d’Informatique, de Robotique et de Microelectronique de Montpellier, Université de Montpellier dans The Conversation

Développer des interactions entre humains et robots n’est pas seulement un défi robotique mais aussi un défi pour comprendre les humains et la société humaine : comment les humains perçoivent les robots, communiquent avec eux, se comportent autour d’eux et les acceptent (ou non). Cela devient d’autant plus important avec l’arrivée de la quatrième génération de robots, qui s’intègrent directement au corps humain.
Nous travaillons à mieux comprendre ce qu’on appelle « l’incarnation » de ces dispositifs : en effet, à mesure que ces robots en viennent à « ne faire qu’un » avec nous, ils modifient nos comportements et notre cerveau.

La première génération d’interactions humain-robot, pour l’industrie
Ce « voyage dans le temps » des robots, passés du statut de machines dangereuses à celui de partie intégrante de la société humaine, dure depuis plus de quarante ans.

Les robots sont très variés, de par leurs tailles (micrométriques voire nanométriques d’un côté, mais de taille humaine ou plus de l’autre), leurs manières de bouger et leurs fonctionnalités (industrielles, spatiales, de défense par exemple). Ici, je ne me concentre pas sur les robots eux-mêmes, mais sur les interactions entre humains et robots qui, selon moi, se sont développées sur quatre générations.

Schéma des quatre générations d’interactions
Ma vision personnelle de l’évolution de nos interactions avec les robots depuis les années 50. Ganesh Gowrishankar, Fourni par l’auteur
Les interactions entre humains et robots à grande échelle ont commencé avec l’arrivée des robots industriels, dont le premier a été introduit par General Motors en 1961. Ceux-ci se sont lentement répandus et au début des années 1980, les robots industriels étaient présents aux États-Unis, en Europe et au Japon.

Ces robots industriels ont permis d’observer la première génération d’interactions humain-robot : ils opèrent généralement dans des zones délimitées, pour s’assurer que les humains ne s’approchent pas d’eux, même par erreur.

Les robots industriels, qui ont d’abord été popularisés par les tâches d’assemblage automobile, sont maintenant utilisés pour diverses tâches, telles que le soudage, la peinture, l’assemblage, le démontage, le pick and place pour les cartes de circuits imprimés, l’emballage et l’étiquetage.

chaine d’assemblage de voitures
Robots dans une usine d’assemblage de voitures. A noter que des garde-corps sur le côté délimitent clairement l’espace de travail du robot de celui des humains. Spencer Cooper/Flickr, CC BY-ND
Travailler côte à côte
La recherche en robotique de cette période s’est concentrée sur le rapprochement des robots avec les humains, ce qui a donné lieu à une deuxième génération d’interactions humain-robot, matérialisée pour le grand public au début des années 2000, lorsque des machines, comme le Roomba et l’Aibo, ont commencé à entrer dans nos maisons.

Ces robots de deuxième génération travaillent à proximité des humains dans nos maisons et nos bureaux pour des « applications de service », telles que le nettoyage des sols, la tonte des pelouses et le nettoyage des piscines – un marché d’environ 13 milliards de dollars US en 2019. En 2009, il y avait environ 1,3 million de robots de service dans le monde ; un nombre qui avait augmenté en 2020 à environ 32 millions.

Les premiers robots à entrer dans nos maisons ne sont pas humanoïdes. Roman Pyshchyk/Shutterstock
Toutefois, bien que ces robots opèrent dans un environnement plus humain que les robots industriels, ils interagissent toujours de manière assez minimale et basique. La plupart de leurs tâches quotidiennes sont des tâches indépendantes, qui nécessitent peu d’interaction. En fait, ils essaient même souvent d’éviter les interactions avec les humains – ce qui n’est pas toujours aisé.

Interagir avec les humains
La relation entre humains et robots évolue désormais progressivement vers la troisième génération d’interactions. Les robots de la troisième génération ont la capacité d’interagir cognitivement ou socialement comme les robots dits « sociaux », mais aussi physiquement comme les exosquelettes.

un robot de rééducation
Lokomat est un robot qui peut s’attacher physiquement aux humains et peut fournir une assistance physique pendant la rééducation. Fondazione Santa Lucia, CC BY-NC-SA
Des robots capables d’assistance physique, qui pourraient être utilisés pour la rééducation et les soins aux personnes âgées, l’assistance sociale et la sécurité, ont par ailleurs été clairement identifiés comme prioritaires par les gouvernements en Europe, aux Etats-Unis ainsi qu’au Japon dès le milieu des années 2010.

Une façon notamment de répondre au problème du vieillissement des populations dans ces pays développés.

Contester la définition du corps humain
Nous voyons désormais lentement l’émergence d’une quatrième génération d’interactions humain-robot, dans laquelle les robots ne sont pas seulement physiquement proches des humains, mais bien connectés au corps humain lui-même. Les robots deviennent des extensions du corps humain.

C’est le cas des dispositifs d’augmentation fonctionnelle -tels que des membres robotiques surnuméraires- ou encore des dispositifs de remplacement fonctionnels tels que les avatars de robots (qui permettent à l’homme d’utiliser un corps de robot pour lui faire réaliser des tâches précises). D’autres dispositifs peuvent également fournir une perception sensorielle supplémentaire aux humains.

Les interactions de quatrième génération sont fondamentalement différentes des autres générations en raison d’un facteur crucial : avant cette génération, l’humain et le robot sont clairement définis dans toutes leurs interactions par les limites physiques de leurs corps respectifs, mais cette frontière devient floue dans les interactions de quatrième génération, où les robots modifient et étendent le corps humain en termes de capacités motrices et sensorielles.

En particulier, les interactions de la quatrième génération devraient interférer avec ces « représentations corporelles ». On sait qu’il existe des représentations spécifiques de notre corps dans notre cerveau qui définissent la façon dont notre cerveau reconnaît notre corps. Ces représentations déterminent notre cognition et nos comportements.

Par exemple, imaginez que vous faites vos courses dans une allée d’épicerie bondée. Pendant que vous atteignez des articles avec votre main droite, vous êtes capable, très implicitement et sans même vous en rendre compte d’éviter la collision de votre bras gauche avec les autres acheteurs.

Ceci est possible car votre cerveau a une représentation de la taille, de la forme de vos membres et est conscient et surveille chacun de vos membres. Si vous tenez un panier dans votre bras (ce qui change la taille et la forme du « bras »), vous aurez plus de difficultés à éviter instinctivement les collisions, et devrez faire un effort conscient pour que le panier ne heurte rien dans votre entourage proche.

De la même manière, notre cerveau peut-il s’adapter à un membre surnuméraire, ou autre addition robotique de quatrième génération, et mettre à jour ses représentations corporelles ? C’est ce que l’on appelle l’« incarnation » en neurosciences.

Si l’incarnation de ces dispositifs peut se produire, à quelle vitesse cela se produit-il ? Quelles sont les limites de cette incarnation ? Comment cela affecte-t-il notre comportement et le cerveau lui-même ?

Les interactions humain-robot de quatrième génération ne remettent pas seulement en question l’acceptation de la machine par le cerveau de l’utilisateur, mais aussi l’acceptation de l’utilisateur dans la société : on ne sait toujours pas si notre société acceptera, par exemple des individus avec des bras robotiques supplémentaires. Cela dépendra certainement d’aspects culturels que nous essayons également d’analyser.

