Archive pour le Tag 'fric'

Football et société: La folie du foot fric

Football et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champions internationaux dans des disciplines considérées comme marginales.Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société. Mais c’est aussi parfois un moment d’union nationale qui fait oublier le reste. NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
________
Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Coupe du monde 2022 : Le fric foot écarte les classes populaires

Coupe du monde 2022 : Le fric foot écarte les classes populaires

«L’essayiste Christophe Guilluy raconte que dans un nombre croissant d’arrondissements de Paris, les classes populaires ont été expulsées, comme elles ont été expulsées du Parc des Princes.»

Auteur du livre «Au cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux», le journaliste Jean-Baptiste Forray voit dans les critiques adressées à la Coupe du Monde 2022 le signe de la fracture entre les «somewhere» et les «anywhere» (les gens de partout). ( intreview du Figaro)

Journaliste à La Gazette des Communes, Jean-Baptiste Forray est l’auteur du livre-enquête Au cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux (2022, éd. du Cerf).

La Coupe du monde qui démarre est l’une des plus contestées de l’histoire. Derrière les critiques sur les conditions d’organisation, faut-il y voit un ras-le-bol plus large du « foot business » sous sa forme la plus aboutie ?

Jean-Baptiste FORRAY. – Évidemment. Cette Coupe du monde va coûter 187 milliards d’euros, contre 1,3 milliard pour la France en 1998. Entre le coût des places et les stades high-tech, climatisés, qui pour certains seront démontés dans quelques mois, cet événement génère une jacquerie sans précédent.
Le contraste est fort entre le Qatar et les deux précédents organisateurs, la Russie et le Brésil, qui ont une vraie tradition de football et une histoire politique autre. Ce pays, incarne en quelque sorte la classification de l’essayiste britannique David Goodhart, ce sont des «anywhere» en matière de football ; en opposition aux «somewhere», les supporters ancrés dans un territoire.

Ces dernières années, le foot français a été l’objet de nombreuses réformes, comme le passage à venir d’une Ligue 1 de 20 à 18 clubs… Doit-on y voir une volonté de réserver l’élite à un lot de clubs plus «privilégiés» ?
Oui, c’est la tendance à l’œuvre depuis quelques années. Mais il existe certains pôles de résistance à cette évolution assez forts, incarnés par les supporters. C’est la raison pour laquelle les instances tentent à tout prix de les contourner.
Par-delà la question du passage d’une Ligue 1 de 20 à 18 clubs, le fait majeur de ces quinze dernières années dans le championnat de France reste le rachat du PSG, qui peut d’une certaine manière ressembler à un Disneyland du foot. Le prix des places a explosé, à l’image du coût de la vie dans la capitale. Dans son livre Les dépossédés, l’essayiste Christophe Guilluy raconte que dans un nombre croissant d’arrondissements de Paris, les classes populaires ont été expulsées, comme elles ont été expulsées du Parc des Princes. Le tout, sans que sans que la mairie socialiste, ne trouve à redire. Aujourd’hui, on se rend au Parc des Princes comme on se rend à une partie de golf à Saint-Cloud ou à un concert des Rolling Stones dans une loge premium. C’est devenu un spectacle globalisé.
Le PSG n’est pas le seul exemple de cette gentrification. David Peace, dans son roman Rouge ou mort, retrace l’histoire de Bill Shankly, l’entraîneur mythique de Liverpool de 1959 à 1974, un ancien mineur, socialiste de cœur, qui disait : «Le football n’est pas une question de vie ou de mort, c’est beaucoup plus que ça». Le football était d’une certaine façon la religion laïque du prolétariat. À Liverpool, le prix des places a augmenté de 1100% entre les années 1990 et aujourd’hui. Comme à Paris, toute une population a été a été mise hors du jeu.

La Coupe du monde fait renaître chez beaucoup de gens la nostalgie du foot populaire. Ou du moins, du foot d’avant.

En 1997, à l’occasion d’un quart de finale de Coupe d’Europe, les enfants de Liverpool Robbie Fowler et Steve McManaman ont exhibé un t-shirt en soutien aux dockers de leur ville en grève. La FIFA les a sanctionnés, en prétendant qu’elle ne tolérait aucune manifestation politique. En revanche, elle s’accommode très bien du «foot business».
Ce déclin du foot populaire, en France, s’inscrit-il dans un cadre politique plus large ?
Oui, et elle s’inscrit notamment dans un clivage territorial plus large entre les «somewhere» et les «anywhere». Le charme du foot français, comme ailleurs, c’est que les équipes fanion des petites villes peuvent tenir la dragée haute aux gros du championnat. C’est la potentielle victoire des sous-préfectures sur les métropoles, à l’image du RC Lens, champion de France 1998, qui connaît un regain de forme cette saison.

De ce point de vue, la Coupe du monde fait renaître chez beaucoup de gens la nostalgie du foot populaire. Ou du moins, du foot d’avant. Une forme de paradis perdu de l’enfance avec ces perdants magnifiques et ces folles épopées humaines, à l’image de celle des Verts en 1976.

En quoi le cas du FC Sochaux illustre-t-il cette évolution du football ?
J’ai écrit mon livreAu cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux après avoir entendu une déclaration de la directrice des partenariats de et du sponsoring de Peugeot interrogées depuis une loge VIP à Roland-Garros sur le partenariat entre la marque au lion et le célèbre tournoi de tennis, en 2019. Quand un journaliste d’Europe 1 lui a demandé ce qui allait advenir du FC Sochaux-Montbéliard, elle lui a fait la réponse suivante : «Le football, c’est un sport qui ne va pas trop avec nos valeurs. Il véhicule des valeurs populaires, alors que nous, on essaie de monter en gamme».
Cette déclaration dépasse le cadre du football et illustre l’abandon des classes populaires par les élites globalisées. Les supporters de Sochaux, historiquement liés à Peugeot, sont ainsi traités comme une quantité négligeable. Ces propos laissent penser que les fans sentent sans doute trop l’huile de vidange pour les décideurs parisiens du groupe Peugeot. D’ailleurs, la marque a lâché le club en 2014.

La critique du «foot business» n’est-elle pas aussi ancienne que l’histoire du foot ?
Je pense, oui. Si on prend l’exemple de Sochaux, c’était un club dirigé jadis par la famille Peugeot, une vieille famille protestante qui n’avait pas du tout la méfiance que peuvent avoir les catholiques vis-à-vis de l’argent. Le FC Sochaux a été à l’avant-garde de la professionnalisation du foot en France. Dès les années 30, des joueurs ont commencé à être rémunérés pour leur activité sportive. Le club était constitué de pléthore d’internationaux. C’était un peu les PSG de l’époque. Mais les sommes n’étaient évidemment pas les mêmes et les joueurs ressemblaient davantage au noyau dur de supporters dans leur attitude. On pouvait encore discuter avec eux après les entraînements.
Quand la grande équipe de Sochaux se qualifie en demi-finale de Coupe d’Europe 1981, l’équipe ressemblait aux salariés de Peugeot, aux ouvriers de la «Peuge». Il y avait en son sein le Yougoslave Salih Tsitso Durkalić, à l’image de la diaspora yougoslave qui travaillait dans les ateliers de l’usine. L’augmentation des salaires a créé de la distance. Aujourd’hui, les joueurs sont aussi entourés d’une armée de communicants et d’avocats spécialisés dans l’optimisation fiscale ou dans le Royaume. On est loin des «prolos» du foot et de ce sport comme vecteur d’intégration.

Sport et société: La folie du foot fric

Sport et société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

On peut aimer le sport et le foot en particulier ( en faire est encore mieux) et se montrer critique vis-à-vis des dérives financières invraisemblables du football. À comparer aussi à la situation souvent assez misérable de champion internationaux dans des disciplines considérées comme marginales.Le football est sans doute le reflet d’inégalités plus générales dans la société NDLR

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
________
Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Société: La folie du foot fric

Société: La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)( dans la Tribune)

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.

La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.

Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
________
Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

La folie du foot fric

La folie du foot fric

« L’hypermodernité » du ballon rond se caractérise par de fortes inégalités, des profils inédits d’investisseurs, les stratégies de mondialisation des grands clubs et l’arrivée de nouveaux diffuseurs. Par Luc Arrondel, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) ( dans la Tribune)

L’idée que le football est le « miroir » de la société est souvent avancée dans les salons et s’avère plutôt exacte du point de vue de son économie. Branko Milanovic, spécialiste reconnu des inégalités et fin analyste du ballon rond, l’observe bien : « Le football a été un miroir de la société, où les inégalités se sont accrues de manière exponentielle au cours des trois dernières décennies », explique-t-il dans les colonnes du magazine Forbes.

À l’heure d’une Coupe du monde décriée pour ses conditions d’organisation sociales et environnementales, le football du XXIe siècle n’échappe pas, non plus, aux grands débats économiques actuels, notamment celui de la croissance et des inégalités. Selon nous, toutes ces interrogations sont les symptômes d’une transformation historique et économique de ce sport.
D’après le sociologue anglais Richard Giulianotti, le football a connu quatre périodes dans son histoire. La période traditionnelle s’étend de la mise en place des règles à la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale ; la modernité précoce correspond à l’entre-deux-guerres où s’inventent les compétitions ; la modernité tardive, celle qui voit se construire la professionnalisation, se clôt à la fin des années 1980 ; alors que s’ouvre la période postmoderne, celle de la médiatisation, de la libéralisation du marché du travail et de la croissance.

La thèse que nous défendons dans notre dernier ouvrage est que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère que nous qualifions d’ »hypermoderne ».

Quatre caractéristiques nous permettent de définir cette hypermodernité. La première concerne les inégalités économiques qui se sont fortement creusées au cours des décennies précédentes. Elles s’observent d’une part entre les clubs d’une même ligue, d’autre part entre les différents championnats, et ont pour conséquence sportive, des compétitions, nationales comme internationales, dominées par quelques équipes beaucoup plus riches que les autres. Elles concernent aussi la distribution des salaires des footballeurs, avec une segmentation de plus en plus forte du marché du travail par rapport aux stars, voire aux superstars.

La deuxième caractéristique tient à l’arrivée de nouveaux profils d’investisseurs, à savoir des fonds d’investissement publics et privés, souvent américains pour ces derniers et déjà propriétaires de franchises de sport collectif outre-Atlantique. Par rapport à la période précédente, ce changement dans la « propriété » peut avoir au moins deux conséquences : le football devra dorénavant être rentable financièrement que ce soit au niveau des clubs ou des ligues ; se constituent par ailleurs des « galaxies » de clubs autour d’un même propriétaire. Les richissimes acquéreurs émiratis de Manchester City ont, par exemple, progressivement fait entrer depuis 2008 dans leur « City football group » onze autres clubs, dont le New York FC, Palerme et Troyes.
La troisième concerne la stratégie de mondialisation des grands clubs et des ligues qui leur assurent des revenus commerciaux et des droits de diffusion internationaux de plus en plus conséquents. Enfin, la dernière caractéristique a trait à la demande de football proprement dite. Elle résulte de l’arrivée de nouveaux diffuseurs comme Amazon Prime en France, de la multiplication des plates-formes de diffusion et des nouveaux modes de consommation du football, notamment chez les jeunes générations.
Piketty au point de penalty

L’économie du football est ainsi devenue un domaine intéressant pour appliquer la grille d’analyse inspirée par le succès planétaire du livre de l’économiste Thomas Piketty Le Capital au XXIᵉ siècle, dont la première édition remonte à 2013. L’auteur y montrait que le thème de la répartition des richesses et celui des inégalités sont aujourd’hui au cœur de la société. Le football ne semble pas se soustraire à la règle.
Depuis les années 1990, le monde du ballon rond connaît une très forte croissance dans les principaux pays européens. Hors transferts, les revenus des clubs proviennent de quatre sources principales : les droits de retransmission, la billetterie, les sponsors et les produits dérivés (les ventes de maillot par exemple). Tous ont beaucoup augmenté depuis les années 1970 mais dans des proportions différentes : la billetterie, prédominante il y a cinquante ans, a progressivement vu sa part diminuer au profit des droits TV et du sponsoring dans les grands clubs européens.

Ce boom économique s’est accompagné d’une augmentation des inégalités entre les clubs, au niveau national et européen. Comme dans la société en général, cette croissance des inégalités concerne surtout le haut de la distribution. La part des revenus des clubs les plus huppés a augmenté dans le chiffre d’affaires des ligues, ce qui sportivement s’est traduit par une concentration accrue des titres. En première division allemande, par exemple, neuf clubs différents ont remporté la première division dans les années 1960, cinq dans les années 1990 et seulement deux depuis 2010.
Malgré les revenus croissants, l’économie du football reste pourtant une plus « petite économie » que ce que l’on pense. Surtout, jusqu’il y a peu, elle ne génère pas ou peu de profit pour ses actionnaires. Le fait est que de nombreux propriétaires, milliardaires ou fonds souverains, achètent des équipes bien souvent pour d’autres raisons que la simple rentabilité financière de leurs investissements : « soft power », nation branding ou encore philanthropie en sont les maîtres mots.

Lorsque sont liés football et inégalités, vient aussi à l’esprit la question des salaires des joueurs. L’idée qu’ils seraient « trop payés », au niveau individuel ou de la masse salariale des clubs, traverse le champ politique. La droite formule des critiques sociales, la gauche remet en cause le libéralisme qui les alimente : il y a, en tout cas, un certain consensus pour voir dans la rémunération des footballeurs une des sources des maux supposés de l’économie du football actuel.

Notons déjà que seule une toute petite partie des joueurs gagne des millions alors que la majorité a des carrières extrêmement courtes, environ quatre ans dans l’élite en moyenne. Par ailleurs, moins d’un transfert sur trois fait l’objet d’une transaction monétaire dans les cinq grands championnats (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) et environ un sur sept dans le monde entier.
Il n’en demeure pas moins qu’il existe de fortes inégalités entre les footballeurs et que celles-ci se sont également accrues. Baisser les salaires des superstars se heurte cependant à une impasse « morale ». Ces joueurs ont un talent très supérieur à la moyenne dont le coût pour les clubs est fortement convexe : les grandes équipes sont alors prêtes à payer très cher le « génie » de ces joueurs hors normes, talent unique que l’on ne peut « substituer » à celui de plusieurs joueurs « moyens ».

C’est, de plus, pour voir jouer ces derniers qu’un supporter paie sa place au stade, quand bien même cela nuit aux chances de voir leur équipe favorite gagner. De ce point de vue, si l’on adopte les principes philosophiques de John Rawls, les footballeurs superstars « méritent » leur rémunération : l’expression de leur talent contribue au bien-être de la « collectivité », notamment des milieux défavorisés. Daniel Cohen, directeur du département d’Économie de l’école normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, le formule ainsi dans une chronique écrite pour Le Nouvel Obs :
« le football est le seul cas où des jeunes, venus le plus souvent de milieux populaires, rackettent des milliardaires avec le consentement de ceux-ci. »
Comme le suggère le prolongement du contrat de Kylian Mbappé au Paris Saint-Germain, la tendance est à une augmentation des très hautes rémunérations susceptible de modifier le fonctionnement du marché du travail des footballeurs. On est vraisemblablement passé d’un système à deux segments, les superstars et les autres, à un système à trois segments : les quelques joueurs hyperstars, les superstars plus nombreuses et les autres.
Tribunes vides
Ce constat sur les inégalités défend-il l’idée d’un football en crise, dans un contexte postpandémique ? Contrairement à tout ce qui était annoncé par les prophètes en bois, ce que le coronavirus a changé dans le football, en dehors des difficultés financières qu’a subi toute l’économie, c’est rien ou pas grand-chose et on ne vit certainement pas l’apocalypse !
La « crise » la plus visible a été celle des supporters en raison du huis clos généralisé à partir de mars 2020 et durant toute la saison 2020-2021. Au-delà de ses aspects financiers, l’absence du public s’est fait sentir à deux niveaux. Sportivement, sans ce « douzième homme », on a pu se demander si cela devenait moins un avantage de jouer à domicile qu’à l’accoutumée. Profitant de cette « expérience naturelle », les économistes ont abouti à des conclusions nuancées en ce qui concerne le résultat des matchs, mais pas sur l’arbitrage. Les hommes en noir se sont montrés plus cléments pour l’équipe visiteuse dans les stades vides, révélant bien un rôle de « pression sociale » des supporters.

Surtout, cela donnait des retransmissions télévisuelles sans la saveur d’une ambiance. L’enseignement à en tirer est que cette dimension du « spectacle » à laquelle les supporters ne sont pas étrangers doit donc être prise en compte quand on mesure l’importance des droits TV dans les budgets des clubs. Maradona disait que « Jouer à huis clos, c’est comme jouer dans un cimetière ».
Les supporters ont récemment également pu être échaudés par la proposition de certains présidents de grands clubs de « faire sécession » à travers le projet (avorté) d’une Super League plus ou moins fermée. Ce projet récurrent, et relancé ces dernières semaines, d’un championnat européen illustre, selon nous, une nécessité économique de réformer les compétitions, évolution qui constitue sans doute l’un des principaux enjeux actuels du football professionnel. La création de la Super League, aboutissement de tous les éléments caractérisant l’hypermodernité du football, en constituerait alors « l’apothéose ».
________
Par Luc Arrondel, Économiste, directeur de recherche au CNRS, membre associé, Paris School of Economics – École d’économie de Paris et Richard Duhautois, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Mettre fin au foot fric ?

Mettre fin au foot fric ?

 

Les affaires Pogba, Diallo, Le Graët et les polémiques récentes sont révélatrices d’un système qui vit en vase clos, s’autorisant à fonctionner avec ses propres règles et ses propres valeurs, en déconnexion complète avec les évolutions du reste de la société estime un papier du monde.

 

Reste qu’il sera bien difficile de s’attaquer à la citadelle du foot fric. Le football professionnel est en effet complètement drogué à l’argent facile qui permet de s’affranchir des réalités et contraintes sociétales NDLR 

 

Dire que le football français traverse une mauvaise passe tient de la litote, pas tant sur le terrain que dans l’arrière-cour de la discipline, qui révèle des situations consternantes. Depuis plusieurs semaines, une succession d’affaires met en lumière des pratiques qui interrogent sur le comportement des instances, des clubs, des joueurs et de leur entourage. Aveuglés par l’argent roi et les rêves de notoriété, les moins scrupuleux ont fini par développer un sentiment trompeur d’impunité.

L’international français Paul Pogba se retrouve ainsi au cœur d’une affaire dans laquelle son frère, accusé d’avoir tenté de le faire chanter, vient d’être mis en examen pour extorsion en bande organisée et participation à une association de malfaiteurs.

La joueuse du Paris-Saint-Germain (PSG) Aminata Diallo, elle, a été mise en examen pour « violences aggravées » et « association de malfaiteurs » après l’agression, le 4 novembre 2021, de son ex-coéquipière, Kheira Hamraoui. Comme dans l’affaire Pogba se pose la question de l’influence toxique des entourages dans un cocktail où manque de maturité, appât du gain et système clanique finissent par faire dérailler les plus fragiles. Dans le cas Diallo s’ajoute l’absence de soutien du club parisien à l’une de ses joueuses agressées à coups de barre de fer.

Dans un autre registre, le président de la Fédération française de football (FFF), Noël Le Graët, est accusé d’avoir envoyé des SMS à caractère sexuel. En 2021, cette même FFF avait été condamnée aux prud’hommes pour des faits de harcèlement sexuel reprochés à son directeur financier, ce qui, au sein de l’instance, ne lui avait valu qu’un simple rappel à l’ordre.

Sur un tout autre plan, chacun se souvient de la polémique soulevée début septembre par Christophe Galtier, l’entraîneur de l’équipe masculine du PSG. Interrogé sur le fait de savoir si le club envisageait de trouver des moyens de déplacement alternatifs à l’avion afin de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique, il avait répondu par une mauvaise plaisanterie, en expliquant que l’équipe réfléchissait à l’utilisation de chars à voile et provoquant l’hilarité de son joueur vedette, Kylian Mbappé, assis à ses côtés.

Quand la ministre des sports, Amélie Oudéa-Castéra, proposait, fin août, que la discipline participe à l’effort national de sobriété énergétique en mettant fin aux matchs nocturnes, le milieu du foot lui a fait savoir qu’il était davantage préoccupé par les contrats qui le liaient aux diffuseurs télévisuels que par les pénuries d’électricité.

Tous ces faits n’ont pas la même ampleur ni la même gravité. Toutefois, ils sont révélateurs, chacun à leur manière, d’un système qui vit en vase clos, s’autorisant à fonctionner avec ses propres règles et ses propres valeurs, en déconnexion complète avec les évolutions du reste de la société.

A cet égard, dans moins de deux mois, débute au Qatar une Coupe du monde dont on sait déjà qu’elle a fait l’objet d’une attribution scandaleuse, sur la forme et sur le fond, du point de vue des droits humains et de l’environnement. Aujourd’hui, la société manifeste un degré élevé d’exigence morale et éthique à l’égard des entreprises, du monde du spectacle ou de la politique. Il est temps que le football ne reste pas une planète à part et fasse l’objet des mêmes exigences.

Métavers : Pompe à données et à fric

Métavers :  Pompe à données et à fric
Loin de l’idéal du web3 décentralisé, Mark Zuckerberg voit surtout le métavers comme un relais de croissance pour son empire des réseaux sociaux. Un moyen de relancer son business publicitaire menacé, de devenir un acteur du paiement grâce aux NFT, et surtout de se positionner comme une porte d’entrée incontournable dans ce nouvel internet grâce à ses casques Oculus Quest et son Quest Store. ( un papier de la Tribune, extrait)

Le métavers est-il vraiment le futur d’Internet et l’avènement d’un nouveau monde « ouvert et décentralisé » où le réel et le virtuel s’entremêleront dans une fluidité parfaite ? Ou est-ce simplement un coup marketing génial <https://www.latribune.fr/technos-medias/innovation-et-start-up/realite-virtuelle-le-metavers-de-facebook-a-mi-chemin-entre-le-pari-fou-et-le-coup-marketing-894679.html>pour rendre désirable l’utilisation de la réalité virtuelle et augmentée, technologies qui arriveront enfin à maturité dans les prochaines années, pour les transformer en machines à cash et conforter au passage les positions dominantes de certains géants actuels du numérique ? La question mérite d’être posée au regard de la stratégie affichée par les acteurs les plus entreprenants sur le sujet, à commencer par le bien nommé Meta <https://www.latribune.fr/technos-medias/facebook-le-groupe-va-s-appeler-meta-895373.html>, la maison-mère de Facebook, Instagram, Messenger et WhatsApp depuis la fin de l’année 2021.
Plus qu’une coqueluche, le métavers est carrément devenu la nouvelle raison d’être de Meta, et l’obsession de son directeur général, Mark Zuckerberg. L’ensemble du business de l’entreprise pivote dans cet univers et ses nouvelles applications « révolutionnaires ». Persuadé de longue date que la réalité virtuelle et augmentée vont refaçonner les interactions sociales et ouvrir de nouvelles opportunités publicitaires pour les marques, Mark Zuckerberg veut que Meta devienne la plateforme de référence de ce web3. Le directeur général de Méta s’est engagé à investir 10 milliards de dollars par an <https://www.latribune.fr/technos-medias/facebook-en-plein-scandale-promet-10-000-emplois-a-l-ue-pour-batir-son-metaverse-894595.html> dans la prochaine décennie pour façonner ce monde virtuel et immersif rempli d’avatars.
Autrement dit, Zuckerberg veut éviter la ringardisation et l’effacement progressif de ses réseaux sociaux, qui dominent actuellement le web2. L’idée est de profiter de leur puissance -chacun regroupe entre 2 et 3 milliards d’utilisateurs actifs par mois dans le monde- pour que les nouveaux usages du métavers se démocratisent aussi grâce et avec eux. L’objectif est en fait de reproduire pour le web3 le modèle du web2 qui a si bien réussi aux Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) : concentrer les usages numériques autour de quelques plateformes dominantes, structurantes et incontournables. Et tant pis pour l’énorme contradiction entre l’idéal ouvert et décentralisé du web3 et la stratégie de plateformisation du métavers que Mark Zuckerberg souhaite imposer…

 

 

Société-Grand âge : une pompe à fric ?

Société-Grand âge : une pompe à fric ?

 

 

Les pouvoirs publics se réveillent par rapport au douloureux sujet de la dépendance et de l’exploitation qui en est faite parfois dans certains EHPAD privés.  mais  le réveil est un peu tardif dans la mesure où des 2017 il avait été promis un grand débat et une loi relative à la dépendance. Une loi qui traiterait de la prise en charge des plus âgés en particulier de ceux qui présentent des thérapies lourdes. Certains peuvent évidemment le plus longtemps possible être maintenu à domicile mais les services sont notoirement insuffisants, mal organisés et les personnels mal payés.

Pourtant le cout à domicile est moitié moins que celui en EHPAD. À domicile le coût en moyenne et d’environ  1000 € pour un minimum de 2000 € en EHPAD. Et dans les EHPAD privés le coût de la pension mensuelle peut dépasser les 5000 €. Compte tenu de l’état de dépendance des résidents qui rentrent de plus en plus tard en EHPAD (à 85 ans aujourd’hui au lieu de 75 ans il y a une vingtaine d’années) la demande d’accompagnement et de soins est autrement plus importante. Et l’objectif serait en moyenne de disposer d’un salarié pour un résident. Il faut en effet Intégrer les maladies, les repos, les grossesses, les formations etc. des salariés. Cinq à six personnes sont nécessaires pour assurer en permanence un seul poste. La différence de compétitivité des EHPAD privés se fait essentiellement sur la réduction des effectifs. Une activité d’ailleurs particulièrement rentable avec de très grandes sociétés internationales présentes sur environ 25 % de ce marché.

Suite aux dénonciations de maltraitance concernant le groupe Orpéa, les pouvoirs publics durcissent enfin le temps

Brigitte Bourguignon se veut ferme. Quelques heures après avoir reçu les dirigeants du groupe Orpea, gravement mis en cause dans le livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet pour de graves dysfonctionnements dans ses établissements, la ministre déléguée chargée de l’Autnomie l’a martelé à l’antenne de BFMTV, « le grand âge, ce n’est pas une pompe à fric. »

Durant son interview, cette dernière a confirmé que le gouvernement avait lancé deux enquêtes à ce sujet et que plusieurs propositions étaient en cours afin de prévenir les maltraitances en Ehpad.

 

Il convient cependant de ne pas procéder par amalgame car certains EHPAD notamment publics offrent une haute qualité de service avec un dévouement exceptionnel d’un personnel pas toujours récompensé financièrement.

Grand âge : une pompe à fric ?

Grand âge : une pompe à fric ?

 

 

Les pouvoirs publics se réveillent par rapport au douloureux sujet de la dépendance et de l’exploitation qui en est faite parfois dans certains EHPAD privés.  mais  le réveil est un peu tardif dans la mesure où des 2017 il avait été promis un grand débat et une loi relative à la dépendance. Une loi qui traiterait de la prise en charge des plus âgés en particulier de ceux qui présentent des thérapies lourdes. Certains peuvent évidemment le plus longtemps possible être maintenu à domicile mais les services sont notoirement insuffisants, mal organisés et les personnels mal payés.

Pourtant le cout à domicile est moitié moins que celui en EHPAD. À domicile le coût en moyenne et d’environ  1000 € pour un minimum de 2000 € en EHPAD. Et dans les EHPAD privés le coût de la pension mensuelle peut dépasser les 5000 €. Compte tenu de l’état de dépendance des résidents qui rentrent de plus en plus tard en EHPAD (à 85 ans aujourd’hui au lieu de 75 ans il y a une vingtaine d’années) la demande d’accompagnement et de soins est autrement plus importante. Et l’objectif serait en moyenne de disposer d’un salarié pour un résident. Il faut en effet Intégrer les maladies, les repos, les grossesses, les formations etc. des salariés. Cinq à six personnes sont nécessaires pour assurer en permanence un seul poste. La différence de compétitivité des EHPAD privés se fait essentiellement sur la réduction des effectifs. Une activité d’ailleurs particulièrement rentable avec de très grandes sociétés internationales présentes sur environ 25 % de ce marché.

Suite aux dénonciations de maltraitance concernant le groupe Orpéa, les pouvoirs publics durcissent enfin le temps

Brigitte Bourguignon se veut ferme. Quelques heures après avoir reçu les dirigeants du groupe Orpea, gravement mis en cause dans le livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet pour de graves dysfonctionnements dans ses établissements, la ministre déléguée chargée de l’Autnomie l’a martelé à l’antenne de BFMTV, « le grand âge, ce n’est pas une pompe à fric. »

Durant son interview, cette dernière a confirmé que le gouvernement avait lancé deux enquêtes à ce sujet et que plusieurs propositions étaient en cours afin de prévenir les maltraitances en Ehpad.

 

Il convient cependant de ne pas procéder par amalgame car certains EHPAD notamment publics offrent une haute qualité de service avec un dévouement exceptionnel d’un personnel pas toujours récompensé financièrement.

Covid-Le père de Djokovic défend la liberté ou le sport fric?

Covid-Le père de Djokovic défend la liberté ou le sport fric?

 

 

D’après le père de Djokovic – (numéro un mondial du tennis qui refuse la vaccination), le fils serait le symbole même de la liberté mondiale ! Ce n’est évidemment pas la première fois que le paternel sublime la réussite de son fils et  le compare même à Jésus. Derrière les propos universalistes, le père défend surtout le fils tirelire et le sport fric.

 

La vérité est sans doute plus prosaïque, ce paternel défend surtout le fils tirelire qui risque d’être privé des revenus du tournoi d’Australie faute d’être vacciné. Le père de Djokovitch n’est malheureusement pas le seul parent à se préoccuper autant de la tirelire filiale voire  même à intervenir dans le champ sportif de leur descendance. La tirade du père laisse évidemment pantois face à l’hypocrisie et au ridicule qui atteint les sommets :: «Nole (le surnom de Djokovic) est le cœur de la Serbie, notre fierté. Notre fierté ils veulent la mettre à genoux, mais ils n’y arriveront pas ! Serbes, et toutes les autres nations libertaires du monde, le moment est venu d’arrêter d’être opprimés ! (…) Mon fils, enchaine-t-il, est en captivité mais il n’a jamais été aussi libre. Novak deviendra un symbole et un leader du monde libre, le leader des pays et des peuples opprimés. Même un petit pays héroïque comme la Serbie peut avoir le plus grand athlète de tous les temps. Vous pouvez être mis en prison aujourd’hui ou demain, mais la vérité trouve toujours son chemin. Novak se bat pour l’égalité de tous les peuples de la planète.»

 

On pourrait suggérer aux autorités d’attribuer le Nobel de la paix à ce père aussi aimant vis-à-vis de son fils et de son  pays ou alors le prix du ridicule et de l’hypocrisie.

 

Le foot fric à la dérive

Le foot fric à la dérive

 

Dans un article de la Tribune, le journaliste Pierre manière évoque la problématique du foot devenu business.

 

 

Le foot ne rapporte visiblement pas assez d’argent. C’est en tout cas ce constat qui a motivé l’aristocratie européenne du ballon rond à dégainer un nouveau projet : la Super League. Douze clubs parmi les plus puissants du continent – les espagnols du Real Madrid, du FC Barcelone et de l’Atletico Madrid, les italiens de la Juventus, de l’Inter Milan et du Milan AC, ainsi que les anglais Manchester United, Manchester City, Arsenal, Liverpool, Tottenham et Chelsea – se sont alliés pour créer une nouvelle compétition, rivale de l’actuelle Ligue des champions. La nouvelle, survenue dans la nuit de dimanche à lundi, a provoqué un séisme dans le monde du football. De fait, avec la Super League, cette aristocratie du ballon rond veut désormais vivre en vase clos, privilégier l’entre soi. Loin des préoccupations et difficultés des petits clubs, dont le faible niveau nuit au football champagne, dont les « douze » comptent abreuver les fans pour doper leurs revenus.

Car la Super League est une ligue quasi-fermée. Ses fondateurs y disposent d’une place à vie. Ils ne risquent pas d’en rater la moindre édition, au contraire de la Ligue des champions, réservée aux premières équipes des championnats nationaux. L’objectif est clair : en écartant les clubs moins prestigieux, les « douze » veulent multiplier les grosses affiches et les affrontements entre leurs joueurs stars pour faire flamber les droits de diffusion et séduire un public plus large, plus jeune. Une véritable cash-machine, mais pour eux seuls. « La Ligue des champions génère un peu plus de 3,5 milliards d’euros, rappelle Julien Pillot, professeur à l’Inseec. Si vous la remportez, vous pouvez gagner entre 80 et 120 millions d’euros au total. Avec les règles de la Super League, tous les participants encaissent d’emblée 250 millions d’euros chacun, juste parce qu’ils y participent ! Ils cherchent à la fois plus de pouvoir politique [en se détachant de l'UEFA, qui a la main sur les compétitions européennes, NDLR] et plus de rentrées d’argent sécurisées, puisqu’il n’y a plus d’aléa sportif. »

« Les riches aspirent toujours à être plus riches »

Et tant pis pour la vieille Ligue des champions, amenée, mécaniquement, à perdre de son aura en l’absence des grosses écuries européennes. Tant pis, aussi, pour les clubs les plus modestes, qui verront mécaniquement leurs rentrées d’argent se tarir sur la scène continentale. La Super League enterre aussi les rêves d’épopée des petits clubs. Les Monaco, Atalanta Bergame ou RB Leipzig, qui ont réalisé de beaux parcours ces dernières années, n’auront qu’à prier pour que les cadors de la Super League, qui souhaitent une compétition à 20 clubs, daignent un jour inviter ces va-nu-pieds à leur banquet.

Largement orchestré par Florentino Perez, le président du Real Madrid, le projet de Super League a suscité une vaste levée de boucliers. Entraîneur de Leeds et technicien respecté, l’Argentin Marcelo Bielsa a bien résumé la grogne : « Le problème fondamental, c’est que les riches aspirent toujours à être plus riches, sans tenir compte des conséquences pour les autres, a-t-il déclaré lundi, au micro de la chaîne Sky Sports. À mesure qu’ils acquièrent plus de pouvoir, ils commencent à exiger plus de privilèges. » Face à la colère de l’UEFA, mais surtout des fans – anglais en particulier -, et de plusieurs gouvernements dont la France et le Royaume-Uni, les douze « traîtres », ou « douze salopards » selon certains médias, ont fait machine-arrière. Deux jours seulement après l’annonce, la plupart d’entre eux se sont désistés dans un incroyable effet domino, gelant de facto le projet.

Éphémère, l’épisode a un mérite. Il jette une lumière crue sur ce que le foot est devenu : une vaste bulle spéculative qui n’est, visiblement, pas loin d’éclater. Si la bande des « douze » n’a eu aucun complexe à vouloir faire sécession, c’est parce que leur modèle économique et leurs finances sont à bout de souffle. Pour défendre le projet, Florentino Pérez l’a déclaré : « Nous sommes tous ruinés », a-t-il alerté lundi soir dans l’émission espagnole ‘El Chiringuito’. La plupart sont en effet lourdement endettés. Institution planétaire du ballon rond, le Real Madrid, auréolé de treize couronnes en Ligue des champions, affiche une dette de plus de 900 millions d’euros. Barcelone, son rival, doit plus de 1,1 milliard. De l’autre côté de la Manche, Chelsea et Tottenham sont endettés à hauteur de 1,5 et 1,3 milliard. En Italie, la Juventus de Turin, et l’Inter Milan ont, eux, des ardoises respectives de 458 et 630 millions. Avoir des dettes n’est pas un problème si l’on peut les rembourser. Mais ces montagnes, ces clubs prestigieux, pourtant parmi les plus riches d’Europe, n’arrivent plus à les gravir. La Covid-19 a certes pesé sur leurs recettes. Mais ces clubs souffrent surtout, depuis des années, d’une gestion tout à fait calamiteuse.

« Les clubs se font une concurrence monstrueuse »

Même si, historiquement, les droits TV, qui constituent l’essentiel des recettes des clubs, ont flambé, et que ces derniers sont devenus des « marques » pour accroître les recettes à l’international, ils n’arrivent pas à compenser l’explosion des salaires et des indemnités de transfert des joueurs. « Le problème, c’est que la croissance des revenus s’est avérée insuffisante au regard de la hausse des charges, constate Jean-François Brocard, chercheur au Centre de droit et d’économie du sport de Limoges. Comme il n’y a plus de régulation sur les salaires et sur l’accès au talent, les clubs se font une concurrence monstrueuse. Cela débouche sur des salaires énormes, couplés à des indemnités de transferts qui grandissent. »

Les joueurs sont, en effet, des atouts très prisés. Si les clubs s’arrachent les meilleurs à prix d’or, c’est parce que les Messi, Ronaldo, Mbappé, Neymar ou Haaland sont le Graal pour gagner en aura, en compétitivité, et in fine en attractivité financière. « Ils permettent de minimiser l’aléa sportif, de sécuriser les abonnements au stade, tout en maximisant les revenus marketing et le merchandising », égrène Julien Pillot. Pour décrocher ces étoiles et rester au niveau, la recette est simple : dépenser l’argent qu’on n’a pas. Ou celui qu’on anticipe la saison prochaine. « C’est une pyramide de Ponzi, constate Jean-François Brocard. Vous engagez des fonds dont vous anticipez les rentrées plus tard pour payer les frais des charges d’aujourd’hui. C’est hyper dangereux. Parce que cela a une fin… » En France, le fiasco du diffuseur Mediapro, qui s’est révélé défaillant après avoir surpayé, à hauteur de 830 millions d’euros par an, les droits de la Ligue 1, le démontre. De nombreux clubs se retrouvent dans l’impasse. D’autant que les salaires, qui sont des charges fixes, représentent près des trois quarts de leur budget…

En creusant années après années leurs dettes, les clubs suscitent désormais l’inquiétude. « Beaucoup de créanciers se demandent s’ils seront capables d’honorer leur endettement », affirme Julien Pillot. Sachant qu’aujourd’hui, les revenus et les audiences baissent, souligne-t-il. La pandémie, qui a vidé les stades et impacté le pouvoir d’achat, n’a rien arrangé.

Outre la concurrence, les habitudes de mauvaise gestion sont aussi propres au milieu du foot. « L’économiste Wladimir Andreff parle de ‘contrainte budgétaire molle’ », souligne Jean-François Brocard. Si de nombreux clubs se moquent éperdument d’atteindre l’équilibre financier, c’est parce qu’ils bénéficient des largesses « de milliardaires qui s’en fichent un peu, parce qu’ils savent, comme en Espagne pendant longtemps, qu’on ne leur demandera pas de régler certaines créances, parce qu’ils se disent que les actionnaires finiront bien, d’une manière ou d’une autre, par remettre au pot, ou encore parce que les collectivités locales ne pourront pas se permettre de les laisser tomber », enchaîne l’économiste.

La capacité des clubs à dépenser sans compter, au mépris des règles élémentaires de bonne gestion, n’a fait que s’accentuer. La faute à des dizaines d’années de financiarisation et d’absence de régulation. « L’arrêt Bosman [qui, en 1995, a permis de déréglementer le marché du travail sportif, en interdisant les clauses d'indemnité de fin de transfert et les quotas de nationalité dans les clubs, NDLR] constitue un marqueur, argue Julien Pillot. Tout ce qui s’en est suivi n’est que la logique de près de 30 ans de doctrine libérale, de très forte financiarisation du foot et de dérégulation massive. A cet égard, la Super League est une forme d’aboutissement. » Pour se financer, de nombreux clubs ont choisi d’aller en Bourse. Les écuries anglaises ont été les premières à s’y lancer, à l’instar de Tottenham, en 1983. Puis une deuxième vague d’introductions est survenue dans les années 1990, avec les arrivées de Manchester United, Chelsea ou encore Arsenal. En parallèle, les clubs suscitent l’appétit des fonds d’investissements, généralement soucieux de dégager une plus-value à la revente après seulement quelques années aux manettes.

« Il faut regarder la couleur de l’argent »

Aujourd’hui, les investisseurs américains montrent, en particulier, un fort appétit pour ces « actifs ». A l’image de RedBird Capital Partners, qui possède des parts dans le Toulouse FC, et serait sur le point de rafler 10% du capital de Liverpool. Manchester United et Arsenal, eux, disposent déjà de propriétaires « made in USA » – lesquels contrôlent par ailleurs des franchises en NFL, la prestigieuse ligue fermée du foot américain… En Italie, c’est aussi le fonds activiste Elliott Management qui est propriétaire du Milan AC. Dans l’Hexagone, les Girondins de Bordeaux sont passés dès 2018 sous pavillon américain. Le club bordelais vit depuis un calvaire, sportivement et économiquement. L’affaire Mediapro et le coronavirus ont précipité sa dégringolade. Ce mercredi, son actionnaire, King Street, a affirmé qu’il ne souhaitait plus « soutenir [le club] et financer ses besoins actuels et futurs », le mettant de facto en péril.

La plupart de ces acteurs, qui n’ont d’yeux que pour l’augmentation des revenus à court terme, contribuent à entretenir la bulle du foot européen. Les grands clubs entraînent dans leur danse les plus petits, contraints eux aussi de réaliser des transferts de plus en plus chers, d’augmenter les salaires et les prix des abonnements, pour rester compétitif. Comment, dès lors, refroidir la machine et éviter qu’elle ne s’emballe ? Jusqu’à présent, les mesures prises par l’UEFA se sont avérées largement insuffisantes. Adoptée en 2010, la règle du fair-play financier, qui visait à limiter les dépenses des clubs, n’a pas empêché certains transferts d’atteindre des sommets. Des mesures visant à plafonner les salaires pourraient s’avérer efficaces. Mais pour vraiment changer la donne, Jean-François Brocard juge qu’il faut travailler « en aval »« Il faut réguler l’accès à l’actionnariat des clubs, il faut regarder la couleur de l’argent », argue-t-il.

En février dernier, il a précisé sa pensée dans une tribune au Monde, cosignée avec l’économiste Jérémie Bastien et le politiste Jean-Michel de Waele :

« Il s’agirait de veiller à une allocation plus équilibrée du capital entre les clubs, à partir d’un contrôle plus strict de l’origine des sommes y étant investies, défendent les auteurs. L’objectif serait de refuser les apports de fonds douteux ou reposant principalement sur de l’endettement, lesquels mettent à mal l’économie du football professionnel au-delà d’en renforcer la dualisation, tout en promouvant l’actionnariat domestique, par exemple via l’imposition d’un plancher de détention du capital par l’association support (à l’image de la règle du 50+1 appliquée aux clubs allemands) ou le développement maîtrisé de l’actionnariat populaire. »

Le football est-il capable d’une telle révolution ? Rien n’est moins sûr. Mais il ne serait, alors, guère surprenant de voir ressurgir le projet de Super League. Après la débâcle du début de semaine, Florentino Pérez a pris grand soin de ne pas l’enterrer définitivement, précisant qu’il était « en stand-by ». Rien ne dit, d’ailleurs, que les fans ne finiront pas un jour par l’adopter. Manchester United arrive toujours à remplir son stade. Et ce malgré la fronde des supporters qui, en 2005, ont tant critiqué le rachat du club par le magnat américain Malcom Glazer, allant jusqu’à créer un club concurrent. La Super League, qui vise à « sauver le football » aux dires de Florentino Pérez, pourraient pourtant l’entraîner dans une nouvelle course à l’échalote. Le dirigeant du Real Madrid a d’ailleurs indiqué qu’il misait sur cette manne pour attirer Kylian Mbappé et Erling Haaland, les nouvelles très chères stars du foot mondial. Sous ce prisme, la Super League apparaît comme une énième pierre sur un édifice de plus en plus bancal.

 

Foot business : le fric a tué la dramaturgie

Foot business : le fric a tué la dramaturgie

Alexis Abeille,Supporteur de l’Olympique de Marseille,Geoffroy Daignes,Supporteur du Racing Club de Lens estime dans une tribune au Monde que le fric a tué la dramaturgie

Tribune.

 

En apparence, les créateurs de la Super Ligue de football européen ont renoncé à leurs projets, mais dans les faits, la transgression est faite et ses motifs sont énoncés : moins suivi par les nouvelles générations, le football a besoin de renouveler son spectacle, alors que le Covid-19 a plongé dans le rouge l’ensemble des clubs européens.

Si le projet a volé en éclats en 48 heures, il est difficile de parler d’échec pour les clubs promoteurs de ce projet tant la logique de la réforme de la Ligue des champions proposée dans le même temps par l’Union des associations européennes de football (UEFA) reprend leurs volontés. Plus de matchs, davantage de droits de télévision et une participation à la compétition sécurisée pour des grands clubs vivant au-dessus de leurs moyens depuis des années. Curieuse démarche qui, face à une baisse de la demande, propose une hausse de l’offre.

Ce n’est donc pas une réforme, mais une opération de prédation des puissants d’un football spéculatif dont le modèle économique ne tient plus. Florentino Perez, le président du Real Madrid, l’admet lui-même, malgré lui : « S’il n’y a pas d’argent chez les grands, ils n’achètent pas de joueurs aux autres. C’est une pyramide. » Chacun appréciera au passage la définition du ruissellement donné par le roublard Perez : un système où les plus puissants s’accaparent la totalité des richesses pour décider ensuite auprès de qui ils distribuent les miettes, s’ils en ont l’envie et le besoin – avis aux amateurs.

Les supporteurs de football se sont réveillés après plusieurs jours d’un épisode tragicomique, où ils ont pu, sur tous les canaux, protester contre l’annonce de cette sorte de NBA [National Basketball Association] montée à l’envers, aux enjeux sportifs aussi mal définis que les enjeux financiers (400 millions d’euros annuels pour chaque club) étaient énormes. Alors, ont-ils vraiment réussi à renverser la donne ? Le doute est permis.

En réalité, le football fonctionne déjà selon un principe d’inégalité économique qui a quasiment rompu avec la dramaturgie de ce sport. Qu’il est loin, le temps où, dans un article publié dans Il Giorno, Pier Paolo Pasolini (1922-1975) considérait le football comme un système de signes, et donc un langage, où les passes seraient la prose et où les dribbles et les actions qui mènent à un but seraient la poésie.

« Depuis dix ans, les championnats nationaux sont trustés par une poignée de clubs et tout suspense a disparu. Pile je gagne, face tu perds »

Traitement Coronavirus : une bataille de fric

Traitement Coronavirus : une  bataille de fric  

 

Indéniablement les chercheurs sont lancés dans une guerre de recherche à la fois pour traiter le Coronavirus et au-delà trouver un vaccin. Parallèlement,  une guerre est engagée  entre les industries pharmaceutiques qui souhaitent imposer que coûte que coûte  leur remède y compris en faisant fi des études épidémiologiques et des procédures de validation. Ainsi en est-il du remdesivir produit de l’industrie américaine (Gilead) . Mais ce remède miracle revendiqué par l’industrie américaine ne semble pas plus efficace qu’un placebo.

Pour l’instant, pour les résultats positifs, il faut s’en remettre à un communiqué de Gilead.

« Gilead Sciences a connaissance de données positives émanant de l’étude conduite par l’Institut national des allergies et maladies infectieuses sur son médicament antiviral remdesivir pour le traitement du Covid-19″, a indiqué la société.

« Positif » signifie que les malades traités se sont rétablis plus vite, selon les objectifs déclarés de l’étude.

Le directeur de l’Institut des maladies infectieuses, Anthony Fauci, s’est montré prudemment optimiste mercredi. Ce n’est pas une victoire par K.-O., a-t-il dit dans le Bureau ovale à côté du président Donald Trump, mais c’est une « importante preuve de concept ».

La mortalité du groupe témoin serait de 11%, contre 8% dans le groupe remdesivir, selon Anthony Fauci.

 

« C’est très positif », a résumé Donald Trump.

Cet essai clinique américain avait commencé le 21 février et devait inclure 800 malades du Covid-19 aux Etats-Unis et dans d’autres pays.

Ni les patients, ni les médecins ne savaient si la solution injectée par intraveineuse était le remdesivir ou le placebo, qui ressemblait au médicament mais ne contenait que des ingrédients inactifs.

De multiples essais cliniques sont en cours en Europe, en Asie et aux Etats-Unis pour trouver un traitement efficace contre le Covid-19. Le remdesivir est l’une des thérapies testées, aux côtés d’autres antiviraux ou encore de l’hydroxychloroquine.

Pour l’instant, seule l’étude chinoise, menée du 6 février au 12 mars dans dix hôpitaux de Wuhan, a été dûment évaluée et publiée. Ses résultats avaient fuité le 23 avril brièvement sur le site de l’Organisation mondiale de la Santé.

237 malades avaient participé, dont deux tiers traités par le remdesivir. Les médecins voulaient plus de 450 participants, mais la pandémie s’est arrêtée à Wuhan avant d’avoir pu atteindre ce nombre.

« Le traitement par remdesivir n’accélère pas la guérison ni ne réduit la mortalité liée au Covid-19 par rapport à un placebo », selon un résumé de l’étude, publiée par The Lancet.

« Malheureusement, notre essai a montré que bien que sûr et bien toléré, le remdesivir n’a pas montré de bénéfice significatif par rapport au placebo », a commenté l’auteur principal de l’étude, le professeur Bin Cao, cité dans un communiqué du Lancet.

 

La bataille continue donc entre les partisans du traitement américain et les partisans de la chloroquine. Une bataille normalement de nature scientifique mais qui a largement émergé dans les médias depuis des semaines. Le professeur Raoult de Marseille utilise la chloroquine a été la cible de nombreux experts et médias. Il s’est expliqué devant la commission parlementaire en indiquant clairement que certains de ses collègues défendaient des industries pharmaceutiques en raison d’intérêts personnels. Il a condamné ces conflits d’intérêts. Il a invité les membres de la commission parlementaire à consulter Internet sur ces conflits d’intérêts « tout y est » a-t-il déclaré. De fait  l’un de ces experts parisiens les plus virulents contre le professeur Raoult qu’on voit souvent sur les chaînes d’information entretient quelques liens avec l’industrie pharmaceutique , extrait de wikipédia:

« De 2011 à 2016, cet expert effectue des interventions rémunérées dans des conférences et comités d’experts des entreprises pharmaceutiques Bristol-Myers Squibb (pour un total de 10 000 euros sur 5 ans), Gilead (15 000 euros), AbbVie (3 000 euros), Janssen (3 000 euros) et Merck & Co (7 000 euros)6. Ces interventions portent sur le VIH et les hépatites B et C6. En 2016, elle est invitée à parler sur le sujet de l’hépatite C à la Conférence internationale sur les rétrovirus et les infections (CROI)7.

En 2012, elle devient experte auprès de l’Organisation mondiale de la santé, et en 2016 d’Unitaid6. Elle fait partie du panel de scientifiques du programme ONUSIDA de 2013 à 20158. En 2015, elle fait partie des auteurs du document publié par l’OMS intitulé Lignes directrices pour la prévention, les soins et le traitement en faveur des personnes atteintes de l’infection à hépatite B chronique9.

De 2011 à 2016, elle effectue des interventions rémunérées dans des conférences et comités d’experts des entreprises pharmaceutiques Bristol-Myers Squibb (pour un total de 10 000 euros sur 5 ans), Gilead (15 000 euros), AbbVie (3 000 euros), Janssen (3 000 euros) et Merck & Co (7 000 euros)6. Ces interventions portent sur le VIH et les hépatites B et C6. En 2016, elle est invitée à parler sur le sujet de l’hépatite C à la Conférence internationale sur les rétrovirus et les infections (CROI)7. »

« .

Coronavirus : L’efficacité du Remdesivir contre le virus ou la féroce bataille de fric des labos

Coronavirus : L’efficacité du Remdesivir contre le virus ou la féroce bataille de fric  des labos

 

Indéniablement les chercheurs sont lancés dans une guerre de recherche à la fois pour traiter le Coronavirus et au-delà trouver un vaccin. Parallèlement,  une guerre est engagée  entre les industries pharmaceutiques qui souhaitent imposer que coûte leur remède y compris en faisant fi des études épidémiologiques et des procédures de validation. Ainsi en est-il du remdesivir produit de l’industrie américaine (Gilead) . Mais ce remède miracle revendiqué par l’industrie américaine ne semble pas plus efficace qu’un placebo.

Pour l’instant, pour les résultats positifs, il faut s’en remettre à un communiqué de Gilead. Les Instituts de santé américains ont indiqué à l’AFP qu’une « annonce » serait faite dans la journée de mercredi, peut-être lors d’un briefing sur le nouveau coronavirus à la Maison Blanche.

« Gilead Sciences a connaissance de données positives émanant de l’étude conduite par l’Institut national des allergies et maladies infectieuses sur son médicament antiviral remdesivir pour le traitement du Covid-19″, a indiqué la société.

« Positif » signifie que les malades traités se sont rétablis plus vite, selon les objectifs déclarés de l’étude, mais on ignore encore les chiffres.

Le directeur de l’Institut des maladies infectieuses, Anthony Fauci, s’est montré prudemment optimiste mercredi. Ce n’est pas une victoire par K.-O., a-t-il dit dans le Bureau ovale à côté du président Donald Trump, mais c’est une « importante preuve de concept ».

La mortalité du groupe témoin serait de 11%, contre 8% dans le groupe remdesivir, selon Anthony Fauci.

« C’est très positif », a résumé Donald Trump.

Cet essai clinique américain avait commencé le 21 février et devait inclure 800 malades du Covid-19 aux Etats-Unis et dans d’autres pays.

Ni les patients, ni les médecins ne savaient si la solution injectée par intraveineuse était le remdesivir ou le placebo, qui ressemblait au médicament mais ne contenait que des ingrédients inactifs.

De multiples essais cliniques sont en cours en Europe, en Asie et aux Etats-Unis pour trouver un traitement efficace contre le Covid-19. Le remdesivir est l’une des thérapies testées, aux côtés d’autres antiviraux ou encore de l’hydroxychloroquine.

Pour l’instant, seule l’étude chinoise, menée du 6 février au 12 mars dans dix hôpitaux de Wuhan, a été dûment évaluée et publiée. Ses résultats avaient fuité le 23 avril brièvement sur le site de l’Organisation mondiale de la Santé.

237 malades avaient participé, dont deux tiers traités par le remdesivir. Les médecins voulaient plus de 450 participants, mais la pandémie s’est arrêtée à Wuhan avant d’avoir pu atteindre ce nombre.

« Le traitement par remdesivir n’accélère pas la guérison ni ne réduit la mortalité liée au Covid-19 par rapport à un placebo », selon un résumé de l’étude, publiée par The Lancet.

« Malheureusement, notre essai a montré que bien que sûr et bien toléré, le remdesivir n’a pas montré de bénéfice significatif par rapport au placebo », a commenté l’auteur principal de l’étude, le professeur Bin Cao, cité dans un communiqué du Lancet.

Pour trouver une thérapie efficace, il faut aussi s’intéresser au dosage.

Gilead a à ce sujet rendu publics mercredi des résultats d’un essai clinique appelé SIMPLE, qui visait à comparer deux différentes doses de remdesivir.

Coronavirus : le remdesivir, premier traitement anti-Covid autorisé en Europe

 

Pour mieux comprendre la concurrence que se livre le traitement remdesivir de l’industriel pharmaceutique américain Gilead, il faut intégrer le prix. Le fameux   remdesivir  qui n’a pas fait davantage la preuve de son efficacité que la chloroquine a un prix d’environ 2200 $ alors que la chloroquine ( vieille molécule)  ne coûte que quelques dollars à peine . Après les autorités américaines, et un travail intensif lieu de lobbying de l’Américain Gilead( et des experts proches de Gilead,)    c’était au tour de la Commission européenne d’autoriser « la mise sur le marché conditionnelle » du remdesivir (nom commercial Veklury) pour traiter les patients de plus de 12 ans atteints de coronavirus nécessitant le recours à l’oxygène.

Le feu vert de la Commission intervient moins d’un mois après le dépôt de la demande et une semaine après la recommandation du CHMP (Comité évaluant les médicaments) et l’aval des Etats membres, contre 67 jours normalement. Le remdesivir est ainsi le « premier médicament autorisé dans l’Union européenne contre le Covid-19 », précise l’exécutif européen.

La mise sur le marché conditionnelle est un mécanisme réglementaire européen permettant la commercialisation accélérée de médicaments sur la base de données moins complètes, si les bénéfices l’emportent sur les risques dans un contexte de menace pour la santé publique, et lorsqu’il n’y a pas d’alternative. Le laboratoire n’est pas pour autant dispensé d’études complémentaires.

Le remdesivir devrait ainsi théoriquement être disponible dès samedi mais, dans la plupart des pays, un délai supplémentaire est nécessaire pour fixer le prix. Gilead a annoncé en début de semaine qu’il le mettait à disposition de tous les pays développés au même prix de 2.340 dollars, soit 2.081 euros.

En France, le remdesivir va être soumis à la procédure habituelle, qui comporte une évaluation du médicament par la Haute Autorité de Santé, puis une négociation avec le Comité Economique des Produits de Santé pour tenter d’obtenir un prix inférieur à celui affiché par Gilead.

 

Cette procédure, souvent longue (parfois plus d’un an) retarde l’arrivée sur le marché des médicaments dans l’Hexagone. Toutefois, compte tenu de la nature du besoin et de l’absence d’alternative, le processus pourrait être accéléré pour le remdesivir. Jusqu’à présent, les patients qui avaient pu être traités avec ce médicament l’ont été dans le cadre d’essai cliniques ou de protocole compassionnels (avant validation par un essai clinique, en cas d’urgence).

De son côté, Gilead veut exploiter tout le potentiel de sa molécule. Il vient d’obtenir le feu vert des autorités américaines pour commencer un essai clinique avec une version inhalée du médicament, jusque-là injectable. Si cette formulation se montrait efficace, cela permettrait une utilisation hors de l’hôpital et à des stades plus précoces de la maladie. Gilead prévoit ainsi de commencer en août un essai incluant 50 enfants et adolescents présentant des formes modérées à sévère de la maladie, dans plus de trente lieux aux Etats-Unis et en Europe.

Si les cas graves de la maladie chez les moins de 21 ans sont rares, ils peuvent entraîner chez 2 pour 100.000 d’entre eux, une maladie inflammatoire appelée « syndrome multi-inflammatoire chez les enfants » ou « Kawasaki like ». D’où l’intérêt de prévenir les formes graves. Enfin, Gilead prévoit également de tester le remdesivir en combinaison avec des médicaments anti inflammatoires tels que l’Olumiant de Lilly ou l’Actemra de Roche, mais aussi la dexamethasone.

 

Réforme droits d’auteur : remède pour le fric contre la liberté

Réforme droits d’auteur : remède pour le fric contre la liberté

 

En apparence uen réforme votée par le parlement européen pour protéger le droit d’auteur mais qui en définitive va surtout protéger les auteurs et médias connus, renforcer les GAFA et restreindre la liberté d’expression. Bref un bel exemple de corporatisme des auteurs et médias  patentés. Guillaume Champeau, le directeur Éthique et affaires juridiques de Qwant, déplore ainsi, dans un billet au vitriol, une « victoire du court-termisme« . Selon lui, les articles 11 et 13 vont finir par renforcer la domination des Gafa sur les médias. L’article 13, par exemple, impose aux Gafa de mettre en place des outils techniques pour détecter des œuvres protégées par le droit d’auteur. Pour l’ancien fondateur du pure-player Numerama, il s’agit ni plus ni moins que d’une « nouvelle barrière à l’entrée pour les concurrents des Gafa« : Passons sur les problèmes qu’un tel dispositif pose pour la liberté d’expression, et imaginons que les outils techniques de détection des œuvres protégées par le droit d’auteur sont d’une fiabilité et d’une performance telles qu’ils savent aussi reconnaître les parodies ou autres critiques couvertes par des exceptions légales. Qui a aujourd’hui les bases de données des œuvres à identifier ? Qui a les moyens financiers et technologiques de développer les outils de détection ? Les Gafa. « Les éditeurs exigent que Google et Facebook les financent en payant pour chaque extrait d’article cité sur leur service. Mais quand les revenus du Monde ou du Figaro dépendront des revenus de Google ou de Facebook, combien de temps encore pourrons-nous lire dans ces journaux des critiques de ces géants ? Plutôt que de s’adapter, les éditeurs de presse préfèrent renoncer entièrement à leur indépendance », déplore l’association dans un communiqué. 

12345



L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol