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Contribution des Gafa aux télécoms : les collectivités veulent aussi un retour financier

Contribution des Gafa aux télécoms : les collectivités veulent aussi un retour financier

Alors que l’Europe étudie un mécanisme visant à faire contribuer les géants américains du Net au financement du déploiement de la fibre ou de la 5G, les collectivités françaises estiment qu’une partie de cette manne doit leur revenir. Et pour cause, elle pourrait atteindre 20 milliards d’euros par an, dont deux milliards pour la France.

l’Union européenne souhaite que les géants américains du Net contribuent au déploiement des réseaux télécoms sur le Vieux Continent et les collectivités françaises veulent mettre la main sur une partie de la contribution financière éventuelle. Pas question, en clair, que les opérateurs comme Orange, SFR, Bouygues Telecom ou Free, en soient les seuls bénéficiaires. C’est le message qu’a fait passer ce mardi Patrick Chaize, le sénateur de l’Ain (LR) et président de l’Avicca, qui regroupe les collectivités impliquées dans le numérique.

Les montants évoqués d’une possible contribution des Gafa au secteur des télécoms sont faramineux. Le lobby européen du secteur (ETNO), qui a été en première ligne pour faire avancer ce dossier à Bruxelles, milite pour un chèque de 20 milliards d’euros par an ! Les opérateurs français, eux, espèrent une contribution de 2 milliards d’euros pour l’Hexagone.

Les collectivités locales estiment *que les opérateurs ne sont pas les seuls à investir dans les réseaux. Dans les campagnes, le déploiement de la fibre, très avancé, n’a pu voir le jour que parce que les collectivités et l’Etat ont mis la main au portefeuille. C’est grâce à leurs investissements que les Réseaux d’initiative publique (RIP), qui permettent aux habitants des zones rurales et peu peuplées de disposer d’une connexion Internet fixe à très haut débit, ont vu le jour.
L’appétit croissant des Gafa en bande passante pour écouler leurs services oblige depuis des années les opérateurs télécoms à déployer, à grands frais, des tuyaux toujours plus gros. Ils n’ont pas le choix, puisque la neutralité du Net interdit aux Orange, Bouygues Telecom, SFR ou Free de discriminer le trafic de tel ou tel fournisseur de contenus. Dans ce contexte, et sachant que le trafic des Gafam engloutit jusqu’à 80% de la bande passante, la Commission européenne estime normal que ces mastodontes finance les réseaux d’infrastructures.

Enterrement de la taxe Gafa

Enterrement de la taxe Gafa 

 

 

Les Etats  considèrent désormais que la réforme fiscale internationale portant d’une part sur les multinationales, d’autre part sur le Taux d’imposition minimum de 15 % permet d’enterrer la taxe GAFA. Un accord est  intervenu dans ce sens entre l’union européenne et les États-Unis. Les États-Unis étaient particulièrement visés compte tenu de leur grande entreprise de la TECH.

Reste à savoir maintenant comment seront évalués effectivement les activités des GAFA dans les différents pays. Nombre de géants de la Tech fournissent en effet des prestations souvent  à caractère immatériel qu’il sera difficile de localiser de même que les sources publicitaires de financement., la France, l’Autriche, l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni ont annoncé, dans un communiqué commun avec les Etats-Unis, un compromis sur le retrait de leur taxe Gafa nationale prévoyant la suspension des représailles commerciales américaines contre ces cinq pays européens. Cette paix des braves découle directement de l’accord conclu le 8 octobre dernier sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Au total, 136 pays étaient parvenus à s’entendre sur une vaste réforme de la fiscalité des activités numériques des multinationales (premier pilier) et l’instauration d’un taux d’imposition effectif minimum de 15 % pour les entreprises (second pilier). De ce fait, comme l’a souvent répété le ministre des Finances français, Bruno Le Maire, la taxe Gafa hexagonale de 3 % sur le chiffre d’affaires des géants du numérique serait supprimée dès la mise en oeuvre effective du premier pilier de l’accord conclu à l’OCDE.

 

Démantèlement des GAFA: Quelles conséquences sur les consommateurs ?

Démantèlement des GAFA: Quelles conséquences sur les consommateurs ?

Scinder les activités de Facebook, Apple, Amazon et Google pourrait favoriser la concurrence et l’innovation estimeChristopher Mims Dans le Wall Street Journal entre parenthèses (extrait)

Les entreprises, leurs lobbyistes et leurs alliés s’opposent déjà avec force à ces législations et à la nouvelle directrice de la Commission fédérale du commerce (FTC), Lina Khan, une opposante aux géants de la tech. La décision d’un juge fédéral, la semaine dernière, de rejeter les poursuites antitrust contre Facebook au motif qu’elles étaient « juridiquement insuffisantes » laisse penser que la mise en œuvre de règles plus strictes ne sera pas chose aisée.

Il existe peu de précédents permettant de se faire une idée claire de ce que serait la situation pour les utilisateurs en cas de démantèlement majeur d’Amazon, ou si Apple était contraint de se défaire de son App Store

Mais il y a de plus en plus de chances que les dispositions de ces projets de loi deviennent les règles auxquelles les grandes entreprises technologiques auront à se conformer. Cela pourrait passer par le biais d’une législation du Congrès, de lois à l’échelon des Etats, de procès, d’une nouvelle génération de régulateurs comme Mme Khan ou d’une volonté politique bipartisane de lutter contre le secteur de la tech.

Il  est intéressant d’imaginer comment les choses pourraient se passer. Après avoir parlé avec des spécialistes de l’histoire des batailles antitrust, de l’impact de la concentration du marché sur la concurrence et des effets de la réglementation sur les entreprises en position dominante, ainsi qu’avec des sociétés elles-mêmes, voici quelques pistes.

Amazon

Tous les projets de loi proposés par la Chambre semblent viser Amazon d’une manière ou d’une autre. Mais le plus important d’entre eux, le Ending Platform Monopolies Act, permettrait à la FTC de démanteler les géants de la tech si elle estime que leurs produits et services sont susceptibles de concurrencer ceux vendus par d’autres entreprises sur les plateformes de ces mastodontes.

Si cela semble couvrir de nombreuses activités de ces plateformes et que nous considérons comme normales — des applications préinstallées sur l’iPhone aux produits de marques distributeurs comme Kindle et Amazon Basics sur Amazon — c’est parce que le projet de loi est rédigé en des termes très généraux.

 

Dans le passé, les spécialistes de la lutte antitrust ont proposé de scinder Amazon en au moins quatre sociétés, en séparant les éléments qui constituent les piliers de sa domination : son activité principale de vente au détail, sa marketplace où des vendeurs tiers opèrent, sa division extrêmement rentable de services de cloud et ses services de traitement de commandes et de logistique.

Même si le géant de Seattle ne devait se séparer que de sa marketplace, les effets pourraient être perceptibles pour les consommateurs. Amazon a déclaré le mois dernier que les projets de loi pourraient l’amener à interdire aux vendeurs tiers l’accès à sa plateforme, alors qu’ils y proposent la majorité des articles. Ce serait comme si Amazon était scindé en deux, avec d’un côté une division de vente au détail fonctionnant comme Walmart — avec ses marques distributeur et les articles d’autres sociétés qu’il propose directement — et, de l’autre, une marketplace distincte comme eBay.

Dans ce même communiqué, Amazon indique que tout cela « aurait des effets négatifs importants sur les centaines de milliers de petites et moyennes entreprises américaines qui commercialisent leurs produits dans notre magasin, et sur les dizaines de millions de consommateurs qui les achètent sur Amazon ».

Il est difficile d’évaluer l’impact potentiel d’un tel démantèlement et téméraire de professer des certitudes à ce sujet — l’Amérique n’a rien vu de tel depuis la scission de Bell System. Amazon affirme que cela signifierait la fin de prestations comme la livraison gratuite. Mais les programmes de la société destinés à proposer aux vendeurs tiers le même service de livraison gratuite que Prime sans l’aide des départements logistiques d’Amazon, laissent penser que l’entreprise pourrait, malgré tout, trouver un moyen de poursuivre ses activités.

Apple

Une autre proposition de loi, l’American Choice and Innovation Online Act, poursuit un objectif similaire. Elle vise à empêcher les entreprises qui possèdent de grandes plateformes dominant le marché de donner à leurs propres services et produits qui y sont vendus un avantage injustifié sur leurs concurrents. L’App Store, via lequel Apple contrôle 100 % du marché des applications pour iPhone, pourrait ainsi être ciblé. C’est un marché lucratif. Un expert, sollicité comme témoin par Epic Games dans son récent litige judiciaire avec la firme à la pomme, a estimé que les marges d’exploitation de l’App Store pouvaient atteindre 80 %.

Dans une lettre au Congrès et un rapport qu’elle a publié sur la sécurité, Apple explique que les attaques contre sa situation de monopole sur la distribution des applications pour ces appareils menacent sa capacité à assurer leur sécurité

Apple conteste qu’elles soient aussi élevées, mais a refusé de communiquer un chiffre. Le géant de Cupertino a déclaré au cours du procès que sa marge globale en 2020 avait été de 20,9 % et que sa boutique d’applications ne devrait pas être examinée séparément de ses pertes et profits totaux.

Le système d’exploitation mobile d’Apple est utilisé sur six appareils mobiles sur dix aux Etats-Unis.

Dans une lettre au Congrès et un rapport qu’elle a publié sur la sécurité, Apple explique que les attaques contre sa situation de monopole sur la distribution des applications pour ces appareils menacent sa capacité à assurer leur sécurité.

L’impact potentiel pourrait être plus important, à la fois pour Apple et pour ses clients. Cela pourrait conduire au démantèlement du très rentable « jardin clos » — constitué de matériel, de logiciels et de services — qui rend ses produits relativement pratiques pour les utilisateurs, mais qui limite également leurs choix.

De nouvelles règles et de nouveaux régulateurs pourraient contraindre Apple à décloisonner ce système, en cédant son App Store ou en laissant les consommateurs installer des applications depuis n’importe quel endroit. Cela pourrait faciliter l’accès des utilisateurs d’iPhone aux produits d’autres entreprises, mais aussi les exposer aux menaces de rançongiciels ou d’usurpation d’identité numérique.

Facebook

Le Platform Competition and Opportunity Act, un troisième projet de loi, est plus ou moins conçu pour interdire ce qui a été la marque de fabrique de Facebook : acquérir un concurrent avant qu’il ne devienne une menace.

La plainte de la FTC contre Facebook qui figurait parmi celles qui ont été rejetées la semaine dernière, accusait l’entreprise de pratiques anticoncurrentielles lors des rachats de WhatsApp et Instagram. Si la nouvelle législation devait être adoptée, il pourrait être beaucoup plus facile pour la FTC de gagner ce type de procès.

Facebook a déclaré qu’il serait, par exemple, plus difficile pour les utilisateurs de poster des publications partagées à la fois sur Instagram et Facebook. D’autre part, le dossier complet dont dispose Facebook sur chacun d’entre nous, qu’il vend aux annonceurs — sous une forme toutefois de plus en plus anonyme — serait beaucoup plus difficile à constituer pour l’entreprise.

Un porte-parole de Facebook a qualifié ces projets de « remède empoisonné pour le secteur américain de la tech à un moment où notre économie peut le moins se le permettre ».

Un autre projet de loi, l’Augmenting Compatibility and Competition by Enabling Service Switching Act, est censé permettre aux utilisateurs d’échanger des messages entre n’importe quels services, ou du moins de faire migrer leur activité sur un réseau social vers une autre plateforme, en obligeant des entreprises comme Facebook à ne pas se limiter à nous remettre nos données lorsque nous le demandons, mais à en faciliter la transmission, sans les altérer, à d’autres sociétés.

Les avantages en matière de protection de la vie privée n’ont peut-être pas d’importance pour de nombreux consommateurs, mais ils pourraient figurer parmi les conséquences les plus immédiates de ce projet de loi pour les plus de 2,8 milliards de personnes qui utilisent chaque mois l’un des produits de Facebook.

Alphabet (Google)

L’empire de Google dans le secteur des moteurs de recherche — où il contrôle 92 % du marché à l’échelle mondiale — serait également touché par l’American Choice and Innovation Online Act. La société affirme que l’impossibilité de privilégier ses propres services impliquerait qu’ils n’apparaissent plus en tête des résultats de recherche.

Il est clair que toute action contre les Big Tech nécessitera encore beaucoup de temps pour avoir un impact sur les consommateurs. Le litige gouvernement fédéral contre Microsoft, par exemple, s’est prolongé sous trois administrations présidentielles, de 1991 à 2001. A la fin, le gouvernement a préféré conclure un accord plutôt que de tenter de faire démanteler l’entreprise

A court terme, ne plus voir les résultats de Google Maps lorsqu’ils font une recherche pourrait perturber les utilisateurs, mais de nombreux concurrents seraient enthousiastes à l’idée d’occuper cette place, notamment Yelp, qui lutte depuis des années contre le géant de Mountain View et la prédominance de son moteur de recherche. On pourrait dire la même chose de la plupart des autres services que Google et ses lobbyistes ont cités comme étant des outils que les consommateurs considèrent actuellement comme normaux — et qui vont des paroles de chansons aux vidéos YouTube apparaissant en haut dans les résultats de recherche.

« Nous ne sommes pas opposés à un examen antitrust ou à une réglementation mise à jour sur des questions spécifiques, assure Mark Isakowitz, vice-président en charge des relations avec les pouvoirs publics chez Google. Mais les consommateurs et les petites entreprises américaines seraient choqués de voir comment ces projets de loi mettraient fin à nombre de leurs services préférés. »

Il est clair que toute action contre les Big Tech nécessitera encore beaucoup de temps pour avoir un impact sur les consommateurs. Le litige gouvernement fédéral contre Microsoft, par exemple, s’est prolongé sous trois administrations présidentielles, de 1991 à 2001. A la fin, le gouvernement a préféré conclure un accord plutôt que de tenter de faire démanteler l’entreprise.

Même si ces bouleversements n’auront pas lieu de sitôt, les utilisateurs doivent pourtant se préparer à des modifications de ces services. Ces changements pourraient conduire à une concurrence accrue et, en fin de compte, à de l’innovation.

 

GAFA-Antitrust: Les lobbys résistent

GAFA-Antitrust: Les lobbys résistent

Un article deJohn D. McKinnon d ans le Wall Street Journal (extrait)

 

Les détracteurs des Big Tech se sont réjouis lorsque procureurs et parlementaires se sont prononcés contre Facebook et ses semblables. Toutefois, les derniers développements soulignent les difficultés à utiliser les tribunaux et le Congrès pour refaçonner ce secteur d’activité.

Le juge James Boasberg a statué lundi qu’une plainte de l’autorité de la concurrence américaine, la Federal Trade Commission (FTC), était « légalement insuffisante », estimant que le régulateur ne donnait pas suffisamment de preuves du monopole de Facebook et de ses pratiques pénalisant la concurrence. Autre échec pour les détracteurs du géant des réseaux sociaux, le juge a rejeté la plainte de 46 Etats contre Facebook, notamment parce que les avocats avaient attendu trop longtemps pour porter plainte.

Parallèlement, les parlementaires à Washington étudient la voie à suivre après une bataille douloureuse la semaine dernière pour faire avancer des projets de loi visant à renforcer l’application des règles antitrust dans le secteur technologique. Beaucoup de démocrates pro-business subissent des pressions pour retarder ou assouplir les projets de loi, qui pourraient faciliter le démantèlement d’entreprises telles que Facebook et Amazon, et les républicains font l’objet de pressions similaires.

« Ceux qui imaginaient que ce serait facile et rapide devraient prendre du recul… la loi est sans pitié et la politique aussi », explique Harry First, un professeur de droit de la concurrence à New York University, qui a travaillé sur le litige de l’Etat contre Microsoft il y a plus de vingt ans.

 

Le juge Boasberg a statué que la FTC ne donnait pas suffisamment de preuves d’un monopole de Facebook dans le marché des services personnels de réseaux sociaux. Il a ajouté que la politique de Facebook restreignant l’accès à ses outils et données utilisateurs n’enfreignait pas la loi. Le jugement a laissé ouverte la possibilité d’une nouvelle plainte, mais il illustre bien à quel point les régulateurs peuvent peiner à satisfaire les standards de lois antitrust.

Même si l’opinion générale est que les entreprises de la tech sont trop grandes, « le rôle des lois antitrust est de tester même les choses… sur lesquelles tout le monde semble d’accord », indique David Olson, professeur de droit au Boston College.

Plusieurs membres de la Chambre des représentants ont déclaré que les développements juridiques démontraient la nécessité de mettre à jour les lois antitrust pour les adapter à l’ère de l’Internet. Les mesures adoptées par la commission judiciaire de la Chambre la semaine dernière visent à empêcher les grandes plateformes technologiques de privilégier leurs propres produits et services, à simplifier le transfert de données d’une plateforme à une autre par les utilisateurs, à éviter que les plateformes dominantes n’éliminent des concurrents potentiels par des acquisitions et à faciliter le démantèlement d’opérations de sociétés technologiques par les régulateurs.

Jerrold Nadler, élu démocrate de l’Etat de New York, et David Cicilline, élu démocrate de l’Etat du Rhode Island, les présidents respectifs de la commission judiciaire et de la sous-commission des affaires antitrust, ont souligné l’importance de ces propositions pour « faire face aux fusions anti-concurrentielles et à l’abus de position dominante ».

Facebook a contesté les plaintes de la FTC et des parlementaires, déclarant qu’il était en concurrence loyale « pour obtenir le temps et l’attention des gens. »

Mark Shmulik, analyste chez Bernstein, estime que le jugement récent démontrait que la plainte de la FTC contre Facebook « partait de bases faibles » et que le rejet ne changeait pas son scénario d’investissement sur l’entreprise, qui a récemment franchi la barre des 1 000 milliards de dollars de capitalisation et dont il estime l’action sous-évaluée.

« Ils ont fait des pieds et des mains pour définir un nouveau marché dont ils ont exclu des entreprises que je qualifierais de concurrentes », a-t-il déclaré au sujet du gouvernement. « Le juge ne s’y est pas trompé ».

Même certains avocats du changement reconnaissent que la route vers une révision des lois antitrust sera difficile.

« Il y avait un désaccord entre les démocrates de la commission et tous les démocrates n’ont pas voté pour et certains membres très anciens se sont opposés [à la proposition de loi], » a déclaré mardi le chef de groupe à la Chambre des représentants Steny Hoyer, élu démocrate du Maryland. « Pour l’instant, nous ne sommes pas prêts et je ne veux pas faire de prévision sur le moment où nous le serons. »

Les parlementaires pourraient aussi vouloir se coordonner avec le Sénat qui est très divisé et où les Républicains ont plus d’influence, a ajouté Steny Hoyer. Les républicains sont plus souvent favorables aux règles en vigueur et opposés à des normes plus strictes qui pourraient être source d’incertitude économique ou d’injustice.

De leur côté, les géants de la tech s’efforcent de gagner de nouveaux alliés à la Chambre des représentants, avant les prochaines tentatives d’adoption des projets de lois, qui pourraient avoir lieu en septembre selon les parlementaires et lobbyistes.

Une mesure que les lobbyistes tentent d’éliminer est le projet de loi qui pourrait éventuellement démanteler des entreprises. Il a été approuvé à 21-20, un vote serré qui met en lumière sa vulnérabilité.

 

(Traduit à partir de la version originale en anglais par Astrid Mélite)

G7 : fiscalité et GAFA au menu

G7 : fiscalité et GAFA au menu

Au menu du prochain G7 la fiscalité y compris celles des GAFA. Biden a clairement affirmé sa volonté de créer une taxe taxe minimum sur les entreprises à l’échelle mondiale. Elle sera discutée la semaine prochaine à l’occasion du G7 Finances. Les débats tourneront notamment autour du taux retenu de 15%. Mais il y aura la question de la fiscalité spécifique des Gafa, une question qui risque d’opposer les États-Unis et l’Europe.

Le Royaume-Uni notamment défend le principe de taxer les revenus là où ils sont générés et non pas là où les sociétés sont enregistrées.  »Notre position reste que là où les impôts sont payés est important et tout accord doit s’assurer que les entreprises numériques paient des impôts au Royaume-Uni qui reflètent leur activité économique.

La souveraineté des Etats menacés par les GAFA

La souveraineté des Etats menacés par les GAFA 

 

Pascal Boniface, directeur de l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques) explique en quoi la souveraineté des Etats est clairement menacée par les GAFA

Pascal Boniface qui vient de publier une Géopolitique de l’intelligence artificielle (Editions Eyrolles, 2021).

Vous avez toujours été sceptique face aux thèses décrivant l’obsolescence de l’Etat dans les relations internationales. Vous semblez pris d’un doute, face à l’émergence des géants du numérique, estimant qu’ils pourraient être « la menace la plus sérieuse n’ayant jamais existé » pour les Etats. Expliquez-nous.

Je n’ai en effet jamais été sensible aux thèses sur l’obsolescence inéluctable des Etats, thèses selon lesquelles ils seraient condamnés à rejoindre le rouet et la hache de pierre au musée de l’histoire du fait de la globalisation. Certes, les Etats n’ont plus, depuis longtemps d’ailleurs, le monopole de l’action internationale, mais ils restent les acteurs pivots de la scène internationale. On a d’ailleurs bien vu avec la crise de la Covid-19 que les thèses sur la fin des territoires ou des frontières étaient pour le moins battues en brèche. C’est vers l’Etat que chacun s’est retourné pour obtenir une aide, une solution, une perspective. Les Etats sont bousculés par la multiplication de nouveaux acteurs internationaux, mais ils restent solidement au gouvernail du navire planétaire.

Mais en effet, les Gafam – ou plus largement les entreprises digitales – représentent une menace pour la pérennité des Etats plus conséquente que celles auxquelles ils ont été confrontés dans le passé. En termes de population, de puissance économique, de services quotidiens rendus, et même de fonctions régaliennes, ces géants sont en train d’empiéter sur le domaine des Etats. La fortune personnelle du patron d’Amazon, Jeff Bezos, le met au niveau du PIB du Qatar ; Bill Gates, lui, peut se comparer au Koweït et Elon Musk à la Nouvelle-Zélande. Et ils ont bâti leurs empires en un temps record, la quasi-totalité de leurs entreprises ayant été créées au cours du siècle. Rien qu’en 2020, la fortune de Jeff Bezos s’est accrue de 80 milliards de dollars, soit l’équivalent du PIB de l’Ethiopie ou d’Oman. C’est faramineux ! Facebook, avec WhatsApp et Instagram, a plus d’usagers que l’Inde et la Chine n’ont de populations réunies. On voit que la Nasa doit recourir aux services de SpaceX et Elon Musk veut coloniser Mars ; Bill Gates s’est substitué aux Etats-Unis de Donald Trump pour financer l’OMS et Mark Zuckerberg a songé à créer sa propre monnaie. Bref, les géants du digital veulent occuper des fonctions régaliennes.

Comment avez-vous réagi à la censure de Donald Trump par Twitter ?

Avec des sentiments mêlés. Le fait de l’empêcher de mentir et d’hystériser le débat public aux Etats-Unis est bien sûr une bonne chose. La protection absolue de la liberté d’expression aux Etats-Unis ne permet pas d’élever les barrières qui existent en France et en Europe sur l’usage abusif des réseaux sociaux permettant la condamnation de propos diffamatoires ou racistes. Cependant, j’ai toujours un problème avec la censure et je crois – peut-être naïvement – que sur le long terme, la contre-argumentation est toujours plus efficace que la censure. A terme, celle-ci vient nourrir le complotisme qu’elle veut combattre. D’ailleurs, la décision de Twitter a permis à Donald Trump de se présenter en victime de la censure et contribue à radicaliser une frange de ses partisans. Il y a d’ailleurs un paradoxe : Twitter est une compagnie privée qui a ses propres règles et qui est sur ce point libre ou non d’accepter quelqu’un, de même que tout média est libre ou non de donner la parole. Aucune télé ou aucun journal en France ou ailleurs n’est tenu d’inviter tout le monde et a le droit de sélectionner ceux à qui elle donne la parole. Twitter a pris une telle importance que l’on a réagi comme s’il s’agissait d’un service public auquel chacun avait droit !

Les Gafam pourraient-ils vraiment « rendre obsolètes » les Etats en fournissant des services indispensables de manière plus efficace que l’Etat, par exemple dans le cadre de la crise sanitaire actuelle ?

Les empires digitaux ont des capacités de réactivité, de mobilisation, de moyens sans commune mesure avec les procédures étatiques qui restent par comparaison plus lourdes. Ceci étant, c’est quand même l’Etat qui doit définir l’intérêt public alors que ces sociétés ont, ne l’oublions pas, comme but premier la recherche du profit. En tant que tel, ce n’est pas répréhensible, mais il faut bien voir qu’une régulation est nécessaire. Les questions de santé publique doivent demeurer définies par les pouvoirs régaliens quitte à ce que les opérateurs privés y jouent un rôle. Il peut y avoir une coopération, mais la décision doit rester au niveau national, il ne faut pas inverser les priorités. Je pense que les Gafam apportent des services essentiels. Ils sont devenus indispensables. Ils doivent cependant rester à notre service, pas nous diriger.

Ces groupes empiètent déjà sur le domaine régalien, dans l’espace, la santé ou la monnaie. Peut-on imaginer qu’un jour, ils investissent dans la sécurité, voire la défense ?

Le scénario extrême, c’est que ces grandes fortunes s’établissent dans des zones hors de la souveraineté des Etats – et les projets existent déjà – en créant des îles artificielles dans le Pacifique ou pourquoi pas en allant sur Mars, et échappent ainsi encore plus qu’elles ne le font à l’impôt. Ces milliardaires pourraient s’offrir une sécurité privée pour échapper à la colère de tous ceux qui, privés d’emploi par les progrès technologiques, et d’assistance par l’appauvrissement des Etats, voudraient exprimer leur ressentiment à leur égard. Par ailleurs, le phénomène de société militaire privée n’est pas nouveau. Et on peut tout à fait imaginer que, forts de leurs technologies, y compris pour ce qui concerne l’intelligence artificielle adaptée au secteur de l’armement, les géants du digital créent des armées privées en proposant de façon commerciale leur service aux Etats.

Pourquoi n’y a-t-il pas eu d’émergence de géants du numérique en Europe, contrairement aux Etats-Unis et à la Chine ?

Il y a plusieurs raisons à cela. La première c’est qu’aussi bien en Chine qu’aux Etats-Unis, l’Etat et notamment par le biais du complexe militaro-industriel, via la Darpa aux Etats-Unis, a fortement aidé les entreprises numériques à innover en leur fournissant des crédits plantureux et en fermant les yeux, aux Etats-Unis sur l’évasion fiscale, en Chine sur l’enrichissement personnel de leurs patrons. En 2002, les Européens avaient décidé au Sommet de Lisbonne de développer les autoroutes de l’information. On est ensuite passé à autre chose et rien n’a été fait.

Pourtant, le marché intérieur européen est tout à fait comparable et même supérieur, en termes de pouvoir d’achat disponible, au marché chinois ou américain. Nos scientifiques sont excellents, mais ce qui est dramatique, c’est qu’il y a un phénomène massif de brain drain au profit des géants du numérique américains, et désormais chinois, par le biais des filiales qu’ils créent en Europe. Mais l’Europe a longtemps privilégié les consommateurs sur les producteurs et a plutôt empêché la constitution de géants européens au nom de la protection de la libre concurrence. Résultat : ce sont les géants américains qui se sont imposés en Europe.

Fort heureusement, il y a un réveil et la nouvelle Commission semble bien déterminée à faire front contre les Gafam et à organiser le rattrapage du retard en matière d’intelligence artificielle. Pour les données personnelles, on ne rattrapera pas nos concurrents chinois ou américains. L’Europe fait cependant office d’exemple s’agissant de la protection des données des utilisateurs. Pour les données industrielles, la partie reste ouverte.

Vous décrivez des systèmes fiscaux « pris en défaut » par les Gafam avec, dans l’UE, une évasion fiscale annuelle de l’ordre du plan de relance. Que peuvent faire les Européens et le gouvernement français pour y remédier ?

Le problème est que l’Union européenne accepte d’avoir en son sein des paradis fiscaux. Lors de la crise de 2008, il a été irresponsable de ne pas faire dépendre de l’aide accordée à l’Irlande d’une modification de son système fiscal pour qu’il soit plus compatible avec le reste des pays européens. Lorsqu’Apple a été condamné à 13 milliards d’euros d’amendes pour avoir opéré une évasion fiscale à partir de l’Irlande, Dublin s’est battu pour ne pas toucher cette somme. C’est hallucinant. Je pense que la nouvelle Commission se veut plus offensive. Elle veut affirmer son rôle géopolitique, il y a là pour elle un chantier essentiel.

GAFA: un encadrement urgent pour protéger les démocraties

GAFA: un encadrement urgent pour protéger les démocraties

Pour l’économiste Joëlle Toledano, la régulation des réseaux sociaux passe par le contrôle de leur modèle économique et par conséquent de leurs algorithmes, ce qui suppose d’y avoir accès. Interview dans le Monde.

Depuis la suspension des comptes de Donald Trump par les principales plates-formes numériques, le débat s’est centré sur les responsabilités en jeu dans la modération des contenus. Pour l’économiste Joëlle Toledano, autrice de GAFA. Reprenons le pouvoir ! (Odile Jacob, 192 pages, 19,90 euros, prix du livre d’économie 2020), rien ne sert de courir après les contenus illicites si l’on ne régule pas en amont un modèle économique qui donne la prime aux émotions et à la conflictualité.

Quelles leçons tirez-vous de la suppression des comptes de Donald Trump et des débats qui ont suivi ?

Nous avons assisté en janvier à un moment paroxystique avec l’incitation à la violence par un président des Etats-Unis en fonctions et à l’invasion du Capitole. Mais ce n’était que le dernier épisode d’une série d’événements dont les traductions sur les réseaux sociaux étaient aussi condamnables. Les justifications des patrons des plates-formes numériques auraient pu être avancées fréquemment durant les cinq dernières années, au vu des règles de fonctionnement qu’ils avaient eux-mêmes édictées.

La première leçon à en tirer est que le débat américain sur l’irresponsabilité supposée de ces plates-formes a été tranché par ceux-là même qui en bénéficiaient. Marc Zuckerberg (Facebook), Jack Dorsey (Twitter) et leurs homologues de Google, Amazon ou Apple abandonnent cette fiction. Ils avaient la possibilité de ne rien faire, puisque la fameuse « section 230 » exonère les « intermédiaires techniques » de toute responsabilité à l’égard des contenus introduits par des tiers.

En faisant taire le président américain, ils ont reconnu qu’ils sont responsables des contenus. Pris entre deux mauvaises décisions – « couper ou ne pas couper » –, ils ont choisi celle qui conviendrait le mieux à leurs salariés, sensibles au rôle de leur entreprise dans la société, et surtout aux responsables politiques désormais à la tête des deux chambres. Les GAFA seront en meilleure position pour influencer la prochaine mouture du texte qui doit succéder à la « section 230 » et préserver leurs intérêts économiques.

Vous écrivez que la modération des réseaux sociaux passe avant tout par la régulation de leur modèle économique. De quelle façon ?

On ne peut pas se contenter de fixer des règles de modération, quelles qu’elles soient, sans se préoccuper en amont de ce qui les rend nécessaires, à savoir les algorithmes programmés pour mettre en avant les contenus. Même si on parvient à obtenir un certain nombre de vérifications a posteriori, on ne peut traiter la modération des réseaux sociaux sans s’attaquer à leur modèle économique.

GAFA: Le Maire et Yellen: OK pour une mini taxe

Le Maire et Yellen:  OK pour une mini taxe

 

 

Pour ne pas paraître marginalisé  par les principaux décideurs que son notamment les États-Unis et l’Allemagne, Bruno Lemaire le ministre français de l’économie essaye de faire bonne figure en annonçant un entretien avec Janet Yellen,  la responsable du trésor  américain à propos de la taxe Gafa. Bruno Lemaire indique que la discussion va reprendre au sein de l’OCDE. On se souvient que plusieurs Etats ont pris des décisions dans ce domaine cependant l’Europe elle-même a été incapable de se mettre d’accord sur l’objectif.

Du coup la discussion a été renvoyée au sein de l’OCDE mais Trump a rompu la négociation. De toute manière, le renvoi au sein de l’OCDE était l’assurance qu’on ne pourrait déboucher que sur une éventuelle mini taxe GAFA. Les États-Unis sont bien d’accord pour taxer les grands du numérique depuis la nomination de Biden mais pour les taxer aux États-Unis et pas seulement à l’extérieur des frontières.

Conclusion va sûrement adopter le principe d’une mini taxe GAFA. Du coup la taxe française suspendue risque de l’être  définitivement.

Le Parlement français avait  adopté en juillet 2019 une taxe de 3% sur le chiffre d’affaires des géants du numérique. La mesure a fait de la France un pays pionnier en matière d’imposition des « Gafa » (acronyme désignant Google, Amazon, Facebook et Apple) et autres multinationales accusées d’évasion fiscale.

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Elle a rapporté 350 millions d’euros en 2019 . Washington, qui juge cette taxe discriminatoire envers les entreprises américaines, avait riposté en menaçant d’appliquer des droits de douane de 100 % sur certains produits français, notamment les fromages, les produits de beauté et les sacs à main.

Mais en janvier, les deux alliés avaient conclu une trêve pour laisser leur chance aux négociations menées sous l’égide de l’OCDE en vue de créer un impôt mondial sur les multinationales : Paris gelait le prélèvement de sa taxe et Washington s’abstenait de sanctions.

Ces négociations ont cependant échoué en octobre, rendant la trêve caduque.

« Nous avions suspendu la perception de la taxe le temps que la négociation de l’OCDE aboutisse. Cette négociation a échoué, nous percevrons donc une taxe sur les géants du digital en décembre prochain », avait menacé le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire.

Bruno Le Maire, le ministre français de l’Economie, et Janet Yellen, la nouvelle secrétaire américaine au Trésor, sont convenus jeudi lors d’un entretien téléphonique de la nécessité de trouver des solutions multilatérales en matière de taxation des entreprises multinationales, rapporte Bercy.

La taxe française est déjà ridicule puisqu’elle devait rapporter autour de 300 millions pour une évaluation très approximative de 10 milliards de chiffre  d’affaires. Un chiffre évidemment très sous-estimé puisqu’on est difficilement capable d’évaluer l’activité des grands du numérique facturée dans d’autres pays. Sans parler des transferts de charges entre les filiales de ces grandes entreprises pour externaliser les profits dans les pays à faible fiscalité et internaliser à l’inverse les coûts dans les pays à forte fiscalité

“Le ministre a accueilli très positivement l’engagement de la secrétaire d’Etat en faveur d’une participation active des équipes américaines aux discussions sur la fiscalité au sein de l’OCDE, en vue d’un accord international d’ici la fin du semestre”, déclare le ministère de l’Economie dans un communiqué.

Notons que le ministre de l’économie prend le train en marche puisque l’Allemagne sitôt la nomination de Janet yellen  a adressé des félicitations dithyrambiques à l’intéressée histoire de l’amadouer sur les futures taxes qui pourraient peser sur l’union européenne pour le cas où les taxes CAF a seraient trop élevées. Des taxes douanières américaines qui pèseraient à leur sur les exportations allemandes

Taxe GAFA : Berlin brosse dans le sens du poil les États-Unis

Taxe GAFA : Berlin brosse dans le sens du poil les États-Unis

 

L’Allemagne est très dubitative pour ne pas dire opposée à une taxe GAFA sur les grands du numérique américain. L’Allemagne craint en effet des mesures de représailles américaines qui viendraient peser sur ses exportations.

Du coup, c’est avec un zèle surprenant que le ministre des finances allemand a adressé des félicitations aux États-Unis pour la nomination de Janet Yellen comme première femme au poste de secrétaire au Trésor, disant espérer qu’elle pourra contribuer à avancer vers un accord international sur la taxation des géants du numérique.

L’Allemagne se contenterait bien d’un accord au rabais si cela peut empêcher une hausse significative des tarifs douaniers sur l’exportation de ces machines et de ses automobiles notamment. Cette déclaration d’amour de l’Allemagne vise aussi sans doute à rééquilibrer la position de l’Europe qui jusque-là militait  pour une taxe gafa sous la pression notamment de la France. Une manière de rappeler que le moteur de l’Union européenne est en Allemagne et non pas en France

“Félicitations aux Etats-Unis pour avoir fait ce choix exceptionnel ! Janet Yellen est une personne très impressionnante”, a réagi Olaf Scholz, ajoutant être très impatient de collaborer avec l’ancienne présidente de la Réserve fédérale américaine, confirmée lundi au poste de secrétaire au Trésor à Washington.

Olaf Scholz a déclaré à Reuters que l’Europe et les Etats-Unis étaient des partenaires naturels et s’est dit “convaincu” que les deux blocs pouvaient ensemble “accomplir davantage” pour leurs citoyens.

Aux yeux de Berlin, l’une des questions clé à régler dans les prochains mois avec Washington est la taxe sur les grandes entreprises du numérique – les “Gafa”, pour Google, Amazon, Facebook et Apple.

“J’entends effectuer des avancées décisives et conclure un accord à l’OCDE cet été”, a fait savoir Olaf Scholz. “La pandémie de coronavirus nous montre une nouvelle fois combien il est important que toutes les entreprises paient leur tribut”.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a prévenu en octobre qu’un échec des discussions internationales sur le sujet pourrait générer jusqu’à 100 milliards de dollars de manque à gagner et déclencher une guerre commerciale.

« Comment réguler les Gafa ? (Joëlle Toledano, économiste)

« Comment réguler les Gafa ? (Joëlle Toledano, économiste)

 

 

Dans son dernier ouvrage, l’économiste Joëlle Toledano, professeur émérite à l’université Paris-Dauphine, prône un « changement d’approche » de la régulation européenne, pour « enfin faire respecter l’état de droit » aux géants du Net américains. Entretien dans la Tribune.

 

- Votre dernier livre décortique comment les Gafa [Google, Apple, Facebook, Amazon, ndlr] ont tissé leur toile jusqu’à étouffer la concurrence dans leurs secteurs respectifs. Pendant des années, ils ont échappé aux filets des régulateurs, notamment en Europe, qui est devenue une colonie numérique des Etats-Unis. Pourquoi la régulation ne fonctionne-t-elle pas avec eux ?

JOËLLE TOLEDANO - Mon livre dresse effectivement un constat d’échec de la régulation jusqu’à présent, qui n’agit qu’a posteriori une fois les dérives identifiées. Contrairement aux autres plateformes numériques, chacun de ces empires a réussi à sa façon à étendre ses activités de façon à créer de puissants écosystèmes qui sont devenus des places fortes. Les pratiques abusives de chacun des quatre Gafa sont largement connues et documentées, sans même parler de leur expertise pour l’optimisation fiscale, de l’impact d’Amazon sur le commerce et les emplois, ou encore des énormes défis démocratiques posés par les contenus haineux et les fake news sur les réseaux sociaux.

Je pense que le problème des régulateurs du XXè siècle est qu’ils arrivent toujours un peu après la bataille, à moins que les Gafa, qui sont des entreprises visionnaires, aient toujours un temps d’avance sur tout le monde. Pourquoi les autorités de la concurrence ont-elles autorisé Facebook à acquérir Instagram et WhatsApp, ce qui a offert à Mark Zuckerberg un quasi-monopole sur les réseaux sociaux ? Parce que les règles que devaient appliquer les autorités de concurrence pour évaluer et éventuellement refuser de telles acquisitions étaient beaucoup trop strictes. Nos outils de régulation sont inadaptés car ils n’empêchent pas ces acteurs non seulement de façonner des empires économiques et financiers d’une puissance inédite, mais aussi d’abuser de leurs positions et d’étouffer la concurrence.

L’enseignement que j’en tire est que pour réguler efficacement les Gafa, il faut monter en compétence et se donner les moyens de comprendre comment ils fonctionnent. Pour cela, il faut d’abord aller au cœur de leur modèle économique, c’est-à-dire inspecter sous le capot des algorithmes, s’attaquer à l’opacité qui entoure les relations économiques à l’intérieur des écosystèmes, et comprendre la façon dont s’effectue le partage de la valeur dans la publicité ou sur les places de marché. Ensuite, il faut identifier et interdire un certain nombre de pratiques qui nuisent à la concurrence. Enfin, il faut, entreprise par entreprise, prendre des mesures pour rendre possible à nouveau la concurrence.

Le constat que je dresse est donc sévère mais je ne suis pas fataliste pour autant. Je pense que réguler les Gafa est possible, mais seulement si on s’en donne les moyens intellectuels et politiques. Par contre, cela nécessite de changer profondément d’approche, et de se retrousser sérieusement les manches.

Gafa: une mini taxe mise en application en France

Gafa: une mini taxe mise en application en France

La taxe sur les grands du numérique va renaître en France. Une taxe qui devrait rapporter entre 300 et 400 millions pour un chiffre d’affaires annuel très approximatifs de 15 milliards. Elle avait été suspendue en attendant les résultats du groupe de travails mis en place par l’OCDE. Or cette réflexion a été bloquée par l’attitude des États-Unis. La France avait cependant prévenu que si le blocage des discussions pilotées par l’OCDE persistait, elle mettrait en oeuvre sa propre taxe. En octobre, les quelque 140 pays impliquées dans les négociations sur le sujet ont décidé de prolonger jusqu’à la mi-2021 les discussions.

“Les entreprises assujetties à cette taxe (taxe numérique) ont reçu un avis d’imposition pour le versement des acomptes de 2020”, a déclaré un responsable du ministère des Finances.

Les grandes entreprises américaines du numériques comme Google, Apple, Facebook ou Amazon, souvent appelées les Gafa, minimisent le chiffre d’affaires qu’elles réalisent en France pour payer moins d’impôts, à confirmé un rapport, commandé par l’ancien secrétaire d’État au numérique Mounir Mahjoubi. L’étude révèle surtout le montant du manque à gagner pour le fisc français en 2018, estimé à un milliard d’euros.

Plus précisément, les Gafa, auxquels s’ajoutent Microsoft, déclarent un chiffre d’affaires quatre fois inférieur à celui effectivement réalisé dans notre pays. En 2018, les Gafam ont déclaré en France 3,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires cumulé contre 14,9 milliards effectivement

Le Parlement français a adopté en 2019 une taxe de 3% sur le chiffre d’affaires des entreprises dégageant des revenus supérieurs à 25 millions d’euros dans l’Hexagone et 750 millions d’euros dans le monde. La France espérait alors à l’époque que cet impôt rapporterait environ 500 millions d’euros cette année, mais le projet de finances 2021 l’évalue désormais à 400 millions.

La France a indiqué qu’elle mettrait fin à cette taxe dès qu’un accord au sein de l’OCDE serait conclu.

Taxe Gafa: réapparition en France

Taxe Gafa: réapparition en France

 

La France est quelque autre rare pays avaient décidé de mettre en place une taxe sur les grands du numérique . S’en était suivie une guerre de communiqués entre les États-Unis et les pays concernés. La France avait consenti à suspendre sa taxe à condition que l’Europe en décide le principe à son niveau. L’Europe à son tour s’était désisté sur l’OCDE qui a été chargée d’une mission pour accorder les violons des 137 pays concernés.

Mais la discussion a été bloquée par la position intransigeante des États-Unis. Du coup, la problématique revient sur le terrain national et le ministre de l’économie affirme que la taxe française sera opérationnelle dès la fin de l’année. «Nous avions suspendu la perception de la taxe le temps que la négociation de l’OCDE aboutisse. Cette négociation a échoué, nous percevrons donc une taxe sur les géants du digital en décembre prochain», a-t-il dit, lors de l’émission Dimanche en Politique.

«La France doit être fière d’être l’un des premiers pays en Europe, avec l’Espagne, avec l’Italie, avec l’Autriche à percevoir une taxation juste sur les gens du digital, dont je rappelle qu’ils sont les seuls vainqueurs de cette crise», a souligné le ministre.

Lundi dernier, les 137 pays négociant sous l’égide de l’OCDE ont échoué à trouver un accord pour que les grandes entreprises du numérique «paient leur juste part d’impôt». Si l’OCDE est confiante d’aboutir d’ici la mi-2021, son secrétaire général Angel Gurria a prédit, en cas d’échec définitif, «une multiplication des actions unilatérales, des mesures de représailles», et in fine, une nouvelle «guerre commerciale».

Ces nouvelles règles fiscales, en plus de pacifier les relations économiques internationales, pourraient rapporter 200 milliards de dollars par an, bienvenus alors que la pandémie a «creusé les déficits» publics, avait fait valoir Angel Gurria lors d’une conférence de presse. En face, les géants du numérique ont «tiré profit» de la numérisation de l’économie, accélérée par les diverses mesures de confinement dans le monde.

À titre d’exemple, Facebook a réalisé un chiffre d’affaires de près de 70 milliards de dollars en 2019, mais a payé 8,46 millions d’euros d’impôt sur les sociétés en France en 2019. Une partie infime des 6,3 milliards d’impôts acquittés par le groupe, essentiellement aux États-Unis.

Taxe internationale GAFA: projet bloqué

Taxe internationale GAFA: projet bloqué

Pour l’instant, la fameuse taxe internationale GAFA  dont l’étude était engagée dans le cadre de l’OCDE est complètement bloquée notamment du fait de l’attitude des États-Unis. On sait que la plupart des GAFA ne payent  pas leurs impôts dans le pays d’activité mais dans le pays où elles ont leur établissement principal. Des pays à très faible taux d’imposition.

Dans le cadre des discussions à l’OCDE, il est proposé que les grands du numérique règlent leurs impôts dans le pays d’activité avec un taux minimum d’imposition de 12,5 %. La recette annuelle de cette nouvelle taxe pourrait être de 200 milliards. La France avait suspendu sa taxe unilatérale en attendant les résultats de la discussion à l’OCDE qui regroupe 137 pays.

La France menace de reprendre cette taxation en cas de désaccord à l’OCDE. La balle est aussi renvoyée dans le camp de l’union européenne. Le problème c’est que les mêmes désaccords se manifestent en Europe entre des pays qui font du dumping fiscal un argument économique et les autres. Sans parler de l’Allemagne très réticente à l’idée de taxer l’économie américaine qui en retour pourrait punir fiscalement les importations en provenance d’outre-Rhin. Bref on  tourne sérieusement en rond.

GAFA : limite et danger d’une régulation « populiste »

GAFA : limite et danger d’une régulation populiste

Aurélien Portuese, Professeur, St Mary’s University London et Professeur associé en Droit Européen de la Concurrence au Global Antitrust Institute de la George Mason University (*) d’une régulation sous pression populiste des géants du numérique. Une vision évidemment libérale.

 

« Avec trois condamnations cumulant près de 10 milliards d’euros d’amende, Google est le résultat parlant d’une recherche toujours plus poussée des autorités à l’encontre des géants du numérique: après le temps de l’enthousiasme numérique où d’aucuns se félicitaient de la puissance des algorithmes, de l’ampleur de l’innovation digitale, et des services fournis gratuitement – voici venu ce qu’il est convenu d’appeler le « techlash » !

Sanctionnées, vilipendées, et bientôt démantelées? Les géants du numérique font l’objet de nombreuses pressions populaires que nos régulateurs et responsables politiques ont souvent bien du mal à  refreiner. Et pourtant ! L’histoire nous enseigne que la régulation de la concurrence devrait demeurer le domaine de l’expertise et de l’analyse économique plutôt que le domaine de l’opinion publique et l’instrumentalisation politique.

Aux origines populistes du droit de la concurrence

Avec la révolution industrielle que connurent les Etats-Unis dans la seconde moitié du XIXe siècle, l’accumulation de capital dans les villes et l’émergence d’innovations telles que les chemins de fers ont conduit à des révoltes d’agriculteurs qui se sont révélées être politiquement influentes. Par ces révoltes, les agriculteurs ont pu exprimer leurs craintes face à ce qui était considéré alors comme une concurrence déloyale de ces conglomérats industriels – la productivité accrue conduisait également à une déflation des prix au détriment des agriculteurs et des petits commerçants. Ainsi, des plateformes programmatiques ont été élaboré au sortir desquelles, notamment, la lutte contre les monopoles et le contrôle des chemins de fers étaient mêlées à la revendication d’un argent libre pour tous (« Free Coinage of Silver »).

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Né aux Etats-Unis avec le Sherman Act de 1890, le droit de la concurrence tire ses origines de multiples mouvements populistes initiés par les agriculteurs – tels que le « Farmers’ Alliance » et le « Grange Movement ». Ces initiatives ont contribué à fonder en 1891 le « People’s Party« , aussi dénommé  « The Populists ». Avant cette législation fédérale, douze Etats (agraires) avaient déjà initié ce type de législation. La  formation d’un « trust » (soit, un cartel) par Rockefeller en 1879, le « Standard Oil Trust » ayant des ramifications sur plusieurs Etats, a convaincu le Congrès d’introduire une législation « anti-trust » au niveau fédéral. Proposée par le républicain John Sherman, cette législation fédérale adoptée en 1890 était destinée à protéger les « petits commerces et les honnêtes hommes», comme l’interprètera en 1897 la Cour Suprême, contre les grandes entreprises et leurs excès.

Il est alors évident que les origines du Sherman Act, et du droit de la concurrence tel qu’il a influencé sa transposition en Europe des décennies plus tard, sont éminemment populistes : une lutte contre les grandes entreprises et une défense des petits commerçants comme choix politiques sans pour autant exiger une démonstration des méfaits économiques à imputer à ces grandes entreprises.

Les dangers d’un populisme dans la concurrence

La concurrence dans la société est souhaitable pour son efficacité économique (des prix bas, des entreprises compétitives et une innovation accrue) et pour le processus qu’elle engendre : un esprit entrepreneurial récompensant les mérites économiques des entreprises florissantes et sanctionnant les entreprises en décalage avec les besoins des consommateurs. Or, cette justification économique n’est pas partagée par la vision populiste de la concurrence. Le populisme dans la  concurrence perçoit le besoin d’organiser le marché par l’Etat afin qu’il y ait un nombre suffisant d’entreprises à tailles égales afin que ces entreprises puissent réellement se concurrencer entre elles : seul un nombre suffisant d’entreprises garantit la déconcentration économique et politique du pouvoir détenu par les entreprises. Cette vision a historiquement conduit non seulement à sanctionner des pratiques efficientes ne créant aucun dommage pour les consommateurs, mais également à démanteler des entreprises pour la seule raison qu’elles avaient acquis une taille trop importante.

Premièrement, des comportements tels que la pratique des prix minimums aux distributeurs, la pratique des restrictions imposés par le fournisseur à ses distributeurs, la fusion entre petites entreprises, la vente à prix bas par des entreprises dominantes…ont été considérés comme illégales car renforçant l’entreprise dominante, sans nécessité de démontrer au préalable que les consommateurs étaient lésés. Deuxièmement, le démantèlement d’entreprises – néanmoins rarissimes dans l’histoire – s’est toujours soldé par des échecs. Il y a trois expériences de démantèlement d’entreprises : Standard Oil en 1911, AT&T en 1984, et Microsoft en 2000. Standard Oil une fois démantelé en 34 entreprises, aucune de ces entreprises n’a pu survivre sans être rachetée (pour donner naissance à des entreprises comme Exxon Mobil, BP PlC, Chevron Corporation…) et aucune baisse de prix n’a été démontrée. Après 10 ans d’investigations et une fois AT&T démantelé en huit entreprises de téléphonie, la baisse des prix a principalement été le fait d’innovations comme l’émergence de la téléphonie sans fil sans pour autant éviter la constitution aujourd’hui d’un duopole entre Verizon et AT&T. Surtout, le réseau physique de téléphonie mobile était considéré comme monopole naturel. Enfin, le régulateur américain a échoué à démanteler Microsoft par un jugement d’appel qui a simplement exigé que Microsoft agisse sans discriminer les concurrents de ses produits Windows. Par conséquent, toute tentative de démanteler les géants du numérique (ou « GAFA » pour Google, Amazon, Facebook et Apple) serait fondée sur des motifs hasardeux, ne saurait être qu’une mesure de dernier recours, et prendrait des années d’investigations pour un échec probable quant aux bienfaits pour les consommateurs et pour l’innovation espérée.

La nécessaire « économisation » de la régulation de la concurrence

Commencé dans les années 70s aux Etats-Unis et dans les années 2000 en Europe, l’approche économique – plutôt que politique voire populiste – de la concurrence a consisté à questionner les interdictions de comportements d’entreprises par le prisme de l’efficacité économique : désormais, seuls seront interdits les comportements qui ne concourent pas à l’efficacité économique du marché. Cette efficacité est alors mesurée par l’accroissement ou pas du bien-être du consommateur par la pratique concernée. A contrario, seront sanctionnés les comportements pour lesquels un dommage aux consommateurs sera démontré (prix élevé ou qualité réduite du fait de cartels ou d’abus de position dominante). Ainsi, les synergies entre entreprises pour des gains d’efficience peuvent désormais être acceptées, les fusions pour une meilleure productivité bénéficiant aux consommateurs sont encouragées, les relations contractuelles entre fournisseurs-distributeurs sont libres dès lors qu’elles ne se font pas au détriment des consommateurs.

L’organisation de nos économies autour de nouveaux « business models », principalement l’économie digitale autour des plateformes, était rendu possible. Ainsi, les stratégies d’intégration verticales des entreprises dans lesquelles des écosystèmes digitaux se créent ont bénéficié de la bienveillance du régulateur.

De même, l’essor de l’économie du gratuit dans laquelle l’utilisateur final ne paie pas le service financé par les publicitaires était rendu tout autant possible par le jeu complexe d’obligations contractuelles réciproques dans lesquelles l’échange de données personnelles a remplacé le paiement d’un prix. Il n’est pas anodin que la grande période d’innovation digitale, à savoir 1995-2015, s’est accompagnée – si ce n’est a été facilitée – par une économie de la concurrence à la fois aux Etats-Unis et en Europe où seuls les dommages prouvés aux consommateurs étaient sanctionnés et où le pouvoir de marché était perçu comme la condition sine qua non à l’émergence de ces plateformes de réseaux.

Inquiets de la taille de certaines entreprises du numérique et invoquant l’héritage populiste du Sherman Act, certains auteurs appellent désormais à revenir entièrement sur l’économisation de la régulation de la concurrence qui a émergé depuis les années 70s. Se revendiquant explicitement comme étant populistes, ces auteurs appellent à démanteler les GAFA. Ces appels au démantèlement de Google, Facebook, Amazon ou encore Apple interviennent non pas après avoir démontré l’inefficacité de sanctions potentielles ni même après avoir démontré  la réalité de dommages aux consommateurs, mais seulement comme volonté de faire émerger des plus petites entreprises digitales afin que le pouvoir économique et politique soit déconcentré : dans la lignée de l’historique populiste de la défense des petits entrepreneurs, ce populisme moderne auto-proclamé comme « Antimonopoly Movement » entend restructurer les marchés conformément à une démocratie dite « économique » et à un objectif d’intérêt général plus ambigu que la stricte défense du bien-être des consommateurs.

Avec leurs profitabilité et leurs capitalisations importantes, les géants du numérique sont les Standard Oil du XXIe siècle : des cibles de choix pour dénoncer la concentration économique et politique des pouvoirs et défendre ainsi les entreprises potentiellement empêchées de se développer en raison de la taille des géants du numérique. Avec cette analyse dans la lignée de l’héritage populiste du Sherman Act, et sans même démontrer le pouvoir de marché, l’absence d’innovation et/ou la qualité décrue des services offerts (souvent gratuitement), cette école de pensée néo-populiste s’attire néanmoins les faveurs à la fois de l’opinion publique et de responsables politiques en mal d’élaborer un programme économique populaire.

Aux mêmes causes, les mêmes conséquences : l’abandon d’une jurisprudence ayant conduit à interdire des comportements pourtant bénéfiques pour les consommateurs a été l’aboutissement de longues années de débats académiques ayant fini par convaincre de démontrer les erreurs commises dans le passé. Ainsi, revenir sur l’ « économisation » de la concurrence à la faveur d’une vision plus politique de la concurrence reviendrait à commettre les mêmes erreurs du passé – au détriment des consommateurs qui en paieraient les coûts indus. La passion populiste, quoique séduisante et engageante, ne saurait prévaloir sur une analyse raisonnée, experte et détachée, de l’économie de la concurrence.

« C’est une erreur de croire que la passion, quand elle est heureuse et pure, conduit l’homme à un état de perfection ; elle le conduit simplement à un état d’oubli » avançait Victor Hugo.

Cette passion populiste nous conduit à l’oubli – l’oubli des erreurs du passé et l’attrait pour des solutions éprouvées.

Résister à l’appel du pied d’un populisme dans la concurrence, c’est résister à toute forme de populisme dans la société – où la réflexion médiate est souvent plus juste que l’intuition immédiate, où l’expertise n’est pas sacrifiée sur l’autel du ressenti majoritaire, où l’économie revêt les attributs d’une science plutôt que les traits de la méfiance.

Résister en Europe à la vision populiste à l’endroit des géants du numérique, c’est aussi encourager l’émergence en Europe même d’entreprises digitales capables d’évoluer et de les concurrencer. Voilà un objectif de politique économique enthousiasmant loin de l’instrumentalisation politique d’une concurrence dévoyée !

(*) Par Aurélien Portuese, Professeur, St Mary’s University London ; Professeur associé en Droit Européen de la Concurrence au Global Antitrust Institute de la George Mason University ; Chercheur affilié à l’Université Catholique de Paris. Cet article fait écho à la publication académique co-écrite avec Pr. Joshua Wright « Antitrust Populism : Towards a Taxonomy » publié au Stanford Journal of Law, Business & Finance (Mars 2020) et nominé pour un Prix chez Concurrences. Aurélien Portuese a également bénéficié d’un financement de l’Académie libre des sciences humaines.

Sanctions européennes contre les Gafa ?

Sanctions européennes contre les Gafa ?

 

Jusque-là la commission européenne avait beaucoup hésité à prendre des sanctions contre les GAFA notamment des sanctions financières justifiées des procédures d’évitement fiscal des grandes sociétés t américaines. Le problème, c’est que l’Allemagne jusqu’ alors s’était montrée assez réticente vis-à-vis d’éventuelles sanctions craignant un retour de bâton sur les droits de douane de ses exportations vers les États-Unis.

Il faut cependant noter qu’aux États-Unis même il y a une prise de conscience des responsables politiques du caractère trop hégémonique des grands du numérique. La Commission européenne compterait,  elle,  renforcer d’ici à la fin de l’année son arsenal répressif contre l’hégémonie des géants du numérique, pouvant aller jusqu’à leur exclusion du marché commun, a affirmé le commissaire au Marché intérieur Thierry Breton au Financial Times.

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