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Vitesse route : la fin des retraits de points pour les petits excès de vitesse en 2024

Vitesse route : la fin des retraits de points pour les petits excès de vitesse en 2024

Nouvelle décision idiote du ministre de l’intérieur qui décide de ne plus retirer de point pour les dépassements de vitesse inférieure à 5 km/h mais qui maintient cependant l’infraction. Bref, une décision idiote qui succède à une autre qui l’était encore davantage. Notons que plus de 60 % des infractions relevées concernent des dépassements de l’ordre de 5 km/h !

Il y a quelque chose d’anachronique vis-à-vis de l’automobile dont la plupart des modèles peuvent maintenant rouler entre 160 et 250 km/h mais qui peuvent être sanctionnés pour un dépassement de moins de 5 km/h. En outre, une régulation de la vitesse certes nécessaire mais une moyenne sur chaque catégorie de routes quand il faudrait en fait s’adapter à chaque portion.

Ainsi il est particulièrement dangereux de rouler à 80 sur de petites routes dangereuses, même une vitesse de 60 km/h peut comporter des risques. Inversement, il était idiot de limiter à 80 sur des routes à caractère national ( y compris les départementisées pour des questions financières et de compétences)
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«Il ne s’agira pas de dépénaliser ces infractions qui demeureront sanctionnées par une amende», a indiqué le ministre de l’Intérieur dans un courrier.

Les petits excès de vitesse ne seront plus sanctionnés par un retrait de point à compter du 1er janvier 2024, a annoncé le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin dans un courrier à la sénatrice LR du Var Françoise Dumont, daté du 11 avril.

Il s’agit «d’introduire une indulgence administrative à l’égard de ces manquements relevant davantage du manque d’attention que de la volonté délibérée de s’affranchir de la règle», estime le ministre de l’Intérieur. Certaines associations de prévention routière avaient déploré fin mai 2022 une piste «regrettable» ou incitant les automobilistes «à rouler plus vite».

En 2020, sur les 12,5 millions de contraventions envoyées pour des excès de vitesse contrôlés par des radars, 58% concernaient des excès inférieurs à 5 km/h, selon une réponse du ministère de l’Intérieur en avril 2022 à une question écrite de Françoise Dumont. «On travaille sur cette mesure avec le ministère de l’Intérieur depuis des années, donc je ne peux que m’en féliciter», a réagi auprès de l’AFP Pierre Chasseray, délégué général de 40 millions d’automobilistes. «Cela va permettre de constater que cela n’aura aucun effet sur l’accidentalité», anticipe-t-il. «La deuxième étape, maintenant, c’est d’obtenir la non sanction financière, car il reste toujours l’amende à payer», a-t-il ajouté.

Aujourd’hui, un excès de vitesse inférieur à 20 km/h est sanctionné d’un point et d’une amende de 68 euros (sur les routes où la vitesse maximale autorisée est supérieure à 50 km/h) ou 135 euros (sur les routes où la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 50 km/h).

La fin du Service national ?

La fin du Service national ?


En 2017, Macron avait promis le retour du service militaire ou du service national. Il n’y aura rien de tout cela , les deux vont disparaître. Le service national universel qui n’était déjà qu’un ersatz du service militaire. Sorte de service civil ressemblant à une colonie de vacances vient de prendre fin dans le budget militaire. Budgétairement le SNU n’est supprimé pour autant il continuera d’être financé mais on ne sait pas comment . Il est clair que ce service est évidemment complètement inadapté à une situation de guerre de haute intensité ou même à un apprentissage et une appropriation des valeurs républicaines. Finalement, il y aura quelques heures de cours à l’école ou le retour de l’éducation civique d’antan. Le nombre de jeunes concernés étaient très marginale de l’ordre de quelques dizaines de milliers quand une génération représente 800 000. 50 000 Jeunes sont concernés au maximum par le SNU en 2023. Bref la plus grande confusion sur l’objectif, les modalités et les moyens.

Le Service national universel (SNU) ne figurera donc pas compte tenu du contexte social dans la prochaine Loi de programmation militaire (LPM) couvrant la période 2024-2030. En revanche, la LPM sera bien présentée mardi prochain en conseil des ministres après quelques hésitations de l’exécutif. « On a l’intention d’aller de l’avant résolument sur le processus relatif à la loi de programmation militaire, dont le projet a été envoyé au Conseil d’État », confirmait-on lundi à l’Élysée. Le coût budgétaire du SNU est estimé autour de 3,5 milliards d’euros pas an, dont une partie pèse sur le budget du ministère des Armées.

Voulu par Emmanuel Macron, le SNU vise « à impliquer davantage la jeunesse dans la vie de la Nation, à promouvoir la notion d’engagement, à renforcer la mixité territoriale et à favoriser un sentiment d’unité nationale autour de valeurs communes ».

Pour une généralisation hors temps scolaire, le nombre de personnes recrutées devrait être compris entre 39.375 et 52.500. Concernant le scénario d’une généralisation du SNU sur le temps scolaire, les besoins de recrutement seraient moins élevés (entre 14.000 et 16.153 personnes).Un imbroglio total entre SNU à l’extérieur, un SNU à l’intérieur de l’école et des cours d’éducation civique pour tous.

Société-Fin de vie : le tabou

Société-Fin de vie : le tabou

Interview de Marie de Hennezel qui a exercé auprès de personnes en fin de vie, au sein de la première unité de soins palliatifs créée en France, à Paris. En 2003, à la demande du gouvernement, elle a rendu un rapport intitulé « Fin de vie, le devoir d’accompagnement », qui a inspiré la première loi française spécifique aux droits des malades à l’approche de la mort, dite loi Leonetti de 2005. Aujourd’hui âgée de 76 ans, elle s’oppose à toute légalisation de l’aide active à mourir en France et milite pour une meilleure prise en compte des personnes âgées dans la société. ( franceinfo)

Dans un récent rapport, le Conseil consultatif national d’éthique a relevé que « la fin de vie n’est plus perçue comme un temps essentiel de l’expérience humaine ». Partagez-vous ce constat ?

Marie de Hennezel : Oui. On veut escamoter ce temps. On veut anticiper la mort ou être endormi dans les derniers moments. On considère que bien mourir, c’est mourir dans son sommeil, rapidement, sans déranger les autres. Or, le temps du mourir est précieux. Les derniers échanges qu’un mourant peut avoir avec ses proches lui permettent de partir apaisé et aident les autres à vivre un deuil différent.

N’oublions pas la rupture anthropologique qu’a constituée l’interdiction des visites lors de la crise du Covid-19. De nombreuses familles ont été privées des rituels d’adieu. Les dernières paroles et les derniers gestes sont irremplaçables. Ce sont des temps de méditation sur la finitude, une confrontation de chacun à sa propre mort.

Le fait de pouvoir choisir le moment de sa mort ne permettrait-il pas de mieux organiser sa fin de vie et de redonner de la force à ce « temps essentiel » ?

Je comprends que certaines personnes puissent se dire que c’est la seule manière de pouvoir être sujet de sa mort. Mais c’est quand même dommage. Le suicide assisté et l’euthanasie poseraient d’autres problèmes. Pensez aux proches. Ceux qui accompagnent la personne peuvent se sentir coupables de ne pas avoir réussi à la retenir à la vie. Ceux qui n’y vont pas se sentent coupables de ne pas avoir été là dans les derniers instants. Quoi qu’on fasse, on se sent coupable. C’est quand même assez violent. Quant aux médecins qui pratiquent l’euthanasie, ce n’est pas anodin. J’en ai suivi en psychothérapie. Ils en faisaient des cauchemars après. C’est un acte radical, brutal.

Depuis une quinzaine d’années, vous animez des groupes de parole auprès de personnes retraitées. Quel est leur regard sur leur fin de vie ?

Il y a deux publics. Les 60-80 ans que je rencontre souhaitent préserver leur autonomie et souvent pouvoir choisir le moment de leur mort. C’est une génération encore bien portante, qui veut maîtriser ses derniers moments. Pour les 80-100 ans avec qui j’échange, c’est complètement autre chose. Ils ne demandent pas d’injection létale, mais pensent tous à la mort et aimeraient en parler. Seulement, ils n’ont personne avec qui le faire. Les familles ne veulent pas souvent aborder la question, le personnel des résidences non plus. La solidarité intergénérationnelle s’effrite. Il y a une solitude immense.

Qu’ont envie de dire ces personnes âgées ?

Elles appréhendent la mort en tant que destin de façon relativement apaisée. En revanche, elles redoutent la manière dont elles vont mourir, avec le spectre d’être transférées à l’hôpital et de finir sur un brancard aux urgences, comme cela arrive trop fréquemment.

« Les personnes âgées s’interrogent aussi sur le sens et l’utilité de leur existence. »

Leur crainte : être considérées un jour comme un poids pour la société. « Ne fera-t-on pas pression sur nous pour qu’on ait l’élégance de s’en aller ? », me confiait une femme de 86 ans. « Peut-être qu’on nous culpabilisera de vouloir rester en vie », m’a dit une autre. Nous vivons dans une société jeuniste, qui valorise la performance, la rentabilité, l’efficacité. Ces personnes le perçoivent très bien.

Une loi sur le grand âge, promise lors du précédent quinquennat et destinée à améliorer les conditions de vie des personnes en perte d’autonomie, a finalement été abandonnée. Comment l’interprétez-vous ?

C’est un très mauvais signal, d’autant qu’il est désormais question d’une loi sur la fin de vie. La génération des baby-boomers commence à arriver dans les zones de fragilité du grand âge. Elle perçoit bien le manque d’investissements en matière d’accompagnement, d’habitat, de mobilité… Quand vous allez avoir presque 30% de la population en perte d’autonomie, ces personnes âgées risquent de se sentir comme un poids pour la société. Vous verrez qu’un certain nombre de personnes auront le sentiment d’une vieillesse indigne et réclameront la mort. Prenons soin de préserver leur estime d’elles-mêmes.

Où en est notre société dans son rapport à la mort ?

Elle entretient un rapport très paradoxal avec la mort. Il y a une phrase de l’anthropologue Louis-Vincent Thomas qui résume tout : « Nous sommes dans une société thanatophobe et mortifère. »

« Par peur de la mort, nous voulons l’anticiper. »

Faire face à la mort et rester vivant jusqu’au bout n’est pas facile dans un monde qui dénie la mort et qui valorise l’autonomie et la maîtrise sur sa vie. On en vient à parler de « droit à la mort », de « liberté de choisir le moment de sa mort ». Cette volonté de maîtrise est une façon de faire face à sa peur. Or c’est surtout une volonté de bien-portants. Plus on approche de la fin de sa vie et plus, en général, on y tient. Mais le tabou qui règne dans les familles et dans le monde médical engendre une grande solitude chez ceux qui vont mourir.

A quand remonte le déni de la mort ?

Cela a commencé après-guerre, avec les progrès de la médecine et le souhait de faire reculer la mort. Avec succès, d’ailleurs, puisque nous avons gagné 20 années d’espérance de vie depuis 1945. Or cette médecine toute-puissante a un rapport difficile à la mort. Durant mon parcours, je n’ai presque connu que des médecins pour qui la mort était un échec.

Le corps médical a beaucoup à apprendre des services de soins palliatifs : on y accepte que les personnes vont mourir et que ce n’est pas un échec. Plutôt que de s’obstiner, on y aide les patients à mourir le mieux possible, sans souffrance. Malheureusement, les médecins sont trop peu formés à cette culture. Il faudrait instituer, chaque année, dans les hôpitaux, une réunion obligatoire pour sensibiliser tous les soignants à l’accompagnement de la fin de vie.

Vous avez été la première psychologue à intervenir en unité de soins palliatifs. Comment les patients y appréhendaient-ils leurs derniers moments ?

Ils avaient d’abord besoin de vérité. A l’époque, il y avait cette comédie du mensonge dans les autres services : on racontait aux gens qu’on allait les retaper et que, 15 jours plus tard, ils allaient sortir et que tout irait bien. Mais ces personnes sentaient bien que leur corps s’affaiblissait et qu’elles allaient mourir. Le discours qu’on leur tenait, en contradiction avec ce qu’elles sentaient, les angoissait.

J’ai trouvé remarquable, en soins palliatifs, que les médecins et l’équipe ne jouent pas cette comédie. Ils avaient l’intelligence de dire ce qu’ils savaient et ce qu’ils ne savaient pas. Ils reconnaissaient ne plus pouvoir guérir le patient, mais ne donnaient pas de pronostic chiffré.

« Le temps qu’il reste à quelqu’un dépend du mystère des corps et des échéances intimes de chacun. »

Certains ont peur de mourir et se disent : « Autant que cela intervienne le plus vite possible. » J’en ai vu lâcher prise intérieurement et mourir assez rapidement. D’autres ont besoin de temps, pour vivre des choses importantes. Il peut y avoir un regain de vitalité, une appétence relationnelle, une envie de rencontrer des gens, de boucler la boucle avec eux. C’est une question de tempérament et de personnalité. A partir du moment où chacun est dans la vérité, il peut décider au fond de lui ce qui va se passer.

Comment les proches, plongés dans cette société de déni de la mort, trouvaient-ils leur place ?

Ce sont les mourants qui aidaient les vivants. Ils abordaient eux-mêmes la question de leur mort. Et nous, dans l’équipe, nous faisions tout ce que nous pouvions pour aider les proches à surmonter leur peur d’entrer dans la chambre, d’être présents, de tenir la main, de parler. C’est vraiment un temps essentiel, qu’il faut préserver, sans l’escamoter.

Société-Fin de vie : Prendre le temps de la réflexion

Société-Fin de vie : Prendre le temps de la réflexion

par
Stéphane Alvarez
Maitre de conférences en sociologie, Université Grenoble Alpes (UGA)

Emmanuel Monfort
Maître de conférences en Psychologie, Université Grenoble Alpes (UGA)

Une contribution intéressante qui conseille de prendre du temps sur le très complexe problème de la fin de vie. Une recommandation sans doute qui s’adresse aussi au chef de l’État précipite un peu le débat pas forcément compte tenu de l’urgence de la question mais pour passer à autre chose après la révolte des retraites.


La convention citoyenne sur la fin de vie, organisée par le Conseil économique, social et environnemental, a rendu son rapport au gouvernement après quatre mois d’échanges, de réflexions et de votes. Les citoyens et citoyennes sélectionnés étaient invités à éclairer les pouvoirs publics sur la question de l’accompagnement de la fin de vie et sont prononcés en faveur d’une aide active à mourir.

La législation sur la fin de vie en France a su se réinventer depuis les premiers jalons posés par la loi Kouchner de 1999 qui garantissait l’accès aux soins palliatifs. La loi Leonetti de 2005, puis la loi Claeys-Leonetti de 2016 ont ouvert des droits pour les personnes en fin de vie. Au-delà de l’arrêt des traitements, elles cadrent la désignation d’une personne de confiance et la rédaction des directives anticipées, déclaration écrite qui peut être faite par toute personne majeure pour préciser ses souhaits concernant sa fin de vie.

Ces dispositions sont vues comme des moyens efficaces de lever les incertitudes liées aux conditions de la fin de vie. Au moment de leurs votes, elles ont été unanimement saluées. Pourtant, elles sont peu opérantes.

Une équipe de chercheurs a analysé la capacité des personnes de confiance à prendre des décisions correspondant au désir de leur proche. En se basant sur près de 20 000 paires de réponses patient-personne de confiance sur des scénarios hypothétiques de fin de vie, ils sont arrivés à une conclusion préoccupante : dans un tiers des cas, la personne de confiance se trompe sur la préférence de traitement de son proche et ne prend pas la décision que celui-ci souhaiterait.

« Controverses » est un nouveau format de The Conversation France. Nous avons choisi d’y aborder des sujets complexes qui entraînent des prises de positions souvent opposées, voire extrêmes. Afin de réfléchir dans un climat plus apaisé et de faire progresser le débat public, nous vous proposons des analyses qui sollicitent différentes disciplines de recherche et croisent les approches.

Plus alarmant encore : ce chiffre reste le même lorsque des discussions sur ces questions ont déjà eu lieu. En effet, les personnes de confiance peuvent faire primer leurs propres valeurs sur celles de leurs proches. En l’absence de directives anticipées claires, la désignation d’une personne de confiance ne serait pas efficace dans les pratiques actuelles.

Or, les individus ont des difficultés à exprimer clairement leurs avis sur la fin de vie. Les personnes les plus âgées peuvent particulièrement apporter un éclairage sur ce point. Si la mort semble de plus en plus éloignée de nos vies quotidiennes, elle prend une importance particulière avec l’avancée en âge.

Pourtant, demander à une personne âgée de prendre une décision sur sa fin de vie n’est pas pour autant facile, y compris lorsque la famille et les personnels soignants paraissent avoir trouvé un accord. Elles peuvent en particulier être confrontées à des dilemmes moraux : faut-il envisager de ne pas avoir sa vie prolongée dans certaines conditions ? Est-il possible d’accepter de laisser d’autres décider pour soi s’il n’est plus possible de s’exprimer ?

La question est particulièrement complexe dans le cas des personnes âgées qui vivent en institution. Celles-ci peuvent se voir limitées dans l’expression de choix aussi importants que ceux qui vont définir leurs derniers moments d’existence – en raison de leur état de santé, parce que toutes leurs libertés ne sont pas respectées, ou parce qu’on ne leur pose simplement pas la question. Selon une étude menée en 2013-2014 au sein de 78 maisons de retraite en France, les questions relatives à la fin de vie ont été abordées avec au maximum 21,7 % des résidents. Dans 32,8 % des cas, aucune discussion sur les questions relatives à la fin de vie n’a jamais eu lieu, que ce soit avec le résident ou avec les proches. C’est un paradoxe, si on pense que ces lieux d’hébergement sont aussi d’ultimes lieux de vie.

Dans une autre étude exploratoire, des chercheurs en santé britanniques ont mis en évidence les inquiétudes des personnes âgées lorsqu’il leur est demandé de penser aux soins palliatifs et à l’euthanasie (et en particulier aux conditions de leurs mises en œuvre). Ainsi, même si des directives anticipées ont été rédigées en prévision d’hypothétiques difficultés à venir, les personnes âgées ne seront pas nécessairement capables d’y adhérer lorsqu’elles seront réellement confrontées à la fin de leur existence.

Rédiger des directives anticipées n’est pas tout. Encore faut-il être accompagné pour choisir si elles correspondent encore à une conception existentielle qui a pu évoluer, notamment dans ces moments difficiles. Les bénéfices des directives anticipées sont limités par les difficultés des systèmes de santé à intégrer l’expression des choix des patients dans les pratiques de soins, notamment quand l’organisation du travail est complexe, soumise à des contraintes de temps et chargées émotionnellement.

On le comprend : prendre en compte des directives anticipées sur les conditions de la fin de vie implique de donner une place à des échanges qui prennent en compte les choix existentiels de tous. Il est nécessaire de reconnaître une expertise aux patients, même les plus âgés qui sont aptes à dire pour eux-mêmes ce qui est le plus adapté. Sont également centraux les enjeux éthiques associés à des situations cliniques souvent complexes, avec des professionnels formés, qui doivent pouvoir être disponibles.

La convention citoyenne qui vient de se terminer propose d’aller plus loin que les dispositions actuelles. À une large majorité, elle a voté pour l’introduction dans la loi de la notion d’aide active à mourir dans le cadre d’un parcours d’accompagnement et de coordination avec les soins palliatifs.

C’est là que le bât blesse et que se pose la question d’une réelle volonté politique de faire évoluer le cadre législatif de la fin de vie, étant donné l’état du système de santé français. Il est étonnant de constater que l’évaluation de la loi Claeys-Leonetti de 2016 se soit déroulée en même temps que la convention citoyenne : une évaluation préalable aurait certainement été bénéfique pour la qualité des travaux de la convention.

La Haute autorité de santé a toutefois donné quelques éléments de cadrage en 2020.Elle précise que la loi Claeys-Leonetti n’est pas suffisamment appliquée par les professionnels de santé : une amélioration est nécessaire dans le dialogue entre les professionnels de santé et les patients, même les plus âgés. Des progrès sont également nécessaires dans l’accompagnement de ces derniers et de leurs proches.

Ensuite, les décideurs vont-ils introduire l’aide active à mourir alors que le système de soins palliatifs est critiqué pour son aspect inégalitaire (26 départements n’ont pas d’unités de soins palliatifs) et plus largement pour un manque de moyens évidents ?

Les pratiques actuelles, sous-dimensionnées, ne sont pas satisfaisantes et procèdent d’une tendance à penser les dispositifs sans tenir compte de la variété des expériences. Contrairement à certains présupposés, toutes les personnes en fin de vie ne souhaitent pas nécessairement décéder à leur domicile. Les attentes sur les conditions de la fin de vie ne sont pas uniformes. Certains besoins essentiels, qui nécessitent la mise en place d’un accompagnement spécifique, peuvent être selon les situations incompatibles avec un trépas à domicile.

Les propositions de la convention citoyenne font face à une réalité complexe et encore mal appréhendée. Les difficultés autour des directives anticipées ne sont qu’une question parmi bien d’autres.

Face à ces constats, il paraît légitime de se poser la question d’une réelle volonté politique d’introduire la notion d’aide à mourir dans la loi, évolution jusqu’à présent refusée. De nombreuses questions demeurent et un état des lieux de la fin de vie préalable à la convention aurait permis de contribuer à des évolutions souhaitées. Une telle avancée demanderait de revoir en profondeur un système de santé en souffrance.

Fin de vie : Prendre le temps de la réflexion

Fin de vie : Prendre le temps de la réflexion

par
Stéphane Alvarez
Maitre de conférences en sociologie, Université Grenoble Alpes (UGA)

Emmanuel Monfort
Maître de conférences en Psychologie, Université Grenoble Alpes (UGA)


La convention citoyenne sur la fin de vie, organisée par le Conseil économique, social et environnemental, a rendu son rapport au gouvernement après quatre mois d’échanges, de réflexions et de votes. Les citoyens et citoyennes sélectionnés étaient invités à éclairer les pouvoirs publics sur la question de l’accompagnement de la fin de vie et sont prononcés en faveur d’une aide active à mourir.

La législation sur la fin de vie en France a su se réinventer depuis les premiers jalons posés par la loi Kouchner de 1999 qui garantissait l’accès aux soins palliatifs. La loi Leonetti de 2005, puis la loi Claeys-Leonetti de 2016 ont ouvert des droits pour les personnes en fin de vie. Au-delà de l’arrêt des traitements, elles cadrent la désignation d’une personne de confiance et la rédaction des directives anticipées, déclaration écrite qui peut être faite par toute personne majeure pour préciser ses souhaits concernant sa fin de vie.

Ces dispositions sont vues comme des moyens efficaces de lever les incertitudes liées aux conditions de la fin de vie. Au moment de leurs votes, elles ont été unanimement saluées. Pourtant, elles sont peu opérantes.

Une équipe de chercheurs a analysé la capacité des personnes de confiance à prendre des décisions correspondant au désir de leur proche. En se basant sur près de 20 000 paires de réponses patient-personne de confiance sur des scénarios hypothétiques de fin de vie, ils sont arrivés à une conclusion préoccupante : dans un tiers des cas, la personne de confiance se trompe sur la préférence de traitement de son proche et ne prend pas la décision que celui-ci souhaiterait.

« Controverses » est un nouveau format de The Conversation France. Nous avons choisi d’y aborder des sujets complexes qui entraînent des prises de positions souvent opposées, voire extrêmes. Afin de réfléchir dans un climat plus apaisé et de faire progresser le débat public, nous vous proposons des analyses qui sollicitent différentes disciplines de recherche et croisent les approches.

Plus alarmant encore : ce chiffre reste le même lorsque des discussions sur ces questions ont déjà eu lieu. En effet, les personnes de confiance peuvent faire primer leurs propres valeurs sur celles de leurs proches. En l’absence de directives anticipées claires, la désignation d’une personne de confiance ne serait pas efficace dans les pratiques actuelles.

Or, les individus ont des difficultés à exprimer clairement leurs avis sur la fin de vie. Les personnes les plus âgées peuvent particulièrement apporter un éclairage sur ce point. Si la mort semble de plus en plus éloignée de nos vies quotidiennes, elle prend une importance particulière avec l’avancée en âge.

Pourtant, demander à une personne âgée de prendre une décision sur sa fin de vie n’est pas pour autant facile, y compris lorsque la famille et les personnels soignants paraissent avoir trouvé un accord. Elles peuvent en particulier être confrontées à des dilemmes moraux : faut-il envisager de ne pas avoir sa vie prolongée dans certaines conditions ? Est-il possible d’accepter de laisser d’autres décider pour soi s’il n’est plus possible de s’exprimer ?

La question est particulièrement complexe dans le cas des personnes âgées qui vivent en institution. Celles-ci peuvent se voir limitées dans l’expression de choix aussi importants que ceux qui vont définir leurs derniers moments d’existence – en raison de leur état de santé, parce que toutes leurs libertés ne sont pas respectées, ou parce qu’on ne leur pose simplement pas la question. Selon une étude menée en 2013-2014 au sein de 78 maisons de retraite en France, les questions relatives à la fin de vie ont été abordées avec au maximum 21,7 % des résidents. Dans 32,8 % des cas, aucune discussion sur les questions relatives à la fin de vie n’a jamais eu lieu, que ce soit avec le résident ou avec les proches. C’est un paradoxe, si on pense que ces lieux d’hébergement sont aussi d’ultimes lieux de vie.

Dans une autre étude exploratoire, des chercheurs en santé britanniques ont mis en évidence les inquiétudes des personnes âgées lorsqu’il leur est demandé de penser aux soins palliatifs et à l’euthanasie (et en particulier aux conditions de leurs mises en œuvre). Ainsi, même si des directives anticipées ont été rédigées en prévision d’hypothétiques difficultés à venir, les personnes âgées ne seront pas nécessairement capables d’y adhérer lorsqu’elles seront réellement confrontées à la fin de leur existence.

Rédiger des directives anticipées n’est pas tout. Encore faut-il être accompagné pour choisir si elles correspondent encore à une conception existentielle qui a pu évoluer, notamment dans ces moments difficiles. Les bénéfices des directives anticipées sont limités par les difficultés des systèmes de santé à intégrer l’expression des choix des patients dans les pratiques de soins, notamment quand l’organisation du travail est complexe, soumise à des contraintes de temps et chargées émotionnellement.

On le comprend : prendre en compte des directives anticipées sur les conditions de la fin de vie implique de donner une place à des échanges qui prennent en compte les choix existentiels de tous. Il est nécessaire de reconnaître une expertise aux patients, même les plus âgés qui sont aptes à dire pour eux-mêmes ce qui est le plus adapté. Sont également centraux les enjeux éthiques associés à des situations cliniques souvent complexes, avec des professionnels formés, qui doivent pouvoir être disponibles.

La convention citoyenne qui vient de se terminer propose d’aller plus loin que les dispositions actuelles. À une large majorité, elle a voté pour l’introduction dans la loi de la notion d’aide active à mourir dans le cadre d’un parcours d’accompagnement et de coordination avec les soins palliatifs.

C’est là que le bât blesse et que se pose la question d’une réelle volonté politique de faire évoluer le cadre législatif de la fin de vie, étant donné l’état du système de santé français. Il est étonnant de constater que l’évaluation de la loi Claeys-Leonetti de 2016 se soit déroulée en même temps que la convention citoyenne : une évaluation préalable aurait certainement été bénéfique pour la qualité des travaux de la convention.

La Haute autorité de santé a toutefois donné quelques éléments de cadrage en 2020.Elle précise que la loi Claeys-Leonetti n’est pas suffisamment appliquée par les professionnels de santé : une amélioration est nécessaire dans le dialogue entre les professionnels de santé et les patients, même les plus âgés. Des progrès sont également nécessaires dans l’accompagnement de ces derniers et de leurs proches.

Ensuite, les décideurs vont-ils introduire l’aide active à mourir alors que le système de soins palliatifs est critiqué pour son aspect inégalitaire (26 départements n’ont pas d’unités de soins palliatifs) et plus largement pour un manque de moyens évidents ?

Les pratiques actuelles, sous-dimensionnées, ne sont pas satisfaisantes et procèdent d’une tendance à penser les dispositifs sans tenir compte de la variété des expériences. Contrairement à certains présupposés, toutes les personnes en fin de vie ne souhaitent pas nécessairement décéder à leur domicile. Les attentes sur les conditions de la fin de vie ne sont pas uniformes. Certains besoins essentiels, qui nécessitent la mise en place d’un accompagnement spécifique, peuvent être selon les situations incompatibles avec un trépas à domicile.

Les propositions de la convention citoyenne font face à une réalité complexe et encore mal appréhendée. Les difficultés autour des directives anticipées ne sont qu’une question parmi bien d’autres.

Face à ces constats, il paraît légitime de se poser la question d’une réelle volonté politique d’introduire la notion d’aide à mourir dans la loi, évolution jusqu’à présent refusée. De nombreuses questions demeurent et un état des lieux de la fin de vie préalable à la convention aurait permis de contribuer à des évolutions souhaitées. Une telle avancée demanderait de revoir en profondeur un système de santé en souffrance.

Fin de vie : le tabou

Fin de vie : le tabou

Interview de Marie de Hennezel qui a exercé auprès de personnes en fin de vie, au sein de la première unité de soins palliatifs créée en France, à Paris. En 2003, à la demande du gouvernement, elle a rendu un rapport intitulé « Fin de vie, le devoir d’accompagnement », qui a inspiré la première loi française spécifique aux droits des malades à l’approche de la mort, dite loi Leonetti de 2005. Aujourd’hui âgée de 76 ans, elle s’oppose à toute légalisation de l’aide active à mourir en France et milite pour une meilleure prise en compte des personnes âgées dans la société. ( franceinfo)

Dans un récent rapport, le Conseil consultatif national d’éthique a relevé que « la fin de vie n’est plus perçue comme un temps essentiel de l’expérience humaine ». Partagez-vous ce constat ?

Marie de Hennezel : Oui. On veut escamoter ce temps. On veut anticiper la mort ou être endormi dans les derniers moments. On considère que bien mourir, c’est mourir dans son sommeil, rapidement, sans déranger les autres. Or, le temps du mourir est précieux. Les derniers échanges qu’un mourant peut avoir avec ses proches lui permettent de partir apaisé et aident les autres à vivre un deuil différent.

N’oublions pas la rupture anthropologique qu’a constituée l’interdiction des visites lors de la crise du Covid-19. De nombreuses familles ont été privées des rituels d’adieu. Les dernières paroles et les derniers gestes sont irremplaçables. Ce sont des temps de méditation sur la finitude, une confrontation de chacun à sa propre mort.

Le fait de pouvoir choisir le moment de sa mort ne permettrait-il pas de mieux organiser sa fin de vie et de redonner de la force à ce « temps essentiel » ?

Je comprends que certaines personnes puissent se dire que c’est la seule manière de pouvoir être sujet de sa mort. Mais c’est quand même dommage. Le suicide assisté et l’euthanasie poseraient d’autres problèmes. Pensez aux proches. Ceux qui accompagnent la personne peuvent se sentir coupables de ne pas avoir réussi à la retenir à la vie. Ceux qui n’y vont pas se sentent coupables de ne pas avoir été là dans les derniers instants. Quoi qu’on fasse, on se sent coupable. C’est quand même assez violent. Quant aux médecins qui pratiquent l’euthanasie, ce n’est pas anodin. J’en ai suivi en psychothérapie. Ils en faisaient des cauchemars après. C’est un acte radical, brutal.

Depuis une quinzaine d’années, vous animez des groupes de parole auprès de personnes retraitées. Quel est leur regard sur leur fin de vie ?

Il y a deux publics. Les 60-80 ans que je rencontre souhaitent préserver leur autonomie et souvent pouvoir choisir le moment de leur mort. C’est une génération encore bien portante, qui veut maîtriser ses derniers moments. Pour les 80-100 ans avec qui j’échange, c’est complètement autre chose. Ils ne demandent pas d’injection létale, mais pensent tous à la mort et aimeraient en parler. Seulement, ils n’ont personne avec qui le faire. Les familles ne veulent pas souvent aborder la question, le personnel des résidences non plus. La solidarité intergénérationnelle s’effrite. Il y a une solitude immense.

Qu’ont envie de dire ces personnes âgées ?

Elles appréhendent la mort en tant que destin de façon relativement apaisée. En revanche, elles redoutent la manière dont elles vont mourir, avec le spectre d’être transférées à l’hôpital et de finir sur un brancard aux urgences, comme cela arrive trop fréquemment.

« Les personnes âgées s’interrogent aussi sur le sens et l’utilité de leur existence. »

Leur crainte : être considérées un jour comme un poids pour la société. « Ne fera-t-on pas pression sur nous pour qu’on ait l’élégance de s’en aller ? », me confiait une femme de 86 ans. « Peut-être qu’on nous culpabilisera de vouloir rester en vie », m’a dit une autre. Nous vivons dans une société jeuniste, qui valorise la performance, la rentabilité, l’efficacité. Ces personnes le perçoivent très bien.

Une loi sur le grand âge, promise lors du précédent quinquennat et destinée à améliorer les conditions de vie des personnes en perte d’autonomie, a finalement été abandonnée. Comment l’interprétez-vous ?

C’est un très mauvais signal, d’autant qu’il est désormais question d’une loi sur la fin de vie. La génération des baby-boomers commence à arriver dans les zones de fragilité du grand âge. Elle perçoit bien le manque d’investissements en matière d’accompagnement, d’habitat, de mobilité… Quand vous allez avoir presque 30% de la population en perte d’autonomie, ces personnes âgées risquent de se sentir comme un poids pour la société. Vous verrez qu’un certain nombre de personnes auront le sentiment d’une vieillesse indigne et réclameront la mort. Prenons soin de préserver leur estime d’elles-mêmes.

Où en est notre société dans son rapport à la mort ?

Elle entretient un rapport très paradoxal avec la mort. Il y a une phrase de l’anthropologue Louis-Vincent Thomas qui résume tout : « Nous sommes dans une société thanatophobe et mortifère. »

« Par peur de la mort, nous voulons l’anticiper. »

Faire face à la mort et rester vivant jusqu’au bout n’est pas facile dans un monde qui dénie la mort et qui valorise l’autonomie et la maîtrise sur sa vie. On en vient à parler de « droit à la mort », de « liberté de choisir le moment de sa mort ». Cette volonté de maîtrise est une façon de faire face à sa peur. Or c’est surtout une volonté de bien-portants. Plus on approche de la fin de sa vie et plus, en général, on y tient. Mais le tabou qui règne dans les familles et dans le monde médical engendre une grande solitude chez ceux qui vont mourir.

A quand remonte le déni de la mort ?

Cela a commencé après-guerre, avec les progrès de la médecine et le souhait de faire reculer la mort. Avec succès, d’ailleurs, puisque nous avons gagné 20 années d’espérance de vie depuis 1945. Or cette médecine toute-puissante a un rapport difficile à la mort. Durant mon parcours, je n’ai presque connu que des médecins pour qui la mort était un échec.

Le corps médical a beaucoup à apprendre des services de soins palliatifs : on y accepte que les personnes vont mourir et que ce n’est pas un échec. Plutôt que de s’obstiner, on y aide les patients à mourir le mieux possible, sans souffrance. Malheureusement, les médecins sont trop peu formés à cette culture. Il faudrait instituer, chaque année, dans les hôpitaux, une réunion obligatoire pour sensibiliser tous les soignants à l’accompagnement de la fin de vie.

Vous avez été la première psychologue à intervenir en unité de soins palliatifs. Comment les patients y appréhendaient-ils leurs derniers moments ?

Ils avaient d’abord besoin de vérité. A l’époque, il y avait cette comédie du mensonge dans les autres services : on racontait aux gens qu’on allait les retaper et que, 15 jours plus tard, ils allaient sortir et que tout irait bien. Mais ces personnes sentaient bien que leur corps s’affaiblissait et qu’elles allaient mourir. Le discours qu’on leur tenait, en contradiction avec ce qu’elles sentaient, les angoissait.

J’ai trouvé remarquable, en soins palliatifs, que les médecins et l’équipe ne jouent pas cette comédie. Ils avaient l’intelligence de dire ce qu’ils savaient et ce qu’ils ne savaient pas. Ils reconnaissaient ne plus pouvoir guérir le patient, mais ne donnaient pas de pronostic chiffré.

« Le temps qu’il reste à quelqu’un dépend du mystère des corps et des échéances intimes de chacun. »

Certains ont peur de mourir et se disent : « Autant que cela intervienne le plus vite possible. » J’en ai vu lâcher prise intérieurement et mourir assez rapidement. D’autres ont besoin de temps, pour vivre des choses importantes. Il peut y avoir un regain de vitalité, une appétence relationnelle, une envie de rencontrer des gens, de boucler la boucle avec eux. C’est une question de tempérament et de personnalité. A partir du moment où chacun est dans la vérité, il peut décider au fond de lui ce qui va se passer.

Comment les proches, plongés dans cette société de déni de la mort, trouvaient-ils leur place ?

Ce sont les mourants qui aidaient les vivants. Ils abordaient eux-mêmes la question de leur mort. Et nous, dans l’équipe, nous faisions tout ce que nous pouvions pour aider les proches à surmonter leur peur d’entrer dans la chambre, d’être présents, de tenir la main, de parler. C’est vraiment un temps essentiel, qu’il faut préserver, sans l’escamoter.

Fin de vie et euthanasie : l’Ordre des médecins « défavorable »

Fin de vie et euthanasie : l’Ordre des médecins « défavorable »


Alors que les conclusions de la convention citoyenne (qui par parenthèses n’a aucune légitimité et aucune compétence) sur la fin de vie, qui pourrait engendrer un changement de loi avant fin 2023 en la matière en se prononçant sur la légalisation d’une « aide active à mourir », sont attendues dimanche 2 avril, l’Ordre des médecins estime qu’un praticien ne peut « provoquer délibérément la mort par l’administration d’un produit létal ». Il se dit également « défavorable à toute possibilité de mettre en place une procédure d’aide active à mourir pour les mineurs et les personnes hors d’état de manifester leur volonté ».

L’Ordre des médecins se montre plus souple sur le suicide assisté, à certaines conditions. « Dans l’hypothèse d’une légalisation du suicide assisté », poursuit le communiqué, le conseil demanderait l’établissement d’une « clause de conscience » pour les médecins, « qui pourrait être mise en exergue à tout moment de la procédure ». Il souhaite également que « l’évaluation, la décision d’éligibilité pour une aide active à mourir, et la responsabilité devraient être collégiales ». Si le Conseil est « défavorable à la participation active du médecin lors de la prise du produit létal par le patient », il estime « que le médecin qui n’aurait pas fait valoir sa clause de conscience pourrait rester présent et accompagner son patient jusqu’à ses derniers instants ».

Vers la fin du Service national universel

Vers la fin du Service national universel ?


La fin déjà du service national universel qui n’était déjà qu’un ersatz du service militaire. Sorte de service civil ressemblant à une colonie de vacances vient de prendre fin dans le budget militaire. Budgétairement le SNU est supprimé pour autant il continuera d’êtreer financé mais on ne sait pas comment . Il est clair que ce service est évidemment complètement inadapté à une situation de guerre de haute intensité ou même à un apprentissage et une appropriation des valeurs républicaines. Finalement,il y aura quelques heures de cours à l’école ou le retour de l’éducation civique d’antan. Le nombre de jeunes concernés étaient très marginale de l’ordre de quelques dizaines de milliers quand une génération représente 800 000. 50 000 Jeunes sont concernés au maximum par le SNU en 2023. Bref la plus grande confusion sur l’objectif, les modalités et les moyens.

Le Service national universel (SNU) ne figurera donc pas compte tenu du contexte social dans la prochaine Loi de programmation militaire (LPM) couvrant la période 2024-2030. En revanche, la LPM sera bien présentée mardi prochain en conseil des ministres après quelques hésitations de l’exécutif. « On a l’intention d’aller de l’avant résolument sur le processus relatif à la loi de programmation militaire, dont le projet a été envoyé au Conseil d’État », confirmait-on lundi à l’Élysée. Le coût budgétaire du SNU est estimé autour de 3,5 milliards d’euros pas an, dont une partie pèse sur le budget du ministère des Armées.

Voulu par Emmanuel Macron, le SNU vise « à impliquer davantage la jeunesse dans la vie de la Nation, à promouvoir la notion d’engagement, à renforcer la mixité territoriale et à favoriser un sentiment d’unité nationale autour de valeurs communes ».

Pour une généralisation hors temps scolaire, le nombre de personnes recrutées devrait être compris entre 39.375 et 52.500. Concernant le scénario d’une généralisation du SNU sur le temps scolaire, les besoins de recrutement seraient moins élevés (entre 14.000 et 16.153 personnes).Un imbroglio total entre SNU à l’extérieur, un SNU à l’intérieur de l’école et des cours d’éducation civique pour tous.

La fin du Service national universel , déjà !

La fin du Service national universel , déjà !

La fin déjà du service national universel qui n’était déjà qu’un ersatz du service militaire. Sorte de service civil ressemblant à une colonie de vacances vient de prendre fin dans le budget militaire. Budgétairement le SNU est supprimé pour autant il continuera financé on ne sait pas comment . Il est clair que ce service est évidemment complètement inadapté à une situation de guerre de haute intensité ou même à un apprentissage et une appropriation des valeurs républicaines. Finalement il y aura quelques heures de cours à l’école ou le retour de l’éducation civique d’antan. Le nombre de jeunes concernés étaient très marginale de l’ordre de quelques dizaines de milliers quand une génération représente 800 000. 50 000 Jeunes sont concernés au maximum par le SNU en 2023. Bref la plus grande confusion sur l’objectif, les modalités et les moyens.

Le Service national universel (SNU) ne figurera donc pas compte tenu du contexte social dans la prochaine Loi de programmation militaire (LPM) couvrant la période 2024-2030. En revanche, la LPM sera bien présentée mardi prochain en conseil des ministres après quelques hésitations de l’exécutif. « On a l’intention d’aller de l’avant résolument sur le processus relatif à la loi de programmation militaire, dont le projet a été envoyé au Conseil d’État », confirmait-on lundi à l’Élysée. Le coût budgétaire du SNU est estimé autour de 3,5 milliards d’euros pas an, dont une partie pèse sur le budget du ministère des Armées.

Voulu par Emmanuel Macron, le SNU vise « à impliquer davantage la jeunesse dans la vie de la Nation, à promouvoir la notion d’engagement, à renforcer la mixité territoriale et à favoriser un sentiment d’unité nationale autour de valeurs communes ».

Pour une généralisation hors temps scolaire, le nombre de personnes recrutées devrait être compris entre 39.375 et 52.500. Concernant le scénario d’une généralisation du SNU sur le temps scolaire, les besoins de recrutement seraient moins élevés (entre 14.000 et 16.153 personnes).Un imbroglio total entre SNU à l’extérieur, un SNU à l’intérieur de l’école et des cours d’éducation civique pour tous.

Le Conseil constitutionnel doit mettre fin à la chienlit de Macron ou disparaître

Le Conseil constitutionnel doit mettre fin à la chienlit de Macron ou disparaître

Dans la crise générale politique, démocratique et sociétale, toutes les institutions sont remises en cause. On leur reproche à la fois leur manque de représentativité donc de légitimité et leur caractère inefficace et bureaucratique. La reproche vaut aussi pour le conseil constitutionnel normalement composé de sages mais en fait de personnalités désignées par les pouvoirs politiques. Une conséquence consubstantielle au centralisme politique français. Pire, on a même autorisé aussi la présence d’anciens présidents de la république. On se demande sur quels critères d’objectivité voire de compétences.

Le conseil constitutionnel a sans doute cette fois l’occasion exceptionnelle de justifier son existence pour mettre fin à la chienlit de Macron qui s’affranchit allègrement de l’esprit et du fonds de la constitution. Par exemple en utilisant un véhicule législatif inadéquate.

Par exemple encore en réduisant le temps de débat au parlement, par exemple en autorisant l’annulation systématique des amendements, par exemple en introduisant des mesures sociales structurelles qui n’ont rien à voir dans le cadre d’une loi rectificative de financement de la sécurité sociale. Par exemple encore en ignorant les organisations syndicales et leur légitimité sociale. Résultat un pays grandement affecté par des grèves, des manifestations voir certaines violences. Un pays dont l’image va se trouver tellement ternie qu’elle risque de décourager les touristes voir des investisseurs. Un pays en pleine déprime sociétale.

Or le Conseil constitutionnel doit vérifier si l’objectif gouvernemental de la réforme des retraites est conforme à la constitution. La réponse est sans ambiguïté non. Logiquement le conseil constitutionnel devrait condamner la totalité de cette réforme. Il ne le fera pas pour ménager le corporatisme des élites. Par contre, il annulera nombre de dispositions anticonstitutionnelles qui videraient à alors le projet de réforme de sa substance. De quoi permettre au pays de retrouver son calme et de restaurer les relations démocratiques dans le pays.
Si le conseil constitutionnel ne procède pas ainsi alors lui aussi sera mis en cause.

Faut-il rappeler qu’il est composé de neuf membres : trois désignés par le chef de l’État, trois désignés par le président de l’Assemblée nationale, trois désignés par le président du Sénat plus la présence des anciens présidents de la république. Résumé : neuf membres désigné par des responsables politiques qui n’ont obtenu qu’entre 5 et 13% pour cent

APRÈS LE 49.3: la fin d’Elisabeth Borne

APRÈS LE 49.3: la fin d’Elisabeth Borne

Le recours à l’article 49 trois est évidemment un échec retentissant pour Macron et pour Élisabeth Borne . Cette dernière a tenté jusqu’au dernier moment de persuader le chef de l’État d’aller jusqu’au vote à l’assemblée. Cependant un vote majoritaire devenant très hypothétique Macron a tranché en faveur de la brutalité.

Élisabeth Borne pourrait payer cette erreur de stratégie. Rien d’étonnant d’une certaine façon, l’intéressée -étiquetée de gauche paraît-il- n’a jamais fait montre de la moindre épaisseur politique. Et pour cause, cette technocrate est sortie du chapeau sans avoir eu au préalable le moindre engagement citoyen. En outre son autoritarisme n’a pas aidé la concertation.

Elle va engager la responsabilité de son gouvernement, qui pourrait être renversé en cas d’adoption d’une motion de censure par une majorité de députés à l’Assemblée nationale.

La réforme est désormais considérée comme adoptée, sauf si une motion de censure est votée. Les oppositions ont à présent 24 heures, soit jusqu’à ce vendredi, à 15h20, pour déposer un tel texte. Il faut 56 signataires pour qu’une motion pour permettre un dépôt.

Complètement discréditée Élisabeth Barnes n’a plus qu’une solution honorable accepter de se démettre. Son discours à l’assemblée pour annoncer le 49 -3 témoignait de sa grande fébrilité tout autant que de sa déception. Par ailleurs ses attaques contre « les républicains » témoignait sans doute de sa résignation et de sa fin de règne.

Une fois déposées, la ou les motions de censure doivent être examinées à l’Assemblée nationale dans une limite de 48 heures. En fonction du moment du dépôt des textes, elles le seront entre samedi et lundi, en fonction de la décision de la Conférences de Présidents de groupe.

Selon les récentes déclarations des différents groupes et partis, trois motions de censure pourraient être déposées: une par la NUPES, une par le RN (qui a déjà été officialisée par Marine Le Pen) et une autre, transpartisane, qui pourrait être cosignées par le groupe Libertés, Indépendants Outre-mer et Territoires (Liot), qui compte 20 députés, ainsi que des députés Les Républicains. Des députés de la Nupes, mais pas de La France insoumise, pourrait également participer à cette dernière motion.

La possible motion transpartisane apparaît comme la seule en mesure d’être votée car n’émanant ni du RN ni de la Nupes, qui clivent certains camps d’opposition. Pour être adopté, ce texte doit recueillir 289 votes, ce qui implique tous les députés Nupes (149 personnes), tous les députés RN (88), tous les Liot (20) et au moins 32 des 61 députés Les Républicains.

Si tel est le cas, le gouvernement d’Élisabeth Borne serait renversé. Emmanuel Macron, aura alors le choix entre la nommer à nouveau pour former un nouveau gouvernement, choisir un autre Premier ministre ou dissoudre l’Assemblée nationale.

Réforme des Retraites: le Sénat vote la fin des régimes spéciaux…. pour les futurs embauchés

Réforme des Retraites: le Sénat vote la fin des régimes spéciaux…. pour les futurs embauchés


Avec le vote du Sénat, il est prévu que les agents recrutés à compter de septembre 2023 soient affiliés au régime de droit commun pour l’assurance vieillesse. Les salariés concernés déjà en poste conservent leurs avantages. C’est la «clause du grand-père».Le projet gouvernemental qui prévoit l’extinction progressive de cinq régimes spéciaux (industries électriques et gazières, RATP, Banque de France, clercs et employés de notaire, membres du Conseil économique, social et environnemental). Notons cependant que le Sénat, lui, maintient son propre régime très avantageux de retraite !

Et contradiction supplémentaire, Bruno Retailleau est contre la «clause du grand-père». Contrairement au gouvernement, le sénateur vendéen souhaite que la suppression tout de suite des régimes spéciaux aux salariés déjà en poste. De quoi installer une véritable pagaille dans les entreprises ou pour le même poste des salariés auront des statuts différents.

Après le vote de l’article 1 dans la nuit de samedi à dimanche, la Chambre Haute poursuit l’examen du texte. Les sénateurs se penchent désormais sur l’épineuse question de l’emploi des seniors et débattent de «l’index» prévu par le gouvernement. Rejetée, mi-février, par l’Assemblée nationale au grand dam du gouvernement, cette mesure prévoit une obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés de publier des indicateurs sur leur taux d’emploi des salariés de plus de 55 ans. Pour l’instant des indicateurs qui ne prévoient aucune contrainte !

Réseaux sociaux : mettre fin à l’anonymat

Réseaux sociaux : mettre fin à l’anonymat

Par Philippe Boyer, directeur relations institutionnelles et innovation à Covivio.


Certaines images d’archives de l’INA montrent que, durant les évènements de Mai-68, lors des assemblées générales de grévistes, à un moment donné ou à un autre, la question déboulait lorsqu’une personne inconnue prenait la parole : « D’où parles-tu camarade ? », lui demandait-on alors. Par cette interpellation directe, l’orateur était sommé de justifier sa position de « classe », et donc sa légitimité à s’exprimer. Avec le numérique et singulièrement les réseaux sociaux, ce « D’où parles-tu camarade ? » s’est transformé en « Vas-y camarade : profite, exprime-toi autant que tu veux… tu as et tu es la parole ! ».

C’est un fait : nous sommes désormais noyés dans un flot ininterrompu de paroles, au point, parfois, d’espérer un peu de silence…
Bien sûr, on ne cédera pas à ce trop facile « c’était mieux avant… » au point d’oublier que ce sont ces outils numériques qui ont notamment permis à la parole de se libérer : #MeToo, #BlackLivesMatter, #OccupyWallStreet, #JeSuisCharlie ou, plus récemment #MahsaAmini … des milliards de prises de paroles pour exprimer une indignation et faire bouger l’ordre établi.

Avec la révolution numérique, tout ou presque est devenu parole. Nous, les humains, avons d’ailleurs perdu ce privilège de la parole depuis que les machines interagissent sans cesse avec nous : réfrigérateurs, voitures, livres, journaux (à défaut de la lire, cette chronique peut être écoutée) : sans jeu de mots, tout nous parle.
Outre que tout cela génère une cacophonie assourdissante qui a pour résultat de rendre impossible toute tentative de hiérarchisation de l’information, ce magma de mots, de sons et d’images (vidéos, smileys, SMS…) a pour effet de banaliser la parole et, par voie de conséquence, d’étouffer le débat.

On se parle sans s’écouter, on se parle entre soi, on parle pour exclure, on parle pour ne rien dire… bref, trop de paroles tue la parole, selon la formule connue, en écho à la thèse de l’ouvrage récent de Monique Atlan et Roger-Pol Droit, « Quand la parole détruit [1] ».

Ne rêvons pas : on ne refermera plus cette boîte de Pandore, qui, grâce à la palette d’outils numériques à la disposition du plus grand nombre, permet à cette parole de triompher voire de se transformer en arme lorsque celle-ci se mue en injure, complotisme, calomnie ou haine de l’autre.
Alors comment tenter de réguler cette parole ou, à défaut, essayer de la canaliser ? Bien sûr, il y a la vision idéale d’un Socrate pour qui le « dialogue » (« dia » : à-travers et « logos » : parole) permet d’exercer sa raison grâce à l’échange et à l’objection. Nous n’en sommes malheureusement plus là…

Il faut donc réfléchir à d’autres formes de maîtrise de la parole, non pour censurer mais pour faire en sorte que les débordements liés aux outils numériques soient contenus.

Dans son dernier ouvrage, la philosophe Monique Canto-Sperber [2] avance l’idée que la liberté d’expression, héritée de grandes lois au XIXe siècle – en France, avec notamment la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse -, repose sur le principe que ceux qui avaient accès à la parole, pouvaient certes critiquer, contester… mais que leurs interventions dans le débat public se faisait en cohérence avec « un langage et des valeurs communes » [3].

C hacun a les moyens de s’exprimer, mais les paroles les plus extrêmes sont valorisées par les algorithmes avec pour conséquence que la parole devient assassine et, partant, que l’écoute, les nuances et le débat n’existent plus. Et de conclure que la liberté d’expression est « un droit qui doit être limité si son emploi cause un dommage ».
L’une des pistes consisterait donc à réfléchir à des actions destinées à définir ce qui est/serait admissible ou pas en termes de paroles et de liberté d’expression. Constat a priori logique mais pas simple à mettre en œuvre à l’ère du numérique, et cela, dans un État de droit.

L’autre piste pour tenter de canaliser cette parole débridée, qui débouche souvent sur des formes de violence verbale, consiste à miser, voire imposer un plus haut niveau de responsabilisation des grandes plateformes. Concrètement, il faudrait règlementer en faveur de la fin de l’anonymat.

En le faisant, on pourra tout autant s’exprimer mais on ne pourra plus le faire en toute impunité, en se cachant derrière un pseudonyme. Certes, la fin d’un anonymat généralisé qui déresponsabilise utilisateurs et diffuseurs n’est pas pour demain, mais cette idée connaît néanmoins de réelles avancées.

Contraints de se réinventer et à appliquer les réglementations imposées par les États, et singulièrement l’Union Européenne (RGPD, DSA, DMA : ces sigles comme autant d’initiatives de l’UE pour réglementer le Far-West numérique), les GAFA tendent de plus en plus à proposer à leurs utilisateurs de nouveaux services payants qui passent par des contraintes d’identification.

Outre que ces identifications individuelles s’avéreraient, à long terme, plus rentables que les formules qui reposent sur la gratuité et l’anonymat, elles permettraient à ces plateformes d’avoir le beau rôle : avoir été à l’origine d’une maîtrise du niveau de violences verbales sans toucher à la sacro-sainte liberté d’expression et tout en générant plus de bénéfices.
En soi, un idéal à atteindre qui permettrait de faire en sorte que la parole ne tue plus, et que l’on sache enfin d’où parle ce camarade…
___
NOTE
1 Monique Atlan et Roger-Pol Droit, « Quand la parole détruit », Éditions de l’Observatoire (décembre 2022).
2 Monique Canto-Sperber, « Sauver la liberté d’expression », Éditions Albin Michel (avril 2021).
3 https://www.lepoint.fr/postillon/canto-sperber-la-liberte-d-expression-releve-du-juste-pas-du-bien-24-04-2021-2423560_3961.php

Responsabilisation des réseaux sociaux : pour la fin de l’anonymat

Responsabilisation des réseaux sociaux : pour la fin de l’anonymat

Par Philippe Boyer, directeur relations institutionnelles et innovation à Covivio.


Certaines images d’archives de l’INA montrent que, durant les évènements de Mai-68, lors des assemblées générales de grévistes, à un moment donné ou à un autre, la question déboulait lorsqu’une personne inconnue prenait la parole : « D’où parles-tu camarade ? », lui demandait-on alors. Par cette interpellation directe, l’orateur était sommé de justifier sa position de « classe », et donc sa légitimité à s’exprimer. Avec le numérique et singulièrement les réseaux sociaux, ce « D’où parles-tu camarade ? » s’est transformé en « Vas-y camarade : profite, exprime-toi autant que tu veux… tu as et tu es la parole ! ».

C’est un fait : nous sommes désormais noyés dans un flot ininterrompu de paroles, au point, parfois, d’espérer un peu de silence…
Bien sûr, on ne cédera pas à ce trop facile « c’était mieux avant… » au point d’oublier que ce sont ces outils numériques qui ont notamment permis à la parole de se libérer : #MeToo, #BlackLivesMatter, #OccupyWallStreet, #JeSuisCharlie ou, plus récemment #MahsaAmini … des milliards de prises de paroles pour exprimer une indignation et faire bouger l’ordre établi.

Avec la révolution numérique, tout ou presque est devenu parole. Nous, les humains, avons d’ailleurs perdu ce privilège de la parole depuis que les machines interagissent sans cesse avec nous : réfrigérateurs, voitures, livres, journaux (à défaut de la lire, cette chronique peut être écoutée) : sans jeu de mots, tout nous parle.
Outre que tout cela génère une cacophonie assourdissante qui a pour résultat de rendre impossible toute tentative de hiérarchisation de l’information, ce magma de mots, de sons et d’images (vidéos, smileys, SMS…) a pour effet de banaliser la parole et, par voie de conséquence, d’étouffer le débat.

On se parle sans s’écouter, on se parle entre soi, on parle pour exclure, on parle pour ne rien dire… bref, trop de paroles tue la parole, selon la formule connue, en écho à la thèse de l’ouvrage récent de Monique Atlan et Roger-Pol Droit, « Quand la parole détruit [1] ».

Ne rêvons pas : on ne refermera plus cette boîte de Pandore, qui, grâce à la palette d’outils numériques à la disposition du plus grand nombre, permet à cette parole de triompher voire de se transformer en arme lorsque celle-ci se mue en injure, complotisme, calomnie ou haine de l’autre.
Alors comment tenter de réguler cette parole ou, à défaut, essayer de la canaliser ? Bien sûr, il y a la vision idéale d’un Socrate pour qui le « dialogue » (« dia » : à-travers et « logos » : parole) permet d’exercer sa raison grâce à l’échange et à l’objection. Nous n’en sommes malheureusement plus là…

Il faut donc réfléchir à d’autres formes de maîtrise de la parole, non pour censurer mais pour faire en sorte que les débordements liés aux outils numériques soient contenus.

Dans son dernier ouvrage, la philosophe Monique Canto-Sperber [2] avance l’idée que la liberté d’expression, héritée de grandes lois au XIXe siècle – en France, avec notamment la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse -, repose sur le principe que ceux qui avaient accès à la parole, pouvaient certes critiquer, contester… mais que leurs interventions dans le débat public se faisait en cohérence avec « un langage et des valeurs communes » [3].

C hacun a les moyens de s’exprimer, mais les paroles les plus extrêmes sont valorisées par les algorithmes avec pour conséquence que la parole devient assassine et, partant, que l’écoute, les nuances et le débat n’existent plus. Et de conclure que la liberté d’expression est « un droit qui doit être limité si son emploi cause un dommage ».
L’une des pistes consisterait donc à réfléchir à des actions destinées à définir ce qui est/serait admissible ou pas en termes de paroles et de liberté d’expression. Constat a priori logique mais pas simple à mettre en œuvre à l’ère du numérique, et cela, dans un État de droit.

L’autre piste pour tenter de canaliser cette parole débridée, qui débouche souvent sur des formes de violence verbale, consiste à miser, voire imposer un plus haut niveau de responsabilisation des grandes plateformes. Concrètement, il faudrait règlementer en faveur de la fin de l’anonymat.

En le faisant, on pourra tout autant s’exprimer mais on ne pourra plus le faire en toute impunité, en se cachant derrière un pseudonyme. Certes, la fin d’un anonymat généralisé qui déresponsabilise utilisateurs et diffuseurs n’est pas pour demain, mais cette idée connaît néanmoins de réelles avancées.

Contraints de se réinventer et à appliquer les réglementations imposées par les États, et singulièrement l’Union Européenne (RGPD, DSA, DMA : ces sigles comme autant d’initiatives de l’UE pour réglementer le Far-West numérique), les GAFA tendent de plus en plus à proposer à leurs utilisateurs de nouveaux services payants qui passent par des contraintes d’identification.

Outre que ces identifications individuelles s’avéreraient, à long terme, plus rentables que les formules qui reposent sur la gratuité et l’anonymat, elles permettraient à ces plateformes d’avoir le beau rôle : avoir été à l’origine d’une maîtrise du niveau de violences verbales sans toucher à la sacro-sainte liberté d’expression et tout en générant plus de bénéfices.
En soi, un idéal à atteindre qui permettrait de faire en sorte que la parole ne tue plus, et que l’on sache enfin d’où parle ce camarade…
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NOTE
1 Monique Atlan et Roger-Pol Droit, « Quand la parole détruit », Éditions de l’Observatoire (décembre 2022).
2 Monique Canto-Sperber, « Sauver la liberté d’expression », Éditions Albin Michel (avril 2021).
3 https://www.lepoint.fr/postillon/canto-sperber-la-liberte-d-expression-releve-du-juste-pas-du-bien-24-04-2021-2423560_3961.php

Réseaux sociaux : pour la responsabilisation et la fin de l’anonymat

Réseaux sociaux : pour la responsabilisation et la fin de l’anonymat

Par Philippe Boyer, directeur relations institutionnelles et innovation à Covivio.

Certaines images d’archives de l’INA montrent que, durant les évènements de Mai-68, lors des assemblées générales de grévistes, à un moment donné ou à un autre, la question déboulait lorsqu’une personne inconnue prenait la parole : « D’où parles-tu camarade ? », lui demandait-on alors. Par cette interpellation directe, l’orateur était sommé de justifier sa position de « classe », et donc sa légitimité à s’exprimer. Avec le numérique et singulièrement les réseaux sociaux, ce « D’où parles-tu camarade ? » s’est transformé en « Vas-y camarade : profite, exprime-toi autant que tu veux… tu as et tu es la parole ! ».

C’est un fait : nous sommes désormais noyés dans un flot ininterrompu de paroles, au point, parfois, d’espérer un peu de silence…
Bien sûr, on ne cédera pas à ce trop facile « c’était mieux avant… » au point d’oublier que ce sont ces outils numériques qui ont notamment permis à la parole de se libérer : #MeToo, #BlackLivesMatter, #OccupyWallStreet, #JeSuisCharlie ou, plus récemment #MahsaAmini … des milliards de prises de paroles pour exprimer une indignation et faire bouger l’ordre établi.

Avec la révolution numérique, tout ou presque est devenu parole. Nous, les humains, avons d’ailleurs perdu ce privilège de la parole depuis que les machines interagissent sans cesse avec nous : réfrigérateurs, voitures, livres, journaux (à défaut de la lire, cette chronique peut être écoutée) : sans jeu de mots, tout nous parle.
Outre que tout cela génère une cacophonie assourdissante qui a pour résultat de rendre impossible toute tentative de hiérarchisation de l’information, ce magma de mots, de sons et d’images (vidéos, smileys, SMS…) a pour effet de banaliser la parole et, par voie de conséquence, d’étouffer le débat.

On se parle sans s’écouter, on se parle entre soi, on parle pour exclure, on parle pour ne rien dire… bref, trop de paroles tue la parole, selon la formule connue, en écho à la thèse de l’ouvrage récent de Monique Atlan et Roger-Pol Droit, « Quand la parole détruit [1] ».

Ne rêvons pas : on ne refermera plus cette boîte de Pandore, qui, grâce à la palette d’outils numériques à la disposition du plus grand nombre, permet à cette parole de triompher voire de se transformer en arme lorsque celle-ci se mue en injure, complotisme, calomnie ou haine de l’autre.
Alors comment tenter de réguler cette parole ou, à défaut, essayer de la canaliser ? Bien sûr, il y a la vision idéale d’un Socrate pour qui le « dialogue » (« dia » : à-travers et « logos » : parole) permet d’exercer sa raison grâce à l’échange et à l’objection. Nous n’en sommes malheureusement plus là…

Il faut donc réfléchir à d’autres formes de maîtrise de la parole, non pour censurer mais pour faire en sorte que les débordements liés aux outils numériques soient contenus.

Dans son dernier ouvrage, la philosophe Monique Canto-Sperber [2] avance l’idée que la liberté d’expression, héritée de grandes lois au XIXe siècle – en France, avec notamment la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse -, repose sur le principe que ceux qui avaient accès à la parole, pouvaient certes critiquer, contester… mais que leurs interventions dans le débat public se faisait en cohérence avec « un langage et des valeurs communes » [3].

C hacun a les moyens de s’exprimer, mais les paroles les plus extrêmes sont valorisées par les algorithmes avec pour conséquence que la parole devient assassine et, partant, que l’écoute, les nuances et le débat n’existent plus. Et de conclure que la liberté d’expression est « un droit qui doit être limité si son emploi cause un dommage ».
L’une des pistes consisterait donc à réfléchir à des actions destinées à définir ce qui est/serait admissible ou pas en termes de paroles et de liberté d’expression. Constat a priori logique mais pas simple à mettre en œuvre à l’ère du numérique, et cela, dans un État de droit.

L’autre piste pour tenter de canaliser cette parole débridée, qui débouche souvent sur des formes de violence verbale, consiste à miser, voire imposer un plus haut niveau de responsabilisation des grandes plateformes. Concrètement, il faudrait règlementer en faveur de la fin de l’anonymat.

En le faisant, on pourra tout autant s’exprimer mais on ne pourra plus le faire en toute impunité, en se cachant derrière un pseudonyme. Certes, la fin d’un anonymat généralisé qui déresponsabilise utilisateurs et diffuseurs n’est pas pour demain, mais cette idée connaît néanmoins de réelles avancées.

Contraints de se réinventer et à appliquer les réglementations imposées par les États, et singulièrement l’Union Européenne (RGPD, DSA, DMA : ces sigles comme autant d’initiatives de l’UE pour réglementer le Far-West numérique), les GAFA tendent de plus en plus à proposer à leurs utilisateurs de nouveaux services payants qui passent par des contraintes d’identification.

Outre que ces identifications individuelles s’avéreraient, à long terme, plus rentables que les formules qui reposent sur la gratuité et l’anonymat, elles permettraient à ces plateformes d’avoir le beau rôle : avoir été à l’origine d’une maîtrise du niveau de violences verbales sans toucher à la sacro-sainte liberté d’expression et tout en générant plus de bénéfices.
En soi, un idéal à atteindre qui permettrait de faire en sorte que la parole ne tue plus, et que l’on sache enfin d’où parle ce camarade…
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NOTE
1 Monique Atlan et Roger-Pol Droit, « Quand la parole détruit », Éditions de l’Observatoire (décembre 2022).
2 Monique Canto-Sperber, « Sauver la liberté d’expression », Éditions Albin Michel (avril 2021).
3 https://www.lepoint.fr/postillon/canto-sperber-la-liberte-d-expression-releve-du-juste-pas-du-bien-24-04-2021-2423560_3961.php

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