27 milliards d’euros de pertes pour des banques grecques
La Banque nationale de Grèce (BNG), premier établissement commercial du pays, a perdu 12,3 milliards d’euros en 2011, dont 11,7 milliards proviennent de l’opération de restructuration de la dette souveraine du pays, a annoncé le groupe vendredi. Ces pertes massives ramènent le taux des fonds propres durs (Core Tier 1) de la banque à 6,3%, ce qui permet de donner une idée des besoins en recapitalisation du groupe pour parvenir à 9% d’ici la fin de l’année, comme le prévoit la Banque de Grèce. «Les mois prochains, la BNG va continuer ses efforts pour renforcer son capital (…) tout en restant le pole de base pour la stabilité du système bancaire en vue d’attirer les capitaux nécessaires pour la procédure de la recapitalisation», a indiqué le directeur général Apostolos Tamvakakis dans un communiqué.
Alpha Bank , la deuxième banque grecque a fait état d’une perte de 3,8 milliards d’euros en 2011 en raison de la restructuration de la dette souveraine du pays. Ces pertes ont provoqué une chute à 3% du taux de fonds propres durs de la banque (Core Tier 1),. Malgré le poids pour Alpha de l’opération de restructuration de la dette souveraine grecque qui a permis à la Grèce d’effacer environ 105 milliards d’euros d’obligations détenues par ses créanciers privés, la banque a «maintenu ses indices de capitaux à des niveaux satisfaisants», a estimé le directeur général, Dimitrios Mantzounis dans un communiqué. Il a rappelé qu’Alpha avait soumis à la Banque de Grèce «un plan d’entreprise qui comprend une restructuration, condition préalable pour que l’établissement, créé il y 130 ans, bénéficie de la recapitalisation» prévue par les instances européennes.
Hors effet restructuration de la dette souveraine du pays, achevée récemment, la banque a enregistré une baisse de 73,6% de son bénéfice avant impôt, à 57,2 millions d’euros, et de 75,1% de son bénéfice net à 21,4 millions d’euros contre 86 millions un an auparavant. Les provisions accumulées du groupe, comprenant des filiales dans les pays de l’Europe du sud-est, s’élèvent à 2,9 milliards d’euros, portant sur 5,8% du portefeuille des prêts de la banque. L’actif a également baissé de 11,5% pour s’établir à 59,148 milliards d’euros, par rapport à 2010.
Le groupe est présent en Albanie, Bulgarie, Macédoine, Roumanie, Serbie, Chypre, et Ukraine avec plus de mille succursales. Alpha Bank a dû renoncer en début d’année à son projet de fusionner avec Eurobank, numéro trois du pays, invoquant les «impacts» sur le secteur bancaire de la restructuration de la dette du pays.
Eurobank EFG, troisième établissement bancaire grec, a pour sa part accusé des pertes nettes en 2011 de 5,5 milliards d’euros, dont 4,6 milliards dues à la récente restructuration de la dette souveraine du pays. Ces pertes ramènent les fonds propres durs de la banque à 875 millions d’euros indique Eurobank dans un communiqué, sans indiquer quel est du coup l’évolution de son ratio Core Tier 1, qui permet de donner une image sur la solvabilité de l’établissement. Avant la restructuration, cet indicateur était de 9,8%, pour un niveau requis de 9% d’ici septembre. Les provisions pour créances douteuses s’établissent à 1,3 milliard d’euros, en hausse de 4,7% par rapport à 2010.«La recapitalisation couvrira les pertes du capital et donne la possibilité d’un nouveau départ de stabilité pour les banques grecques», a commenté le directeur général Nikolaos Nanopoulos, cité dans un communiqué.
Pour se renforcer, Eurobank a par ailleurs récemment conclu un accord avec Burgan (Koweït) pour la vente de sa filiale turque Eurobank Tefken. Elle a par ailleurs dû renoncer à un projet de fusion avec Alpha bank, deuxième banque grecque, en janvier après cette dernière eut reculé, invoquant les «impacts» sur le secteur bancaire de la restructuration de la dette du pays.
La Banque du Pirée, enfin, quatrième établissement bancaire grec, a perdu 6,3 milliards d’euros en 2011 dont 5,9 milliards proviennent de l’opération de restructuration de la dette souveraine du pays. Pour aider le groupe menacé de faillite, le Fonds héllénique de stabilité financière alimenté par les pays de la zone euro, a déjà accepté de participer à hauteur de «5 milliards d’euros» pour recapitaliser la banque, afin que le taux de Core Tier 1 «revienne à 9,7% sur une base pro forma», a indiqué le groupe dans un communiqué. Les actifs du groupe ont plongé de 14% en 2011 par rapport à l’année précédente, à 49,3 milliards d’euros. «La mise en oeuvre par le gouvernement grec de l’opération de restructuration de dette, dite PSI, débouche inévitablement sur des effets très largement négatifs pour les banques grecques à la fois pour leurs résultats financiers et leur capital» indique le président de la Banque du Pirée dans un communiqué. «Nous avons l’engagement du Fonds hellénique de stabilité financière (créé récemment pour soutenir les banques) que la recapitalisation de la banque va contribuer au rétablissement du Core Tier 1 à 9,7%», ajoute-t-il.
le Premier ministre grec Lucas Papademos a qualifié de «décisive» pour la relance de l’économie nationale la recapitalisation des banques du pays, qui devront ensuite «prendre leurs responsabilités» pour soutenir les entreprises étranglées par la crise. En mars, l’effacement d’environ 105 milliards d’euros de dette souveraine détenus par des créanciers privés, au premier rang desquels les banques commerciales du pays, ont entraîné pour les établissements concernés des pertes réelles de l’ordre de 70%.
Les banques grecques font donc face à un besoin urgent de liquidités. Pour lancer cette procédure de recapitalisation, la Grèce a reçu jeudi un premier versement de 25 milliards d’euros du Fonds européen de stabilité financière (FESF) prévu dans deuxième plan de soutien accordé mi-mars au pays par l’UE et le FMI, a rappelé M. Papademos. «Ce montant est la première moitié des fonds disponibles» pour l’opération, qui doit être finalisée par le nouveau gouvernement attendu à l’issue des élections législatives du 6 mai, a relevé M. Papademos. Ensuite, a-t-il déclaré, les banques devront «prendre la responsabilité de soutenir l’économie réelle» et «agir rapidement» pour financer les PME grecques qui emploient 85% des salariés du privé, contre une moyenne de 67% dans l’UE. «Si les banques veulent un renforcement en capital, il faut qu’elles soutiennent le financement des entreprises, notamment les PME. Si les PME veulent des crédits bancaires, elles doivent protéger l’emploi», a insisté M. Papademos.
Le Commissaire européen à l’Industrie Antonio Tajani, présent à Athènes aux côtés du Premier ministre, a reconnu «les problèmes» et les «difficultés» auxquelles font face les banques grecques, mais s’est déclaré «convaincu» qu’elles seraient «capables de revenir sur les rails et d’accorder du crédit aux particulier et aux entreprises grecques».