En réalité, les robots de troisième et quatrième génération sont si proches des humains que nous devons mieux comprendre les comportements humains et notre cerveau pour les développer.

Dans nos travaux, nous combinons donc la recherche en robotique avec les neurosciences cognitives, motrices et sociales, pour développer ce que nous croyons être la science des interactions humain-machine.

C’est seulement grâce à une compréhension holistique des individus humains, des machines qui interagissent avec eux et de la société dans laquelle ils vivent, que nous pourrons développer les futures générations de robots. Et, dans un sens, la société du futur.

Sciences et société : Des implants cérébraux sur les humains

Des implants cérébraux sur les humains

L’Agence américaine des médicaments, la FDA, a donné son autorisation à Neuralink pour mettre en place un essai clinique sur l’homme, a annoncé l’entreprise d’Elon Musk sur Twitter.

« C’est une première étape importante qui permettra un jour à notre technologie d’aider de nombreuses personnes », se félicite l’entreprise.
Implant cérébral

Le patron de SpaceX et Tesla l’a discrètement lancée en 2016, espérant fabriquer des implants cérébraux. En pratique, Neuralink doit concevoir des interfaces cerveau–ordinateur qui permettraient de contrôler des équipements à distance simplement par la pensée.

Les applications sont nombreuses. Il s’agirait, par exemple, de redonner de la mobilité aux personnes paralysées en leur permettant d’interagir avec leur environnement ou de manipuler facilement des bras mécaniques. Les implants pourraient aussi être une solution aux troubles neurologiques, promet Neuralink.

Les implants cérébraux peuvent être définis comme des dispositifs artificiels d’interface avec le cerveau. Ils permettent notamment de proposer des solutions de suppléance artificielle dans le cas de fonctions perdues, comme la parole.

Ces avancées technologiques se révèlent particulièrement intéressantes, par exemple, pour offrir des nouveaux modes de communication à des individus atteints de paralysie sévère.

Mais si l’aide que promet cette technologie semble précieuse, elle suscite néanmoins un questionnement éthique qu’il est essentiel de saisir, alors même que la technologie se développe.

témoin cet article de : Éric Fourneret Philosophe, Braintech Lab (Inserm, U205), équipe « Neurotechnologies et Dynamique des Réseaux », Université Grenoble Alpes (UGA)

Blaise Yvert
Directeur de recherche à l’Inserm, responsable de l’équipe Neurotechnologies et Dynamique des Réseaux, Inserm

Clément Hébert
Chargé de recherche implants Neuronaux, neuroprothèses, Inserm U1216 Grenoble Institut des Neurosciences, Université Grenoble Alpes (UGA)


Deux approches

Comprendre le fonctionnement du cerveau et améliorer nos capacités d’intervention pour remédier à certains de ses dysfonctionnements font partie des défis majeurs relevés par les neurosciences de ces dix dernières années. Et deux approches différentes et de grande envergure se sont concrétisées.

Dans la première, avant tout théorique, il s’agit de modéliser de manière réaliste le fonctionnement du cerveau grâce à des réseaux de neurones artificiels (informatiques ou électroniques) : c’est l’objectif du projet européen Human Brain Project. Dans la seconde, pragmatique, on cherche à développer des implants cérébraux pour enregistrer et stimuler le plus grand nombre de neurones possibles : c’est le but du vaste projet américain Brain Initiative, ou encore du projet européen Braincom.

D’ici très peu de temps, arrivera donc logiquement le moment où l’on disposera d’une part de vastes réseaux artificiels neuromimétiques, et d’autre part d’interfaces à très haute résolution permettant un couplage bidirectionnel (enregistrement et stimulation) avec des millions de neurones du cerveau. Or la fusion de ces deux mondes technologiques, prévisible, conduirait à l’émergence de vastes réseaux hybrides couplant l’activité du cerveau avec celle de réseaux artificiels. Et ce n’est pas de la pure science-fiction : des preuves de concept ont déjà été fournies par des réseaux hybrides simples, à l’instar de la technique de « dynamic clamp ».

Née à la fin des années 1990, la technique de dynamic clamp permet de coupler un neurone artificiel à un neurone réel par le biais d’une électrode intracellulaire : l’activité de l’un modifie celle de l’autre de manière bidirectionnelle. Et à l’avenir, l’avènement d’implants intégrant un grand nombre de microélectrodes extracellulaires – et assurant chacune une liaison bidirectionnelle stable avec un neurone individuel – devrait permettre la construction de réseaux hybrides à grande échelle, y compris in vivo au niveau de vastes régions cérébrales.

Certes, ce n’est pas encore d’actualité. Mais force est de constater que la route n’est sans doute plus si longue. En effet, des réseaux neuromorphiques sont déjà capables d’apprendre automatiquement à reproduire l’activité d’ensembles de neurones réels enregistrés par un implant cérébral. Cela signifie que l’on dispose déjà de la technologie permettant à plusieurs neurones réels de contrôler des réseaux artificiels complexes. Et inversement, on sait aussi s’appuyer sur des réseaux artificiels pour stimuler, de manière plus ou moins précise, des neurones réels.

Le développement d’implants cérébraux permet ainsi d’entrevoir l’avènement d’un couplage hybride entre le cerveau et de vastes réseaux artificiels. L’optimisation de ces technologies autorisera la simulation des neurones artificiels grâce à des circuits neuromorphiques à très basse consommation énergétique, et rendra possible, à terme, l’implantation de ces technologies d’hybridation.

Audition d’Éric Fourneret lors de la consultation sur l’intelligence artificielle et le transhumanisme organisée par la MGEN et la Commission nationale Française pour l’UNESCO.
Dans ce contexte, et même si l’implantation de dispositifs artificiels dans le corps n’est pas quelque chose de nouveau, les frontières traditionnelles entre ce qui est naturel et artificiel, entre l’homme et la machine, entre le vivant et l’inanimé, deviennent plus ambiguës. Une des principales questions soulevées, si ce n’est la principale à partir de laquelle toutes les autres se posent, est alors la suivante : quelle « forme de vie » la technologie des implants cérébraux peut-elle produire ?

La nature humaine en question

Il n’est toutefois pas question de se laisser embarquer dans une ambition éthique réductrice ne s’attardant que sur les scénarios du pire (collapsologie), ou à l’inverse ne considérant que les scénarios du mieux (discours technoprophétique). On le sait, chaque nouvelle technologie est porteuse de bienfaits pour les êtres humains, tout en nécessitant souvent une transformation sociale (par exemple, pour ajuster le cadre normatif de l’action sociale). Mais elle suscite parfois de vives interrogations quant aux effets indésirables liés à son utilisation, qu’il faudrait gérer moralement, socialement et juridiquement.

De la même manière, le développement d’implants cérébraux nous place sur cette ligne de crête, entre bienfaits et dérives potentielles. En effet, il ne s’agit pas d’intervenir sur un organe quelconque. C’est du cerveau qu’émerge notre sentiment de présence au monde, c’est-à-dire notre conscience. Et d’elle dépend notre capacité à saisir le monde et soi-même au moyen d’un même acte : de penser la frontière entre l’être humain et le monde et, simultanément, de penser l’articulation entre les deux. Or l’hybridation du cerveau avec des dispositifs électroniques possède d’autre part un potentiel d’impact sans précédent dans notre façon de nous représenter l’Homme. Et pour cause…

Il n’existe pas, de façon naturelle, d’êtres humains dont le fonctionnement neurophysiologique du cerveau s’organise sous l’influence de composants électroniques implantés, voire à terme, de réseaux de neurones artificiels. Aussi, cette séparation conceptuelle entre l’inné à l’Homme et les artifices acquis pourrait-elle rendre difficile la catégorisation sociale de l’individu équipé d’un implant cérébral. Ni totalement humain, ni totalement machine, il est un mélange de deux réalités différentes dont le caractère hybride pourrait produire une nouvelle unité humaine dans le corps biologique.

L’implant cérébral, une prothèse parmi d’autres

On pourrait objecter qu’il existe d’ores et déjà des prothèses de hanche et des pacemakers. L’implant cérébral est-il si différent de ces dispositifs artificiels qui, socialement, ne posent pas de difficulté particulière ?

On pourrait répondre par la négative. Si l’implant cérébral est socialement perçu comme le prolongement électronique du cerveau d’un individu, de la même manière qu’une jambe prothétique prolonge le corps, alors il n’est pas différent d’une prothèse traditionnelle – la conscientisation de la frontière entre l’Homme et le monde étant maintenue dans son fonctionnement originel. Dans ce cas, l’implant constitue une sorte de projection organique, dans l’acceptation qu’en a faite Canguilhem : ce dispositif artificiel possède un sens biologique, sa fonction consistant à compenser la défaillance d’un organe naturel.

Cela pourrait néanmoins poser problème. Si cette forme d’hybridation se révélait être une instance de régulation et d’organisation du rapport au monde étrangère à celle, originelle, laissant penser à une forme d’hétéronomie (telle l’expérience du cerveau dans une cuve imaginée par le philosophe Hilary Putnam en 1981), elle pourrait être considérée par la société comme une nouvelle corporéité humaine, où la conscience de quelque chose est médiée par le dispositif artificiel. En effet, si le substrat de la pensée s’anime en synergie avec des réseaux de neurones artificiels, la conscientisation de la frontière entre l’Homme et le monde s’artificialise. Or dans ce cas, l’hybridation est susceptible d’être vécue, à tort ou à raison, comme dénaturante. Et cela pourrait conduire à transformer les systèmes de normes et de règles qui encadrent les conduites au sein d’une collectivité composée d’êtres humains hybrides, et d’autres qui ne le sont pas.

Certes, notre contact avec le monde est de plus en plus médié par des artifices, sans aucune référence faite aux implants cérébraux – comme en témoignent les téléphones portables, ordinateurs et autres écrans à travers lesquels on entre en contact avec le réel. Mais comme nous l’avons déjà souligné, avec ces implants, la recherche s’oriente vers une technologie d’hybridation directe entre le cerveau et des réseaux de neurones artificiels. Et dans ces conditions, il importe de se pencher sérieusement sur la façon dont cette technologie peut affecter notre représentation de la « nature humaine ».

L’une des plus importantes caractéristiques de l’Homme est d’avoir inventé et créé des techniques et des technologies pour satisfaire ses besoins et compenser ses vulnérabilités, selon ses facultés et son intelligence, selon sa volonté et ses désirs. Il suffit qu’une chose soit, d’une certaine manière, pour être déterminée dans son développement et dans sa destination. Aussi, que l’être humain soit une espèce technicienne – particularité qu’il partage à des degrés différents, on le sait aujourd’hui, avec d’autres animaux – détermine-t-il sa destination sous la forme d’un effacement de la frontière entre nature et artifice.

Considérant que le monde lui offre des possibilités pour répondre à ses besoins et innover pour s’opposer aux misères de la vie, l’humanité est un entrelacement, de plus en plus serré, de la nature et de la technique. Bien qu’étant autre que la technique, elle habite le monde par et dans la technique. Et son évolution révèle une frontière entre le naturel et l’artifice beaucoup moins catégorique qu’on ne le croit : au cours du temps, elle est devenue de plus en plus poreuse. On ne peut donc pas définir la nature humaine en faisant abstraction des technologies par lesquelles l’humanité habite le monde. Voilà pourquoi, penser les implications éthiques du développement des implants cérébraux consiste à penser ces liens étroits entre l’Homme et la technique.

Cette réflexion, bien entendu, ne s’inscrit pas dans une démarche dogmatique qui prendrait la forme d’une collapsologie ou, à l’inverse, d’une prophétie technologique. Il est en effet du rôle de la philosophie et de l’éthique d’interroger par la seule raison les implications des nouvelles neuro-technologies, en s’en tenant aux faits et non à des scénarios de science-fiction sans fondements dans le réel. Ces faits sont fournis par les neuroscientifiques et par leurs résultats. Voilà pourquoi la séparation, encore trop marquée, entre la réflexion philosophique et les recherches technoscientifiques en cours, est embarrassante et inadéquate dans l’examen des implications éthiques des implants cérébraux.

Pour les étudier, il faudrait bien au contraire une interaction forte et étroite entre, d’une part, les acteurs des sciences humaines et sociales, et d’autre part, les neuro et techno-scientifiques, ingénieurs, informaticiens, biologistes et médecins. C’est ensemble qu’ils devraient poursuivre ce vieux débat à la croisée de tous les savoirs : « Qu’est-ce qu’être humain ? ». Ensemble qu’ils devraient examiner ce qui engage notre condition en tant qu’être humain, et réfléchir aux critères d’évaluation du processus technologique que représentent les implants cérébraux. On peut alors dire que c’est vers l’altérité Homme-Technologie, et non vers une dualité indépassable, qu’il faut se tourner pour mieux connaître et comprendre quels sont les enjeux du développement des implants cérébraux concernant nos représentations de la nature humaine.

Cet article s’inscrit dans la continuité de la consultation publique sur l’intelligence artificielle et le transhumanisme organisée en 2020 par la MGEN et la Commission nationale Française pour l’Unesco. Une partie des auditions menées dans le cadre de cette consultation sont visionnables en ligne.

Des implants cérébraux sur les humains

Des implants cérébraux sur les humains

L’Agence américaine des médicaments, la FDA, a donné son autorisation à Neuralink pour mettre en place un essai clinique sur l’homme, a annoncé l’entreprise d’Elon Musk sur Twitter.

« C’est une première étape importante qui permettra un jour à notre technologie d’aider de nombreuses personnes », se félicite l’entreprise.
Implant cérébral

Le patron de SpaceX et Tesla l’a discrètement lancée en 2016, espérant fabriquer des implants cérébraux. En pratique, Neuralink doit concevoir des interfaces cerveau–ordinateur qui permettraient de contrôler des équipements à distance simplement par la pensée.

Les applications sont nombreuses. Il s’agirait, par exemple, de redonner de la mobilité aux personnes paralysées en leur permettant d’interagir avec leur environnement ou de manipuler facilement des bras mécaniques. Les implants pourraient aussi être une solution aux troubles neurologiques, promet Neuralink.

Les implants cérébraux peuvent être définis comme des dispositifs artificiels d’interface avec le cerveau. Ils permettent notamment de proposer des solutions de suppléance artificielle dans le cas de fonctions perdues, comme la parole.

Ces avancées technologiques se révèlent particulièrement intéressantes, par exemple, pour offrir des nouveaux modes de communication à des individus atteints de paralysie sévère.

Mais si l’aide que promet cette technologie semble précieuse, elle suscite néanmoins un questionnement éthique qu’il est essentiel de saisir, alors même que la technologie se développe.

témoin cet article de : Éric Fourneret Philosophe, Braintech Lab (Inserm, U205), équipe « Neurotechnologies et Dynamique des Réseaux », Université Grenoble Alpes (UGA)

Blaise Yvert
Directeur de recherche à l’Inserm, responsable de l’équipe Neurotechnologies et Dynamique des Réseaux, Inserm

Clément Hébert
Chargé de recherche implants Neuronaux, neuroprothèses, Inserm U1216 Grenoble Institut des Neurosciences, Université Grenoble Alpes (UGA)


Deux approches

Comprendre le fonctionnement du cerveau et améliorer nos capacités d’intervention pour remédier à certains de ses dysfonctionnements font partie des défis majeurs relevés par les neurosciences de ces dix dernières années. Et deux approches différentes et de grande envergure se sont concrétisées.

Dans la première, avant tout théorique, il s’agit de modéliser de manière réaliste le fonctionnement du cerveau grâce à des réseaux de neurones artificiels (informatiques ou électroniques) : c’est l’objectif du projet européen Human Brain Project. Dans la seconde, pragmatique, on cherche à développer des implants cérébraux pour enregistrer et stimuler le plus grand nombre de neurones possibles : c’est le but du vaste projet américain Brain Initiative, ou encore du projet européen Braincom.

D’ici très peu de temps, arrivera donc logiquement le moment où l’on disposera d’une part de vastes réseaux artificiels neuromimétiques, et d’autre part d’interfaces à très haute résolution permettant un couplage bidirectionnel (enregistrement et stimulation) avec des millions de neurones du cerveau. Or la fusion de ces deux mondes technologiques, prévisible, conduirait à l’émergence de vastes réseaux hybrides couplant l’activité du cerveau avec celle de réseaux artificiels. Et ce n’est pas de la pure science-fiction : des preuves de concept ont déjà été fournies par des réseaux hybrides simples, à l’instar de la technique de « dynamic clamp ».

Née à la fin des années 1990, la technique de dynamic clamp permet de coupler un neurone artificiel à un neurone réel par le biais d’une électrode intracellulaire : l’activité de l’un modifie celle de l’autre de manière bidirectionnelle. Et à l’avenir, l’avènement d’implants intégrant un grand nombre de microélectrodes extracellulaires – et assurant chacune une liaison bidirectionnelle stable avec un neurone individuel – devrait permettre la construction de réseaux hybrides à grande échelle, y compris in vivo au niveau de vastes régions cérébrales.

Certes, ce n’est pas encore d’actualité. Mais force est de constater que la route n’est sans doute plus si longue. En effet, des réseaux neuromorphiques sont déjà capables d’apprendre automatiquement à reproduire l’activité d’ensembles de neurones réels enregistrés par un implant cérébral. Cela signifie que l’on dispose déjà de la technologie permettant à plusieurs neurones réels de contrôler des réseaux artificiels complexes. Et inversement, on sait aussi s’appuyer sur des réseaux artificiels pour stimuler, de manière plus ou moins précise, des neurones réels.

Le développement d’implants cérébraux permet ainsi d’entrevoir l’avènement d’un couplage hybride entre le cerveau et de vastes réseaux artificiels. L’optimisation de ces technologies autorisera la simulation des neurones artificiels grâce à des circuits neuromorphiques à très basse consommation énergétique, et rendra possible, à terme, l’implantation de ces technologies d’hybridation.

Audition d’Éric Fourneret lors de la consultation sur l’intelligence artificielle et le transhumanisme organisée par la MGEN et la Commission nationale Française pour l’UNESCO.
Dans ce contexte, et même si l’implantation de dispositifs artificiels dans le corps n’est pas quelque chose de nouveau, les frontières traditionnelles entre ce qui est naturel et artificiel, entre l’homme et la machine, entre le vivant et l’inanimé, deviennent plus ambiguës. Une des principales questions soulevées, si ce n’est la principale à partir de laquelle toutes les autres se posent, est alors la suivante : quelle « forme de vie » la technologie des implants cérébraux peut-elle produire ?

La nature humaine en question

Il n’est toutefois pas question de se laisser embarquer dans une ambition éthique réductrice ne s’attardant que sur les scénarios du pire (collapsologie), ou à l’inverse ne considérant que les scénarios du mieux (discours technoprophétique). On le sait, chaque nouvelle technologie est porteuse de bienfaits pour les êtres humains, tout en nécessitant souvent une transformation sociale (par exemple, pour ajuster le cadre normatif de l’action sociale). Mais elle suscite parfois de vives interrogations quant aux effets indésirables liés à son utilisation, qu’il faudrait gérer moralement, socialement et juridiquement.

De la même manière, le développement d’implants cérébraux nous place sur cette ligne de crête, entre bienfaits et dérives potentielles. En effet, il ne s’agit pas d’intervenir sur un organe quelconque. C’est du cerveau qu’émerge notre sentiment de présence au monde, c’est-à-dire notre conscience. Et d’elle dépend notre capacité à saisir le monde et soi-même au moyen d’un même acte : de penser la frontière entre l’être humain et le monde et, simultanément, de penser l’articulation entre les deux. Or l’hybridation du cerveau avec des dispositifs électroniques possède d’autre part un potentiel d’impact sans précédent dans notre façon de nous représenter l’Homme. Et pour cause…

Il n’existe pas, de façon naturelle, d’êtres humains dont le fonctionnement neurophysiologique du cerveau s’organise sous l’influence de composants électroniques implantés, voire à terme, de réseaux de neurones artificiels. Aussi, cette séparation conceptuelle entre l’inné à l’Homme et les artifices acquis pourrait-elle rendre difficile la catégorisation sociale de l’individu équipé d’un implant cérébral. Ni totalement humain, ni totalement machine, il est un mélange de deux réalités différentes dont le caractère hybride pourrait produire une nouvelle unité humaine dans le corps biologique.

L’implant cérébral, une prothèse parmi d’autres

On pourrait objecter qu’il existe d’ores et déjà des prothèses de hanche et des pacemakers. L’implant cérébral est-il si différent de ces dispositifs artificiels qui, socialement, ne posent pas de difficulté particulière ?

On pourrait répondre par la négative. Si l’implant cérébral est socialement perçu comme le prolongement électronique du cerveau d’un individu, de la même manière qu’une jambe prothétique prolonge le corps, alors il n’est pas différent d’une prothèse traditionnelle – la conscientisation de la frontière entre l’Homme et le monde étant maintenue dans son fonctionnement originel. Dans ce cas, l’implant constitue une sorte de projection organique, dans l’acceptation qu’en a faite Canguilhem : ce dispositif artificiel possède un sens biologique, sa fonction consistant à compenser la défaillance d’un organe naturel.

Cela pourrait néanmoins poser problème. Si cette forme d’hybridation se révélait être une instance de régulation et d’organisation du rapport au monde étrangère à celle, originelle, laissant penser à une forme d’hétéronomie (telle l’expérience du cerveau dans une cuve imaginée par le philosophe Hilary Putnam en 1981), elle pourrait être considérée par la société comme une nouvelle corporéité humaine, où la conscience de quelque chose est médiée par le dispositif artificiel. En effet, si le substrat de la pensée s’anime en synergie avec des réseaux de neurones artificiels, la conscientisation de la frontière entre l’Homme et le monde s’artificialise. Or dans ce cas, l’hybridation est susceptible d’être vécue, à tort ou à raison, comme dénaturante. Et cela pourrait conduire à transformer les systèmes de normes et de règles qui encadrent les conduites au sein d’une collectivité composée d’êtres humains hybrides, et d’autres qui ne le sont pas.

Certes, notre contact avec le monde est de plus en plus médié par des artifices, sans aucune référence faite aux implants cérébraux – comme en témoignent les téléphones portables, ordinateurs et autres écrans à travers lesquels on entre en contact avec le réel. Mais comme nous l’avons déjà souligné, avec ces implants, la recherche s’oriente vers une technologie d’hybridation directe entre le cerveau et des réseaux de neurones artificiels. Et dans ces conditions, il importe de se pencher sérieusement sur la façon dont cette technologie peut affecter notre représentation de la « nature humaine ».

L’une des plus importantes caractéristiques de l’Homme est d’avoir inventé et créé des techniques et des technologies pour satisfaire ses besoins et compenser ses vulnérabilités, selon ses facultés et son intelligence, selon sa volonté et ses désirs. Il suffit qu’une chose soit, d’une certaine manière, pour être déterminée dans son développement et dans sa destination. Aussi, que l’être humain soit une espèce technicienne – particularité qu’il partage à des degrés différents, on le sait aujourd’hui, avec d’autres animaux – détermine-t-il sa destination sous la forme d’un effacement de la frontière entre nature et artifice.

Considérant que le monde lui offre des possibilités pour répondre à ses besoins et innover pour s’opposer aux misères de la vie, l’humanité est un entrelacement, de plus en plus serré, de la nature et de la technique. Bien qu’étant autre que la technique, elle habite le monde par et dans la technique. Et son évolution révèle une frontière entre le naturel et l’artifice beaucoup moins catégorique qu’on ne le croit : au cours du temps, elle est devenue de plus en plus poreuse. On ne peut donc pas définir la nature humaine en faisant abstraction des technologies par lesquelles l’humanité habite le monde. Voilà pourquoi, penser les implications éthiques du développement des implants cérébraux consiste à penser ces liens étroits entre l’Homme et la technique.

Cette réflexion, bien entendu, ne s’inscrit pas dans une démarche dogmatique qui prendrait la forme d’une collapsologie ou, à l’inverse, d’une prophétie technologique. Il est en effet du rôle de la philosophie et de l’éthique d’interroger par la seule raison les implications des nouvelles neuro-technologies, en s’en tenant aux faits et non à des scénarios de science-fiction sans fondements dans le réel. Ces faits sont fournis par les neuroscientifiques et par leurs résultats. Voilà pourquoi la séparation, encore trop marquée, entre la réflexion philosophique et les recherches technoscientifiques en cours, est embarrassante et inadéquate dans l’examen des implications éthiques des implants cérébraux.

Pour les étudier, il faudrait bien au contraire une interaction forte et étroite entre, d’une part, les acteurs des sciences humaines et sociales, et d’autre part, les neuro et techno-scientifiques, ingénieurs, informaticiens, biologistes et médecins. C’est ensemble qu’ils devraient poursuivre ce vieux débat à la croisée de tous les savoirs : « Qu’est-ce qu’être humain ? ». Ensemble qu’ils devraient examiner ce qui engage notre condition en tant qu’être humain, et réfléchir aux critères d’évaluation du processus technologique que représentent les implants cérébraux. On peut alors dire que c’est vers l’altérité Homme-Technologie, et non vers une dualité indépassable, qu’il faut se tourner pour mieux connaître et comprendre quels sont les enjeux du développement des implants cérébraux concernant nos représentations de la nature humaine.

Cet article s’inscrit dans la continuité de la consultation publique sur l’intelligence artificielle et le transhumanisme organisée en 2020 par la MGEN et la Commission nationale Française pour l’Unesco. Une partie des auditions menées dans le cadre de cette consultation sont visionnables en ligne.

Intelligence artificielle : menace pour les droits humains

Intelligence artificielle : menace pour les droits humains (ONU)

Les récentes avancées en matière d’intelligence artificielle (IA) représentent une grave menace pour les droits humains, a alerté le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme samedi, réclament la mise en place de « garde-fous efficaces ». « Je suis profondément troublé par le potentiel de nuisance des récentes avancées en matière d’intelligence artificielle », a déclaré Volker Türk, dans un bref communiqué. « La dignité humaine et tous les droits humains sont gravement menacés », a-t-il ajouté. Volker Türk a lancé « un appel urgent aux entreprises et aux gouvernements pour qu’ils développent rapidement des garde-fous efficaces ».

Le site futura–sciences énumère ces menaces:

Intelligence artificielle : les menaces graves
• Fausses vidéos : usurper l’identité d’une personne en lui faisant dire ou faire des choses qu’elle n’a jamais dite ou faites, dans le but de demander un accès à des données sécurisées, de manipuler l’opinion onde nuire à réputation de quelqu’un…Ces vidéos truquées sont quasi indétectables.
• Piratage de voitures autonomes : s’emparer des commandes d’un véhicule autonome pour s’en servir comme arme (par exemple perpétrer une attaque terroriste, provoquer un accident, etc).
• Hameçonnage sur mesure : générer des massages personnalisés et automatisés afin d’augmenter l’efficacité du phishing visant à collecter des informations sécurisées ou installer des logiciels malveillants.
• Piratage des systèmes contrôlés par l’IA : perturber les infrastructures en causant par exemple une panne d’électricité généralisée, un engorgement du trafic ou la rupture de la logistique alimentaire.
• Chantage à grande échelle : recueillir des données personnelles afin d’envoyer des messages de menace automatisés. L’IA pourrait également être utilisée pour générer de fausses preuves (par exemple de la «sextrosion»).
• Fausses informations rédigées par IA : écrire des articles de propagande semblant être émises par une source fiable. L’IA pourrait également être utilisée pour générer de nombreuses versions d’un contenu particulier afin d’accroître sa visibilité et sa crédibilité.
E
Intelligence artificielle : les menaces de moyenne gravité
• Robots militaires : prendre le contrôle de robots ou armes à des fins criminelles. Une menace potentiellement très dangereuses mais difficile à mettre en œuvre, le matériel militaire étant généralement très protégé.
• Escroquerie : vendre des services frauduleux en utilisant l’IA. Il existe de nombreux exemples historiques notoires d’escrocs qui ont réussi à vendre de coûteuses fausses technologiques à de grandes organisations, y compris des gouvernements nationaux et l’armée.
• Corruption de données : modifier ou introduire délibérément de fausses données pour induire des biais spécifiques. Par exemple, rendre un détecteur insensible aux armes ou encourager un algorithme à investir dans tel ou tel marché.
• Cyberattaque basée sur l’apprentissage : perpétrer des attaques à la fois spécifiques et massives, par exemple en utilisant l’IA pour sonder les faiblesses des systèmes avant de lancer plusieurs attaques simultanées.
• Drones d’attaque autonomes : détourner des drones autonomes ou s’en servir pour s’attaquer à une cible. Ces drones pourraient être particulièrement menaçants s’ils agissent en masse dans des essaims auto-organisés.
• Refus d’accès : endommager ou priver des utilisateurs d’un accès à un service financier, à l’emploi, à un service public ou une activité sociale. Non rentable en soi, cette technique peut être utilisée comme chantage.
• Reconnaissance faciale : détourner les systèmes de reconnaissance faciale, par exemple en fabriquant de fausses photos d’identité (accès à un smartphone, caméras de surveillance, contrôle de passagers…)
• Manipulation de marchés financiers : corrompre des algorithmes de trading afin de nuire à des concurrents, de faire baisser ou monter une valeur artificiellement, de provoquer un crash financier…
Intelligence artificielle : les menaces de faible intensité
• Exploitation de préjugés : tirer profit des biais existants des algorithmes, par exemple les recommandations de YouTube pour canaliser les spectateurs ou les classements de Google pour améliorer le profil des produits ou dénigrer les concurrents.
• Robots cambrioleurs : utiliser des petits robots autonomes se glissant dans les boîte aux lettres ou les fenêtres pour récupérer des clés ou ouvrir des portes. Les dommages sont faibles potentiellement, car très localisés à petite échelle.
• Blocage de détection par IA : déjouer le tri et la collecte de données par IA afin d’effacer des preuves ou de dissimuler des informations criminelles (pornographie par exemple)
• Fausses critiques rédigées par IA : générer des faux avis sur des sites tels que Amazon ou Tripadvisor pour nuire ou favoriser un produit.
• Traque assistée par IA : utiliser les systèmes d’apprentissage pour pister l’emplacement et l’activité d’un individu.
• Contrefaçon : fabriquer de faux contenus, comme des tableaux ou de la musique, pouvant être vendus sous une fausse paternité. Le potentiel de nuisance demeure assez faible dans la mesure où les tableaux ou musiques connues sont peu nombreux.

Cette semaine, plusieurs dizaines de pays, dont les États-Unis et la Chine, ont exhorté à réguler le développement et l’utilisation de intelligence artificielle dans le domaine militaire, évoquant les risques de « conséquences non souhaitées ». Le texte, signé par plus de 60 pays, évoque également des préoccupations relatives à « la question de l’implication humaine » ainsi que « le manque de clarté en ce qui concerne la responsabilité » et les « conséquences involontaires potentielles ».

Différents pays démocratiques veulent encadrer le secteur. Actuellement, l’Union européenne est au centre de ces efforts de régulation, son projet de loi « AI Act », censée encourager l’innovation et éviter les dérives, pourrait être finalisé fin 2023 ou début 2024, pour une application encore quelques années plus tard.

Cameroun et droits humains

Cameroun et droits humains 

Des chercheurs de Human Rights Watch et Amnesty International posent  dans le Monde  la question des droits humains à l’occasion de la visite du chef d’État français au Cameroun. Une question légitime  mais qui doit aussi intégrer le fait que la France est de plus en plus marginaliséeen Afrique par de grandes puissances qui ne prêtent guère attention à ces droits voire même y portent atteinte ( Chine, Russie et autres). Il ne faudrait pas accepter  une partition des responsabilités et des rôles entre grandes puissances : la France chargée de rappeler les droits, la Chine détournant les richesses et la Russie développant partout des régimes de dictature NDLR.

 

Tribune.

 

Le président français, Emmanuel Macron, est attendu au Cameroun, les lundi 25 et mardi 26 juillet, dans un contexte de répression aggravée et deux ans et demi après avoir promis à un citoyen camerounais qui l’interpellait à Paris au sujet de la situation des droits humains au Cameroun qu’il mettrait « le maximum de pression [sur le président camerounais Paul Biya] pour que cette situation cesse ».

Depuis, la situation a empiré. C’est pourquoi il est crucial que le président français ne se contente pas de renforcer les relations économiques, politiques et culturelles entre les deux pays et d’exprimer la solidarité de la France dans le conflit qui oppose depuis 2013 les forces de sécurité camerounaises au groupe armé Boko Haram dans la région de l’Extrême-Nord.

En rencontrant le président Paul Biya, arrivé au pouvoir en 1982, le président français devrait clairement exprimer son inquiétude quant aux violations des droits humains commises par les forces de sécurité dans les deux régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest depuis 2016, et à la répression à l’encontre de toute personne dans le pays qui ose critiquer le pouvoir. Aujourd’hui au Cameroun, arrestations, détentions arbitraires et torture sont monnaie courante.

Depuis la violente répression, en 2016 et 2017, des manifestations contre la marginalisation ressentie par la minorité anglophone en matière d’éducation et de justice, le quotidien des habitants du Nord-Ouest et du Sud-Ouest est rythmé par les affrontements entre l’armée et des groupes séparatistes armés de mieux en mieux équipés. Ces derniers diffusent les images de leurs exactions sur les réseaux sociaux : notamment des tueries visant des élèves et des attaques contre des enseignants et des écoles. En réponse, l’armée tue des personnes et incendie des villages entiers accusés de soutenir les séparatistes. Les défenseurs des droits humains qui dénoncent ces exactions sont menacés de mort.

Les conséquences humanitaires de ces violences sont désastreuses. Près de 600 000 personnes sont déplacées dans les deux régions anglophones, plus de 75 000 ont fui au Nigeria voisin.

L’impunité reste l’un des principaux moteurs de la violence et alimente de nouveaux abus. La reconnaissance par l’armée de sa responsabilité dans la mort de neuf personnes dans le village de Missong, le 1er juin, est une étape importante dans la lutte contre l’impunité. Mais l’affirmation de la volonté des autorités de sanctionner les crimes reste encore à démontrer, le gouvernement n’ayant, à maintes reprises, pas tenu ses engagements dans ce sens. Plus de deux ans après le massacre de Ngarbuh, le 14 février 2020, au sujet duquel le gouvernement a également reconnu l’implication de l’armée, le procès de 21 individus accusés d’être impliqués dans le meurtre de 21 personnes traîne depuis dix-neuf mois.

Grandes marques et violations des droits humains

Grandes marques et violations des droits humains

 

Après le drame du Rana Plaza, au Bangladesh, celui des Ouïgours en Chine fera-t-il basculer l’Europe dans la vigilance, se demande l’expert en responsabilité sociale d’entreprise, Pierre-Samuel Guedj, Président de l ’agence de conseil Affectio Mutandi, dans une tribune au « Monde ».

 

Tribune.

 

Huit ans quasiment jour pour jour après le drame du Rana Plaza qui fit 1 135 victimes le 24 avril 2013, c’est encore le secteur textile qui est en première ligne sur les enjeux de droits humains.

Lundi 11 avril les associations Sherpa, Ethique sur l’étiquette, l’Institut ouïgour d’Europe et une victime ouïgoure ont annoncé le dépôt d’une plainte auprès du tribunal judiciaire de Paris, contre plusieurs entreprises du secteur pour recel de travail forcé et crime contre l’humanité. Des bases légales pénales inédites qui, articulées avec la notion de devoir de vigilance, font peser sur les marques visées une quasi-présomption de responsabilité.

Elles doivent se préparer à une charge de la preuve très lourde pour convaincre les juges et l’opinion du sérieux de leurs dispositifs de prévention et d’atténuation des risques de violations de droits humains.

Cette pression juridique et réputationnelle vise aujourd’hui les marques Zara, Bershka, Pull and Bear et Massimo Duti appartenant au groupe Inditex, les marques Sandro, Maje, Claudie Pierlot et De Fursac, détenues par SMCP, ainsi qu’Uniqlo. Les organisations non gouvernementales (ONG) annoncent d’ores et déjà que la plainte sera progressivement élargie à d’autres marques ainsi qu’à des enseignes de distribution.

A l’heure où le pouvoir chinois montre de manière explicite sa volonté d’imposer ses valeurs au monde, l’existence même de cette initiative montre que cela ne dissuade pas les organisations de la société civile d’agir.

 

Elle envoie aussi un message fort aux marques internationales, comme Tommy Hilfiger, Calvin Klein, Abercrombie & Fitch ou The North Face qui ont ces derniers jours retiré leurs engagements sous la pression du gouvernement chinois, Hugo Boss allant jusqu’à annoncer fièrement poursuivre ses achats de coton provenant de la province du Xinjiang.

Une volte-face qui les expose à une nouvelle vague de boycottages dans le sillage de la campagne portée depuis 2020 notamment par le député européen (S & D) Raphaël Glucksmann, présent à la conférence de presse annonçant le dépôt de plainte.

Cette initiative judiciaire illustre aussi un alignement d’intérêts avec les autorités européennes dont les récentes sanctions visant plusieurs dignitaires chinois sont inédites, plus de trente ans après les mesures d’embargo qui avaient suivi la répression du mouvement de la place Tiananmen.

Tommy Hilfiger, Calvin Klein, Abercrombie & Fitch ou The North Face ont retiré leurs engagements sous la pression du gouvernement chinois, Hugo Boss allant jusqu’à annoncer fièrement poursuivre ses achats de coton provenant du Xinjiang

Biden et Arabie Saoudite : rappel des droits humains

Biden et Arabie Saoudite : rappel des droits humains

 

Lors de son entretien téléphonique avec le roi d’Arabie Saoudite, le président américain a rappelé qu’il souhaitait renforcer les liens réciproques entre les deux pays avec cependant une précaution oratoire indiquant que sur certains sujets pourraient subsister des positions différentes. Le président américain a notamment insisté sur le problème des droits humains, question récurrente en Arabie Saoudite comme dans la plupart des monarchies arabes.

Le président américain, qui a rappelé le «partenariat de longue date» et «historique» entre les deux pays alliés, a aussi «souligné l’importance que les États-Unis placent dans les droits humains universels et dans l’État de droit», a déclaré la Maison Blanche dans un communiqué. À cet égard, «il a relevé de manière positive la récente libération de plusieurs militants américano-saoudiens et de Mme Loujain al-Hathloul», une militante féministe.

Les deux dirigeants ont discuté des efforts américains pour mettre fin à la guerre au Yémen, où Joe Biden a stoppé le soutien de Washington à la coalition militaire dirigée par Ryad. «Le président a dit au roi Salmane qu’il œuvrerait pour rendre les relations bilatérales aussi fortes et transparentes que possible», a ajouté la Maison Blanche.

 

L’entretien n’a pas évoqué l’affaire Jamal Khashoggi, qui devrait mettre en cause le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane, dit MBS, malgré les dénégations du royaume. Mais le gouvernement américain avait auparavant fait savoir qu’il serait dévoilé «très bientôt», après le coup de fil entre Joe Biden et le monarque.

Chine : l’Europe fait passer les droits humains après le business

Chine :  l’Europe fait passer  les droits humains après le business  

Une centaine de personnalités de sensibilité écologique dénoncent le fait que l’union européenne fasse passer les intérêts commerciaux avant le respect des droits humains en Chine. De fait,  la dernière preuve est sans doute cet accord sur les investissements réciproques passés entre les deux zones surtout poussée par l’Allemagne.  (Tribune dans le monde)

Tribune.

 

En ce 12 février débute le Nouvel An chinois. Témoignage de la persistance à travers les âges de la culture dominante en Chine, celle des Han (ethnie majoritaire à l’échelle du pays), cette tradition ne saurait pourtant occulter la richesse et la diversité de la société chinoise : l’immense territoire chinois regroupe en effet de nombreuses cultures et populations dont les traditions sont souvent méconnues, voire censurées par le pouvoir en place.

Ainsi, des rapports de plus en plus nombreux et étayés attestent depuis 2016 de la politique d’éradication culturelle menée par le régime de Pékin à l’encontre des Ouïgours, population musulmane turcophone, habitant principalement la province du Xinjiang.

Arrestations arbitraires, internements dans des camps de « rééducation », soumission au travail forcé, campagnes de stérilisation perpétrées à l’encontre des femmes, contraceptions et avortements forcés, destruction des lieux de culte, prélèvements d’organes, interdiction de parler leur langue, interdiction de donner un prénom musulman à leur enfant et même persécutions au-delà des frontières… La liste des violations et des crimes commis à l’encontre de la communauté ouïgoure semble sans fin.

En parallèle, Pékin facilite la migration de Chinois han dans la région du Xinjiang : les Ouïgours sont ainsi en passe d’y devenir minoritaires. Comme pour les Tibétains, à terme, c’est l’existence même de cette population, avec sa culture et ses spécificités, qui est menacée.

Kazakhs, Ouzbeks et Mongols sont exposés au même risque en tant que minorités ethniques : le Parti communiste chinois est sans pitié contre celles et ceux qui pourraient contester son autorité sur le territoire chinois. Hongkong en a aussi fait les frais, la répression contre l’opposition démocratique aux représentants de Pékin étant féroce.

Selon l’ONG Human Rights Watch, entre un et trois millions de Ouïgours sont actuellement enfermés dans des camps où il leur est appris à oublier leur culture, leur religion, à coups de sévices, et où ils sont forcés à produire des biens que nous, Européens, consommons parfois sans même le savoir.

Ces violations des droits humains permettent ainsi à des multinationales – dont certaines européennes – de réduire leurs coûts de production : un rapport de l’Institut australien de politique stratégique a ainsi identifié, en février 2020, plus de quatre-vingts entreprises bénéficiant de ce travail forcé. Pour éluder leurs responsabilités, elles se cachent derrière leurs sous-traitants.

Des particules microplastiques dans des organes humains

Des particules microplastiques dans des organes humains

Des chercheurs de l’Université d’Etat de l’Arizona ont analysé 47 échantillons d’organes humains, prélevés d’une banque de tissus destinée à étudier les maladies neurodégénératives, et leurs conclusions sont sans appel. Des poumons aux reins, en passant par le foie et la rate, des microplastiques et nano plastiques ont été détectés dans chaque échantillon, relève le quotidien « The Guardian », qui parle d’une première. Leurs résultats ont été présentés lundi et n’ont pas encore été soumis au processus d’examen par leurs pairs.

Les microplastiques peuvent héberger des produits chimiques toxiques et nuire à certaines créatures marines. Les moules perdent ainsi de leur adhérence lorsqu’elles y sont exposées. Les humains y sont exposés en consommant de la nourriture, en buvant de l’eau ou encore en respirant.

Dans le détail, les scientifiques ont identifié des dizaines de types de plastiques, dont le polyéthylène téréphtalate (PET) notamment utilisé dans les bouteilles de boissons en plastique et le polyéthylène utilisé dans les sacs en plastique. Ils ont également retrouvé du bisphénol A, une substance chimique qui impacte notamment la reproduction des animaux.

Prochaine étape pour les scientifiques : mieux comprendre ce qui se trouve dans les tissus, pour mener par la suite une étude épidémiologique et évaluer les résultats potentiels sur la santé humaine. Les donneurs de la banque de tissus avaient fourni des informations sur leur mode de vie, leur régime alimentaire et leurs professions. Des données qui pourraient permettre de déterminer les principales façons dont les personnes sont exposées aux microplastiques.

Intelligence artificielle : « Les humains sont loin d’avoir perdu leur place en entreprise »

Intelligence artificielle : « Les humains sont loin d’avoir perdu leur place en entreprise »

Sur cette question très complexe et très controversée, Cyril Le Mat, responsable data & IA dans une société spécialisée en ressources humaines, l’intelligence artificielle sert à humaniser le travail et non à le remplacer, dit-il dans une tribune au « Monde ».Un vision qui mérite attention mais peut être un peu idyllique car personne ne sait vraiment quelles seront les conséquences de l’IA notamment en matière d’emplois.

Tribune. Nous sommes aujourd’hui submergés d’articles, d’entretiens et de Tweet sur l’intelligence artificielle (IA) émanant de personnes déconnectées de la réalité technique, mais qui puisent sans vergogne dans un imaginaire de concurrence et de soumission afin de générer toujours plus d’émotion et de clics.

En tant qu’expert et praticien de l’IA en entreprise, ma volonté est ici d’éclairer sur les enjeux du développement de ces nouveaux outils, qui se révèlent plus humains qu’on ne pourrait le penser. Car la réalité est là : ce qu’on appelle l’intelligence artificielle n’est qu’une succession d’outils spécialisés, chacun consacré à l’optimisation d’une unique tâche répétitive. Exemple classique : l’imagerie médicale, où un algorithme va analyser pour un cancer précis des centaines d’images afin de proposer au médecin un diagnostic. Œuvre de l’humain, l’IA n’est rien de plus que ce que l’on décide d’y mettre.

 

L’IA permet avant tout d’automatiser des actions souvent répétitives, parfois ingrates, jusque-là opérées par des collaborateurs. Il faut en finir avec l’idée reçue qui remettrait aux mains des machines la majorité de l’activité humaine de l’entreprise. L’IA doit être abordée comme une opportunité technologique qui permet de dégager du temps au salarié et de l’aider à prendre des décisions. 

Le collaborateur va donc pouvoir se concentrer sur d’autres missions plus « humaines », où il aura plus de valeur ajoutée. Il pourra d’un côté se focaliser sur sa créativité, son innovation et son analyse ; de l’autre, se consacrer aux relations humaines, qu’elles soient internes ou externes à l’entreprise : par exemple, une infirmière pourra passer plus de temps avec ses patients. En cela, l’IA redonne du sens au travail, quête essentielle pour les jeunes générations.

 

Opaque dans son fonctionnement, l’IA est un outil qui nécessite une interaction par certains aspects similaire à celle entre humains. Sur ce point, les solutions connues du grand public sont encore loin de la maturité. En effet, les GAFA [Google, Apple, Facebook et Amazon] ont pour principal but de garder captifs leurs utilisateurs en ne leur fournissant ni outils de pilotage ni justification. Il faut pourtant s’assurer qu’humains et IA se comprennent tant sur les questions que sur les réponses ! La collaboration avec l’humain est un enjeu phare pour les solutions d’entreprise dont la progression va affecter positivement la réalité du travail. 

Ne soyons pas naïfs, des suppressions d’emplois causés par l’IA auront lieu. Mais la réalité sera loin des nombreuses prédictions de certains groupes de réflexion ou d’essayistes hors sol annonçant, selon les cas, la suppression de 30 % à 90 % des emplois actuels. Les humains sont loin d’avoir perdu leur place en entreprise. Avec le développement des solutions IA au travail, les salariés se tourneront vers des missions plus enrichissantes pour des carrières plus épanouissantes.

Canicule de juillet: la faute aux humains

Canicule de juillet: la faute aux humains

 

Des records de chaleur et des dépassements de température liés directement à l’activité humaine.  «Sans le changement climatique induit par les humains, une canicule aussi exceptionnelle que celle-ci aurait eu des températures environ 1,5 à 3°C moins élevées», affirment des chercheurs du réseau World Weather Attribution. Des records de température ont été battus dans plusieurs pays d’Europe de l’Ouest lors de cette vague de chaleur brève mais intense: 42,6°C à Paris et à Lingen, en Allemagne, 41,8°C à Begijnendijk, dans le nord de la Belgique, et 40,4°C dans le sud des Pays-Bas. Des températures inédites ont également été atteintes au Royaume-Uni, avec 38,7°C au Jardin botanique de l’Université de Cambridge. Les scientifiques de ce réseau ont pris comme référence les trois jours consécutifs les plus chauds lors de cet épisode caniculaire.

 

Pour la France, en combinant différents modèles, les scientifiques estiment que «la probabilité qu’un tel événement se produise a été multiplié par au moins dix», selon leur rapport. Concernant la canicule qui avait frappé l’Hexagone fin juin, ils avaient déjà calculé qu’elle avait été rendue «au moins cinq fois plus probable» que si l’Homme n’avait pas altéré le climat.

Infrasons : danger pour les animaux pas pour les humains ?

 

 

Infrasons : danger pour les animaux pas pour les humains ?

 

 

 

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement a publié  les résultats de son évaluation des effets sanitaires liés aux basses fréquences sonores (20 Hz à 200 Hz) et infrasons (inférieurs à 20 Hz) émis par les parcs éoliens. Dans ses conclusions, l’Agence considère  qu’aucun dépassement des seuils d’audibilité dans les domaines des infrasons et basses fréquences jusqu’à 50 Hz n’a été constaté. Mais elle observe aussi, les effets potentiels sur la santé des infrasons et basses fréquences produits par les éoliennes n’ont fait l’objet que de peu d’études scientifiques. Cependant, des connaissances acquises récemment chez l’animal montrent toutefois l’existence d’effets biologiques induits par l’exposition à des niveaux élevés d’infrasons. Ces effets n’ont pour l’heure pas été décrits chez l’être humain, En clair pour l’humain, on ne sait rien mais il y a des risques pour les animaux en particulier les vaches, les poulets et les chevaux. Rappelons que les infrasons des éoliennes sont inaudibles pur l’oreille humaine. Les infrasons, selon leur nature,  peuvent se propager sur des dizaines, des centaines voire des milliers de kms et il est impossible d’empêcher leur propagation. , seuls quelques animaux pourraient être plus sensibles que les autres. Le porc a sa limite inférieure d’audibilité à 42 à 42,  la chèvre à 78 Hz, le cheval à 55 Hz et la vache à 23 Hz. La vache est donc la plus susceptible d’être sensible aux Infrasons. Les conséquences sont biologiques avec notamment une baisse de production chez la vaches et des déformations osseuses  chez le cheval. Pour l’homme,  il n’y a aucune étude réellement scientifique mais on a constaté en particulier des troubles du sommeil, des modifications de tension artérielle, des troubles d’audition,  de concentration et de mémoire.  Bien entendu il faudrait faire des études épidémiologiques sur longue période pour vérifier l’ampleur de ces conséquences. La plupart des organismes officiels en France comme à l’étranger concluent  que faute d’existence d’études scientifiques rien ne justifie de mettre en cause les effets néfastes des infrasons. Et inversement ?




L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol