Archive pour le Tag 'Faut-il'

France : des résultats scolaires qui expliquent une partie de la crise française

France :  des résultats scolaires qui expliquent une partie de la crise française

 

Les résultats solaires de la France sont particulièrement mauvais, avec une tendance à la baisse encore plus marquée.

Ils expliquent une partie des crises du pays La France se classe à la 23e place du classement, alors qu’elle est 7e puissance mondiale. Les résultats sont surtout en régression en maths pour les élèves de 15 ans.  »En mathématiques, la forte baisse observée en France entre 2018 et 2022 est la plus importante observée depuis la première étude PISA  » en 2000, avec une baisse de » 21 points, contre une baisse de 15 points pour la moyenne », note l’OCDE.

. Malheureusement, les nouvelles ne sont pas bonnes pour la France. Elle termine à la 23e place de ce classement et chute lourdement en mathématiques. À l’échelle mondiale, les résultats du classement démontrent une baisse significative et généralisée post-crise du covid-19.

Pour rappel cette étude à consulter dans son intégralité sur le site de l’OCDE, évalue les élèves sur plusieurs épreuves. La première est un test de compréhension de l’écrit, suivi ensuite du test de culture mathématique, de celui de culture scientifique et enfin d’un exercice de pensée créative. Cette année, 85 pays faisaient partie de l’aventure avec pas moins de 8 000 élèves tirés au sort. En France, 355 établissements étaient concernés.

La France ne fait pas figure de bonne élève. Elle se situe dans la moyenne des pays de l’OCDE, avec 474 points en mathématiques, en dessous de la moyenne, à 480 points ; 474 points en compréhension de l’écrit alors que la moyenne se situe à 482 points ; 487 points en culture scientifique points alors que la moyenne est à 491 points.

Il faut retenir du classement Pisa 2023 (appelé 2022 car l’étude rend compte des résultats de l’an dernier en réalité) ceci : les résultats globaux sont en baisse, notamment du fait de la pandémie de Covid-19. Seulement trois pays parviennent à faire mieux qu’en 2019 : Singapour, le Japon, la Corée du Sud. Tous les autres ont de plus mauvais résultats.

 

Faut-il renommer le vivant ?

Faut-il renommer le vivant ?

 

La description de la biodiversité repose sur une discipline appelée taxinomie – ou taxonomie – qui se charge de décrire, classer et nommer des éléments structurés de la biodiversité, appelés taxons. D’Aristote à Albert le Grand en passant par Pline l’Ancien, de nombreux travaux de taxonomie sont parvenus à la postérité par des auteurs venant d’époques, de langues et de cultures différentes. Les langues vernaculaires n’étant pas suffisantes pour communiquer sans ambiguïté à propos des différents taxons – certains organismes ayant une multitude de noms, ou aucun dans nos langues actuelles – une discipline internationale est apparue pour établir des noms dits scientifiques : la nomenclature. Elle est dite linnéenne du nom de son fondateur Carl von Linné, un naturaliste suédois du XVIIIe siècle, et est également qualifiée de binomiale (en botanique) ou binominale (en zoologie). Ces deux adjectifs renvoient au fait que les noms d’espèces s’écrivent en deux parties : le nom de genre d’abord, puis l’épithète spécifique. Écrits en italique, ils sont suivis du nom de l’auteur (entier ou sous forme d’abréviation) et souvent de la date de publication en zoologie (ex. Rana temporaria Linnaeus, 1758 pour la grenouille rousse, ou le cerisier griottier Prunus cerasus L. 1753). Depuis peu, ce système fait pourtant l’objet d’une nouvelle vague de critiques. Pour en comprendre les tenants et aboutissants, penchons-nous sur le fonctionnement de cette discipline pluricentenaire.

Par  Taxonomiste et informaticien de la biodiversité, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) ( The Conversation)

La nomenclature biologique est régie par 5 Codes indépendants :

Chacun de ces Codes possède une commission internationale chargée de le rédiger et de trancher d’éventuels cas complexes. Un nouveau Code de botanique est prévu pour l’été 2024 et la 5e édition du Code de zoologie est en cours de rédaction.

La nomenclature dépend toujours d’une taxonomie préexistante. Cette dernière attribue des rangs aux taxons (espèce, genre, famille…) les emboîtant les uns dans les autres, et permet de construire une classification hiérarchique. Les techniques et la méthodologie de la taxonomie évoluent, et chaque changement peut influer sur la nomenclature.

Contrairement à la taxonomie, qui est une science et qui est ainsi réfutable, la nomenclature est une discipline scientifique qui suit une logique de procédure, et n’est donc pas sujette à interprétation, en dehors de celle des articles des Codes.

La nomenclature reconnaît plusieurs catégories de noms. Certains sont qualifiés de disponibles (zoologie) ou validement publiés (botanique), car ils remplissent toutes les conditions pour exister aux yeux des Codes et entrer dans le système nomenclatural.

Ces conditions, qui ont évolué avec le temps, incluent aujourd’hui, mais ne se limitent pas, au fait que le nom soit de forme latine, accompagné d’une description taxonomique, et qu’un spécimen au moins, pour les espèces, soit désigné comme type porte-nom, c’est-à-dire comme référence objective permettant d’identifier le taxon nommé.

Les noms valides (zoologie) ou corrects (botanique) sont ceux à utiliser si un conflit entre noms apparaissait. Si deux noms désignent le même taxon, ils sont dits synonymes, et le cas inverse (deux noms similaires pour deux taxons différents) donne lieu à des homonymes. Lors d’un conflit, le nom le plus ancien est considéré comme étant le nom valide/correct, c’est le principe de priorité.

Dans certaines rares occasions, on déroge à cette règle pour protéger des noms très utilisés, par l’intervention éventuelle de Commissions. Ces dernières ne jugent pas de la qualité scientifique d’un nom ou d’un travail, simplement à la bonne application des règles de nomenclature.

Une liberté importante est laissée aux auteurs lors du choix de noms, et en dehors de règles grammaticales, ces noms ne peuvent pas être modifiés.

Cela permet aux auteurs d’exprimer parfois un sens de l’humour certain : ainsi, il existe une mouche en Floride nommée Pieza rhea Evenhuis 2002, un genre de grenouilles malgaches comptant les espèces Mini atureMini mum et Mini scule, les trois par Scherz et al., 2019 ou encore un scarabée péruvien nommé Gelae donut Miller & Wheeler, 2004.

Les scientifiques peuvent aussi choisir de dédier des noms à des collègues réputés en créant des éponymes, tels que le Magnolia L., hommage à Pierre Magnol, un médecin et botaniste français, ou Adansonia L., le genre contenant le baobab, référence à Adanson, premier à l’avoir décrit.Certaines célébrités ont également eu droit à leurs espèces, comme Plinthina beyonceae (Lessard, 2012) et certains personnages imaginaires donnent naissance à des éponymes tels que Agathidium vaderi Miller & Wheeler, 2005, du nom de l’antagoniste de Star Wars. Mais cette liberté laissée aux auteurs a récemment fait surgir certaines controverses.

Dans le passé déjà, l’histoire de la nomenclature a été traversée par de nombreuses discussions et polémiques, et ce dès le début de la codification de la discipline. En 1905, le congrès botanique de Vienne fut témoin d’une sortie théâtrale d’un botaniste allemand, outré par l’incompétence perçue de l’assemblée. Les règles de nomenclature zoologique éditées la même année, d’à peine une vingtaine de pages contre une centaine aujourd’hui, furent considérées comme trop contraignantes dès leur publication.

Plus récemment, une nouvelle série de polémiques ont vu le jour. Il y a quatre ans, un appel a été lancé par deux néozélandais pour modifier les règles de l’ICNafp et « rétablir » les noms d’origine indigènes dans la taxonomie, plutôt que de respecter l’usage codifié de faire débuter la nomenclature en 1753 – lorsque Linné crée le système – pour la botanique et 1758 pour la zoologie, correspondant à des publications de Linné.

Un article récent sur les anacondas a fait beaucoup de bruit : il reprend cette rhétorique sur les noms indigènes pour faire valoir un nom dont la taxonomie sous-jacente semble fragile. Il y a une volonté des auteurs de renvoyer toute critique de leur taxonomie à une attaque contre les peuples indigènes et un non-respect de leur culture, ce qui est un non-sens scientifique, et justifier une position « non-orthodoxe par rapport au ICZN ». Loin de faire consensus, l’article a déjà reçu au moins deux critiques.

Reprendre les noms indigènes constituerait en effet un retour philosophique à la nomenclature vernaculaire, qui existait avant Linné. Une poignée d’articles énumérant les principales faiblesses de cette proposition ont vu le jour : ils rappellent, entre autres, la difficulté de déterminer la priorité lorsque plusieurs cultures côtoient les mêmes organismes. Les Codes accordent par ailleurs déjà la possibilité de baser un nom d’espèces sur des noms locaux, et cette pratique donne par exemple les noms Okapia Lancester, 1901, du mvuba, ou Aratinga Spix, 1824, nom de genre de la Conure soleil et venu d’une langue amazonienne éteinte, le vieux tupi.

Une seconde polémique, émanant de la « cancel culture », a également pris de l’ampleur, d’abord en botanique, avant d’atteindre la zoologie. Les tenants de cette polémique proposent l’abandon des éponymes, dédiés à des personnages historiques, scientifique ou non, jugé comme indignes d’être honorés ou pouvant le devenir un jour. Un exemple est E. D. Cope, zoologiste américain, qui a donné son nom à quelques dizaines d’espèces animales, et défenseur d’une idéologie raciste. Le journal Copeia a déjà été rebaptisé il y a quelque temps.

Une riposte s’est rapidement mise en place, certains arguant que la stabilité nomenclaturale ne pouvait pas se permettre de se perdre dans des sujets politico-moraux dans l’air du temps, pour un système qui se veut le plus atemporel possible. Une initiative dans ce sens par des biologistes espagnols a recueilli plus de 1500 signatures.

D’autres scientifiques font valoir que les éponymes jouent un rôle positif pour les communautés sous-représentées jusque-là. La Commission internationale de nomenclature zoologique s’est déjà prononcée contre toute tentative d’intrusion des questions politiques dans le processus scientifique. Pour la botanique, le 20e Congrès international tranchera probablement la question cet été.

De par sa nature particulière, la nomenclature est une vitrine pour la taxonomie mais porte un lourd héritage, ancré dans l’histoire humaine, dans ce qu’elle a de pire et de meilleur. Aujourd’hui, elle est menacée par la disparition de l’expertise associée due à la raréfaction des postes de taxonomistes. Cette discipline est avant tout l’un des plus vieux standards en science encore utilisés de nos jours et reste un outil efficace et précieux pour les scientifiques.

Politique: faut-il mentir pour agir ?

Politique: faut-il mentir pour agir ?

par Historien (UHA-Cresat, MSH-P), Centre national de la recherche scientifique (CNRS) dans the Conversation

Mentir pour protéger, mentir pour servir, mentir par omission, mentir pour « le bien commun », mentir comme moyen de gouverner : les historiens Renaud Meltz et Yvonnick Denoël publient le premier inventaire du « mensonge d’État » sous la Ve République. Convoquant les travaux d’une vingtaine d’universitaires et journalistes, ils rassemblent plusieurs grandes thématiques soulignant les arrangements avec la vérité et la transparence par différents acteurs de l’État sous la Ve République : la vie privée des présidents, l’armée, le nucléaire, le terrorisme et l’islamisme, les lâchetés administratives, la santé publique, les affaires policières et judiciaires, la finance. Le livre distingue plus spécifiquement quatre cas de figure où le mensonge se conçoit respectivement en ennemi de la sincérité (il travestit des faits), de la publicité (il cache des informations), de la connaissance (il organise l’ignorance ou empêche la science de progresser) et de la conscience collective (il organise l’oubli et fictionnalise le passé national). Extraits choisis de l’introduction.

« J’assume parfaitement de mentir pour protéger mon président. » Sibeth Ndiaye a le mérite de la franchise lorsqu’elle proclame qu’elle dénoue délibérément le pacte qui régit les rapports entre les gouvernants et les citoyens dans une démocratie libérale. Ce contrat repose sur la publicité des décisions et la sincérité de ses acteurs. Il est vrai que la condamnation du mensonge demeure implicite dans la Constitution de la Ve République. Elle proclame dès son article 3 que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants » ; les délibérations du Parlement qui « contrôle l’action du gouvernement » sont publiques et publiées au Journal officiel. La notion de publicité est partout, dans la Constitution ; celle de sincérité, nulle part, ou presque.

À quoi bon délibérer et décider en pleine lumière si la sincérité n’est pas requise ? Seule exception : les comptes des administrations publiques qui doivent être « réguliers et sincères ». Comme si le mensonge, la dissimulation, le travestissement ne pouvaient se loger que dans les réalités chiffrées, qui seraient le seul horizon de la vérité. Comme si la sincérité était un devoir du citoyen, dans sa déclaration fiscale ou son témoignage, mais pas du gouvernement. Le mensonge sous serment constitue une infraction pénale. Le citoyen qui dépose devant les commissions parlementaires jure en levant la main droite de dire « la vérité, toute la vérité, rien que la vérité ». Un magistrat doit répondre de parjure. Mais un président, un ministre peut mentir dans l’exercice de ses fonctions sans risquer d’autre peine que celles délivrées par le tribunal médiatique. Or l’opinion est parfois tolérante au mensonge.

La raison d’État justifie-t-elle les écarts avec la vérité ?

« Les Guignols de l’info », en représentant Jacques Chirac en « super-menteur » pendant la campagne de 2002, ne l’ont pas empêché d’être élu président de la République… Est-ce à dire que la notion de mensonge d’État se réduit à celle du secret, longtemps justifiée par la raison d’État ?

Si le mensonge politique n’est pas l’envers parfait de la vérité (l’erreur, par exemple, ne relève pas de ce livre), les notions de sincérité, d’authenticité, d’exactitude, ne concernent pas seulement la morale privée ou la science, mais aussi la vie politique.

Suite à une décision du Conseil constitutionnel de 2005, entérinée six mois plus tard par le règlement de l’Assemblée nationale, le débat parlementaire obéit désormais au principe « de clarté et de sincérité ».

[Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. Abonnez-vous aujourd’hui]

Ces notions apparaissent moins souvent dans la France laïque que dans des nations plus imprégnées de religion, comme aux États-Unis, où l’injonction morale est ancrée dans la culture politique. Le mensonge sous serment de Bill Clinton sur une liaison extraconjugale a conduit le président à la lisière de l’impeachment.

La question des fake news suscite une floraison de publications sur les conditions de leur régulation dans le régime médiatique actuel. La propagande en période de guerre, qui fait déroger les démocraties libérales à leur règle ordinaire, a intéressé les historiens.

Mais un angle mort demeure : la vulnérabilité de notre vie sociale et politique à une large gamme de mensonges d’État qui profite du caractère trop implicite du pacte de publicité sincère au fondement de nos institutions. Faute de penser la vérité en matière politique, on s’est habitué au poison. Aucun ouvrage d’histoire ou de sciences politiques n’a récemment affronté la question du mensonge d’État afin de penser sa nature et de documenter ses effets. Ce livre veut réparer cette lacune pour la période la plus contemporaine : celle de notre Ve République.

Que peut-on et que doit-on savoir en démocratie ?

Philosophes et politistes s’émeuvent non sans raison du relativisme du temps présent, qui voit fleurir l’expression « post-vérité ». La frontière entre « opinion » et « vérité de fait », pour reprendre l’expression de Hannah Arendt, distinction reprise à son compte par Myriam Revault d’Allonnes, pose question : qu’est-ce que la vérité, que peut-on savoir en dehors des sciences de la nature, en matière sociale et politique ?

Quelles sont les conditions pour permettre d’approcher et de partager ce type de vérité ? Nous proposons de distinguer ce qui relève de la véracité en matière sociale de la vérité mathématique, et l’exigence de publicité de la soif de transparence.

Il ne s’agit pas de fonder naïvement une science exacte de la politique comme en rêvaient les socialistes utopiques ou Auguste Comte mais de s’accorder sur un horizon de vérité dans le monde social, en admettant ses limites langagières.

Ce livre n’a pas la naïveté de traquer des mensonges comme autant de fautes morales, équivalentes à des erreurs algébriques – nous ne croyons pas davantage, du reste, que les sciences exactes produisent une vérité « pure », le scientisme s’avérant comme une tentation perpétuelle du savoir scientifique d’affirmer un monopole sur la vérité. De fait, les sciences de la nature ne sont pas les mathématiques. Le philosophe et historien des sciences Thomas Kuhn a montré que les sciences n’échappent pas à l’histoire.

Nous admettons une forme de relativité de la vérité pour les sociétés humaines, sans négliger les zones grises : l’habileté de la communication, l’ambiguïté qui tient compte de la maturité historique de l’auditoire (le fameux « je vous ai compris » du général de Gaulle), le secret et le flou parfois utiles à la négociation. L’exigence de publicité ne signifie pas que la vérité, en matière politique, se dévoilerait grâce à une formule magique de circulation parfaite d’une information univoque.

L’informatisation de la société et l’accès facilité des citoyens aux données ne favorisent pas mécaniquement le débat public. On perçoit en outre les limites populistes ou puritaines de la revendication à la « transparence ».

L’exigence de publicité peut se retourner contre le projet moderne, libéral, visant à soumettre la décision politique à l’intelligence collective. Le partage de l’information politique, qui préjuge d’une communauté rationnelle, a laissé place à un soupçon systématique de manipulation par les « élites » qui entendraient se soustraire à la critique, trancher en secret, et dissimuler les véritables décideurs.

Ce soupçon confine au complotisme lorsqu’il aboutit à la conviction que le pouvoir est toujours ailleurs que dans les institutions officielles et que la décision procède de circuits occultes. Par ailleurs, l’exigence libérale de publicité des informations nécessaires à la délibération collective peut se tromper de cible et compromettre une non moins légitime aspiration au secret, notamment dans la sphère privée.

On pense à la traque des informations mues par des considérations commerciales (le trafic par les GAFAM des données aux fins de publicité privée), politiques (l’affaire Benjamin Griveaux, candidat à la mairie de Paris, par exemple) ou sécuritaires (la traque de l’information permettant d’anticiper tout acte de menace interne ou externe, de la délinquance au terrorisme).

Quelle est la frontière légitime entre la publicité et le secret en démocratie libérale ? À la fin du XVIIIe siècle déjà, le libéral Benjamin Constant contestait le devoir absolu de véracité proclamé par Kant. Le bien général de la nation, en particulier sa défense contre un danger extérieur, justifie-t-il le mensonge ? Apparaît alors la raison d’État, qui se substitue à la rationalité démocratique.

Si Sibeth Ndiaye a justifié avec aplomb le mensonge politique dans l’intérêt d’une personne, serait-ce le président de la République, faut-il dénier aussi catégoriquement le droit au mensonge au nom de la raison d’État ?

La question a été tranchée une première fois, en démocratie libérale sous la IIIe République. La société française, avec l’affaire Dreyfus, a mis en balance le sort d’un individu avec l’autorité d’un groupe, d’une institution. Finalement, il n’a pas paru souhaitable de préserver l’Armée, en dépit de son rôle essentiel dans la survie nationale, en accablant un innocent. Lorsque la culpabilité de Dreyfus s’est avérée une erreur judiciaire, elle est apparue à l’opinion comme ce qu’elle était : un mensonge d’État…

Si les droits de l’individu demeurent sacrés, en démocratie libérale, ceux de l’humanité tout entière ne peuvent pas davantage être bafoués : ce sont les intérêts de l’humanité, voire de la planète, qu’il faut défendre contre la raison d’État. Cette étrange tension entre le plus petit et l’universel nous conduit à considérer qu’il faut écarter tout mensonge d’État au bénéfice de l’intérêt, fut-il généralisé à l’échelle d’une nation.

Cet ouvrage, sur la base d’une large gamme de situations historiques récentes, qui permet de passer en revue tous les types de mensonges et leurs acteurs, prend nettement position. Au terme de l’exercice, il nous apparaît plus encore qu’à ses débuts, au risque d’être considérés comme naïfs, que le mensonge n’affaiblit pas seulement la démocratie libérale, mais l’État lui-même. Il n’est pas seulement condamnable mais inefficace, et se retourne contre l’institution, sinon contre la personne, qui l’utilise.

Faut-il remettre en cause l’activité touristique en France ?

Faut-il remettre en cause l’activité touristique en France ?

Trois chercheurs en économie du développement pointent, dans une tribune au « Monde », les incohérences entre les investissements privés, et surtout publics, dans l’industrie du tourisme et les ambitions affichées en matière de sobriété par le gouvernement.

Eric Adamkiewicz
maître de conférences en développement territorial à l’université Toulouse-III
Philippe Naccache
professeur associé en stratégie et développement durable à l’Inseec
Julien Pillot
enseignant-chercheur en économie à l’Inseec et chercheur associé CNRS

Un article qui met en cause la pertinence écologique de l’activité des touristes en France. Le problème est que cette activité représente plus de 7 % du PIB et qu’il faudra du temps pour gérer les évolutions de volume et de contenu de ce secteur. À noter aussi que le tourisme des Français à l’étranger pourrait paraître aussi peu pertinent.

Consommation touristique intérieure et poids dans le consommation touristique des visiteurs étrangers s’élève à 50,8 milliards d’euros et est en baisse de 3,0 % par rapport à 2015. Les visiteurs étrangers contribuent en 2016 à -1,0 point de croissance de la consommation touristique intérieure et les visiteurs français à 1,0 point de croissance. La consommation touristique intérieure représente 7,13 % du PIB de l’année 2016, dont 4,85% pour la consommation des visiteurs français et 2,28% pour celle des visiteurs étrangers.
Sources : DGE, compte satellite du tourisme (base 2010) ; Insee, comptes nationaux (base 2010). NDLR

Le 26 juin 2020, au plus fort de la crise Covid, et alors que beaucoup de réflexions s’articulaient autour de l’avènement d’un hypothétique « monde d’après », nous signions une tribune dans Le Monde au titre pour le moins évocateur : « La transition écologique et le tourisme responsable sont incompatibles avec la massification des voyages ». Depuis, la pandémie a reculé et l’économie du tourisme a repris ses droits.

Frappée d’amnésie et incapable de se réformer, elle ne semble pas avoir pris la mesure du problème systémique dont elle souffre. Il en va des investissements privés, à l’image des carnets de commandes records chez les avionneurs ou les croisiéristes, tandis que se multiplient les programmes immobiliers de standing essentiellement destinés à la clientèle étrangère au bilan carbone chargé. Gourmands en ressources, ils contribuent également à l’accroissement du prix du foncier et à l’exode de la population active, notamment la plus jeune, des territoires touristiques.

Nous attendons avec impatience de voir comment tout cet écosystème parviendra à justifier ces investissements massifs, toujours orientés vers les volumes, au regard des objectifs de décarbonation affichés, parfois même inscrits dans le rapport de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) des sociétés impliquées. Plus étonnamment, la fièvre des investissements semble également avoir repris du côté de la puissance publique, bien loin des objectifs de sobriété affichés.

En témoignent les ambitions démesurées pour les Jeux olympiques de Paris, un plan de relance pour la montagne – qui n’est que l’empilage de rustines obsolètes largement consacrées au soutien de l’économie de l’or blanc – ou les propos récemment tenus le 29 août par Olivia Grégoire, ministre déléguée au tourisme, « ensemble, nous avons bien l’intention de rester la première destination mondiale ».

La même Olivia Grégoire qui n’exclut pas de poursuivre la trajectoire pré-Covid et son objectif de… 100 millions de touristes annuellement accueillis sur notre sol. Notons qu’au-delà de ces investissements dispendieux et aux retombées incertaines, une véritable stratégie ferroviaire se fait toujours attendre… A y regarder de plus près, la posture de la ministre déléguée au tourisme dérange autant que la stratégie de l’Etat qui semble bloquée sur des discours qui ont accompagné les plans de la DATAR des années 1960.

Elle paraît en effet parfaitement contracyclique alors que les Français sont appelés à davantage de sobriété, dans un contexte certes conjoncturel de crise énergétique, mais structurel sur le plan du changement climatique. Plus grave encore, cette politique pro-tourisme construite lors des « trente glorieuses » semble ignorer que nous venons de vivre un été 2022 caniculaire qui nous rappelle combien la raréfaction de nos ressources naturelles, notamment en eau, est déjà bien engagée, et ne fera que s’aggraver dans les prochaines années.

Faut-il un « Web du débat public » ?

Faut-il un « Web du débat public » ? 

 

Un collectif* milite dans un article de la Tribune pour la création un Web du débat public afin de contribuer à sauver la démocratie.

On comprend évidemment la préoccupation des intéressés vis-à-vis des insuffisances des réseaux d’information en particulier sur Internet aussi des manipulations au service d’intérêts  économiques, politiques voire communautaristes . La question se pose cependant de savoir si la démocratie a vraiment besoin d’un Web de débat public.En fait une sorte de Wikipédia organisant les  références et l’accès à l’information sur le Web. Le risque est évidemment celui de l’étatisation de l’information. Il n’est pas certain que la réplique de Radio France ou France Télévisions sur le Web constitue un apport démocratique substantiel si l’on se réfère à ce que produit actuellement le public qui n’est pas très différent des informations émanant du privé.Le mérite de ce papier est de poser un problème mais le moins on puisse dire c’est que les propositions paraissent relativement floues, voire confuses et  dangereuses. L’urgence serait sans doute d’approfondir la problématique et pour commencer de manière la plus démocratique possible. NDLR

 

Bien loin des dictatures et des « démocratures », ce sont bien nos systèmes démocratiques représentatifs eux-mêmes qui sont en souffrance : crise de confiance des citoyens, crise de représentation, crise de la liberté d’expression, crise du dialogue social… Et en surplomb de cette « thrombose des crises » ? Une véritable crise cognitive bien plus profonde, qui fragilise considérablement le débat public et l’expression citoyenne.

Au cœur des tensions figure le plus large et le plus accessible espace d’échanges et d’interactions contemporain : l’Internet. Fake news, cyber-attaques, manipulation des consciences, exploitation des données personnelles ont été depuis plusieurs années les points d’attention des politiques et des législateurs, nationaux et européens. Nous gardons en mémoire les scandales Cambridge Analytica, le révisionnisme de certains médias russes, les manipulations d’information pré-Brexit, et faisons tous les jours l’expérience de l’ultra-contagion des théories complotistes, de l’extrême viralité d’une infox ou de l’hostilité d’une bulle filtrante sur les réseaux sociaux.

Toutefois, on est en droit de se demander si ce risque d’abus n’est pas l’arbre qui cache la forêt. Car au fond, ni les médias conventionnels (dictature de l’immédiateté, concentration et propriété des médias), ni les réseaux sociaux (bulles communautaristes, infox), ni l’Internet et ses moteurs de recherche (oligarchie des sites référencés par le moteur de recherche de Google sur un modèle « winner takes all ») ne réussissent à restituer au citoyen, sur un sujet social ou sociétal, une information neutre et exploitable dans toute sa complexité. Pour le dire autrement, nos systèmes d’information publics ne permettent pas l’éclosion apaisée, chez nos concitoyens, d’une conscience politique.

La démocratie a besoin d’un nouveau mode d’organisation des savoirs, qui appelle à une réarchitecture de la manière dont les citoyens s’informent et débattent sur le Web, afin d’évoluer vers un « Web du débat public ». Un cœur de services Web qui permettraient de donner accès à l’ensemble des contributions formelles (faits vérifiés) et informelles (opinions) existantes sur un thème politique donné. Qui proposeraient une base de données unifiée du débat d’intérêt général étiquetant et catégorisant la plupart des contenus. Qui feraient émerger du sens à partir de cette masse immense de contributions et les restitueraient à travers un langage commun (thématiques, préoccupations, solutions, arguments). Un cœur de services Web, pour conclure, qui mettraient à disposition des citoyens, des corps intermédiaires, des élus et des médias une représentation intelligible des idées et des rapports de forces en présence.

 

Le Web que l’on connaît – celui des GAFAM – n’a pas été conçu selon ces grands principes, il répond à d’autres objectifs, essentiellement lucratifs. Il est même démontré que le Web favorise aujourd’hui les contenus conservateurs ! Nous plaidons donc pour la création d’un ensemble de services Web alternatifs, dont les technologies clés doivent permettre de soutenir a minima 5 objectifs (d’autres apparaîtront au fil de l’eau) :

  • Objectif 1 : mieux s’informer

Il s’agit d’inventer le système d’étiquetage de l’information et de restitution des requêtes faites au moteur de recherche via une représentation cartographique des résultats : mettre en place un étiquetage de l’information tenant compte de ses biais et de ses éléments « nutritifs » (émotions, faits scientifiques…) sur le modèle des mentions obligatoires sur une étiquette alimentaire, développer une cartographie des liens listés par le moteur de réponse pour mettre en perspective les différentes dimensions d’un sujet complexe en insistant sur les relations entre les sources remontées (ex : arborescence de type Mind Map).

  • Objectif 2 : mieux contribuer

Il s’agit de reconcevoir les interfaces utilisateurs pour la délibération et la décision collectives : respecter une politique stricte en matière d’interfaces fondée sur des principes communs d’expérience utilisateur (accessibilité, inclusion, ergonomie…), favoriser des interfaces respectant la nuance et la complexité de l’information (principe de complexité minimale), faciliter les échanges d’arguments, promouvoir la coexistence de points de vue distincts et complémentaires (contrairement aux bulles filtrantes des réseaux sociaux) sur le modèle notamment du Web des controverses, mesurer les rapports de forces en présence, quantifier les opinions.

  • Objectif 3 : mieux bâtir

Il s’agit de permettre la catégorisation et la capitalisation des résultats de tous les contenus générés par l’utilisateur dans un débat public afin de mettre un terme à l’amnésie numérique qui rend immédiatement obsolètes la plupart des contributions citoyennes : systématiser l’open data automatique des données brutes liées aux contenus citoyens, systématiser l’open data des données « analysées » par les algorithmes, favoriser la multiplicité des référentiels sur une même problématique (comme il devrait exister plusieurs couches de lecture de Wikipedia : la couche du Wikipedia des jeunes, celle des seniors, celle de telle ou telle culture, etc., mettant en exergue les points communs et les différences), permettre la portabilité des référentiels (ex : le référentiel du Grand Débat – 700 propositions – ou le référentiel de la Convention Citoyenne pour le Climat – 149 mesures – devront pouvoir être utilisés comme référentiels de départ pour toute nouvelle consultation citoyenne en ligne sur un thème cohérent avec ces 2 grandes consultations).

  • Objectif 4 : donner confiance

Il s’agit de créer un Web basé sur la confiance algorithmique : favoriser les algorithmes explicables (ceux dont les règles sont établies par des humains et dont les résultats sont donc intelligibles), assurer une double transparence algorithmique (transparence sur les instructions données aux algorithmes et sur leurs effets déclarés), permettre la liberté de choix des algorithmes par les utilisateurs, garantir la propriété intellectuelle des données personnelles.

  • Objectif 5 : mieux apprendre

Il s’agit de permettre l’émergence d’une démocratie de la compétence en associant la production de contenus générés par le citoyen à la mutualisation des compétences par les pairs : identifier des « experts profanes », consolider les connaissances informelles, favoriser les échanges au sein de communautés d’intérêt, imaginer un CV démocratique, un passeport citoyen ou l’obtention de crédits certifiés par une école ou une université.

Faire advenir un Web du débat public, c’est répondre a minima à ces 5 objectifs correspondant aux « essentiels » d’une agora numérique. Ce projet ne peut être laissé aux mains de la seule civic tech française (une dizaine d’acteurs représentant en 2022 moins de 20M€ de revenus cumulés) et devrait faire l’objet d’un véritable plan d’excellence nationale, de même ambition que le plan IA ou le plan Hydrogène.

C’est pourquoi un Plan Démocratie doit être lancé par l’État, visant à faire émerger une filière d’excellence française autour de l’émergence de ce cœur renouvelé de services Web, alternatif aux GAFAM et répondant à l’objectif d’éclairer le citoyen dans ses choix démocratiques. Cette filière d’excellence a vocation à faire émerger les technologies critiques qui sous-tendent les 5 objectifs cités, et favoriseront ainsi la consultation, la co-construction, la co-décision et la co-action citoyennes.

Dans l’esprit d’un Internet des Lumières, ces technologies essentielles sont des communs numériques, transverses et agnostiques des plateformes qui les utiliseront. Elles ont vocation à irriguer les espaces numériques d’expression citoyenne existants ou à venir (consultations, enquêtes, débats, forums, pétitions, votes, projets, etc.) et représentent un bien commun à protéger pour assurer notre vivre-ensemble. Toute plateforme, privée, associative ou publique (y compris les médias) pourrait puiser dans cette architecture de technologies clés par le biais d’API (système ouvert).

Une telle filière industrielle doit être soutenue en fonds propres et en capacités de financement permettant à moyen terme l’émergence de licornes françaises de la démocratie, ayant vocation à monter des alliances européennes et internationales, à exporter le savoir-faire hexagonal et à défendre notre exception culturelle – à l’ère du numérique – auprès de l’ensemble des démocraties libérales dans le monde. Nous plaidons pour l’hypothèse d’une intégration de ce plan Démocratie au sein de France 2030, opéré par le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI). Un plan de 500 millions d’euros d’investissement peut être fixé comme un objectif à la hauteur des ambitions de la création de ce Web du débat public, décentralisé, transparent, humaniste, porteur et défenseur de nos valeurs.

_________

Co-auteurs :

  • Frank Escoubès, Co-fondateur bluenove, co-auteur de « La démocratie, autrement » (Ed. de l’Observatoire, 2021)
  • Arno Pons, Délégué Général Digital New Deal Foundation
  • Gilles Proriol, Fondateur Cognito, co-auteur de « La démocratie, autrement » (Ed. de l’Observatoire, 2021)

Co-signataires :

  • Alicia Combaz, Co-fondatrice de Make.org
  • Louis Daillencourt, Directeur Général Novoville
  • Axel Dauchez, Co-Fondateur de Make.org
  • Julie de Pimodan, Co-fondatrice de Fluicity
  • Isabelle Djian, CEO & Co-Fondatrice VoxNation
  • Adrien Duguet, Co-fondateur Citipo
  • Cyril Lage, Fondateur Parlement et Citoyens / Cap Collectif
  • Pierre Levy, Philosophe, sociologue et chercheur en sciences de l’information et de la communication
  • Clément Mabi, Maître de Conférences Université de technologie de Compiègne
  • Chloé Pahud, Fondatrice de Civocracy
  • Benoît Raphael, Fondateur Flint Media
  • Mathieu Souquière, Expert associé auprès de la Fondation Jean Jaurès
  • Benoît Thieulin, Entrepreneur du numérique, ancien Président du Conseil National du Numérique

Réduire la mobilité ?

Réduire la  mobilité ? 

 

Christophe Gay, co-directeur du Forum Vies Mobiles, s’interroge dans la Tribunesur une société du toujours plus de mobilités, là où il y a trop de déplacements inutiles ou subis. De son côté, Mathieu Flonneau, enseignant-chercheur d’histoire contemporaine à l’Université de Paris 1, met lui en garde contre un risque de déclassement social qu’entraînerait la mise en oeuvre de la « ville du quart d’heure » ou du « territoire de la demi-heure ».

En réalité une question qui est aussi liée à l’urbanisation et à l’aménagement du territoire; Sans cette prise en compte la question est assez théorique NDLR

 

Alors, faut-il réduire la demande de mobilité ?

 

Oui, la démobilité est nécessaire. Jusqu’ici, notre société a utilisé deux leviers pour résoudre le problème de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre liées à la mobilité. Celui de l’innovation technologique, en améliorant l’impact environnemental des carburants ou en jouant sur l’efficacité des moteurs. Et le levier du transfert modal en encourageant les personnes à quitter leur voiture pour aller vers les transports en commun ou le vélo. Mais, il y a un levier qui est totalement ignoré par les autorités alors qu’il est celui le plus recommandé par l’ONU et d’autres organisations internationales : celui d’éviter les déplacements. Cette démobilité consiste à réduire les distances parcourues au quotidien et le temps passé à se déplacer. Au 19ème siècle, nous parcourions 4 km par jour en moyenne. Aujourd’hui, c’est 60 km et 1h30 par jour. Ces pratiques de mobilité sont ancrées dans notre quotidien, et peuvent paraître aussi naturelles que respirer de l’air. Mais toutes nos enquêtes démontrent que chez certains, cette mobilité est une contrainte et qu’ils en souffrent. Pour eux, l’aspiration à réduire le temps passé dans les transports et les distances parcourues est très forte.

Par ailleurs, le mouvement des gilets jaunes a mis en lumière la forte dépendance des gens à la voiture individuelle, une mobilité non seulement carbonée mais aussi coûteuse. Pour ceux qui n’ont que la voiture pour se déplacer, la moindre hausse de taxe ou des prix du carburant devient invivable. Aussi, si l’on veut répondre à l’urgence climatique sans exacerber les inégalités face à la mobilité, il faut offrir des solutions alternatives qui permettent de moins utiliser la voiture. Ce n’est plus seulement un enjeu environnemental, c’est aussi une question de pouvoir d’achat, de qualité de vie et également de santé publique en rendant possible la pratique de la marche et du vélo.

Pour que ces alternatives à la voiture soient crédibles, il faut donc repenser l’organisation des territoires afin de favoriser les activités en proximité et réduire les distances à parcourir au quotidien. C’est ce que l’on appelle la ville du quart d’heure ou le territoire de la demi-heure. Dans les deux cas, il s’agit de réunir dans un même espace les divers centres d’intérêt qui poussent aux déplacements : le logement, l’emploi, les commerces et les lieux de loisirs. Certes ; redéployer les services publics, les commerces, repenser la localisation des entreprises et des logements… tout cela prend du temps. Aussi ; il faut sans attendre poser les bases d’un système moins dépendant de la voiture individuelle. Comment ? En proposant des infrastructures de transport alternatives (pistes pour les vélos et la marche, transports collectifs…) et en réorganisant nos activités pour éviter certains déplacements subis ou inutiles grâce, par exemple, au télétravail. La mobilité ne peut plus être la variable d’ajustement des modes de vie des individus car elle est aliénante dans sa configuration actuelle !

 

Non. Il ne faut pas pousser à la démobiltié. A travers ce concept, on observe une tentation d’expliquer la dégradation des conditions de vie par la dégradation de l’accès aux mobilités. Pourtant, la réalité de la démobilité n’est pas fondée sur la seule sobriété écologique, mais plutôt sur une contrainte qui a trait à l’accroissement du coût de la mobilité, à la saturation problématique des modes capacitaires et au coût du foncier qui atteint des records dans certaines zones, poussant ainsi les gens à s’éloigner. Il existe également une contrainte liée à la congestion qui, paradoxalement, est parfois mise en œuvre par les autorités elles-mêmes lorsqu’elles restreignent volontairement la circulation.

La ville autoréalisatrice du quart d’heure illustre les faiblesses du concept de démobilité. D’un côté, elle revendique cette sobriété dans la consommation de mobilité, alors qu’en réalité, cette ville miraculeuse du quart d’heure est extrêmement équipée, connectée et incarne le triomphe des flux logistiques qui ne sont pas moins carbonés. En outre, ce modèle urbain s’avère être le promoteur pervers de la précarisation du travail, avec l’ubérisation des transports avec ses VTC ou son cortège de livraisons de repas minutées. C’est la Silicon Valley qui prospère sur cette imposture !

On peut donc regretter que cet hypercapitalisme moralisant, qui est à l’origine de ce concept de démobilité, impacte durablement les emplois liés aux déplacements (les métiers des transports publics régulés et de l’industrie automobile) mais aussi tout le tissu économique et le maillage des territoires. Le schéma d’une démobilité qui favoriserait les hyper-centre-villes au détriment de leurs périphéries reproduit donc, dans les faits, une nouvelle forme de ségrégation sociale, qui paupérise et perpétue, sous une nouvelle forme, une France du déclassement.

Campagne Vaccination: faut-il emporter sa seringue… et son vaccin ?

Campagne Vaccination: faut-il emporter sa seringue… et son vaccin ?

Les annonces succèdent aux annonces en matière de campagne de vaccination ainsi il y a à peine quelques jours une centaine de centres étaient prévus ; on les a multipliés par cinq ou six. Le seul problème c’est l’insuffisance de matériel pour vacciner. Des vaccins qui manquent cruellement comme le confirment d’ailleurs les labos actuellement débordés par la demande mais aussi un manque d’autres matériels comme des seringues. Du coup,  la question se pose de savoir s’il est possible d’emporter sa seringue voire son vaccin dans ces fameux vaccinodromes.

Il est légitime de se demander à quoi correspond ce grand cirque de l’administration de la santé et du gouvernement qui déclarent avoir défini une stratégie mais en oubliant la logistique. Il aurait sans doute été plus simple et plus efficace de procéder comme on fait pour la totalité des autres vaccinations à savoir laisser les médecins prescrire éventuellement et laissez les vaccinateurs  habituels comme les pharmaciens par exemple opérer.

D’une certaine façon , nous avons de moins en moins de vaccins en France mais de plus en plus de vaccinodromes. . Vendredi, 833 étaient opérationnels mais une circulaire de Jean Castex datée du 12 janvier, dont le JDD a pris connaissance après L’Opinion, fixe un plafond de « 600 à 700″ et insiste sur le fait qu’il est « crucial de ne pas [en] ouvrir un trop grand nombre en raison des contraintes liées aux caractéristiques des vaccins ».

Le tout sous la houlette du préfet qui évidemment n’en connaît pas plus dans ce domaine que dans les autres mais qui représentent l’autorité sinon la compétence.

Faut-il nationaliser Veolia ?

Faut-il nationaliser Veolia ?

 

La question peut se poser dans la mesure où il est démontré que l’État n’a aucun pouvoir en dépit des actions qu’il possède dans les différentes entreprises concernées (34 % chez Engie, 34 % chez Suez via Engie, et 5 % chez Veolia).

Le problème est simple, Veolia sera en situation hégémonique avec le rachat de Suez. Il pourra encore mieux qu’aujourd’hui imposer ses conditions notamment tarifaires à des collectivités locales le plus souvent désarmées face au géant Veolia. Rappelons que Veolia comme Suez  d’ailleurs se sont surtout développées grâce aux énormes bénéfices réalisés sur l’eau dont les prix se sont envolés de 50 à 100 % par rapport à la tarification des anciennes régies.

Ce regroupement est évidemment une très mauvaise nouvelle pour les collectivités locales qui devront payer le prix fort à Veolia pour les services assurés. Puisque la concurrence n’est plus assurée la question d’une nationalisation peut se poser dans l’intérêt général .

Veolia a donc annoncé lundi l’acquisition auprès d’Engie de sa part de 29,9% au capital de Suez après le feu vert de son conseil d’administration et a confirmé son intention de lancer une offre sur le solde du capital de son rival français.

“Conformément aux engagements pris, Veolia confirme son intention de déposer une offre publique d’acquisition volontaire sur le solde du capital de Suez afin de parachever le rapprochement des deux entreprises”, dit le groupe dans un communiqué.

Faut-il nationaliser Vivendi ?

Faut-il nationaliser Vivendi ?

 

Comme d’habitude Bolloré s’est assis sur l’intérêt national en provoquant même les autorités avec sa décision d’augmenter les dividendes de 20 %. Une manière aussi de soutenir artificiellement le cours de Vivendi. Il se pourrait en effet que cette décision provocatrice soit aussi destinée à dissimuler une certaine  fragilité structurelle. Vivendi progressivement s’est en effet reconvertie dans des activités immatérielles notamment les médias, la musique et la pub. Des secteurs qui ne sont pas absolument indispensables à la vie des ménages. Or après la crise sanitaire, on pourrait connaître une crise économique sans précédent caractérisée par une énorme vague de défaillances et un chômage qui pourrait faire passer le taux de 8 % à 20 %. Globalement, il y aura nécessairement une baisse moyenne du pouvoir d’achat et les consommateurs vont sans doute procéder à une restructuration de leur consommation. Parmi ces consommations, pourraient être concernées  des activités immatérielles et assez secondaires comme celles de Vivendi.  En attendant, le pouvoir serait bien avisé de sanctionner une entreprise aussi peu citoyenne qui se comporte d’ailleurs en France comme Bolloré  se comporte en Afrique.

 

Faut-il décentraliser le gouvernement à Marrakech ou à Brégançon ?

 

Faut-il décentraliser le gouvernement à Marrakech ou à Brégançon ?

 

 

 

Pendant environ dix huit jours, le gouvernement aura donc été introuvable. Pour preuve on ne trouve plus que quelques secrétaires d’État et quelques députés de troisième niveau pour venir défendre les réformes devant l’opinion publique. Les ministres importants, sont absents. La ministre la plus en pointe dans le conflit ,celle qui gère les transports est à Marrakech. Le président de la république, lui, s’enferme dans le mutisme au fort de Brégançon. Pourtant la colère sociale n’a pas disparu même si tous les Français sont loin d’être en grève. D’ailleurs pas loin de la moitié sont en congé pendant la trêve des confiseurs.

 

Dès lors se pose la question de la localisation du pouvoir. Pourquoi en effet ne pas envisager un transfert du gouvernement à Marrakech où plus près à Brégançon ? Ce serait une sorte d’innovation dans le management gouvernemental. Une sorte aussi de manière de prendre un peu de champ avec une situation assez irréaliste. En effet, ce qui justifie la colère sociale à savoir la réforme des retraites va se terminer en eau de boudin. En effet sur le principe la réforme sera maintenue. De toute façon, elle n’entrera vraiment en vigueur qu’à partir de 2025 2035 et n’aura de plein effet que vers 2040. D’ici là nombre de gouvernements auront amendé la réforme des retraites comme ils le font d’ailleurs régulièrement depuis cinq ans. En outre, la réforme dite universelle est en train d’être vidée de son contenu par rapport au principe d’universalité puisqu’on multiplie les exceptions pour l’armée, pour la police, les pompiers, les routiers, les hôtesses de l’air, les pilotes, les aiguilleurs du ciel voir les cheminots et les salariés de la RATP. Le Parisien a révélé qu’ Élisabeth borne qui multiplie les mises en garde par rapport à la situation sociale était en  fait en vacances à Marrakech. Une erreur de communication disent ceux  qui veulent l’excuser. sans doute plutôt une grave erreur politique car cela témoigne à l’évidence que certains membres du gouvernement entretiennent des relations assez ésotériques avec les réalités sociales et économiques.. En effet, Élisabeth Borne n’est pas la seule à avoir déserté son bureau ministériel. Comme si on voulait afficher officiellement la stratégie du gouvernement qui a choisi le pourrissement pour  gérer le conflit en cours. Une stratégie à risque car sur les actions  en cours pourraient se greffer d’autres motifs de mécontentement et d’autres actions de protestation.

 

On notera également le grand silence d’Édouard Philippe pendant la trêve des fêtes, la gestion gouvernementale était en grève. Une curieuse conception de la gestion de l’intérêt général. Finement pourtant Matignon avait souhaité que les ministres les plus concernés par la crise actuelle ne s’éloignent pas. Le mieux serait donc de les rassembler à Marrakech au fort de Brégançon. Avant Noël, Matignon avait donné pour consigne aux ministres de rester « joignables » et de « pourvoir se rendre disponible rapidement selon leur portefeuille » : « De fait, les ministres les plus concernés par les retraites et la grève sont sur le pont pour des questions évidentes de suivi et de gestion », expliquait-on du côté du Premier ministre. Le cabinet d’Élisabeth Borne assure que la ministre respecte « ce cadre », « le reste relève de la vie privée ». Élisabeth Borne a ainsi « décalé son départ et raccourci son séjour pour être à Paris ce week-end et suivre le week-end de grands départs et les intempéries », précise son cabinet à BFMTV. « Elle était dimanche d’ailleurs en salle de crise chez Enedis ».

 

« Il n’y a pas de règle kilométrique ou d’interdiction de sortie du territoire pour les ministres », poursuit le cabinet d’Élisabeth Borne, qui insiste sur le fait que la ministre est « totalement joignable et mobilisable » et « peut être de retour à Paris en quelques heures ». Alors que les Français peinent à rejoindre leurs familles pour les fêtes de fin d’année, faute de trains disponibles, les vacances de la ministre au Maroc passent mal. « C’est un peu choquant », a notamment réagi Claude Goasguen, député Les Républicains de la 14e circonscription de Paris le 25 décembre sur France Info.  »J’avais cru comprendre qu’il (Emmanuel Macron, NDLR) avait demandé à ses ministres de rester tout près, c’est vrai que Marrakech n’est pas si loin en avion mais franchement c’est un peu choquant de voir un ministre important du gouvernement qui va prendre des petites vacances dorées à Marrakech » a ajouté Claude Goasguen sur France Info.

 

Le secrétaire fédéral du syndicat Sud Rail, Eric Meyer, a de son côté dénoncé sur France Info une « stratégie du pourrissement » des négociations. »Si aujourd’hui on était face à un gouvernement qui voulait sortir du conflit, tous les jours on serait en négociations, on serait face au secrétaire d’État des transports, face à la ministre de l’Écologie, mais on voit bien qu’aujourd’hui, consigne a été donnée de couper court à toute discussion, de renvoyer ça mi-janvier », a ainsi déclaré le secrétaire de Sud Rail.

a grève pourrait coûter 1 % de croissance ?

 

La grève pourrait coûter jusqu’à  1 % de croissance si elle s’éternise comme le mouvement des gilets jaunes; 1%,  c’est-à-dire ce qui est prévu comme augmentation du PIB en 2020 . Le PIB tourne autour de 2500 milliards par an , la perte serait de 1 milliards par jour soit 2,5 milliards à peu près sur un mois . Le montant de la facture dépendra évidemment de la durée du mouvement. En l’état de l’hystérisation de la question, on voit mal les syndicats radicaux capituler avant des semaines d’autant que le gouvernement ne manifeste pas de vrais signes d’ouverture sur la logique de la réforme même s’il négocie discrètement avec différentes catégories susceptibles de contribuer à une plus grande mobilisation  sociale ( police, armée, pompiers, routiers, pilotes, aiguilleurs du ciel, voire les salariés  SNCF et RATP. ) Certes certaines activités annulées en décembre pourront être reportées début de l’année prochaine.

 

Cela d’autant plus facilement que déjà l’économie tourne au ralenti pendant la période des confiseurs. Mais d’autres sont durement impactées notamment dans le commerce ou le tourisme. Si le conflit devait s’étaler encore sur janvier voir au-delà, cela pourrait tout simplement annuler toute perspective de croissance en 2020. Or ses perspectives sont déjà particulièrement modestes puisque on ne prévoit pas une augmentation de l’activité de plus de 1 % en 2020. Le pire sans doute, c’est que ce mouvement social risque d’installer sur les acteurs économiques un climat d’incertitude supplémentaire.

 

Témoin d’ailleurs la baisse du moral des chefs d’entreprise. Il est vrai que certaines avancées accordées aux  gilets jaunes ont plutôt permis de soutenir la dynamique de la demande. Un effet direct de la quinzaine de milliards qui est venu abonder le pouvoir d’achat. Un phénomène qu’on ne peut exclure si le pouvoir à l’occasion de la grève actuelle  satisfaits certain nombre de revendications sociales et pas seulement sur les retraites.

 

Et les effets d’un mouvement peuvent donc être contradictoires. Certains pourront considérer que la perte de 0,1 % de croissance par mois en moyenne n’est pas catastrophique sauf que le ralentissement économique mondial est général et qu’il ne faut pas espérer trouver des ressorts d’activité en dehors de nos frontières. Nombre de pays vont d’ailleurs tutoyer la récession à commencer par l’Allemagne, notre principal partenaire commercial. Encore une fois le pire ce n’est sans doute pas la perte de d’activité immédiatement identifiable mais le climat détestable qui risque de refroidir à la fois les investisseurs et les ménages.

 

 

Faut-il tuer les zadistes de Bure ?

Faut-il tuer les zadistes de Bure ?

 

 

 

Ce que suggère ou presque  certains partisans de l’enfouissement de déchets nucléaires pendant des milliers voire des millions d’années. Pas les tuer mais les priver de leurs droits sociaux et les expulser manu militari. C’est la proposition d’un internaute (qui n’indique qu’un prénom) que publie le complaisant site de Boursorama.

«  E.Macron peut envoyer 5 escadrons Gendarmerie mobile commandés par un capitaine ou un chef d’escadron. 1 escadron de gendarmerie mobile (EGM) est composé d’environ 110 militaires regroupés en cinq pelotons.  Je pense que 550 gendarmes mobiles (5 escadrons) ça devrait suffire pour balayer en peu de temps tous ces opposants. Identification rapide des individus avec les plaques d’immatriculation de leurs véhicules avec suppression d’office du RSA pendant 3 mois ainsi que les autres allocations, puis suppressions pendant 6 mois si il y a récidive, puis ensuite suppression pendant 3 ans. Les opposants devraient se faire rare, et ceci sans violence. Quant-à moi, je suis obliger de payer mes impôts pour tout ce petit monde de zadistes. »Le mieux serait sans doute de les éliminer définitivement ! Le site de Boursorama évoque uen participation de 100 manifestants seulement (source EDF !)  Quand l’AFP en compte 500. Et qui indique :

« Quelque 500 opposants au projet Cigéo d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure (Meuse), se sont réunis samedi dans un bois devenu le symbole de leur mobilisation et dont ils risquent d’être bientôt expulsés, ont annoncé les organisateurs.
Réunis derrière le mot d’ordre « qu’ils nous expulsent ou pas, on sera dans le bois« , ces militants ont « construit de nouvelles cabanes et des barricades » dans le bois Lejuc, explique Michel, opposant. Les opposants à Cigéo estiment que l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, porteuse du projet) a entamé illégalement des travaux dans ce bois, site retenu pour l’installation des cheminées d’aération de galeries souterraines. Ils l’occupent depuis plusieurs mois pour empêcher leur poursuite. « Pour gagner face à l’Andra, il faut s’ancrer sur ce territoire, ce n’est pas avec des manifestations ponctuelles qu’on va la faire reculer », estime Michel, pointant une agence « qui joue les gros bras sur le terrain alors qu’elle est en difficultés sur le plan juridique ». Les opposants à Cigéo ont reçu samedi matin le soutien du candidat écologiste à la présidentielle Yannick Jadot. « Le stockage des déchets nucléaires doit être réversible, tout mon soutien aux manifestants de ce samedi », a tweeté le député européen. Les semaines à venir s’annoncent cruciales pour les militants anti-Cigéo: le 22 février, la justice doit se prononcer sur l’expulsion d’un militant installé dans le bois Lejuc. Quelques jours plus tard, le tribunal de Bar-le-Duc devra dire, en appel, si des travaux de défrichement entrepris par l’Andra dans ce bois étaient légaux. En première instance, le tribunal avait ordonné l’arrêt des travaux. Le 28, ce sera au tribunal administratif de Nancy de dire si la cession du même bois à l’Andra s’est faite, ou non, dans les règles. Le projet Cigéo consiste à enfouir à 500 m sous terre, à la frontière de la Meuse et de la Haute-Marne, quelque 4% des déchets radioactifs produits en France, qui représentent à eux seuls 99% de la radioactivité de l’ensemble. Vieux de déjà presque 20 ans, ce projet a suscité la controverse dès le premier jour, les opposants craignant, entre autres, des déversements de matière radioactive dans le sous-sol, ainsi que des incendies. ». Il ne s’agit pas de cautionner la violence mais pour le moins les enjeux méritent uen débat démocratique  et le respect du droit à manifester.

Faut-il pendre Kerviel ?

Faut-il pendre Kerviel ?

 

Sans doute ce que pense Laurence Parisot, ancienne présidente du Medef si l’on en juge par son pamphlet dans Challenges à charge contre l’ex trader. Un pamphlet qui fait suite à celui de même teneur de Philippe Manière, lobbyiste de l’ultra libéralisme toujours dans l’excellent (comme dirait Coluche) et très contradictoire  Challenges. Un pamphlet qui sans doute comme celui de Philippe Manière a été écrit pout influencer le procès civil concernant les 4.9 milliards réclamés à Kerviel. Dommage que nos pamphlétaires n’aient pas attendu pour prendre connaissance de la déclaration de l’avocat général qui a indiqué  que forcément la Société générale était impliquée dans ce scandale et qu’elle l’a couvert implicitement ; bref la reconnaissance de la très forte responsabilité de la banque. Parisot qu’on a connu plus mesurée n’attaque pas seulement Kerviel mais les prudhommes, considérés comme une instance de « justiciers ,  fléau de notre vie économique et socaile » . L’outrance du propos  discrédite évidemment une argumentation déjà très faible qui ne vise qu’a soutenir la Société générale et derrière tous les banquiers (dont rappelons-le aucun n’a été inquiété en France après la crise de 2008 dont ils sont responsables). Et ce n’est pas la référence littéraire à Roland Barthe qui peut faire office de pertinence. Laurence  Parisot devrait relire Mythologie de Barthe en 1957 où il dénonce la stratégie bourgeoise (qui) est de remplir le monde entier de sa culture et de sa morale. Solliciter la morale pour défendre la Société générale, l’oxonérer de toute responsabilité et enfoncer uniquement Kerviel relève de l’aveuglement intellectuel. Le mythe n’est pas Kerviel mais le Dieu de la banque. Comme l’article de Philippe Manière, le pamphlet de Parisot mérite aussi son pesant de cacahuètes.

 

«

 

« L’Affaire Kerviel, c’est une Affaire avec un A majuscule. Le genre d’Affaire qui marque pour toujours une époque. L’homme au cœur du dossier est jeune, affiche le regard déterminé de l’homme sûr de son bon droit. Il est d’autant plus fascinant qu’il a plutôt une belle tête, qu’il porte la barbe légère de l’homme moderne, et qu’à l’évidence il ne manque pas de courage. Sa marche « contre la tyrannie des marchés » de Rome à la frontière franco-italienne après avoir rencontré le Pape François et avant d’être incarcéré, est à elle seule un mythe de la vie quotidienne française au sens où l’entendait Roland Barthes: elle a rendu les choses claires, évidentes, comme allant de soi. L’homme est désormais dépositaire des attributs de la sainteté et peut légitimement incarner le héros solitaire qui lutte contre le système complexe et honni de la finance mondiale. Le mythe fonctionne d’autant mieux que face à l’homme Kerviel, la banque Société Générale se présente toujours de manière anonyme, désincarnée, sans chair, ni os, ni âme.

C’est là, au cœur de ce spectacle quasi hollywoodien qu’intervient la justice. On attend d’elle qu’elle dise le réel, qu’elle extirpe le rationnel de ce grand bazar émotionnel. Or, elle le fait. Au plus haut niveau de sa hiérarchie. Tribunal, Cour d’appel, Cour de Cassation condamnent Jérôme Kerviel à 5 ans de prison, dont 3 ans fermes, pour abus de confiance, faux et usage de faux, et introduction frauduleuse de données dans un système informatique. Le volet civil de l’affaire, actuellement traité par la Cour d’appel de Versailles, concerne le montant des dommages et intérêts réclamés par la banque. Mais quelle que soit la décision de cette Cour, à la question fondamentale qui est le cœur du dossier, le trader Jérôme Kerviel a-t-il commis une faute?, la réponse est oui. Jérôme Kerviel lui-même l’a reconnu au cours de l’instruction, le jugement pénal de première instance en a fait la démonstration, le jugement pénal en appel l’a confirmé. Dès lors, le jugement rendu le 7 juin dernier par le tribunal des prud’hommes de Paris qui condamne la Société Générale pour « licenciement sans cause réelle ni sérieuse » est une ineptie. Je n’ignore pas l’argument de pure forme avancé par le Conseil prudhommal – le droit du travail donne deux mois à une entreprise pour sanctionner des faits, au-delà ils sont considérés comme prescrits -. Mais je vois surtout l’impasse construite, année après année, article après article, alinéa après alinéa, par le code du travail. Ce qu’il convient de mettre en cause n’est ni son poids, ni son épaisseur. De ce point de vue, le Code Général des Impôts n’a rien à lui envier. Non, ce qu’il convient de mettre en cause, c’est son essence aporétique, son incohérence qui peut aller jusqu’à la contradiction flagrante. La décision des prud’hommes en est l’illustration. L’entreprise se doit d’être prudente dans l’évaluation des agissements d’un salarié. Il est raisonnable qu’elle se donne le temps de la compréhension et de l’expertise. Il serait même répréhensible qu’elle fît autrement. Des mois et des mois de travail ont été nécessaires aux inspecteurs de police et aux juges pour établir les faits. Mais au DRH de la Société Générale, deux mois auraient dû suffire! D’un côté, une Cour d’appel condamne à plusieurs années de prison, de l’autre, un tribunal des prud’hommes réfute l’idée d’une « faute lourde »! Non seulement il est fréquent que le droit du travail soit intrinsèquement illogique, mais de plus il s’articule mal aux autres droits. Ici, le droit pénal. Souvent le droit du commerce ou le doit boursier. Mais ce qui rend la chose insupportable, c’est qu’à ces paradoxes du droit et de la justice, s’ajoute la dérive, manifeste depuis quelques années, des Conseils de Prud’hommes. A l’instar de cette décision « Kerviel contre Société Générale », combien de jugements où des détails de forme aboutissent à la condamnation de l’entreprise en dépit de la reconnaissance de la faute du salarié? Des centaines par an. Les Prud’hommes jugent de moins en moins l’individu et de plus en plus le système. Les Conseillers prudhommaux se pensent en justiciers: Jérôme Kerviel a sûrement triché, mais la Société Générale n’avait pas à lui donner un tel pouvoir ! Profitons-en pour rétablir de l’égalitarisme ! Bref, la forme prime sur le fond, la morale, pour ne pas dire le moralisme, sur le droit. La Société Générale survivra à l’Affaire Kerviel. Mais les TPE et les PME ne surmontent pas toujours l’injustice prudhommale de leur mini Affaire Kerviel. La loi Macron a apporté quelques modifications. Mais il est important d’aller beaucoup plus loin, et de lancer une réforme radicale en instaurant la présence obligatoire d’un juge professionnel. Sinon, la justice prudhommale au lieu d’exprimer le fléau de la balance sera le fléau tout court de notre vie économique et sociale. »




L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol