Grèce : relèvement de la note par Fitch
Après le redressemenet financier (même si des problèmes restent à résoudre) et le succès des emprunts, Fitch relève la note de la Grèce. L’agence de notation Fitch a relevé vendredi la note de la Grèce de « CCC » à « B- » tout en indiquant s’attendre à des mesures d’allégement de la dette grecque par ses partenaires européens en 2018. La perspective attribuée à la note est positive. Parmi les grandes agences de notation, Moody’s avait également relevé la note d’Athènes fin juin alors que SP Global Ratings avait pour sa part relevé la perspective de la note à « favorable » en juillet. Après avoir été au bord du gouffre financier, la Grèce de retour sur les marchés financiers connaît un franc succès pour les emprunts qu’elle lance. Ciaran O’Hagan, responsable de la recherche sur les taux d’intérêt dans la zone euro à la Société Générale CIB décrypte dans une interview à la Tribune les enjeux de ce retour réussi sur les marchés financiers.
Pourquoi la demande pour la dette grecque est-elle si forte ?
CIARAN O’HAGAN - Cette obligation est un produit unique, qui n’a pas de comparable, avec un tel rendement, 4,62 %, tout en étant liquide. Pour avoir un tel rendement, les investisseurs doivent aller chercher de petits émetteurs corporate ou des subordonnés bancaires, mais ce n’est pas la même liquidité. En achetant cette dette souveraine, les investisseurs peuvent diversifier leur risque. Or aujourd’hui, avec des taux d’intérêt aussi bas, nombre d’entre eux ont retrouvé de l’appétit pour le risque. Et le seul émetteur souverain qui réalise des emprunts de même taille est le Portugal, mais ses obligations à cinq ans portent un rendement de 1,15 %, l’écart est gigantesque avec les 4,62 % de la Grèce.
Quels investisseurs sont typiquement intéressés ?
Cette émission peut intéresser un large éventail d’investisseurs cherchant du rendement : des Sicav, des fonds spécialistes de dette « high yield » (émetteurs à haut rendement, notés en dessous de la catégorie « investissement »), des spécialistes des marchés émergents et sans doute quelques hedge funds, peut-être aussi des gestionnaires d’actifs, plutôt que des assureurs qui recherchent des placements moins risqués. Les investisseurs, qui souscrivent, savent qu’ils achètent un pays risqué, noté Triple C ou simple B selon les agences, c’est plus d’un cran d’écart avec le Portugal par exemple. Il faut que les investisseurs aient les nerfs solides et une bonne tolérance aux fortes variations de cours : quand on regarde l’historique des obligations avril 2019 émises en 2014, on voit qu’elles sont tombées de 100 à 40 en moins d’un an puis remontées de 70 à plus de 100 depuis le printemps 2016.
Pourquoi la Grèce n’a-t-elle pas levé davantage d’argent ?
C’est vrai que 3 milliards d’euros n’est pas un montant énorme au regard du livre d’ordres qui a dépassé les 7 milliards. La demande n’a donc été servie qu’à moitié. Mais certains ordres réclamaient un rendement plus élevé, à 4,875 %. La Grèce a ainsi pu obtenir un resserrement de 25 points de base du rendement prévisionnel au cours de la journée, c’est une performance assez exceptionnelle. Si la situation est stable, on peut imaginer que la Grèce reviendra probablement sur les marchés dans un an. En 2014, son émission à cinq ans était de 4 milliards d’euros. La Grèce aurait pu aussi émettre à une échéance plus lointaine, mais cela a un coût : l’Argentine a ainsi émis un emprunt à 100 ans en juin, avec un rendement de 8 %. Les nouvelles économiques sont plutôt bonnes en Grèce, la reprise est là, les finances publiques sont sur la bonne voie et l’accord avec la Commission européenne, la BCE et le FMI devrait durer un moment. Ceci dit, la mise en place des réformes est difficile et très lente en Grèce, comme on le constate pour celle du cadastre. Il y a aussi le contexte général : si la Fed remonte ses taux, il y aura un effet de substitution dommageable aux obligations à risque, car les investisseurs se reporteront sur les bons du Trésor américain.