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Football et société: La folie du foot fric

Football et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champions internationaux dans des disciplines considérées comme marginales. Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société. Mais c’est aussi parfois un moment d’union nationale qui fait oublier le reste. À condition toutefois que les excès ne fasse pas tomber les clubs français en particulier dans la faillite. NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
….la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Football et société: La folie du foot fric

Football et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champions internationaux dans des disciplines considérées comme marginales. Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société. Mais c’est aussi parfois un moment d’union nationale qui fait oublier le reste. NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
….la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Politique- Macron après 2027: retour au fric ?

Politique- Macron après 2027: retour au fric ?

Macron affirme qu’il fera probablement « quelque chose de complètement différent » de la politique après 2027; D’abord un ouf de soulagement pour ce président sans doute le plus impopulaire que le pays ait connu. Pas étonnant , il n’avait auparavant connu aucun engagement politique, aucune responsabilité sociale et avait été parachuté par les banquiers et autres grands patrons.

Le chef de l’État affirme donc que son avenir ne sera pas dans la politique mais dans quelque chose de très différent. On voit mal quel pourrait être cet ailleurs autre que dans la finance. Macron n’a en effet aucune autre compétence. Ce n’est pas un intellectuel, loin s’en faut. Il a d’ailleurs été recalé à Normale Sup. Ce n’est évidemment pas un humaniste. Son idéologie est plutôt nombrilisme. Finalement, ses compétences sont assez limitées mais grâce à son carnet d’adresses, on le retrouvera à la tête d’une banque ou d’une entreprise.

Bref, un bel exemple de promotion personnelle rapide pour les jeunes et qui prouve qu’on peut s’affranchir de tout engagement, de toute expérience et même de toute conviction pour atteindre le sommet.

En visite au Kazakhstan, le président français a affirmé que « la politique n’est pas l’exclusivité d’une poignée de gens ». Et sans rire !

Emmanuel Macron se projette sur sa vie d’après. « Il est probable que je ferai quelque chose de complètement différent quand j’aurai fini », en 2027, au terme de deux mandats comme président de la République (il ne peut pas se présenter pour un troisième mandat), a glissé le chef de l’Etat, mercredi 1er novembre, lors d’un échange avec des étudiants à l’université d’Astana, pendant sa visite au Kazakhstan.

« Mais je serai très heureux d’avoir servi mon pays pendant dix ans en tant que président », a-t-il souligné. « Et cette opportunité pourrait être la vôtre », a-t-il insisté. Encourageant les étudiants à être quoi qu’il arrive « engagés dans la vie politique et dans les choix publics », le président de la République a affirmé que « la politique n’est pas l’exclusivité d’une poignée de gens ». Un bel encouragement pour celui qui en fait n’a jamais été engagé dans la vie politique avant d’être élu président.

« Je vous dis cela car je n’étais pas membre d’un parti politique, je n’étais pas un homme politique, quelques mois avant d’être élu président », a fait valoir celui qui fut tout de même secrétaire général adjoint de l’Elysée (2012-2014) puis ministre de l’Economie (2014-2016) avant de se présenter à la présidentielle de 2017 sans aucune expérience de terrain et sans expérience militante.

Macron après 2027: retour au fric ?

Macron après 2027: retour au fric ?

Macron affirme qu’il fera probablement « quelque chose de complètement différent » de la politique après 2027; D’abord un ouf de soulagement pour ce président sans doute le plus impopulaire que le pays ait connu. Pas étonnant , il n’avait auparavant connu aucun engagement politique, aucune responsabilité sociale et avait été parachuté par les banquiers et autres grands patrons.

Le chef de l’État affirme donc que son avenir ne sera pas dans la politique mais dans quelque chose de très différent. On voit mal quel pourrait être cet ailleurs que dans la finance. Macron n’a en effet aucune autre compétence. Ce n’est pas un intellectuel, loin s’en faut. Il a d’ailleurs été recalé à normale Sup. Ce n’est évidemment pas un humaniste. Son idéologie est plutôt nombrilisme. Finalement, ses compétences sont assez limitées mais grâce à son carnet d’adresses, on le retrouvera à la tête d’une banque ou d’une entreprise.

Bref un bel exemple de promotion personnelle rapide pour les jeunes et qui prouve qu’on peut s’affranchir de tout engagement, de toute expérience et même de toute conviction pour atteindre le sommet.

En visite au Kazakhstan, le président français a affirmé que « la politique n’est pas l’exclusivité d’une poignée de gens ». Et sans rire !

Emmanuel Macron se projette sur sa vie d’après. « Il est probable que je ferai quelque chose de complètement différent quand j’aurai fini », en 2027, au terme de deux mandats comme président de la République (il ne peut pas se présenter pour un troisième mandat), a glissé le chef de l’Etat, mercredi 1er novembre, lors d’un échange avec des étudiants à l’université d’Astana, pendant sa visite au Kazakhstan.

« Mais je serai très heureux d’avoir servi mon pays pendant dix ans en tant que président », a-t-il souligné. « Et cette opportunité pourrait être la vôtre », a-t-il insisté. Encourageant les étudiants à être quoi qu’il arrive « engagés dans la vie politique et dans les choix publics », le président de la République a affirmé que « la politique n’est pas l’exclusivité d’une poignée de gens ». Un bel encouragement pour celui qui en fait n’a jamais été engagé dans la vie politique avant d’être élu président.

« Je vous dis cela car je n’étais pas membre d’un parti politique, je n’étais pas un homme politique, quelques mois avant d’être élu président », a fait valoir celui qui fut tout de même secrétaire général adjoint de l’Elysée (2012-2014) puis ministre de l’Economie (2014-2016) avant de se présenter à la présidentielle de 2017 sans aucune expérience de terrain et sans expérience militante.

Dictature Russie : surtout les valeurs du fric et de la mafia

Dictature Russie : surtout les valeurs du fric et du crime

Dans un film , Paul Moreira explique comment l’actuel maître du Kremlin a brisé les velléités politiques et économiques des milliardaires qui avaient fait fortune sous la présidence de Boris Eltsine. Le journaliste a accepté de revenir sur son travail pour franceinfo.

Comment résumeriez-vous votre documentaire ?

Paul Moreira : Pour résumer en une phrase, le film raconte comment un garde du corps est devenu un parrain. On l’a oublié, mais en 1995, la Russie était au bord de l’insurrection. Les ouvriers étaient excédés, car ils n’étaient pas payés. Les oligarques jouaient en bourse avec l’argent qui aurait dû revenir aux travailleurs. C’était une situation qui aurait dû déclencher une révolution.

C’est dans ce contexte, où le Parti communiste menaçait de revenir au pouvoir, que les oligarques décident de porter Poutine au pouvoir. Ils se disent : « On va empêcher les communistes de revenir en choisissant un dur. Vladimir Poutine va mater la révolte, il vient du KGB, a pété la gueule des Tchétchènes, et quand il parle à la télé, les gens ont peur. »

Au tout début, Poutine joue le jeu du type obéissant. Puis tout bascule lors d’une scène que décrit l’ancien oligarque Sergueï Pougatchev dans le documentaire : alors que des rumeurs selon lesquelles il souhaiterait nationaliser plusieurs entreprises privées effrayaient les milliardaires, Vladimir Poutine organise une réunion avec les oligarques dans la datcha [maison de campagne] de Staline, où il met en place une mise en scène très intimidante.

« C’est du Poutine tout craché : il repère les points faibles des gens et manipule leur peur. »

On a pu le constater plus récemment, lorsqu’il a fait rentrer un chien lors d’un rendez-vous avec Angela Merkel, alors qu’il sait qu’elle en a une véritable phobie. C’est sa manière passive-agressive de prendre le pouvoir.

Le barbecue organisé chez Staline, c’était la même chose. Il envoyait un message subliminal que les oligarques ont bien compris : « Attention, en Russie, celui qui est à la tête de l’Etat incarne le pouvoir, ce ne sont pas vous, les milliardaires. »

Au début de son mandat, il était tout de même impressionné face à ces hommes puissants…

Il était évidemment intimidé par ces types qui étaient richissimes, mais il les a très vite testés. A la base, Poutine est un petit officier du KGB. Il n’est pas comme les autres hiérarques, des apparatchiks qui montent dans l’appareil et accèdent au pouvoir après des années d’intrigues. Lui a été choisi pour sa brutalité et sa capacité à faire peur. Le problème, c’est qu’il va faire peur aux oligarques et va réussir à les soumettre en à peine un an.

Avez-vous eu des difficultés particulières lors de la réalisation de ce documentaire ?

La difficulté première résidait dans le choix que nous avons fait de ne pas aller en Russie. D’une part, parce que là-bas, il aurait été compliqué de rencontrer quelqu’un qui puisse nous parler librement. D’autre part, nous ne voulions pas mettre en danger de potentielles sources sur place, étant donné niveau de témoignages que nous souhaitions recueillir.

« Nous voulions des témoins de l’intérieur, capables de raconter des scènes. Des protagonistes qui avaient été en première ligne dans un certain nombre d’événements. »

Il nous a donc fallu aller tout autour de la Russie. Nous avons tourné en Géorgie, en Allemagne, en Autriche, en Pologne, à Londres et puis en France.

L’autre problème concernait les archives. Il nous fallait des images et des images originales. Cela a été très compliqué, car les télévisions russes étaient fermées, et n’avaient de toute façon plus l’autorisation de commercer avec nous. Mais même si elles avaient obtenu l’autorisation de nous vendre des images, nous aurions dû les payer en roubles, car le système Swift n’est plus possible avec la Russie à cause des sanctions internationales. On a dû inventer des méthodes afin d’avoir accès à des archives vraiment originales et qui font, je crois, la saveur et la force du film.

Comment avez-vous réussi à faire témoigner l’ancien oligarque Sergueï Pougatchev ?

Sergueï Pougatchev dit vivre sous la menace permanente de Vladimir Poutine. Nous voulions le rencontrer chez lui. Cela a été un peu long à négocier, car il vit bunkérisé, entouré de bergers allemands et avec d’énormes dispositifs de sécurité.

Nous sommes restés cinq heures ensemble et il m’a finalement confié des choses intéressantes. Ce qui m’intéressait chez Sergueï Pougatchev, c’était ses souvenirs, pas ses prises de positions contre le régime.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué en pénétrant dans cet univers ?

Je connaissais l’importance des oligarques, mais l’un des grands mystères était pour moi l’origine de leur fortune. D’où provenait le premier dollar ?

Lors de notre enquête, j’ai par exemple découvert comment Mikhaïl Khodorkovski [ancienne première fortune de Russie, qui vit désormais en exil à Londres] avait mis la main sur ce que j’appelle la fortune des soviets. A l’époque, les salaires des travailleurs étaient payés en liquide, mais il existait une monnaie virtuelle, appelée non-cash, qui servait aux échanges entre les entreprises. C’était, d’une certaine manière, de l’argent communiste : on ne pouvait rien acheter avec, on ne pouvait pas s’enrichir, ni faire du profit. Mikhaïl Khodorkovski a réussi à convaincre le président de l’époque, Mikhaïl Gorbatchev, de transformer ce non-argent en vrai argent, et a ouvert une banque. L’ingéniosité de ces hommes, qui étaient des mathématiciens très malins, a pour moi été une véritable découverte.

Lorsque Vladimir Poutine arrive au pouvoir, l’argent des oligarques est déjà utilisé comme une arme d’influence sur la scène internationale. Il sert comme aide matérielle apportée aux partis d’extrême droite européens. Ce dark cash [argent sombre] est au centre du pouvoir de Poutine. Et cette opacité a parfaitement profité du système des paradis fiscaux. On peut d’ailleurs estimer que le véritable drapeau des oligarques russe est celui des Iles vierges britanniques : c’est celui qu’arborent leurs yachts.


L’Europe a-t-elle profité de l’argent de ces oligarques ?

Bien sûr. Les Russes ont ouvert les portes de manière spectaculaire à d’anciens dirigeants européens, comme l’ex-chancelier allemand Gerhard Schröder, Nicolas Sarkozy, et des tas d’autres.

Le Royaume-Uni a par ailleurs servi de coffre-fort aux avoirs des oligarques. Depuis la guerre en Ukraine, les Anglais sanctionnent les milliardaires russes, mais ceux-ci ont longtemps eu droit au tapis rouge dans le pays. Ceux qui faisaient affaire avec ces financiers accueillaient leur argent à bras ouvert. Certains allaient jusqu’à surnommer « Londongrad » la ville de Londres.

Dans le film, nous diffusons une séquence stupéfiante dans laquelle des agents immobiliers disent à des oligarques : « On n’a pas besoin de savoir d’où vient votre argent. » Cela aurait pu être le titre du documentaire : les milliardaires russes se sont servi des paradis fiscaux qu’offrait le capitalisme occidental et cela continue encore aujourd’hui, malgré les sanctions. C’est notamment le cas à Chypre, par exemple. Il ne faut pas oublier cette réalité, et c’est ce que j’ai voulu souligner dans le film.

Comment expliquer les morts suspectes de nombre d’oligarques ?

Pour l’instant, nous n’avons pas vraiment de réponse à cette question. [L'ancien oligarque] Sergueï Pougatchev estime qu’il s’agit de « nettoyage d’archives », d’intimidation envers ceux qui seraient tentés de parler ou de collaborer avec les autorités occidentales.

Bien sûr, il s’agit de la version de Pougatchev, qui a, par le passé, participé au système. Cela vaut ce que cela vaut, car il n’y a pas de preuves, mais c’est tout de même un homme qui était à l’intérieur de la machine. Il estime que ces oligarques savaient beaucoup de choses et que le régime russe ne veut pas prendre de risques.

Pourquoi avoir pris le parti de raconter le parcours de Vladimir Poutine sous l’angle des oligarques ?

En effectuant ce travail, j’ai véritablement eu l’impression d’aller derrière le rideau, en coulisses. Nous sommes en plein milieu de la guerre, et tout le monde cherche des clefs idéologiques pour comprendre le régime de Poutine.

A mon sens, il faut plutôt se mettre sur la piste de l’argent. Lorsque l’on expose les flux financiers, on révèle la vraie nature d’un régime beaucoup plus efficacement qu’en essayant de disséquer l’idéologie ou les discours politiques. C’est l’argent qui vous dit la vérité des choses. Là, nous sommes dans la réalité du poutinisme, qui est une fusion entre l’ultra-libéralisme économique, un autoritarisme politique, et une certaine forme de banditisme.

Fric et nouvelles technologies : Les plates-formes pillent les opérateurs et créateurs de contenus

Fric et nouvelles technologies : Les plates-formes pillent les opérateurs et créateurs de contenus


L’économiste Edmond Baranes considère, dans une tribune au « Monde », que le coût des investissements dans les télécoms repose sur les seuls opérateurs, alors que les plates-formes en sont les premières bénéficiaires.

La croissance vertigineuse du trafic de données a rendu les relations entre les opérateurs de télécommunications et les géants du numérique de plus en plus délicates. La poule aux œufs d’or est en effet le contenu, de la vidéo aux jeux, de la diffusion en direct aux publications sur les réseaux sociaux. Or, les entreprises qui sont chargées de délivrer ce contenu ne sont pas celles qui le monétisent.

La diffusion de contenu nécessite une infrastructure de réseau de qualité, intensive en capital et déployée principalement par les opérateurs télécoms. Le besoin d’investissement pour atteindre les objectifs de connectivité fixés par l’Union européenne est estimé à au moins 174 milliards d’euros supplémentaires. Ce financement et celui nécessaire au fonctionnement et à la maintenance des réseaux proviennent de l’industrie européenne des télécoms. Le modèle économique de ces opérateurs repose principalement sur un côté du marché : les consommateurs, facturés chaque mois.

De l’autre côté du marché, les fournisseurs de contenus ont connu une croissance économique remarquable en s’appuyant sur cette infrastructure. Les géants Facebook, Amazon, Netflix et Google ont développé des modèles commerciaux sophistiqués qui leur permettent de gagner de l’argent grâce à la publicité, à la monétisation des données et aux services offerts (vidéo premium, plates-formes en ligne).

Il serait facile d’en conclure que les opérateurs devraient simplement faire évoluer leur modèle en mobilisant les deux faces du marché : les consommateurs et les offreurs de contenus. Mais cela restera très peu probable en l’absence d’intervention réglementaire en raison du déséquilibre entre les pouvoirs de marché des acteurs. Le secteur des télécoms est fragmenté entre des opérateurs relativement petits, alors que les plates-formes numériques se développent à l’échelle mondiale à grande vitesse. Les relations commerciales ne sont donc clairement pas équilibrées, non sans impact négatif sur le fonctionnement efficace du marché.

Une des hypothèses testées par la Commission européenne est le partage des coûts de réseau entre entreprises numériques et opérateurs. L’intuition est simple : la diffusion des contenus, principalement monétisée par ceux qui les fournissent, génère des coûts pour les opérateurs.

Football et société: La folie du foot fric

Football et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champions internationaux dans des disciplines considérées comme marginales.Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société. Mais c’est aussi parfois un moment d’union nationale qui fait oublier le reste. NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
________
Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Coupe du monde 2022 : Le fric foot écarte les classes populaires

Coupe du monde 2022 : Le fric foot écarte les classes populaires

«L’essayiste Christophe Guilluy raconte que dans un nombre croissant d’arrondissements de Paris, les classes populaires ont été expulsées, comme elles ont été expulsées du Parc des Princes.»

Auteur du livre «Au cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux», le journaliste Jean-Baptiste Forray voit dans les critiques adressées à la Coupe du Monde 2022 le signe de la fracture entre les «somewhere» et les «anywhere» (les gens de partout). ( intreview du Figaro)

Journaliste à La Gazette des Communes, Jean-Baptiste Forray est l’auteur du livre-enquête Au cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux (2022, éd. du Cerf).

La Coupe du monde qui démarre est l’une des plus contestées de l’histoire. Derrière les critiques sur les conditions d’organisation, faut-il y voit un ras-le-bol plus large du « foot business » sous sa forme la plus aboutie ?

Jean-Baptiste FORRAY. – Évidemment. Cette Coupe du monde va coûter 187 milliards d’euros, contre 1,3 milliard pour la France en 1998. Entre le coût des places et les stades high-tech, climatisés, qui pour certains seront démontés dans quelques mois, cet événement génère une jacquerie sans précédent.
Le contraste est fort entre le Qatar et les deux précédents organisateurs, la Russie et le Brésil, qui ont une vraie tradition de football et une histoire politique autre. Ce pays, incarne en quelque sorte la classification de l’essayiste britannique David Goodhart, ce sont des «anywhere» en matière de football ; en opposition aux «somewhere», les supporters ancrés dans un territoire.

Ces dernières années, le foot français a été l’objet de nombreuses réformes, comme le passage à venir d’une Ligue 1 de 20 à 18 clubs… Doit-on y voir une volonté de réserver l’élite à un lot de clubs plus «privilégiés» ?
Oui, c’est la tendance à l’œuvre depuis quelques années. Mais il existe certains pôles de résistance à cette évolution assez forts, incarnés par les supporters. C’est la raison pour laquelle les instances tentent à tout prix de les contourner.
Par-delà la question du passage d’une Ligue 1 de 20 à 18 clubs, le fait majeur de ces quinze dernières années dans le championnat de France reste le rachat du PSG, qui peut d’une certaine manière ressembler à un Disneyland du foot. Le prix des places a explosé, à l’image du coût de la vie dans la capitale. Dans son livre Les dépossédés, l’essayiste Christophe Guilluy raconte que dans un nombre croissant d’arrondissements de Paris, les classes populaires ont été expulsées, comme elles ont été expulsées du Parc des Princes. Le tout, sans que sans que la mairie socialiste, ne trouve à redire. Aujourd’hui, on se rend au Parc des Princes comme on se rend à une partie de golf à Saint-Cloud ou à un concert des Rolling Stones dans une loge premium. C’est devenu un spectacle globalisé.
Le PSG n’est pas le seul exemple de cette gentrification. David Peace, dans son roman Rouge ou mort, retrace l’histoire de Bill Shankly, l’entraîneur mythique de Liverpool de 1959 à 1974, un ancien mineur, socialiste de cœur, qui disait : «Le football n’est pas une question de vie ou de mort, c’est beaucoup plus que ça». Le football était d’une certaine façon la religion laïque du prolétariat. À Liverpool, le prix des places a augmenté de 1100% entre les années 1990 et aujourd’hui. Comme à Paris, toute une population a été a été mise hors du jeu.

La Coupe du monde fait renaître chez beaucoup de gens la nostalgie du foot populaire. Ou du moins, du foot d’avant.

En 1997, à l’occasion d’un quart de finale de Coupe d’Europe, les enfants de Liverpool Robbie Fowler et Steve McManaman ont exhibé un t-shirt en soutien aux dockers de leur ville en grève. La FIFA les a sanctionnés, en prétendant qu’elle ne tolérait aucune manifestation politique. En revanche, elle s’accommode très bien du «foot business».
Ce déclin du foot populaire, en France, s’inscrit-il dans un cadre politique plus large ?
Oui, et elle s’inscrit notamment dans un clivage territorial plus large entre les «somewhere» et les «anywhere». Le charme du foot français, comme ailleurs, c’est que les équipes fanion des petites villes peuvent tenir la dragée haute aux gros du championnat. C’est la potentielle victoire des sous-préfectures sur les métropoles, à l’image du RC Lens, champion de France 1998, qui connaît un regain de forme cette saison.

De ce point de vue, la Coupe du monde fait renaître chez beaucoup de gens la nostalgie du foot populaire. Ou du moins, du foot d’avant. Une forme de paradis perdu de l’enfance avec ces perdants magnifiques et ces folles épopées humaines, à l’image de celle des Verts en 1976.

En quoi le cas du FC Sochaux illustre-t-il cette évolution du football ?
J’ai écrit mon livreAu cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux après avoir entendu une déclaration de la directrice des partenariats de et du sponsoring de Peugeot interrogées depuis une loge VIP à Roland-Garros sur le partenariat entre la marque au lion et le célèbre tournoi de tennis, en 2019. Quand un journaliste d’Europe 1 lui a demandé ce qui allait advenir du FC Sochaux-Montbéliard, elle lui a fait la réponse suivante : «Le football, c’est un sport qui ne va pas trop avec nos valeurs. Il véhicule des valeurs populaires, alors que nous, on essaie de monter en gamme».
Cette déclaration dépasse le cadre du football et illustre l’abandon des classes populaires par les élites globalisées. Les supporters de Sochaux, historiquement liés à Peugeot, sont ainsi traités comme une quantité négligeable. Ces propos laissent penser que les fans sentent sans doute trop l’huile de vidange pour les décideurs parisiens du groupe Peugeot. D’ailleurs, la marque a lâché le club en 2014.

La critique du «foot business» n’est-elle pas aussi ancienne que l’histoire du foot ?
Je pense, oui. Si on prend l’exemple de Sochaux, c’était un club dirigé jadis par la famille Peugeot, une vieille famille protestante qui n’avait pas du tout la méfiance que peuvent avoir les catholiques vis-à-vis de l’argent. Le FC Sochaux a été à l’avant-garde de la professionnalisation du foot en France. Dès les années 30, des joueurs ont commencé à être rémunérés pour leur activité sportive. Le club était constitué de pléthore d’internationaux. C’était un peu les PSG de l’époque. Mais les sommes n’étaient évidemment pas les mêmes et les joueurs ressemblaient davantage au noyau dur de supporters dans leur attitude. On pouvait encore discuter avec eux après les entraînements.
Quand la grande équipe de Sochaux se qualifie en demi-finale de Coupe d’Europe 1981, l’équipe ressemblait aux salariés de Peugeot, aux ouvriers de la «Peuge». Il y avait en son sein le Yougoslave Salih Tsitso Durkalić, à l’image de la diaspora yougoslave qui travaillait dans les ateliers de l’usine. L’augmentation des salaires a créé de la distance. Aujourd’hui, les joueurs sont aussi entourés d’une armée de communicants et d’avocats spécialisés dans l’optimisation fiscale ou dans le Royaume. On est loin des «prolos» du foot et de ce sport comme vecteur d’intégration.

Sport et société: La folie du foot fric

Sport et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champion internationaux dans des disciplines considérées comme marginales.Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Société: La folie du foot fric

Société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

La folie du foot fric

La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) ( dans la Tribune)

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.
La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.
Piketty au point de penalty

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.
Tribunes vides
Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
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Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Mettre fin au foot fric ?

Mettre fin au foot fric ?

 

Les affaires Pogba, Diallo, Le Graët et les polémiques récentes sont révélatrices d’un système qui vit en vase clos, s’autorisant à fonctionner avec ses propres règles et ses propres valeurs, en déconnexion complète avec les évolutions du reste de la société estime un papier du monde.

 

Reste qu’il sera bien difficile de s’attaquer à la citadelle du foot fric. Le football professionnel est en effet complètement drogué à l’argent facile qui permet de s’affranchir des réalités et contraintes sociétales NDLR 

 

Dire que le football français traverse une mauvaise passe tient de la litote, pas tant sur le terrain que dans l’arrière-cour de la discipline, qui révèle des situations consternantes. Depuis plusieurs semaines, une succession d’affaires met en lumière des pratiques qui interrogent sur le comportement des instances, des clubs, des joueurs et de leur entourage. Aveuglés par l’argent roi et les rêves de notoriété, les moins scrupuleux ont fini par développer un sentiment trompeur d’impunité.

L’international français Paul Pogba se retrouve ainsi au cœur d’une affaire dans laquelle son frère, accusé d’avoir tenté de le faire chanter, vient d’être mis en examen pour extorsion en bande organisée et participation à une association de malfaiteurs.

La joueuse du Paris-Saint-Germain (PSG) Aminata Diallo, elle, a été mise en examen pour « violences aggravées » et « association de malfaiteurs » après l’agression, le 4 novembre 2021, de son ex-coéquipière, Kheira Hamraoui. Comme dans l’affaire Pogba se pose la question de l’influence toxique des entourages dans un cocktail où manque de maturité, appât du gain et système clanique finissent par faire dérailler les plus fragiles. Dans le cas Diallo s’ajoute l’absence de soutien du club parisien à l’une de ses joueuses agressées à coups de barre de fer.

Dans un autre registre, le président de la Fédération française de football (FFF), Noël Le Graët, est accusé d’avoir envoyé des SMS à caractère sexuel. En 2021, cette même FFF avait été condamnée aux prud’hommes pour des faits de harcèlement sexuel reprochés à son directeur financier, ce qui, au sein de l’instance, ne lui avait valu qu’un simple rappel à l’ordre.

Sur un tout autre plan, chacun se souvient de la polémique soulevée début septembre par Christophe Galtier, l’entraîneur de l’équipe masculine du PSG. Interrogé sur le fait de savoir si le club envisageait de trouver des moyens de déplacement alternatifs à l’avion afin de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique, il avait répondu par une mauvaise plaisanterie, en expliquant que l’équipe réfléchissait à l’utilisation de chars à voile et provoquant l’hilarité de son joueur vedette, Kylian Mbappé, assis à ses côtés.

Quand la ministre des sports, Amélie Oudéa-Castéra, proposait, fin août, que la discipline participe à l’effort national de sobriété énergétique en mettant fin aux matchs nocturnes, le milieu du foot lui a fait savoir qu’il était davantage préoccupé par les contrats qui le liaient aux diffuseurs télévisuels que par les pénuries d’électricité.

Tous ces faits n’ont pas la même ampleur ni la même gravité. Toutefois, ils sont révélateurs, chacun à leur manière, d’un système qui vit en vase clos, s’autorisant à fonctionner avec ses propres règles et ses propres valeurs, en déconnexion complète avec les évolutions du reste de la société.

A cet égard, dans moins de deux mois, débute au Qatar une Coupe du monde dont on sait déjà qu’elle a fait l’objet d’une attribution scandaleuse, sur la forme et sur le fond, du point de vue des droits humains et de l’environnement. Aujourd’hui, la société manifeste un degré élevé d’exigence morale et éthique à l’égard des entreprises, du monde du spectacle ou de la politique. Il est temps que le football ne reste pas une planète à part et fasse l’objet des mêmes exigences.

Métavers : Pompe à données et à fric

Métavers :  Pompe à données et à fric
Loin de l’idéal du web3 décentralisé, Mark Zuckerberg voit surtout le métavers comme un relais de croissance pour son empire des réseaux sociaux. Un moyen de relancer son business publicitaire menacé, de devenir un acteur du paiement grâce aux NFT, et surtout de se positionner comme une porte d’entrée incontournable dans ce nouvel internet grâce à ses casques Oculus Quest et son Quest Store. ( un papier de la Tribune, extrait)

Le métavers est-il vraiment le futur d’Internet et l’avènement d’un nouveau monde « ouvert et décentralisé » où le réel et le virtuel s’entremêleront dans une fluidité parfaite ? Ou est-ce simplement un coup marketing génial <https://www.latribune.fr/technos-medias/innovation-et-start-up/realite-virtuelle-le-metavers-de-facebook-a-mi-chemin-entre-le-pari-fou-et-le-coup-marketing-894679.html>pour rendre désirable l’utilisation de la réalité virtuelle et augmentée, technologies qui arriveront enfin à maturité dans les prochaines années, pour les transformer en machines à cash et conforter au passage les positions dominantes de certains géants actuels du numérique ? La question mérite d’être posée au regard de la stratégie affichée par les acteurs les plus entreprenants sur le sujet, à commencer par le bien nommé Meta <https://www.latribune.fr/technos-medias/facebook-le-groupe-va-s-appeler-meta-895373.html>, la maison-mère de Facebook, Instagram, Messenger et WhatsApp depuis la fin de l’année 2021.
Plus qu’une coqueluche, le métavers est carrément devenu la nouvelle raison d’être de Meta, et l’obsession de son directeur général, Mark Zuckerberg. L’ensemble du business de l’entreprise pivote dans cet univers et ses nouvelles applications « révolutionnaires ». Persuadé de longue date que la réalité virtuelle et augmentée vont refaçonner les interactions sociales et ouvrir de nouvelles opportunités publicitaires pour les marques, Mark Zuckerberg veut que Meta devienne la plateforme de référence de ce web3. Le directeur général de Méta s’est engagé à investir 10 milliards de dollars par an <https://www.latribune.fr/technos-medias/facebook-en-plein-scandale-promet-10-000-emplois-a-l-ue-pour-batir-son-metaverse-894595.html> dans la prochaine décennie pour façonner ce monde virtuel et immersif rempli d’avatars.
Autrement dit, Zuckerberg veut éviter la ringardisation et l’effacement progressif de ses réseaux sociaux, qui dominent actuellement le web2. L’idée est de profiter de leur puissance -chacun regroupe entre 2 et 3 milliards d’utilisateurs actifs par mois dans le monde- pour que les nouveaux usages du métavers se démocratisent aussi grâce et avec eux. L’objectif est en fait de reproduire pour le web3 le modèle du web2 qui a si bien réussi aux Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) : concentrer les usages numériques autour de quelques plateformes dominantes, structurantes et incontournables. Et tant pis pour l’énorme contradiction entre l’idéal ouvert et décentralisé du web3 et la stratégie de plateformisation du métavers que Mark Zuckerberg souhaite imposer…

 

 

Société-Grand âge : une pompe à fric ?

Société-Grand âge : une pompe à fric ?

 

 

Les pouvoirs publics se réveillent par rapport au douloureux sujet de la dépendance et de l’exploitation qui en est faite parfois dans certains EHPAD privés.  mais  le réveil est un peu tardif dans la mesure où des 2017 il avait été promis un grand débat et une loi relative à la dépendance. Une loi qui traiterait de la prise en charge des plus âgés en particulier de ceux qui présentent des thérapies lourdes. Certains peuvent évidemment le plus longtemps possible être maintenu à domicile mais les services sont notoirement insuffisants, mal organisés et les personnels mal payés.

Pourtant le cout à domicile est moitié moins que celui en EHPAD. À domicile le coût en moyenne et d’environ  1000 € pour un minimum de 2000 € en EHPAD. Et dans les EHPAD privés le coût de la pension mensuelle peut dépasser les 5000 €. Compte tenu de l’état de dépendance des résidents qui rentrent de plus en plus tard en EHPAD (à 85 ans aujourd’hui au lieu de 75 ans il y a une vingtaine d’années) la demande d’accompagnement et de soins est autrement plus importante. Et l’objectif serait en moyenne de disposer d’un salarié pour un résident. Il faut en effet Intégrer les maladies, les repos, les grossesses, les formations etc. des salariés. Cinq à six personnes sont nécessaires pour assurer en permanence un seul poste. La différence de compétitivité des EHPAD privés se fait essentiellement sur la réduction des effectifs. Une activité d’ailleurs particulièrement rentable avec de très grandes sociétés internationales présentes sur environ 25 % de ce marché.

Suite aux dénonciations de maltraitance concernant le groupe Orpéa, les pouvoirs publics durcissent enfin le temps

Brigitte Bourguignon se veut ferme. Quelques heures après avoir reçu les dirigeants du groupe Orpea, gravement mis en cause dans le livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet pour de graves dysfonctionnements dans ses établissements, la ministre déléguée chargée de l’Autnomie l’a martelé à l’antenne de BFMTV, « le grand âge, ce n’est pas une pompe à fric. »

Durant son interview, cette dernière a confirmé que le gouvernement avait lancé deux enquêtes à ce sujet et que plusieurs propositions étaient en cours afin de prévenir les maltraitances en Ehpad.

 

Il convient cependant de ne pas procéder par amalgame car certains EHPAD notamment publics offrent une haute qualité de service avec un dévouement exceptionnel d’un personnel pas toujours récompensé financièrement.

Grand âge : une pompe à fric ?

Grand âge : une pompe à fric ?

 

 

Les pouvoirs publics se réveillent par rapport au douloureux sujet de la dépendance et de l’exploitation qui en est faite parfois dans certains EHPAD privés.  mais  le réveil est un peu tardif dans la mesure où des 2017 il avait été promis un grand débat et une loi relative à la dépendance. Une loi qui traiterait de la prise en charge des plus âgés en particulier de ceux qui présentent des thérapies lourdes. Certains peuvent évidemment le plus longtemps possible être maintenu à domicile mais les services sont notoirement insuffisants, mal organisés et les personnels mal payés.

Pourtant le cout à domicile est moitié moins que celui en EHPAD. À domicile le coût en moyenne et d’environ  1000 € pour un minimum de 2000 € en EHPAD. Et dans les EHPAD privés le coût de la pension mensuelle peut dépasser les 5000 €. Compte tenu de l’état de dépendance des résidents qui rentrent de plus en plus tard en EHPAD (à 85 ans aujourd’hui au lieu de 75 ans il y a une vingtaine d’années) la demande d’accompagnement et de soins est autrement plus importante. Et l’objectif serait en moyenne de disposer d’un salarié pour un résident. Il faut en effet Intégrer les maladies, les repos, les grossesses, les formations etc. des salariés. Cinq à six personnes sont nécessaires pour assurer en permanence un seul poste. La différence de compétitivité des EHPAD privés se fait essentiellement sur la réduction des effectifs. Une activité d’ailleurs particulièrement rentable avec de très grandes sociétés internationales présentes sur environ 25 % de ce marché.

Suite aux dénonciations de maltraitance concernant le groupe Orpéa, les pouvoirs publics durcissent enfin le temps

Brigitte Bourguignon se veut ferme. Quelques heures après avoir reçu les dirigeants du groupe Orpea, gravement mis en cause dans le livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet pour de graves dysfonctionnements dans ses établissements, la ministre déléguée chargée de l’Autnomie l’a martelé à l’antenne de BFMTV, « le grand âge, ce n’est pas une pompe à fric. »

Durant son interview, cette dernière a confirmé que le gouvernement avait lancé deux enquêtes à ce sujet et que plusieurs propositions étaient en cours afin de prévenir les maltraitances en Ehpad.

 

Il convient cependant de ne pas procéder par amalgame car certains EHPAD notamment publics offrent une haute qualité de service avec un dévouement exceptionnel d’un personnel pas toujours récompensé financièrement.

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