Les Anti masque : une forme de populisme
Le chercheur Antoine Bristielle analyse une enquête sur les motivations de ceux qui refusent le port du masque, qui s’inscrivent dans une défiance plus générale envers les institutions (tribune dans le onde.
Tribune. Alors que, depuis plusieurs semaines, les cas de contamination au Covid-19 sont en augmentation et que la crainte d’une seconde vague épidémique est plus actuelle que jamais, de nombreux gouvernements ont renforcé les mesures obligeant au port du masque. En l’absence de traitements efficaces et dans l’attente d’un vaccin encore hypothétique, le port du masque semble être le meilleur moyen de freiner la propagation de l’épidémie.
Pourtant, cette mesure est loin de faire l’unanimité. En témoigne, par exemple, le fait que 20 000 personnes ont manifesté à Berlin, le 1er août, pour protester contre cette obligation. En France, si 64 % des citoyens souhaitent bel et bien que le port du masque soit obligatoire même dans les lieux publics ouverts, indiquait un sondage IFOP publié le 9 août par Le Journal du dimanche, il n’en demeure pas moins qu’une riposte des antimasque s’organise. Sur Facebook, de nombreux groupes se sont créés afin de revendiquer leur refus du port du masque.
Mais qui sont ces individus et pourquoi refusent-ils une telle mesure de santé publique ? C’est à cette question que nous répondons à partir d’une enquête menée par questionnaire auprès de plus de 800 individus, membres de groupes Facebook antimasque. Majoritairement féminins (60 %), ils ont, en moyenne, une cinquantaine d’années et un niveau d’éducation assez élevé (bac + 2). En cela, ils ressemblent assez fortement aux soutiens du professeur Raoult s’étant manifestés sur les réseaux sociaux au printemps.
Cette proximité entre les antimasque et les soutiens de Didier Raoult se retrouve lorsque l’on demande aux premiers d’exprimer leur opinion concernant le chercheur marseillais : plus de 80 % d’entre eux en ont une bonne opinion. D’ailleurs, ils ne sont pas moins de 95 % à estimer qu’une personne contaminée par le Covid-19 devrait être libre de décider si elle veut ou non être traitée à l’hydroxychloroquine, le traitement-phare recommandé par Didier Raoult.
La mise en avant de la liberté individuelle est le premier élément expliquant largement le refus de porter le masque. Les contraintes, en particulier lorsqu’elles émanent de l’Etat, sont massivement rejetées par les personnes de notre échantillon : 92 % des individus interrogés considèrent que le gouvernement s’immisce trop dans notre vie quotidienne et 57 % d’entre eux se disent d’accord avec l’idée que, d’une manière générale, chacun devrait être libre de faire ce qu’il veut face au risque sanitaire. Le masque ne serait ainsi que la nouvelle « muselière » imposée par les gouvernements, selon l’expression fréquemment utilisée par les antimasque.