Campagne : pour un sauvetage des haies
La prochaine politique agricole commune, débattue à l’Assemblée nationale le 5 mai, est la dernière chance pour sauver ce qui reste du bocage, souligne, dans une tribune au « Monde », un collectif d’entreprises, de fondations et d’associations.
Tribune.
Soixante ans après avoir provoqué la disparition des trois quarts des haies en France, la politique agricole commune (PAC) [débattue à l’Assemblée nationale le 5 mai] a un devoir de réparation. Elle pourrait être aujourd’hui le levier dont le pays a besoin pour sauver ce qui reste de son patrimoine arboré, à condition que le gouvernement décide de faire appliquer des mesures d’envergure en faveur de la restauration et de la réimplantation des haies dans les exploitations agricoles françaises.
Sans les haies, nos campagnes se meurent. Les oiseaux disparaissent, les cours d’eau s’assèchent, les sols sont de moins en moins fertiles. Face au dérèglement climatique, les agriculteurs peinent à protéger cultures et animaux pour continuer de nous nourrir. Une des causes de cette désertification est désormais bien connue : chaque année, plus de 11 500 kilomètres de haies disparaissent encore des paysages, alors même qu’elles constituent l’une des réponses les plus immédiates et pertinentes pour faire face à la crise.
Reconnaissant l’enjeu national qu’elles représentent, la mesure Plantons des haies ! du plan de relance a l’objectif d’en planter 7 000 kilomètres d’ici à 2023. Avec ce signal donné par le gouvernement, et parce que nous sommes convaincus que les agriculteurs ne s’arrêteront pas là, nous pensons qu’il est temps de donner une nouvelle place à l’arbre dans la PAC pour doubler le linéaire de haies en France à l’horizon 2050.
Mais ce précieux héritage qui a survécu aux remembrements, les 750 000 kilomètres de haies anciennes, est lui-même menacé. Mal gérées, elles dépérissent et ne se renouvellent plus. Or, ce sont elles qui ont la capacité de remplir les fonctions écosystémiques dès maintenant, à condition qu’une gestion adaptée assure leur bon état écologique, alors que les nouvelles haies plantées, si elles préparent l’avenir, ne rempliront pleinement leur rôle que dans vingt à trente ans.
La PAC influencera les pratiques des agriculteurs français pour les dix prochaines années. Elle est le levier dont dispose l’Etat pour que l’arbre et la haie deviennent un atout alors qu’ils sont encore vécus comme une contrainte. Il faut inscrire durablement la reconnaissance des arbres dans l’activité agricole pour freiner leur disparition.
Pour la première fois, l’Union européenne (UE) a introduit dans la PAC le concept de « paiements pour services environnementaux », appelé « éco-régime », qui permet de rémunérer les agriculteurs à la hauteur de leurs efforts en faveur de l’environnement. C’est pourquoi le Fonds pour l’arbre soutient l’AFAC-Agroforesteries, qui propose un éco-régime « infrastructures agroécologiques » (dont arbres et haies font partie) .