Archive pour le Tag 'géopolitique'

Pavel Durov et Telegram : affaire géopolitique ?

 Pavel Durov et Telegram :  affaire géopolitique ?

 
 

Le 24 août, Pavel Durov était arrêté alors que son jet privé faisait un arrêt au Bourget. Les autorités françaises expliquent cette décision par le refus de coopération du PDG de Telegram, notamment dans le cadre d’enquêtes relatives à des actions criminelles (trafic de drogue, escroquerie ou encore pédocriminalité) dont les auteurs auraient employé sa messagerie pour les perpétrer. En effet, si Telegram est largement utilisé pour communiquer entre individus ou sur des chaînes – lesquelles sont souvent considérées par leurs abonnés comme des sources d’information –, c’est aussi une marketplace d’envergure, y compris pour les milieux criminels.

 

par 

Analyste en géopolitique, membre associé au Laboratoire de Recherche IAE Paris – Sorbonne Business School, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, chaire « normes et risques », IAE Paris – Sorbonne Business School dans The Conversation 

Si Pavel Durov est connu pour son rôle au sein de Telegram, son aventure commence bien avant, notamment à travers la création en 2006 du réseau social en langue russe VKontakte. Les réseaux sociaux, dont VKontakte, sont fortement mobilisés lors des manifestations massives de 2011 et 2012 qui contestent notamment le résultat des élections législatives de décembre 2011. Le pouvoir russe demande alors à VKontakte de collaborer mais Durov n’obtempère pas, refusant en particulier de fermer le compte d’Alexeï Navalny.

Nouveau bras de fer fin 2013 : le FSB exige que VKontakte fournisse des données sur les membres de groupes associés au Maïdan ukrainien, parmi lesquels We Are Patriots of Ukraine ou encore Ukrainian Offensive, ce à quoi Durov oppose une fin de non-recevoir. À la suite de ses démêlés avec les autorités russes pour ses refus de collaboration, et après avoir vendu ses parts dans VKontakte et en avoir été révoqué du poste de directeur, le milliardaire quitte la Russie en 2014.

En 2018, alors qu’il vogue de pays en pays, il refuse encore une fois de coopérer avec le Kremlin, en ne donnant pas suite à la demande de l’agence Roskomnadzor (le gendarme des communications russe) de lui transmettre les clés permettant de décrypter les messages de Telegram. Roskomnadzor, face au refus de Durov, ordonne le blocage de la messagerie, mais n’est pas en mesure de le réaliser. Cet épisode accroît significativement la notoriété du réseau, qui apparaît désormais, dans le monde entier, comme celui qui a su résister aux tentatives de blocage de la Fédération de Russie.

Durov, qui reste citoyen russe, obtient dès 2014 la nationalité de Saint-Christophe-et-Nièves puis, en 2021, celle des Émirats arabes unis et celle de la France. C’est ce point qui explique qu’en tant que citoyen naturalisé, il tombe sous le coup de la législation française, qui lui reproche son manque de collaboration – mais, à la différence de la Russie, cela porte sur des affaires criminelles et non pas politiques.

Telegram, un outil de la propagande russe ?

Si les relations entre la messagerie et le Kremlin ont longtemps été particulièrement tumultueuses, on relève un apaisement certain depuis 2018.

Telegram est largement employé depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par les milbloggers (ou correspondants militaires), mais aussi par des officines reliées plus ou moins directement au ministère russe de la Défense ainsi que par des groupes paramilitaires et des sociétés militaires privées telles que Wagner. Si bien que Telegram est devenu un outil incontournable de l’influence russe, que ce soit en Russie ou à l’étranger, le réseau regroupant aujourd’hui quelque 1 milliard d’utilisateurs.

Outre les contenus (vrais ou contrefaits) relatifs au conflit russo-ukrainien circulant sur Telegram, le réseau a pu être utilisé par les divers acteurs pour stocker des vidéos, pour partager des dossiers, voir, pour coordonner des actions. Il sera intéressant d’observer dans l’avenir la place que Telegram aura prise en matière de sources d’archives sur le conflit en Ukraine, mais aussi sur les activités russes en Afrique, les SMP russes y étant très présentes depuis des années.

Malgré l’apaisement des relations entre Moscou et Durov, Vladimir Poutine a signé à l’été 2024 un paquet de lois imposant à tous les administrateurs de chaînes Telegram ayant plus de 10 000 abonnés de communiquer à Roskomnadzor tous les renseignements exigés par l’agence ; en cas de refus, ils ne pourraient plus diffuser de publicité sur leurs chaînes, ce qui est une source notable de revenus, notamment pour des chaînes pro-guerre influentes comme WarGonzo (plus de 1,2 million d’abonnés) ou Grey_Zone (plus de 60 000 abonnés, identifié comme un canal « officiel » du groupe Wagner).

À compter du 1er janvier 2025, les administrateurs auront également l’obligation de limiter l’accès aux pages personnelles des utilisateurs dans les 24 heures suivant la réception d’une demande de Roskomnadzor si ces utilisateurs n’ont pas fourni leurs informations au régulateur. Dans le même ordre d’idées, les chaînes de plus de 500 000 utilisateurs devront, sur demande de Roskomnadzor ou du FSB, communiquer aux autorités des données relatives à leurs utilisateurs.

Ces textes rappellent les demandes des années 2018 ; pour autant Durov n’y a pas réagi de manière véhémente. Ce calme apparent participait à renforcer des rumeurs faisant état d’une certaine proximité entre le pouvoir russe et le milliardaire exilé, même s’il nie publiquement entretenir de telles connexions. Tout récemment, le Kremlin a officiellement démenti l’information selon laquelle Vladimir Poutine aurait rencontré Durov à Bakou quelques jours avant l’arrestation de ce dernier.

Telegram aurait été déficitaire pendant plusieurs années et aurait fonctionné grâce aux fonds propres de Durov. En 2021, des messages publicitaires ont commencé à apparaître sur les chaînes. On voyait alors des annonces portant aussi bien sur des taux de change parfois douteux, des fausses nouvelles, mais aussi sur des cryptomonnaies.

En 2018 et 2021, Durov levait 2,5 milliards de dollars pour lancer une cryptomonnaie et couvrir les dettes de l’entreprise. Parmi les investisseurs russes de Telegram, on a pu retrouver les milliardaires Roman Abramovitch, Sergueï Solonine (fondateur du système de paiement russe Qiwi) David Yakobashvili (créateur de la grande entreprise agro-alimentaire Wimm-Bill-Dann), placé sous sanctions par l’Ukraine pour sa proximité avec le régime de Poutine, ou encore Mikhaïl Fridman, propriétaire d’Alpha Capital, structure dont le projet caritatif a été un temps dirigé par la fille aînée de Poutine. Enfin, en 2021, la société VTB Capital, détenue à 60 % par l’État russe et dirigée par un proche de Poutine, Andreï Kostine, dépensait plus d’un milliard de dollars en obligations Telegram.

Tous ces liens participent à semer le doute quant aux connexions entretenues entre la plate-forme et le pouvoir russe.

Un des arguments mis en avant par Telegram pour assurer ses utilisateurs du fait que leurs messages ne seront accessibles qu’aux destinataires et auteurs de ceux-ci est le chiffrement de bout en bout, ou End-to-End (E2E), mis en place sur la plate-forme pour protéger les données y circulant.

À ce titre, les clés permettant de déchiffrer les données se trouvent uniquement sur l’appareil qui a envoyé ces données et sur l’appareil du destinataire, assurant la fiabilité du système. Toutefois, le chiffrement n’est pas mis en œuvre par défaut. Il doit être activé manuellement afin de créer un chat secret, sachant que ce dernier devra être distinct pour chaque personne à qui l’initiateur du chat voudra parler, ce qui rend la manipulation assez complexe. Enfin, concernant les discussions secrètes chiffrées de bout en bout, un chercheur allemand a découvert en 2021 que Telegram créait des aperçus de liens transmis dans les chats secrets sur ses serveurs, ce qui semblerait indiquer que la messagerie a bel et bien accès aux correspondances secrètes.

En résumé, Telegram est un acteur majeur de la sphère informationnelle en général, y compris de la sphère informationnelle russe. À ce titre, la plate-forme est aujourd’hui un acteur de premier plan maîtrisant un nœud stratégique du cyberespace russe. L’arrestation de Durov permettra (et permet déjà) à la Russie, mais aussi à des représentants des courants radicaux européens et américains, notamment de droite, de s’offusquer et d’invoquer la liberté d’expression bafouée par les Occidentaux et par la France en particulier. Cet argumentaire omettra de prendre en considération que les raisons de l’arrestation sont directement liées à la non-coopération de Telegram dans le cadre d’enquêtes portant sur des activités criminelles, et passera sous silence les nombreuses lois visant à maîtriser la sphère informationnelle russe, particulièrement renforcées depuis l’invasion de l’Ukraine.

Il n’en reste pas moins que la mise en garde à vue de Durov, même brève – le 28 août, il a été mis en examen pour douze infractions dont « complicité d’administration d’une plate-forme en ligne pour permettre une transaction illicite, en bande organisée », « blanchiment de crimes ou délits en bande organisée » ou encore « fourniture et importation d’un moyen de cryptologie n’assurant pas exclusivement des fonctions d’authentification ou de contrôle d’intégrité sans déclaration préalable » et libéré, mais il n’est pas autorisé à quitter le territoire français –, n’est pas celle d’un simple patron d’entreprise, mais bien celle d’un homme se trouvant au cœur d’enjeux géopolitiques importants, particulièrement dans le contexte actuel.

Pavel Durov et Telegram : affaire géopolitique ?

 Pavel Durov et Telegram :  affaire géopolitique ?

 

Le 24 août, Pavel Durov était arrêté alors que son jet privé faisait un arrêt au Bourget. Les autorités françaises expliquent cette décision par le refus de coopération du PDG de Telegram, notamment dans le cadre d’enquêtes relatives à des actions criminelles (trafic de drogue, escroquerie ou encore pédocriminalité) dont les auteurs auraient employé sa messagerie pour les perpétrer. En effet, si Telegram est largement utilisé pour communiquer entre individus ou sur des chaînes – lesquelles sont souvent considérées par leurs abonnés comme des sources d’information –, c’est aussi une marketplace d’envergure, y compris pour les milieux criminels.

 

par 

Analyste en géopolitique, membre associé au Laboratoire de Recherche IAE Paris – Sorbonne Business School, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, chaire « normes et risques », IAE Paris – Sorbonne Business School dans The Conversation 

Si Pavel Durov est connu pour son rôle au sein de Telegram, son aventure commence bien avant, notamment à travers la création en 2006 du réseau social en langue russe VKontakte. Les réseaux sociaux, dont VKontakte, sont fortement mobilisés lors des manifestations massives de 2011 et 2012 qui contestent notamment le résultat des élections législatives de décembre 2011. Le pouvoir russe demande alors à VKontakte de collaborer mais Durov n’obtempère pas, refusant en particulier de fermer le compte d’Alexeï Navalny.

Nouveau bras de fer fin 2013 : le FSB exige que VKontakte fournisse des données sur les membres de groupes associés au Maïdan ukrainien, parmi lesquels We Are Patriots of Ukraine ou encore Ukrainian Offensive, ce à quoi Durov oppose une fin de non-recevoir. À la suite de ses démêlés avec les autorités russes pour ses refus de collaboration, et après avoir vendu ses parts dans VKontakte et en avoir été révoqué du poste de directeur, le milliardaire quitte la Russie en 2014.

En 2018, alors qu’il vogue de pays en pays, il refuse encore une fois de coopérer avec le Kremlin, en ne donnant pas suite à la demande de l’agence Roskomnadzor (le gendarme des communications russe) de lui transmettre les clés permettant de décrypter les messages de Telegram. Roskomnadzor, face au refus de Durov, ordonne le blocage de la messagerie, mais n’est pas en mesure de le réaliser. Cet épisode accroît significativement la notoriété du réseau, qui apparaît désormais, dans le monde entier, comme celui qui a su résister aux tentatives de blocage de la Fédération de Russie.

Durov, qui reste citoyen russe, obtient dès 2014 la nationalité de Saint-Christophe-et-Nièves puis, en 2021, celle des Émirats arabes unis et celle de la France. C’est ce point qui explique qu’en tant que citoyen naturalisé, il tombe sous le coup de la législation française, qui lui reproche son manque de collaboration – mais, à la différence de la Russie, cela porte sur des affaires criminelles et non pas politiques.

Telegram, un outil de la propagande russe ?

Si les relations entre la messagerie et le Kremlin ont longtemps été particulièrement tumultueuses, on relève un apaisement certain depuis 2018.

Telegram est largement employé depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par les milbloggers (ou correspondants militaires), mais aussi par des officines reliées plus ou moins directement au ministère russe de la Défense ainsi que par des groupes paramilitaires et des sociétés militaires privées telles que Wagner. Si bien que Telegram est devenu un outil incontournable de l’influence russe, que ce soit en Russie ou à l’étranger, le réseau regroupant aujourd’hui quelque 1 milliard d’utilisateurs.

Outre les contenus (vrais ou contrefaits) relatifs au conflit russo-ukrainien circulant sur Telegram, le réseau a pu être utilisé par les divers acteurs pour stocker des vidéos, pour partager des dossiers, voir, pour coordonner des actions. Il sera intéressant d’observer dans l’avenir la place que Telegram aura prise en matière de sources d’archives sur le conflit en Ukraine, mais aussi sur les activités russes en Afrique, les SMP russes y étant très présentes depuis des années.

Malgré l’apaisement des relations entre Moscou et Durov, Vladimir Poutine a signé à l’été 2024 un paquet de lois imposant à tous les administrateurs de chaînes Telegram ayant plus de 10 000 abonnés de communiquer à Roskomnadzor tous les renseignements exigés par l’agence ; en cas de refus, ils ne pourraient plus diffuser de publicité sur leurs chaînes, ce qui est une source notable de revenus, notamment pour des chaînes pro-guerre influentes comme WarGonzo (plus de 1,2 million d’abonnés) ou Grey_Zone (plus de 60 000 abonnés, identifié comme un canal « officiel » du groupe Wagner).

À compter du 1er janvier 2025, les administrateurs auront également l’obligation de limiter l’accès aux pages personnelles des utilisateurs dans les 24 heures suivant la réception d’une demande de Roskomnadzor si ces utilisateurs n’ont pas fourni leurs informations au régulateur. Dans le même ordre d’idées, les chaînes de plus de 500 000 utilisateurs devront, sur demande de Roskomnadzor ou du FSB, communiquer aux autorités des données relatives à leurs utilisateurs.

Ces textes rappellent les demandes des années 2018 ; pour autant Durov n’y a pas réagi de manière véhémente. Ce calme apparent participait à renforcer des rumeurs faisant état d’une certaine proximité entre le pouvoir russe et le milliardaire exilé, même s’il nie publiquement entretenir de telles connexions. Tout récemment, le Kremlin a officiellement démenti l’information selon laquelle Vladimir Poutine aurait rencontré Durov à Bakou quelques jours avant l’arrestation de ce dernier.

Telegram aurait été déficitaire pendant plusieurs années et aurait fonctionné grâce aux fonds propres de Durov. En 2021, des messages publicitaires ont commencé à apparaître sur les chaînes. On voyait alors des annonces portant aussi bien sur des taux de change parfois douteux, des fausses nouvelles, mais aussi sur des cryptomonnaies.

En 2018 et 2021, Durov levait 2,5 milliards de dollars pour lancer une cryptomonnaie et couvrir les dettes de l’entreprise. Parmi les investisseurs russes de Telegram, on a pu retrouver les milliardaires Roman Abramovitch, Sergueï Solonine (fondateur du système de paiement russe Qiwi) David Yakobashvili (créateur de la grande entreprise agro-alimentaire Wimm-Bill-Dann), placé sous sanctions par l’Ukraine pour sa proximité avec le régime de Poutine, ou encore Mikhaïl Fridman, propriétaire d’Alpha Capital, structure dont le projet caritatif a été un temps dirigé par la fille aînée de Poutine. Enfin, en 2021, la société VTB Capital, détenue à 60 % par l’État russe et dirigée par un proche de Poutine, Andreï Kostine, dépensait plus d’un milliard de dollars en obligations Telegram.

Tous ces liens participent à semer le doute quant aux connexions entretenues entre la plate-forme et le pouvoir russe.

Un des arguments mis en avant par Telegram pour assurer ses utilisateurs du fait que leurs messages ne seront accessibles qu’aux destinataires et auteurs de ceux-ci est le chiffrement de bout en bout, ou End-to-End (E2E), mis en place sur la plate-forme pour protéger les données y circulant.

À ce titre, les clés permettant de déchiffrer les données se trouvent uniquement sur l’appareil qui a envoyé ces données et sur l’appareil du destinataire, assurant la fiabilité du système. Toutefois, le chiffrement n’est pas mis en œuvre par défaut. Il doit être activé manuellement afin de créer un chat secret, sachant que ce dernier devra être distinct pour chaque personne à qui l’initiateur du chat voudra parler, ce qui rend la manipulation assez complexe. Enfin, concernant les discussions secrètes chiffrées de bout en bout, un chercheur allemand a découvert en 2021 que Telegram créait des aperçus de liens transmis dans les chats secrets sur ses serveurs, ce qui semblerait indiquer que la messagerie a bel et bien accès aux correspondances secrètes.

En résumé, Telegram est un acteur majeur de la sphère informationnelle en général, y compris de la sphère informationnelle russe. À ce titre, la plate-forme est aujourd’hui un acteur de premier plan maîtrisant un nœud stratégique du cyberespace russe. L’arrestation de Durov permettra (et permet déjà) à la Russie, mais aussi à des représentants des courants radicaux européens et américains, notamment de droite, de s’offusquer et d’invoquer la liberté d’expression bafouée par les Occidentaux et par la France en particulier. Cet argumentaire omettra de prendre en considération que les raisons de l’arrestation sont directement liées à la non-coopération de Telegram dans le cadre d’enquêtes portant sur des activités criminelles, et passera sous silence les nombreuses lois visant à maîtriser la sphère informationnelle russe, particulièrement renforcées depuis l’invasion de l’Ukraine.

Il n’en reste pas moins que la mise en garde à vue de Durov, même brève – le 28 août, il a été mis en examen pour douze infractions dont « complicité d’administration d’une plate-forme en ligne pour permettre une transaction illicite, en bande organisée », « blanchiment de crimes ou délits en bande organisée » ou encore « fourniture et importation d’un moyen de cryptologie n’assurant pas exclusivement des fonctions d’authentification ou de contrôle d’intégrité sans déclaration préalable » et libéré, mais il n’est pas autorisé à quitter le territoire français –, n’est pas celle d’un simple patron d’entreprise, mais bien celle d’un homme se trouvant au cœur d’enjeux géopolitiques importants, particulièrement dans le contexte actuel.

Géopolitique-Sud global : un groupement de régimes douteux

Géopolitique-Sud global : un groupement de régimes douteux

Ce concept de « sud global » qui regroupe des pays en développement ne sert sans doute pas la démocratie libérale; en vérité le sud global la combat si l’on en juge par les pays qui la composent. Y a-t-il en effet de véritablement démocratique en Chine, en Russie, en Inde, en Iran, au Brésil, ou encore en Afrique du Sud. Des pays qui se sont plutôt mis du côté de la Russie contre l’Ukraine. En fait pour la plupart, l’occasion d’instrumentaliser le néocolonialisme ou l’impérialisme occidental pour justifier des régimes à la démocratie fragile, douteuse ou carrément autoritaire.

La plupart de ces pays ont en commun de justifier les atteintes à la démocratie pour maintenir leur propre unité nationale et leur régime autocratique voire leur dictature.

D’un point de vue idéologique, c’est l’illusion que la démocratie est néfaste au progrès et justifie ainsi des régimes autoritaires. Bref finalement la philosophie marxiste classique avec la dictature du prolétariat confisquée en réalité par des bandes claniques.( L’exemple de la Chine en particulier). Une philosophie également partagée par des courants religieux et dictatoriaux ( l’exemple plus caractéristique dans ce dernier domaine étant sans doute la Corée du Nord ou la Russie).La légitimité de la dictature s’appuie sur le fait que les masses ne sont pas prêtes à exercer la démocratie et que le progrès est mieux servi par une élite avancée !

Un front anti démocratique uni seulement par sa lutte contre l’impérialisme anti occidental qui permet de justifier les atteintes à la démocratie et le maintien dans une situation sociale délétère

 

 

Géopolitique- De la guerre froide….. à la guerre chaude

Géopolitique- De la guerre froide….. à la guerre chaude

Deux années de guerre en Ukraine ont-elles ressuscité la vocation de l’OTAN, fondée le 4 avril 1949, il y a pratiquement 75 ans ? Privée depuis 1991 de son ennemi existentiel, l’URSS, la plus grande alliance militaire intégrée au monde avait traversé deux décennies de crise de vocation. Rompant avec le bloc soviétique, la nouvelle Fédération de Russie était devenue un partenaire stratégique au sein du Conseil OTAN-Russie créé en 2002. De plus, plusieurs anciens pays du « bloc de l’Est », y compris trois anciennes Républiques socialistes soviétiques (l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie) avaient même rejoint l’Organisation entre 1999 et 2020. De 19 membres à la fin de la guerre froide, elle était passée à 28 membres en 2009 (32 aujourd’hui). Sa raison d’être était de contenir le bloc communiste en Europe et de contrer le Pacte de Varsovie sur le terrain militaire. L’annexion de la Crimée en 2014, la guerre dans le Donbass depuis lors et l’invasion à grande échelle de 2022 ont mis fin à cette introspection inquiète. Dans la Russie de 2022, elle retrouvait son « ennemi » théorisé par Carl Schmitt dans La notion de politique (1932) comme celui avec lequel l’affrontement est radical et inévitable, dans la mesure où aucun terrain commun ne peut être trouvé. L’impression de « déjà-vu » géopolitique est aujourd’hui si puissante que l’idée s’est partout imposée : l’Occident serait entré dans une « nouvelle guerre froide » avec une Fédération russe héritière agressive de l’URSS. Seule la carte des blocs aurait évolué, avec l’intégration dans l’Alliance d’anciens États communistes et de deux pays anciennement neutres (Finlande et Suède).

 

par 

Géopoliticien, Sciences Po dans The Conversation 

Le « désir du même », si rassurant soit-il, ne doit pas offusquer « la recherche de l’autre ». Le retour de l’histoire ne devrait pas se faire au prix de l’oubli de la géopolitique. Si l’Europe se considère elle-même engagée dans cette nouvelle guerre froide, elle risque de négliger les risques nouveaux auxquels elle est exposée. Les déclarations (provocatrices) du candidat Trump sur l’OTAN, les annonces (isolées ou contestées) du président Macron sur l’envoi de troupes en Ukraine et l’entrée de la Finlande et celle (longtemps retardée par la Hongrie) du Royaume de Suède dans l’OTAN doivent nous alerter : le Vieux Continent fait aujourd’hui face à des risques géopolitiques de nature bien différente de ceux dont la guerre froide était porteuse. L’histoire bégaie rarement. Et, en tout cas, elle ne dit jamais la même chose. Et les dangers d’aujourd’hui ne gagnent pas à être réduits aux alertes d’hier.

En géopolitique comme ailleurs, les adorateurs des cycles sont nombreux. Combien de fois l’adage de Marx sur les coups d’État des Bonaparte n’est-il pas invoqué aujourd’hui ? Selon lui, tout événement se produirait deux fois : une première, sous une forme tragique et une deuxième, sous les dehors d’une farce – parfois sanglante. Il en irait ainsi de la guerre froide : sa première occurrence avait émergé du deuxième conflit mondial pour mettre aux prises les Alliés occidentaux et le bloc soviétique. Et nous serions entrés depuis 2022, ou même depuis 2013, dans la deuxième guerre froide.

Face à l’horreur de la guerre en Ukraine et à la crainte que suscite la Russie en Europe, il est tentant de retrouver une grille d’analyse éprouvée. La déstabilisation puis l’invasion de l’Ukraine au nom d’une « dénazification » fictive ne rappellent-elles pas les subversions politiques et les interventions militaires de l’URSS en Allemagne en 1953, en Hongrie en 1956, en Tchécoslovaquie en 1968 ou encore en Afghanistan en 1979 ? Comme lors de cette première guerre froide, on observe aujourd’hui une scission de l’Europe en deux blocs militaires, politiques, stratégiques et diplomatiques. Le Rideau de fer tomberait aujourd’hui sur la ligne de front en Ukraine plutôt que sur la frontière entre RFA et RDA, mais la même césure est en passe de s’installer, dans tous les domaines.

Sur le plan politique, les deux camps revendiquent des modèles radicalement opposés : la Russie critique ainsi le libéralisme décadent des sociétés ouvertes pour mieux affirmer son modèle politique ouvertement et explicitement autoritaire, conservateur et nationaliste.

Sur le plan stratégique, chacun des pôles de puissance se considère menacé par l’autre et contraint de développer à l’échelle continentale, puis à l’échelon mondial, une stratégie de refoulement de l’autre. Pour la Russie, les vagues d’élargissement de l’OTAN poursuivraient ainsi la « Pactomanie » des États-Unis dans les années 1940 et 1950 destinée à contenir et refouler le péril rouge. Pour l’Ouest, Moscou a multiplié les formats de coopération anti-occidentaux (OTSC, UEE, OCS, etc.) pour contrecarrer ces extensions otaniennes, de la même façon qu’elle avait à l’époque soviétique signé de nombreux accords, notamment militaires, avec des « États frères » aux quatre coins de la planète.

Sur le plan économique, les vagues de sanctions européennes et américaines se sont succédé et ont eu pour réponses des contre-sanctions russes ; si bien que les anciens partenaires essaient désormais de se passer des approvisionnements de l’autre.

Sur le plan militaire et industriel, la course aux armements et la (re)militarisation battent leur plein, comme au moment de la phase stalinienne de la guerre froide. L’effort de défense des États de l’OTAN s’est considérablement accentué : en 2024, 18 des 32 membres consacrent plus de 2 % de leur PIB aux dépenses militaires. Quant à la Russie elle affiche pour 2024 un budget de défense représentant 6 % du PIB, en hausse de +70 % par rapport à 2023, pourtant déjà année de guerre.

Dans cette polarisation, la guerre d’Ukraine aurait accéléré, accentué et catalysé la renaissance d’un clivage indépassable entre l’OTAN et son Autre radical, la Russie, nouvel avatar de l’URSS. Bien plus, l’Ukraine serait le théâtre d’une « guerre par procuration » typique de la guerre froide comparable à celles que les deux Corées, le Vietnam ou encore l’Angola et le Mozambique avaient connues durant la guerre froide. Dans le Donbass, en Crimée et ailleurs en Ukraine, l’OTAN et la Russie se combattraient à distance, à l’ombre d’une menace nucléaire globale.

Certains attendus de cette grille d’analyse sont parfaitement exacts. En particulier, tous les mécanismes de dialogue, de négociation et de vérification sont bloqués à l’OTAN, à l’ONU et à l’OSCE. Avec « l’ennemi » schmittien ou « l’Autre » radical, la communication est devenue impossible – a fortiori toute forme de coopération.

Si elle est suggestive, cette vision de la mission de l’OTAN et de la stratégie de la Russie est toutefois trompeuse. Outre qu’elle justifie la rhétorique obsidionale développée par le président russe depuis son fameux discours sur l’OTAN à la Conférence sur la sécurité de Munich en 2007, elle masque les dangers réels de la situation présente. Trois événements récents doivent nous en convaincre.

Le 10 février dernier, le candidat, ancien président et possible futur président des États-Unis Donald Trump a réitéré son souhait de prendre ses distances avec l’OTAN et de réduire ainsi l’exposition de son pays aux conflits européens. Cette déclaration ne doit être accueillie ni comme une foucade coutumière d’un provocateur compulsif ni comme un argument électoral d’un novice en politique étrangère. Elle donne le ton du Zeitgeist international car elle résume plusieurs tendances lourdes incompatibles avec la guerre froide.

L’engagement dans l’OTAN n’est plus l’instrument privilégié d’intervention de Washington dans le rapport de force avec son Autre. La bipolarisation américano-soviétique et la gigantomachie OTAN-Pacte de Varsovie ont disparu parce des puissances tierces ont émergé : la République Populaire de Chine, les BRICS et l’Union européenne au premier chef. Le duopole militaire mondial OTAN-Pacte de Varsovie, relativement stable et axé sur la dissuasion nucléaire mutuelle, n’existe plus. Les risques de dérapage s’en trouvent accrus. Les provocations de Donald Trump sur l’OTAN se multiplieront car les déséquilibres européens ne sont plus régulés par la tension maîtrisée entre deux blocs stables et disciplinés. Voilà un risque spécifique à nos temps qu’il ne faut pas négliger au nom de la théorie de la « nouvelle guerre froide ».

Facteur aggravant : tous les espaces de neutralité, de médiation ou de régulation sont en passe de disparaître entre l’OTAN et la Fédération de Russie appuyée sur son OTSC qui réunit plusieurs anciennes républiques soviétiques. La fin de la neutralité finlandaise en 2023 puis de la neutralité suédoise cette année atteste de cette tendance. La guerre froide avait laissé subsister des espaces ouvertement ou implicitement neutres : les deux États nordiques avaient ainsi échappé au système communiste tout en assurant des relations correctes avec leur voisin soviétique. Des glacis, des zones tampons et des aires grises réduisaient les contacts directs entre OTAN et Pacte de Varsovie.

Les risques de frictions et de dérapage (réels) s’en trouvaient réduits. Désormais, l’espace européen est devenu une vaste zone de confrontation directe (Ukraine) ou indirecte (Baltique, mer Noire). L’abandon des neutralités nordiques – et, à terme, peut-être de la neutralité moldave – fait de l’Autre russe le Voisin direct. Voilà un danger que la « nouvelle guerre froide » risque d’occulter. L’affrontement européen ne se fait plus à distance, par-delà des zones tampons.

Enfin, la déclaration si controversée d’Emmanuel Macron le 26 février au soir a souligné combien les dangers actuels sont distincts de ceux du deuxième XXe siècle. Pour l’OTAN, envoyer officiellement des troupes au sol dans un pays tiers, extérieur à l’Alliance, changerait la nature du conflit actuellement en cours. Pour le moment, celui-ci ne met aux prises que deux États, un agresseur et un envahi. Chacun mobilise ses propres réseaux d’alliances afin de soutenir son effort de guerre. Mais le conflit est bilatéral – et ce point n’est ni à minorer, ni à négliger, ni à récuser en fiction.

Même si l’OTAN comme tout, et ses États membres comme parties, soutiennent l’Ukraine de multiples façons, ils ne sont pas parties au conflit car la clause d’assistance mutuelle de l’article 5 ne peut être déclenchée pour l’Ukraine, non-partie au Traité de 1949. Le risque rappelé – à tort ou à raison – par le président français est qu’une confrontation armée OTAN-Russie est désormais possible. La régionalisation des hostilités, l’entrée en guerre d’autres États, la nucléarisation de certaines opérations, etc. : tels sont des risques actuels.

L’OTAN n’est aujourd’hui pas engagée dans une nouvelle guerre froide : la stratégie américaine ne repose plus principalement sur elle ; d’autres puissances militaires différentes de l’Organisation ont émergé ; son « ennemi » existentiel, le Pacte de Varsovie, discipliné, régulé et donc relativement prévisible, n’existe plus ; la guerre par procuration n’est plus la règle. Les risques sont ceux d’une guerre déjà chaude et même très chaude.

Géopolitique–La guerre est là mais nous ne sommes pas prêts !

Géopolitique–La guerre est là mais nous ne sommes pas prêts !

Alain Bauer a lu le livre de notre journaliste Jean-Dominique Merchet : Sommes-nous prêts pour la guerre? ( L’Opinion)

Professeur du Cnam, Alain Bauer y est responsable du Pôle Sécurité Défense Renseignement. Il a récemment publié : Au commencement était la guerre ? (Fayard, 2023)
Jean-Dominique Merchet, après avoir commis un Macron Bonaparte (Stock, 2017) resté dans les mémoires, nous fait passer d’Austerlitz à un avant-Waterloo avec une pointe d’humour noir affirmé par une citation de Michel Audiard à chaque chapitre. J’ai même un moment pensé qu’il aurait pu sous-titrer son essai : « Je ne dis pas que c’est juste, je dis que ça soulage », avec une pointe d’accent germanique…

Mais Jean-Dominique Merchet n’est pas un « tonton flingueur ». Il aime la France, son armée, ses militaires. Du bourbier afghan décrypté, en passant par l’ode à la pilote de chasse Caroline Aigle, il décrit, dépeint, défend aussi, une armée qui ressemble aux deux citations qu’il a placées en exergue de son ouvrage : Jaurès et Foch.

Il connaît l’intime de l’institution militaire, ses atouts et ses difficultés, ses lourdeurs et son infinie capacité au système D « qui va bien », modèle de bricolage, d’endurance et de fascination pour les armées étrangères, souvent mieux dotées, mais moins bien nourries et beaucoup moins créatives en matière d’adaptation au terrain.

Il connaît les questions qui se posent en interne et la difficulté, pour la « Grande Muette », de s’exprimer clairement, entre sanctions au chef d’état-major des armées, qui dit trop fort la vérité, chuchotements dans les rangs ou affirmation par la doctrine des enjeux des crises à venir. Comme si, dans un pays qui adore les Livres Blancs et leurs mises à jour plus ou moins opportunes, il n’était pas possible d’affronter de manière ouverte la question de la défense nationale, donc de la guerre et de la paix. Comme si la dissuasion nucléaire répondait à tout et que la question ne devait surtout pas être posée. Comme si 2001 n’avait pas eu lieu. Comme si le conflit ukrainien ne dépassait pas la seule question quantitative.

« Bonsaï ». Avec les neuf questions posées par le béotien qu’il n’est pas, il nous entraîne vers une synthèse affinée, intelligente et ouverte, des papiers que les lecteurs de l’Opinion et, comme hier de son blog « Secret Défense », dégustent régulièrement. On pourra y retrouver notre armée « bonsaï », « échantillonnaire » et expéditionnaire, dotée d’un peu de tout et de beaucoup de rien, qui joue dans la cour des grands sans en avoir vraiment les moyens, tout en cochant les cases nécessaires pour que les autres fassent semblant d’y croire. Il rappelle la manœuvre stratégique du duo Le Drian -Lewandowski de sauvetage de l’armée de terre, en 2015, avec Sentinelle et la relative déshérence des recrutements qui se sont étrangement accentués depuis… le début du conflit en Ukraine.

L’air de rien, par petites touches informées, sans méchanceté, mais sans concessions, il dépeint une version Ingres revisitée par Soulages, des choix et non-choix qui ont affaibli une armée qui n’ignore rien des risques et des pertes face à un conflit de haute intensité qui peut se transformer rapidement en longue intensité. Et qui doit jongler face à des injonctions contradictoires et des évolutions politiciennes souvent plus marquées par les problématiques intérieures que les enjeux internationaux.

Il propose un pronostic préoccupant et ose quelques recommandations thérapeutiques marquées par la lucidité et surtout l’espoir

Agile, rapide, projetable, ce qui reste de la force nationale doit donc, contrainte et forcée, mais aussi complice et consentante parfois, faire le deuil de sa défense opérationnelle du territoire, de sa capacité à agréger la technologie et la masse, d’apprendre ou de comprendre les mutations doctrinales issues du conflit coréen, qui ressemble tant à la tragédie ukrainienne.

Jean-Dominique Merchet n’écarte aucun sujet qui pourrait fâcher et de manière criminologique, en commençant par un diagnostic honnête et précis de l’état du malade, il propose un pronostic préoccupant et ose quelques recommandations thérapeutiques marquées par la lucidité et surtout l’espoir. Optimiste, parce qu’il a la foi, il reste réaliste et termine en reprenant d’un sous-entendu efficace, l’une des marottes de l’homme, du général et de l’ami, auquel il dédicace son livre, Jean-Louis Georgelin, tristement disparu l’an dernier alors qu’il terminait son grand œuvre, la restauration de la Cathédrale Notre Dame de Paris, la « surprise stratégique ».

Conviction. C’est sur ce sujet que nous nous fâchâmes, puis devinrent proches avec l’alors chef d’état-major des armées, après que j’eus contesté la valeur de ce concept en utilisant un argument qui me semblait plus crédible : l’aveuglement stratégique. Le Cema ne rendit pas les armes, mais proposa un déjeuner de compromis. De cette confrontation est née une réflexion permanente sur les enjeux de l’anticipation stratégique et de la manière de ne pas de laisser surprendre. De mes cours à l’Ecole militaire, dans des enceintes diverses, j’ai retenu qu’en général, l’échec provenait moins d’une absence d’informations que d’une incapacité à comprendre et hiérarchiser ce qu’on savait.

Et la liste, désagréable, qui va d’Azincourt à Dien Bien Phu en passant par Waterloo, et quelques autres « failles » ou « défaillances » intermédiaires ou postérieures, peut souvent, aux risques et périls du civil qui s’exprime devant des uniformes, toucher au vif une armée par ailleurs légitimement fière de ce qu’elle peut accomplir, notamment ses forces spéciales.

On ne pourra pas faire le reproche de l’aveuglement à Jean-Dominique Merchet. Avec sa lucidité tranquille, son écoute, sa retenue, mais la force de sa conviction, il délivre dans son livre l’analyse indispensable qu’un honnête citoyen devrait avoir lue pour mieux appréhender la nécessaire préparation à la défense des valeurs qui font notre nation. Parce que la guerre est à nos portes. Si vis pacem….

« Sommes-nous prêts pour la guerre ? », par Jean-Dominique Merchet, Robert Laffont, 2024 (224 pages, 18 euros).

Géopolitique : Quels risques de guerre nucléaire ?

Géopolitique : Quels risques de guerre nucléaire  ?

Les menaces proférées par Vladimir Poutine, ce 21 septembre, ne doivent pas être balayées d’un revers de la main. Aux yeux du Kremlin, l’emploi de l’arme nucléaire en premier n’est pas tabou. Par Cyrille Bret, Sciences Po

 

Ce 21 septembre, Vladimir Poutine a réitéré une menace qu’il avait déjà exprimée fin février, au tout début de l’invasion de l’Ukraine, quand il avait mis en état d’alerte les unités des forces armées russes en charge des armements nucléaires : si l’intégrité territoriale de la Russie est menacée, a-t-il assuré, il n’exclut pas le recours aux armes nucléaires.

Au moment même où, à New York, les chefs d’État du monde entier se succèdent à la tribune de la 77ᵉ Assemblée générale des Nations unies, appelant à la cessation des hostilités, il choisit, lui, de reprendre l’offensive en franchissant un nouveau cran dans la rhétorique très codée de l’arme nucléaire.

Face à ce qu’ils considèrent comme une récidive ou une rechute, les Occidentaux se partagent à nouveau entre incrédulité horrifiée et le scepticisme inquiet. Le sérieux des déclarations du président russe est, comme en février, mis en doute. « Bluff », « dérapage », « outrance », « exagération », etc. : les interprétations visant à minimiser le risque nucléaire vont bon train.

Les sceptiques ont raison de souligner qu’un usage – même circonscrit – de l’arme nucléaire aurait des conséquences dévastatrices pour Vladimir Poutine : il serait immédiatement privé de ses soutiens – déjà réticents – en Chine et en Inde ; il s’exposerait à une très large réprobation interne, à l’heure où l’opposition à la guerre se manifeste dans les rues (quelque 1 300 personnes ont été interpellées au soir du 21 septembre) ; et, surtout, il risquerait une réplique directe de la part des puissances nucléaires qui soutiennent l’Ukraine : États-Unis, Royaume-Uni et France.

Faut-il pour autant congédier comme irréel le spectre d’une attaque nucléaire russe ? Ou bien serait-il plus avisé de considérer ce qui, aujourd’hui, rend la perspective de l’emploi de l’arme nucléaire moins taboue qu’avant le début de la guerre en Ukraine ?

Trois éléments se conjuguent aujourd’hui pour abaisser le seuil nucléaire aux yeux du Kremlin : premièrement, cette menace prend corps dans un contexte où la Russie est largement en échec dans son « opération militaire spéciale » ; deuxièmement, Moscou n’a cessé depuis des années, et plus encore depuis février dernier, de rompre avec les méthodes conventionnelles de la conduite de la guerre ; enfin, à titre personnel, Vladimir Poutine se montre, en brandissant la menace nucléaire, fidèle à l’image qu’il cherche à imposer depuis des années – celle d’un homme qui, au nom de sa vision du monde et de la place que son pays doit selon lui y occuper, est prêt à absolument tout.

Envisagée depuis le Kremlin, la situation militaire oriente le pouvoir russe vers des moyens d’extrême urgence. En effet, la Russie s’est montrée incapable, en plusieurs mois, d’atteindre ses objectifs stratégiques par le moyen d’une campagne militaire conventionnelle.

Malgré la modernisation de ses forces armées depuis une décennie, malgré l’aguerrissement de ses officiers sur le théâtre syrien, malgré la combinaison de cyberattaques et de campagnes de désinformation en complément des opérations militaires classiques, la Russie n’a ni pris Kiev, ni brisé la résistance nationale ukrainienne, ni même conservé ses gains territoriaux face aux contre-offensives déclenchées depuis un mois.

La tentation de recourir à des moyens non conventionnels s’accroît quand la victoire militaire conventionnelle se dérobe et le spectre d’une défaite se profile. De fait, les opérations ukrainiennes menées dans les zones de Kharkiv (au nord-est) et de Kherson (dans le sud) visent explicitement à remporter la « victoire » contre la Russie.

Pour les Ukrainiens, « victoire » signifie une reconquête intégrale du territoire national issu de l’indépendance de 1991, y compris la Crimée annexée par la Russie en 2014 et les régions de Donetsk, de Lougansk, de Kherson et de Zaporojié qui pourraient tout prochainement être annexées à leur tour, des « référendums de rattachement à la Fédération de Russie » y ayant été annoncés pour la fin du mois de septembre, alors même que Moscou ne contrôle pas la totalité de leurs territoires respectifs.

Mais pour certains soutiens de Kiev – avant tout en Pologne, dans les États baltes et aux États-Unis -, la notion de « victoire » implique une déroute militaire de la Russie, suivie d’un bouleversement politique et d’un affaiblissement stratégique durable de ce pays. Ce que redoute le Kremlin désormais, c’est de revenir à l’état d’abaissement international qui fut le sien dans les années 1990.

En somme, la Russie de Poutine considère qu’elle est à présent explicitement passée d’une guerre d’invasion contre l’Ukraine à une guerre de défense contre l’OTAN. Le niveau de menace étant dès lors drastiquement plus élevé, il pourrait être justifié, du point de vue du Kremlin, de recourir à un type d’arme qualitativement différent. En matière d’armes nucléaires, les échelons à franchir sont nombreux et il y a loin des premières annonces à l’usage effectif. Toutefois, à mesure que la crise militaire se précise pour la Russie et à mesure que le risque de défaite se matérialise, la tentation de mettre en œuvre un moyen militaire extrême se renforce.

Aujourd’hui plus que jamais, les fondements de la doctrine nucléaire russe doivent être rappelés. Ils sont en rupture complète avec la doctrine française, par exemple : la vision russe ne repose pas sur le principe de « frappe nucléaire en second », qui consiste à n’employer l’arme nucléaire qu’une fois que le territoire national aura lui-même été soumis à une attaque nucléaire.

Un usage « en premier », dans un cadre « tactique » et pour atteindre des buts militaires, est au contraire régulièrement envisagé par les différents documents stratégiques russes.

En l’occurrence, une attaque contre la Crimée (ou contre tout autre territoire considéré par le Kremlin comme étant « russe ») de la part des troupes ukrainiennes, tout particulièrement à l’aide d’armements de l’OTAN, pourrait justifier, aux yeux du pouvoir russe, le lancement de missiles opérant des frappes nucléaires soit sur le champ de bataille pour briser une avancée, soit contre des infrastructures critiques pour l’organisation des forces armées ukrainiennes.

C’est ce qui avait été déjà mentionné par le président russe, de façon plus indirecte, en février 2022. C’est ce qui est répété aujourd’hui. Il ne s’agit là ni d’une gesticulation militaire ni d’un coup de menton politique. C’est le rappel strict d’une doctrine depuis longtemps connue et diffusée.

Récemment, cette doctrine nucléaire a été influencée par de nombreuses ruptures avec les méthodes conventionnelles de guerre : soupçonnée d’être impliquée dans l’usage d’armes chimiques et bactériologiques en Syrie, coopérant avec des supplétifs mercenaires comme le groupe Wagner ou « ethniques » comme les milices du président tchétchène Kadyrov, conduisant à l’occasion des opérations militaires clandestines, voilà déjà au moins une décennie que l’armée russe ne se contente pas des moyens conventionnels pour remplir ses objectifs.

La Russie de Poutine a franchi bien des Rubicons dans les guerres qu’elle a menées, que ce soit au sein de la Fédération (en Tchétchénie), à ses frontières (en Géorgie) ou dans ses zones d’influence (Moyen-Orient, Afrique centrale). L’invasion de l’Ukraine constitue en elle-même une rupture profonde avec le principe d’intangibilité des frontières issues de la dissolution de l’URSS. À mesure que les tabous militaires et stratégiques sont brisés, les uns après les autres, la possibilité de rompre le dernier d’entre eux, l’usage de l’arme nucléaire, devient moins fantasmagorique.

L’usage de l’arme nucléaire correspondrait également à la posture politique que le président russe a choisie en déclenchant l’invasion de l’Ukraine.

En effet, le choix de l’invasion, en février 2022, répond à deux grandes lignes politiques explicites chez Vladimir Poutine. La première, bien identifiée et depuis longtemps analysée, correspond à sa volonté d’annuler, en partie du moins, la réduction du poids international de Moscou suite à la désintégration de l’URSS. La seconde répond à la conception du pouvoir politique qu’il a imposée à l’intérieur comme à l’extérieur : il souhaite se poser comme celui qui ose ce que personne d’autre n’ose. L’usage extrême de la force et l’usage de la force extrême sont la marque de cette conception hyperbolique du pouvoir. Oser franchir le seuil nucléaire serait, en somme, dans la lignée de ce rapport sans complexe à la force.

Enfin, la posture politique de la Russie de 2022 se précise désormais, avec les autres mesures annoncées le 21 septembre. D’une part, une mobilisation des réservistes a été décrétée : cela souligne que la Russie, sanctionnée de toutes parts, se transforme rapidement, à l’intérieur, en citadelle assiégée et en caserne généralisée. D’autre part, nous l’avons évoqué, des référendums seront organisés dans plusieurs régions d’Ukraine pour élargir le territoire de la Fédération de Russie et consacrer ainsi une nouvelle mutilation du territoire ukrainien.

Ainsi, la Russie se prépare à une longue guerre d’usure pour conserver ce qu’elle considère désormais comme son glacis défensif contre l’OTAN, à savoir la Crimée et une partie du sud et de l’est de l’Ukraine. Brandir une menace nucléaire crédible vise à renforcer encore davantage cette idée que la Russie, assiégée, ne se laissera jamais vaincre.

Lorsqu’il a répété, ce 21 septembre, ses menaces nucléaires, Vladimir Poutine avait assurément à l’esprit les répercussions terribles auxquelles il exposerait la Russie si elle frappe en premier. Nul ne doit en douter. Mais nul ne doit négliger non plus les facteurs qui érodent peu à peu l’impossibilité d’utiliser ces armes.

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Par Cyrille Bret, Géopoliticien, Sciences Po

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Géopolitique : rétablir le service militaire obligatoire

Géopolitique : rétablir le service militaire obligatoire

 

Le conflit entre l’Ukraine et la Russie devrait nous inciter à réfléchir sur la stratégie militaire. Jusque-là en effet, comme dans d’autres pays, la doctrine reposait  surtout sur la force de dissuasion nucléaire. Cette force et autres  moyens techniques ont convaincu qu’on pouvait se passer de force terrestre notamment d’infanterie en grand nombre. L’expérience de la force de Barkhane en Afrique qui a du se replier lamentablement devrait aussi nous montrer qu’on ne peut se passer des capacités d’intervention terrestre nombreuses et fortes.

. En Ukraine, la Russie est vraisemblablement en train de se diriger vers un échec du fait de force terrestre notamment d’infanterie notoirement mal formée et mal organisée. À l’inverse l’Ukraine a bénéficié depuis des années d’une solide formation en particulier des États-Unis.

Rien ne permet de penser que le conflit entre l’Ukraine et la Russie va contaminer le reste de l’Europe. Mais rien ne permet d’affirmer aussi le contraire pour aujourd’hui ou demain.

L’appel à mobiliser 300 000 soldats supplémentaires de Poutine va se heurter au fait que la plupart non seulement ne sont pas motivés mais aussi nullement formés pour cette tâche de guerre conventionnelle.

Lâchement et démagogiquement, la France a supprimé le service militaire obligatoire pour des raisons politiques autant que budgétaires. Des centaines de casernes et autres lieux militaires ont été bradées. On a laissé supposer que le service militaire obligatoire pourrait être remplacé par un pseudo service civil bidon qui ne concernant pas grands monde contrairement aux annonces et qui de toute façon ne saurait constituer une formation militaire.

Pour former des militaires et des sous-officiers, il faut au moins une formation de l’ordre de deux à quatre mois. Ce délai va constituer une période particulièrement dangereuse pour Poutine d’autant que sur les 300 000 soldats attendus, il ne pourra en recruter que de l’ordre de 50 000 suites aux désertions. Les stratèges militaires français seraient bien inspirés d’analyser le conflit et ses conséquences tant sur le plan géostratégique que de la doctrine militaire.

 

Géopolitique de la Russie : la restauration de la puissance tsariste et soviétique

Géopolitique de la Russie : la restauration de la puissance tsariste et soviétique

Par Lukas Aubin, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières dans » the conversation » 

 

Depuis la dissolution de l’URSS en 1991, la Russie a cherché à conserver son influence sur les pays postsoviétiques, que ce soit sur les plans culturel, militaire ou diplomatique. Cette stratégie d’influence passe par la création d’outils intergouvernementaux, l’expansion de médias de propagande, mais aussi l’utilisation de soft et de hard power dans l’ensemble de la région. Le rapprochement des États baltes avec les structures euro-atlantiques et la volonté générale d’émancipation de ces pays à l’égard de Moscou s’opposent à l’idée transnationale de « monde russe ». La question de la position de la Russie vis-à-vis des pays anciennement membres de l’URSS mérite tout particulièrement d’être examinée en détail compte tenu de la guerre qu’elle a déclenchée le 24 février dernier en Ukraine.

Cet extrait est tiré de l’ouvrage de Lukas Aubin, docteur en Études slaves contemporaines, spécialiste de la géopolitique de la Russie (Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières), intitulé Géopolitique de la Russie, à paraître le 8 septembre aux éditions La Découverte. Ce passage permet de mieux comprendre l’idée d’« étranger proche », utilisée en Russie pour désigner les pays post-soviétiques et la politique du Kremlin les concernant.

Si les ambitions géopolitiques de la Russie sont mondiales, les moyens de sa puissance sont donc avant tout régionaux. Ils se cantonnent à l’espace postsoviétique ou plus précisément aux quatorze pays de l’ex-URSS, soit les anciennes marches de l’empire du tsar Nicolas II. Principale puissance économique et militaire de l’espace postsoviétique, la Russie cherche à s’y imposer dès 1991 comme l’héritier naturel de l’URSS. Cette posture du « grand frère » trouve ses origines dans l’histoire de l’Empire russe et fait preuve d’une remarquable continuité jusqu’à aujourd’hui. Dans la « carte mentale » des dirigeants russes autant que dans celle de la population, la Russie se doit d’avoir la primauté de l’influence au sein de cet espace. En décembre 2018, un sondage du centre indépendant Levada révèle ainsi que 66 % des Russes interrogés regrettent l’URSS.

Les élites du pouvoir russes se dotent très tôt du concept d’« étranger proche » (blijniéié zaroubiéjié). Si son origine est incertaine, on la retrouve chez l’ancien ministre des Affaires étrangères Andreï Kozyrev dans la première moitié des années 1990. Il désigne alors les territoires postsoviétiques sur lesquels la Russie cherche à conserver une influence.

Dès lors, afin de protéger son « glacis », le Kremlin s’efforce d’institutionnaliser sa politique d’influence dans les domaines économique, militaire et stratégique au sein de l’ex-URSS. En 1992, la création de la Communauté des États indépendants (CEI) par la Russie conjointement avec le Bélarus a pour objectif d’en être le fondement.

Regroupant douze des quinze États postsoviétiques, la CEI fait d’emblée face au refus des pays baltes qui décident de regarder à l’ouest. Déjà, cette stratégie connaît ses premiers échecs liés au fait que l’espace postsoviétique est particulièrement hétérogène et que chaque État dispose désormais de ses propres intérêts géopolitiques. Plus tard, le Turkménistan (2005), la Géorgie (2008) et l’Ukraine (2014) quittent l’organisation à la faveur de différends avec la Russie.

Malgré ces revers, l’expression « étranger proche » devient un pan entier de la politique étrangère russe sous Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev. En 2016, l’article 49 du Concept de politique étrangère de la Fédération de Russie décrit le « développement de la coopération bilatérale et multilatérale avec les États membres de la Communauté des États indépendants (CEI) et le renforcement ultérieur des structures d’intégration actives dans l’espace de la CEI qui impliquent la Russie » comme les axes prioritaires du pays à l’étranger.

Pour concrétiser cette ambition, les autorités russes cherchent également à construire un espace économique commun dans la région. En 1995, l’Union douanière est créée entre le Bélarus, le Kazakhstan et la Russie. Rapidement renommée Zone de libre-échange (1996), elle participe à l’édification de l’Union économique eurasiatique (UEEA) en 2014 qui regroupe l’Arménie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Bélarus et la Russie.

Ces cinq pays intègrent parallèlement un commandement militaire commun à l’initiative du Kremlin en 2012 par l’intermédiaire de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), créée en 1992. Selon les autorités russes, ces trois organisations (CEI, UEEA et OTSC) ont pour objectif de souder l’espace postsoviétique autour de la Russie et de construire une ceinture de protection militaire, économique et diplomatique face à l’OTAN et l’UE. Il est impératif pour le Kremlin que la Russie conserve une zone d’influence privilégiée sous peine de voir l’OTAN, l’UE et les États-Unis se rapprocher dangereusement du territoire russe.

Ces craintes se concrétisent dans les années 1990 et 2000, qui voient le déploiement de l’OTAN jusqu’aux portes de la Russie. Alors que Mikhaïl Gorbatchev souhaitait l’avènement d’une « maison commune européenne », la nouvelle maison post-URSS se construit sans la Russie par l’intermédiaire du déploiement de l’OTAN et l’UE vers l’est. À la faveur de vagues d’élargissement successives initiées en 1999, tous les anciens pays du pacte de Varsovie rejoignent l’Alliance atlantique. De plus, en 2004, cette dernière accueille sept nouveaux membres dont les pays baltes. Pour Moscou, l’intégration d’anciennes républiques soviétiques à l’OTAN marque un tournant.

Dès lors, la zone tampon géopolitique qui existait entre la Russie et le monde dit occidental disparaît et les bases militaires américaines se déploient aux frontières du plus grand pays du monde. Selon Vladimir Poutine, cette stratégie pilotée par les États-Unis est une violation d’un accord verbal entre le secrétaire d’État américain James Baker et Mikhaïl Gorbatchev sur la non-prolifération de l’Alliance atlantique vers l’est datant du 9 février 1990. « Ils nous ont menti à plusieurs reprises [...] avec l’expansion de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord vers l’est, ainsi qu’avec le déploiement d’infrastructures militaires à nos frontières », déclare le président russe le 18 mars 2014, justifiant par là même l’annexion de la Crimée.

Face à ce qui est perçu comme une agression, la Russie hausse le ton. Afin de conserver et d’exercer son influence, le Kremlin lie le concept d’« étranger proche » à celui de « monde russe » (rousski mir). Ce dernier correspond à une idée civilisationnelle transnationale qui dépasse les frontières de la Russie. Selon le chercheur Louis Pétiniaud, la notion de « monde russe » est une « représentation géopolitique aux racines multiséculaires, réaffirmée dans la sphère politique russe dans les années 1990, qui suggère l’existence d’un espace civilisationnel centré autour des valeurs, voire de l’ethnogenèse du peuple russe [...]. Le monde russe comprend la diaspora russe présente dans certaines républiques postsoviétiques » (Pétiniaud, in Limonier et Pawlotsky, 2019).

En effet, en 2020, la diaspora russe dans le monde est comprise entre 25 et 30 millions de personnes dont la majorité est située en ex-URSS. Ainsi cette forte proportion de Russes ethniques (autrement appelés russophones) devient-elle pour le Kremlin un levier d’influence culturel et politique vital. Dès 2001, Vladimir Poutine résume sa stratégie en s’adressant à ceux qu’il appelle les « compatriotes de l’étranger » lors du premier congrès mondial éponyme. Selon lui, les dizaines de millions de personnes parlant, pensant et se sentant russes qui vivent à l’étranger doivent « marcher ensemble » et « aider la patrie dans un dialogue constructif avec les partenaires étrangers ».

Dès lors, l’objectif est de transformer « la présence des Russes à l’étranger en influence de la Russie à l’étranger » Souslov, 2017. C’est ainsi que les créations consécutives de Russia Today _(2005), de la fondation Rousski Mir (2007) et de l’agence fédérale Rossotroudnitchestvo (2008) consacrent cette volonté politique. En disposant désormais de structures d’influence à l’étranger, le Kremlin peut déployer sa stratégie en ex-URSS via le « monde russe » pour orienter la politique des États ciblés.

D’une part, la Russie renforce ses accords économiques (notamment gaziers et pétroliers) avec la plupart des États postsoviétiques. Héritière structurelle de l’URSS, elle reste le centre énergétique, militaire et cybernétique de son territoire néocolonial et les États tiers en sont souvent dépendants. Les conflits gaziers réguliers entre la Russie et l’Ukraine (2005‑2006, 2007‑2008, 2008‑2009 et depuis 2013) révèlent les usages géopolitiques des ressources par Moscou avec l’« étranger proche ».

Pourtant, les forces centrifuges de l’« étranger proche » sont à l’œuvre depuis 1991 et nombreux sont les États et les peuples qui souhaitent s’émanciper du joug russe en rejoignant l’Occident. En 1997, l’Organisation pour la démocratie et le développement (GUAM), qui regroupe la Géorgie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Moldavie, naît d’une volonté des quatre États d’intégrer les structures européennes. Plus tard, les pays baltes, qui comptent d’importantes minorités russophones, rejoignent l’UE et l’OTAN en 2004. À la suite, les « révolutions de couleur » (révolution des roses en Géorgie, 2003 ; orange en Ukraine, 2004 ; des tulipes au Kirghizistan, 2005 ; en jean au Bélarus, 2005) voient les peuples postsoviétiques affirmer leurs espérances démocratiques et ébranler un peu plus la stratégie d’influence de la Russie au sein de l’ex-URSS.

Perçues à la fois comme une tentative d’ingérence occidentale et une tentative d’affranchissement de l’espace russe, ces révolutions entraînent un durcissement de la part des autorités russes. En Lettonie, en Ukraine ou même au Kazakhstan, les médias russophones se déploient en masse afin de prêcher la bonne parole et diffuser l’aura du Kremlin. La rhétorique de la protection du « monde russe » maltraité par des gouvernements « nazis » est par exemple devenue monnaie courante pour justifier un conflit diplomatique(pays baltes) ou une intervention militaire (Ukraine).

L’intervention américaine en Yougoslavie en 1999, qui a conduit à la dislocation du pays et au déploiement des bases militaires de l’OTAN, constitue un scénario que les autorités russes ne souhaitent pas voir se reproduire au sein de l’espace postsoviétique.

Que ce soit durant la guerre en Géorgie en 2008, la guerre en Ukraine depuis 2014, ou la guerre entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie en 2020 à propos du Haut-Karabakh, la Russie est depuis 2000 partie prenante de tous les conflits qui se tiennent sur son territoire de prédilection. La guerre en Géorgie en août 2008 est probablement un marqueur important de cette nouvelle stratégie conduite par le régime. En gelant le conflit par l’intermédiaire de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud-Alanie, le pouvoir russe crée des zones tampons où elle conserve une autorité certaine puisqu’elle est de facto et de jure l’un des seuls pays à les reconnaître et à les perfuser économiquement et militairement.

Désormais, ces États de facto sont nombreux et reflètent ces conflits dits « gelés » où les solutions n’ont toujours pas été trouvées, mais où l’influence russe est dominante : Transnistrie, Abkhazie, Ossétie du Sud, Haut-Karabakh, Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk, et même Crimée. Ce mélange entre hard power et soft power dans des zones stratégiques proches de la Russie peut désormais être assimilé à ce que certains chercheurs appellent du smart power Nossel, 2004, c’est-à-dire la capacité de la Russie à utiliser à la fois l’intimidation militaire et l’influence culturelle dans des espaces russophones pour peser sur les décisions politiques de pays tiers.

En outre, à l’échelle de la Fédération de Russie, l’« activation du syndrome postimpérial » à partir de 2014 par le régime russe a également pour objectif de réunir et mobiliser la population des « quatre Russies » (Zoubarevitch, 2015) autour d’un but commun : la restauration de la puissance tsariste et soviétique.

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Par Lukas Aubin, Docteur en Études slaves contemporaines : spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Géopolitique-Vers un bouleversement mondial ?

Géopolitique-Vers un bouleversement mondial ?

Dans la tradition des mois d’août agités, celui qui s’achève n’aura pas manqué d’être le théatre d’une séquence diplomatique et militaire d’une incroyable intensité durant la première quinzaine. A tel point, qu’elle pourrait bien mettre au jour un nouvel ordre mondial. Par Jérôme Husson, de  Square Management*. ( la Tribune)

 

Depuis plusieurs mois, les regards sont tournés vers la Chine dont l’appétit historique pour Taïwan se montre grandissant, et que nous savons scruter attentivement le développement du conflit Russo-Ukrainien, en particulier les réactions de soutien de l’Union européenne et plus encore celles des États-Unis.

En posant le pied sur le sol taïwanais le 2 août, la présidente de la chambre des représentants des US, Nancy Pelosi a joué sa partition dans ce qui fut considéré comme une provocation ouverte par la Chine. Les heures qui suivirent furent incertaines, et c’est sans doute dans la réaction des acteurs concernés ainsi que de la communauté internationale que l’esquisse d’un nouvel ordre se précise.

Un bref regard sur les 25 dernières années et un focus particulier sur les 12 derniers mois permettent de relire les événements et de discerner la perte de vitesse des USA sur la scène politique internationale parallèlement au renforcement de régimes qui mettent leur économie au second plan.

Depuis un quart de siècle, les USA ont lancé des actions de suprématie qualifiées de « sanctions économiques ». Pêle-mêle, l’Iran, la Corée du Nord, la Syrie et la Russie ont fait l’objet de ces instruments de politique internationale.

Toutefois, le bilan de ces sanctions semble être tout à fait limité. Le programme nucléaire iranien a repris de plus belle ; en Syrie, Bachar El-Assad est resté au pouvoir et s’est même offert le luxe de s’ériger en rempart face à Daesh. En Corée du Nord, le programme nucléaire militaire est en passe d’aboutir. Quant à la Russie, depuis 2014 qu’elle connaît les mesures internationales en représailles de son annexion de la Crimée, elle a aujourd’hui retrouvé une vitalité économique très intéressante. La chute du pétrole orchestrée en 2016 n’aura mis qu’un genou à terre au régime de Moscou qui a appris à vivre avec des ressources limitées. Aujourd’hui, les Européens se trouvent dans une dépendance insoupçonnée aux livraisons de gaz et de pétrole de la Russie, quand l’Afrique ne s’inquiète pas de sa capacité à alimenter sa population en ingrédients de base.

La Chine a donc regardé de près les différentes sanctions infligées par les états occidentaux à la Russie, et plus finement encore, observé les conséquences des réponses de Moscou.

Mais un point crucial a surgi il y a deux ans, et que les occidentaux ont vraisemblablement sous-estimé. La crise du Covid a permis à la Chine de mesurer à quel point le monde est dépendant de ses exportations en tous genres, ce que la Russie n’avait pas été en mesure de faire durant la même époque, et par là, elle a pu mesurer son niveau d’emprise économique réelle.

Dès lors, connaissant son véritable poids dans la mécanique du monde, Pékin peut envisager plus sereinement, quoiqu’à son rythme, de déployer ses prétentions sur sa région d’influence, et exercer en premier lieu sur Taïwan, une forme de réunification. Face à la possibilité de la visite de Mme Pelosi sur place, Pékin avait fait savoir que cela constituerait à ses yeux une provocation insoutenable à laquelle il répondrait. Ladite réponse ne s’est guère fait attendre puisque le surlendemain Pékin lançait des manœuvres militaires aériennes et navales de grande ampleur. La récente mémoire des exercices militaires russes en Biélorussie du 10 au 20 février 2022, soit 4 jours avant l’opération spéciale en Ukraine, laissait présager le pire pour l’île de Taïwan.

Face à la réaction chinoise, les États-Unis sont restés plus que mesurés, participant avec modestie à des exercices militaires taïwanais de défense ; attitude rappelant là encore, l’écart entre les déclarations d’intentions musclées de Joe Biden sur la position russe en février et le concours distant de leurs forces aux côtés des Ukrainiens une fois les troupes russes entrées.

La fermeté de la réponse des Chinois tranche avec la retenue diplomatique habituelle que nous leur connaissons, aussi cela pourrait-il bien être le révélateur d’une forme de prise de conscience ou d’assurance développée par Pékin quant à leurs capacités propres.

En déployant la quasi-totalité de son arsenal de sanctions économiques dans la crise ukrainienne, les Occidentaux ont dévoilé leurs cartes. Et tous ces éléments peuvent nous amener à penser que le régime de Pékin a déjà préparé ses contre-mesures dans la perspective de sa reprise en main de Taïwan et des sanctions que cela appellerait. Ainsi, il ne serait pas étonnant de voir le Dollar US être profondément affecté par une forte libération de monnaies de réserves de la Chine, et moins étonnant encore d’entendre Pékin demander à ce que ses exportations soient réglées en Yuan. Quant à l’accès à la plateforme Swift, gageons que la Chine a déjà développé sa propre plateforme concurrente qu’elle pourrait alors imposer à ses partenaires.

Ces éléments priveraient définitivement les USA de leurs outils d’hégémonie, et la récession faisant son œuvre, un nouvel ordre mondial pourrait émerger, faisant la part belle à des régimes davantage politiques qu’économiques, comme celui de la Russie, et donner une place de leader économique à la Chine dont les relations avec le monde sont d’une tout autre nature que celles du vieux monde.

Une telle évolution serait un véritable bouleversement, tant les grands équilibres s’en trouveraient affectés. Les monnaies de référence, les systèmes d’échanges, les normes du commerce international, l’extraterritorialité des lois et règlements, en bref, tout ce qui constitue notre quotidien et les repères dans lesquels nous vivons pourraient radicalement être renouvelés.

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(*) Jérôme Husson est Principal chez Square Management. Il est expert des sujets d’éthique et de gouvernance des organisations, disposant d’une expérience de haut niveau dans le secteur financier et le secteur associatif, en tant qu’administrateur et cadre dirigeant.

Géopolitique- Taïwan : ne pas humilier Pekin ! ( » le Monde »)

Géopolitique- Taïwan : ne pas humilier Pekin ! ( » le Monde »)

 

En se rendant à Taipei, la présidente de la Chambre des représentants, troisième personnage des Etats-Unis, a pris le risque de provoquer Pékin dans une conjoncture politiquement très délicate estime un papier du « Monde ».

 

Le journal reprend le sentiment d’une partie de l’intelligentsia  qui adopte  une attitude de type munichoise aussi bien vis-à-vis de Pékin que de Moscou. Ce papier est révélateur de la résignation d’une grande partie de l’opinion occidentale prête à plier devant les dictateurs comme Poutine pour ne pas avoir à diminuer le chauffage d’un degré cet hiver.

Cette position est largement partagée par nombre d’experts qui proposent la diplomatie molle et  le renoncement aux valeurs démocratiques fondamentales pour n’avoir pas à subir de conséquences économiques des crimes russes et chinois. De quoi préparer un choc de civilisation au profit des dictatures criminelles. (NDLR)

Le papier du monde :

 

La visite de Nancy Pelosi à Taïwan a été inopportune et périlleuse dans le contexte qui prévaut en Asie orientale. La présidente de la Chambre des représentants, premier dignitaire américain de ce niveau à se rendre sur l’île « rebelle » depuis 1997, a mis de l’huile sur le feu dans un endroit du monde hautement inflammable. Elle a provoqué le courroux de Pékin dans une région qui peut aisément se passer d’une crise de plus : des manœuvres militaires chinoises particulièrement agressives viennent de commencer tout autour de l’île, provoquant un quasi-blocus.


On peut comprendre et partager la satisfaction de nombreux Taïwanais pour lesquels tout soutien étranger, et particulièrement celui des Etats-Unis, leur allié le plus puissant et le plus proche, est bienvenu : le régime communiste chinois ne cesse de multiplier les provocations à l’endroit de l’île qui incarne le contre-modèle démocratique absolu face à l’un des régimes les plus autoritaires de la planète. On peut aussi estimer, à juste titre, que la Chine n’a aucun droit d’empêcher le gouvernement taïwanais, à la tête d’un pays souverain, de recevoir les invités qu’il veut et quand il le veut : Taïwan a besoin et mérite d’être soutenu, alors que Xi Jinping, le numéro un chinois le plus autoritaire depuis l’ère Mao, semble prêt, dans un futur encore indéterminé, à prendre le contrôle de l’île.

 

Mais Nancy Pelosi, troisième personnage dans la hiérarchie du pouvoir américain, ne pouvait plus mal choisir son moment. Sa visite a eu lieu dans une conjoncture politiquement très délicate pour l’« empereur » Xi, qui entend devenir « dictateur à vie » en se faisant réélire pour un troisième mandat à la suite du 20e Congrès du PCC, l’hiver prochain. Depuis la fin de l’ère Deng Xiaoping, les numéros un chinois ne pouvaient dépasser les deux mandats d’affilée. Xi Jinping, dont les fonctions cumulent celles de président, de chef du Parti communiste et de la direction militaire centrale, est en outre affaibli en raison des conséquences économiques désastreuses dues à son obsession du « zéro Covid », qui a fait basculer son pays au bord de la récession.

Pour le président de la République populaire, les enjeux sont donc à la hauteur du destin qu’il rêve pour lui et pour la Chine. Après s’être enorgueilli de la façon dont il avait initialement géré la pandémie, Xi Jinping sait que la brutalité de sa politique ne lui vaut pas que des amis au sein du régime : éradication musclée de la corruption, dont les victimes ont surtout été ses concurrents directs, embastillement impitoyable de ses adversaires politiques – et cela aux plus hauts niveaux civil et militaire –, obsession centralisatrice du pouvoir. Paradoxe de cette visite : outre les dangers d’embrasement régional, elle permet aussi au numéro un chinois de faire une démonstration de force militaire et nationaliste…

Joe Biden est apparu lui-même peu enthousiaste à l’idée de voir Mme Pelosi se rendre à Taïwan. Les caciques de l’armée américaine se sont également montrés hostiles à ce voyage, qui tombe d’autant plus mal que la guerre en Ukraine et le tango géopolitique dansé par Pékin et Moscou incitent les Américains à certaines concessions : Washington veut éviter que la Chine n’arme les Russes, ce que celle-ci s’est soigneusement abstenue de faire jusqu’à présent. Au lieu de se montrer réaliste, Mme Pelosi s’en est vaillamment allée tirer la moustache du Tigre. Les rugissements attendus en retour sont devenus source d’inquiétude non seulement pour Taïwan, mais pour d’autres pays d’Asie.

 

Géopolitique- Rompre totalement avec les dictatures

 

Géopolitique- Rompre les relations avec les dictatures

 

Du fait notamment de la crise économique, nombre de pays de dictature ou de régime autoritaire profitent  de la situation pour durcir encore le champ des libertés voire la répression , la torture et même le crime.

La plupart du temps, on fait jouer la corde nationaliste pour donner une légitimité au renforcement de l’autoritarisme. C’est parce qu’il est supposé être attaqué de l’extérieur que les mesures d’exception s’imposent. Au-delà des velléités territoriales qui ambitionnent de modifier la géographie politique se pose surtout le combat entre deux types de civilisation. La civilisation archaïque de type néo-andertalien qui considère que les citoyens ne sont pas compétents pour orienter  les décisions de leur pays et qui confient  à une poignée d’oligarques profiteurs (ou se font imposer) le soin de prendre toutes les décisions. Pour preuve, dans la plupart des pays à caractère autoritaire, les dirigeants ont sagement placé les ressources détournées dans les pays libres. Une sorte de confirmation du caractère illégal du détournement des ressources et de la peur d’un changement de régime un jour. 

Il ne sert pas à grand-chose de prendre des sanctions très parcellaires qui en réalité sont vite détournées par les responsables des pays visés, aidés aussi par un système financier inter national plus que complaisant.

Les pays démocratiques ont les faiblesses de leurs vertus. Les décisions qui y sont prises sont plus complexes et plus longues à prendre que dans les dictatures. En outre, les pays démocratiques s’interdisent d’utiliser les actions criminelles mettant en cause notamment la vie et les droits des populations civiles.

Fondamentalement, c’est une guerre culturelle qui est en cause, celle des primitifs moyenâgeux qui utilisent la terreur pour maintenir leur pouvoir et celle des défenseurs des libertés qui ne peuvent transiger sur les droits individuels et collectifs.

Le dialogue est impossible entre ces deux types de régimes. Le développement du commerce international n’a pas permis de faire évoluer les dictatures. D’une certaine manière au contraire , il a rendu possible son renforcement et même son développement géographique.

Du coup, il conviendrait sans doute de rompre tous liens commerciaux avec les pays qui bafouent la modernité et en particulier le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes autant que les autres libertés individuelles et collectives.

En clair, cela signifie la rupture totale à terme mais programmé des échanges commerciaux . avec des régimes criminels comme la Chine, la Russie, la Turquie, le Brésil, la Corée du Nord en particulier.

Il y a notamment deux exemples du caractère très pervers de la mondialisation essentiellement soutenue par les grands intérêts financiers occidentaux.  En Chine par exemple, le pays a pu concurrencer le monde entier grâce à la délocalisation organisée par les multinationales. La Chine a pu s’emparer des nouvelles technologies et devenir particulièrement compétitive mais sans changer d’un iota bien au contraire la mainmise du parti communiste sur les libertés. L’Occident est de fait  complice du renforcement de l’autoritarisme chinois.

Autre exemple, l’Europe qui s’est rendue complètement dépendante du pétrole et surtout du gaz russe assurant ainsi les ressources considérables à la mafia des politiques et autres oligarques qui pillent le pays en toute tranquillité grâce à la terreur que fait régner Poutine.

Notons que derrière l’ambition idéologique se dissimule le plus souvent des intérêts mafieux des dirigeants et de leur entourage . Exemple,Vladimir Poutine ne vivrait d’ailleurs que de son salaire de chef de l’État qui est de 11 000 euros par mois. Mais le consortium de médias occidentaux, qui a travaillé plusieurs années sur le sujet, révèle qu’en réalité le chef du Kremlin serait à la tête d’un empire colossal de 4,5 milliards d’euros.


Selon la plateforme « Autour de la France », la fortune <https://www.celebritynetworth.com/richest-politicians/presidents/xi-jinping-net-worth/> de l’actuel président chinois s’élève à 1 million de dollars.

Notons que le salaire moyen en Russie comme en Chine tournent pendant ce temps-là autour de 800 € mensuels !

 

Géopolitique- Rompre les relations économiques avec les dictatures

Géopolitique- Rompre les relations avec les dictatures

 

Du fait notamment de la crise économique, nombre de pays de dictature ou de régime autoritaire profitent  de la situation pour durcir encore le champ des libertés voire la répression , la torture et même le crime.

La plupart du temps, on fait jouer la corde nationaliste pour donner une légitimité au renforcement de l’autoritarisme. C’est parce qu’il est supposé être attaqué de l’extérieur que les mesures d’exception s’imposent. Au-delà des velléités territoriales qui ambitionnent de modifier la géographie politique se pose surtout le combat entre deux types de civilisation. La civilisation archaïque de type néo-andertalien qui considère que les citoyens ne sont pas compétents pour orienter  les décisions de leur pays et qui confient  à une poignée d’oligarques profiteurs (ou se font imposer) le soin de prendre toutes les décisions. Pour preuve, dans la plupart des pays à caractère autoritaire, les dirigeants ont sagement placé les ressources détournées dans les pays libres. Une sorte de confirmation du caractère illégal du détournement des ressources et de la peur d’un changement de régime un jour. 

Il ne sert pas à grand-chose de prendre des sanctions très parcellaires qui en réalité sont vite détournées par les responsables des pays visés, aidés aussi par un système financier inter national plus que complaisant.

Les pays démocratiques ont les faiblesses de leurs vertus. Les décisions qui y sont prises sont plus complexes et plus longues à prendre que dans les dictatures. En outre, les pays démocratiques s’interdisent d’utiliser les actions criminelles mettant en cause notamment la vie et les droits des populations civiles.

Fondamentalement, c’est une guerre culturelle qui est en cause, celle des primitifs moyenâgeux qui utilisent la terreur pour maintenir leur pouvoir et celle des défenseurs des libertés qui ne peuvent transiger sur les droits individuels et collectifs.

Le dialogue est impossible entre ces deux types de régimes. Le développement du commerce international n’a pas permis de faire évoluer les dictatures. D’une certaine manière au contraire , il a rendu possible son renforcement et même son développement géographique.

Du coup, il conviendrait sans doute de rompre tous liens commerciaux avec les pays qui bafouent la modernité et en particulier le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes autant que les autres libertés individuelles et collectives.

En clair, cela signifie la rupture totale à terme mais programmé des échanges commerciaux . avec des régimes criminels comme la Chine, la Russie, la Turquie, le Brésil, la Corée du Nord en particulier.

Il y a notamment deux exemples du caractère très pervers de la mondialisation essentiellement soutenue par les grands intérêts financiers occidentaux.  En Chine par exemple, le pays a pu concurrencer le monde entier grâce à la délocalisation organisée par les multinationales. La Chine a pu s’emparer des nouvelles technologies et devenir particulièrement compétitive mais sans changer d’un iota bien au contraire la mainmise du parti communiste sur les libertés. L’Occident est de fait  complice du renforcement de l’autoritarisme chinois.

Autre exemple, l’Europe qui s’est rendue complètement dépendante du pétrole et surtout du gaz russe assurant ainsi les ressources considérables à la mafia des politiques et autres oligarques qui pillent le pays en toute tranquillité grâce à la terreur que fait régner Poutine.

Notons que derrière l’ambition idéologique se dissimule le plus souvent des intérêts mafieux des dirigeants et de leur entourage . Exemple,Vladimir Poutine ne vivrait d’ailleurs que de son salaire de chef de l’État qui est de 11 000 euros par mois. Mais le consortium de médias occidentaux, qui a travaillé plusieurs années sur le sujet, révèle qu’en réalité le chef du Kremlin serait à la tête d’un empire colossal de 4,5 milliards d’euros.


Selon la plateforme « Autour de la France », la fortune <https://www.celebritynetworth.com/richest-politicians/presidents/xi-jinping-net-worth/> de l’actuel président chinois s’élève à 1 million de dollars.

Notons que le salaire moyen en Russie comme en Chine tournent pendant ce temps-là autour de 800 € mensuels !

 

Géopolitique–Conflit Ukraine : du bluff ?

Géopolitique–Conflit Ukraine : du bluff

 

 

Tandis que le ton monte entre Poutine et Biden à propos de l’Ukraine, certains se demandent si la tension ne correspond pas en faite à des coups  politiques qui servent les intérêts intérieurs des protagonistes ( Biden et Poutine qui connaissent une sérieuse baisse de crédibilité et de popularité dans leuer pays respectifs). « C’est un coup de bluff bilatéral », a estimé samedi 12 février sur franceinfo Florent Parmentier, secrétaire général du CEVIPOF-Sciences Po. Aussi sans doute pour Macron qui se sert de l’Ukraine pour sa campagne électorale et qui intervient dans un conflit en faisant semblant d’être le médiateur. Un médiateur d’ailleurs aussitôt contredit par les autorités russes quand il attribue à Poutine des propos qui n’a pas prononcés.Ce qui fait croire aussi croire à une grande opération de bluff, c’est que les Russes n’ont pas pour habitude de prévenir quand ils investissent militairement un territoire.

 

Comment expliquez-vous les récents propos de Joe Biden sur une possible « attaque imminente » de la Russie en Ukraine ?

Florent Parmentier : Joe Biden n’a pas une opinion publique derrière lui qui est pro-guerre. L’opinion publique américaine est assez indifférente à la question de l’Ukraine donc Joe Biden doit vendre à son opinion publique et à ses alliés une victoire qui passerait par le fait de ne pas avoir d’invasion russe en Ukraine. Pour cela, il doit accentuer la pression, la tension. Plus elle est élevée plus le fait de ne pas avoir de conflit sera vécu comme une victoire : Joe Biden en faiseur de paix face à une Russie qui avait foncièrement envie d’en découdre avec l’Ukraine. Par ailleurs, Joe Biden doit rassurer les Européens les plus inquiets. Les Polonais, les Etats baltes. Il doit montrer que c’est lui qui est à la tête du leadership entre les Etats-Unis d’un côté et les Européens de l’autre. Rien ne serait pire, pour ces pays, que de voir que les Américains sont indifférents au sort de ce qu’il se passe à leurs frontières. Et puis, il s’agit de garantir la crédibilité de l’Otan et la clause de solidarité en cas d’attaque prévue par l’article 5.

C’est un coup de bluff ?

C’est un coup de bluff bilatéral. De l’autre côté on peut aussi penser que le fait, pour la Russie, de mettre autant d’hommes dans les troupes n’est pas rationnel si vous n’attaquez pas tout de suite. Si vous attendez avant d’attaquer, vous vous privez de 50% de l’efficacité d’une attaque, de l’effet de surprise. Ce qui fait dire que du côté de la Russie, l’enjeu n’est pas prioritairement d’envahir l’Ukraine. Peut-être que ce n’est même pas l’enjeu du tout. L’enjeu c’est d’obtenir une forme de garantie de sécurité, une remise en cause de l’architecture de sécurité en Europe. C’est probablement ce que vient chercher Vladimir Poutine et c’est là-dedans que la France s’est engouffrée avec l’idée d’essayer de faire des propositions qui pourraient convenir aux deux, confirmer l’engagement américain sur le sol européen et correspondre aux attentes de la Russie. La question qui se pose, c’est de savoir si ça conviendra aussi aux Ukrainiens.

Donc Vladimir Poutine n’est pas en train de préparer une invasion ?

Vladimir Poutine, à ce stade, est le maître des horloges. Il n’a pas d’élection, d’enjeux de politique intérieure, à se poser. Donc il peut faire durer cette position très inconfortable pour les Européens et les Etats-Unis et cette pression sur l’Ukraine. Attaquer ne serait pas rationnel. En revanche, la question que chacun doit se poser c’est, que se passe-t-il le jour d’après pour la Russie si elle attaque l’Ukraine ? De ce point de vue-là, il n’y a pas grand-chose à gagner pour la Russie. Il y a plus à gagner si la Russie arrive à faire accepter aux Ukrainiens les conclusions des accords de Minsk de 2014 et 2015 qui sont aujourd’hui jugés à Kiev comme étant très défavorables aux intérêts ukrainiens.

Géopolitique -Comment la Chine noyaute l’Afrique

Géopolitique -Comment la Chine noyaute l’Afrique 

Pour le chercheur Antoine Kernen, Pékin exploite un discours plutôt efficace auprès des dirigeants africains en renvoyant l’Europe à son passé.

Accessoirement en utilisant les moyens classiques de corruption pour favoriser le noyautage par la Chine des intérêts africains. La Chine qui n’hésite pas pas à asservir des peuples par la violence voire même l’esclavage et qui se fait le champion de la décolonisation voir même de la démocratie ! NDLR 

 

L’initiative vise, sans les nommer, les Occidentaux. Le 29 septembre, la Chine a déposé une résolution dénonçant « l’héritage du colonialisme » devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, qui rassemble 47 Etats. Le texte, adopté le 8 octobre sans grandes conséquences, dénonce « l’exploitation économique, les inégalités au sein des Etats entre eux, le racisme systémique, les violations des droits des peuples autochtones, les formes contemporaines d’esclavage et les atteintes au patrimoine culturel ». Une parade aux critiques contre les pratiques coloniales brutales de Pékin envers les minorités tibétaine et ouïgoure. 

Pour Antoine Kernen, spécialiste de la « Chinafrique » à l’université de Lausanne, qui a codirigé le dossier « Etats d’émergence en Afrique » dans la revue Critique internationale (numéro 89), la Chine a su « se construire à bon compte l’image d’une puissance généreuse » sur le continent, mais son discours critique sur le colonialisme pourrait se retourner contre elle.

D’où vient l’idée, pour Pékin, de dénoncer l’héritage colonial occidental ?

Pour la Chine, accusée de néocolonialisme en Afrique et ailleurs, il s’agit clairement d’une contre-attaque. Pékin reprend l’argument et le renvoie aux Européens et aux Occidentaux qui ont un passé colonial. Ce jeu rhétorique prend place dans des arènes internationales où la Chine est souvent en position de faiblesse sur les droits humains. Ce n’est pas mal joué de sa part et elle a des arguments, ayant elle-même subi le colonialisme occidental. D’autant que dans le même temps, dans les milieux académiques, la remise en cause de l’héritage colonial et les questions de race ont le vent en poupe.

L’aurait-elle fait il y a vingt ans ?

Non, car la Chine était alors presque inexistante au niveau international. Elle cherchait surtout à ne pas être accusée de violations des droits humains. Le grand changement est venu avec Xi Jinping [le président chinois]. Il veut montrer que la Chine ne se soumet pas à un ordre mondial occidental. Il y a vingt ans, le pays n’avait qu’une politique économique étrangère, aujourd’hui il a un récit qui va avec.

Le message peut-il porter auprès des gouvernements africains ?

Dans les pays d’Afrique de l’Ouest, il existe souvent un fond d’anticolonialisme dénonçant la France ou l’Occident. L’Afrique n’a donc pas eu besoin de la Chine pour développer un tel discours. D’ailleurs, ce discours n’est pas vraiment nouveau en Chine non plus : il remonte à la conférence de Bandung, en 1955, puis au mouvement des non-alignés. Dès les années 1950, alors que la Chine s’invente une politique étrangère et cherche à se positionner comme leader du tiers-monde, elle met en en avant son passé de pays colonisé par les puissances occidentales. Aujourd’hui encore, cette histoire lui permet de cultiver sa différence avec elles.

 

Géopolitique–La cyber qui pourrait déclencher une guerre

Géopolitique–La cyber qui pourrait déclencher une guerre      

De plus en plus d’experts s’inquiètent des conséquences d’une cyberguerre sur la vie économique et sociale mais aussi sur la possibilité qu’elle entraîne un véritable conflit armé.

Pour déstabiliser un pays, il suffira en effet de paralyser les systèmes informatisés des grandes fonctions économiques et sociales ( énergie, transports, santé, communication ou encore banques). Ce qui est en cause, c’est un modèle de société fragilisée par sa cyberdépendance. Il n’y a pratiquement plus d’activité qui ne soit pas sous tutelle des technologies de gestion de l’information. Et des pannes géantes volontairement causées ne sont pas à exclure car les mesures de protection ne sont pas à la hauteur des risques.

Plus généralement, les sociétés développées devraient s’interroger sur leur niveau de dépendance à la cyber économie. Certes les nouvelles technologies permettent des progrès considérables pour la gestion de l’information dans tous les domaines cependant des systèmes alternatifs devraient être envisagés systématiquement en cas d’accident majeur volontaire ou non. Notons que les cyberattaques viennent surtout de Chine ou de Russie, qu’elles sont souvent dirigées sur des objectifs civils sans doute pour tester une capacité de nuisance technologique voire pour affaiblir le potentiel de défense d’un pays.

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