Urgences : une crise à plusieurs facettes
Régulièrement la crise des urgences réapparaît dans les médias. Une crise indiscutable si l’on se fie aux délais d’attente des patients. Mais une crise à plusieurs facettes. Une crise de l’organisation du système sanitaire, aussi une crise de société est une crise du fonctionnement de l’État.
Entamée mi-mars, la grève des urgences s’intensifie. En ce début du mois d’août, 213 services sont toujours mobilisés sur l’ensemble du territoire pour protester contre le manque de moyens face à l’engorgement des urgences, alors que la fréquentation des services a doublé en dix ans. Plus de 21,4 millions de passages y ont été recensés en 2017, un chiffre en hausse de 2,1% sur un an. Inédit par son ampleur, le mouvement démarré mi-mars à Paris après une série d’agressions n’a cessé de s’étendre. Le personnel des urgences réclame 10.000 emplois supplémentaires, une augmentation de salaire de 300 euros et l’arrêt des fermetures de lits dans les hôpitaux. Il est indiscutable que les conditions de travail dans les services d’urgence sont devenues intenables et que parfois ils mettent même la vie des patients en danger. Ceci étant, c’est la conséquence de l’organisation du système sanitaire caractérisé notamment avec l’affaiblissement du nombre de généralistes non seulement dans les zones denses mais aussi en zone rurale. Il n’y a plus de généralistes susceptibles d’intervenir et du coup les patients sont orientés de façon systématique vers les urgences qui doivent traiter de vraies t pathologie, aussi des dérèglements psychiques et sociaux. La responsabilité en incombe à l’État qui a réduit le nombre de médecins, aussi aux médecins eux-mêmes qui dans nombre de cas n’acceptent désormais les malades que sur rendez-vous et certains jours de la semaine. Des médecins qui se comportent pour certains comme des fonctionnaires. D’ailleurs nombre d’entre choisissent la fonction publique. D’autres préfèrent opter pour des spécialités qui ménagent le temps de travail et les congés par rapport à des généralistes à l’ancienne qui travaillent 10 ou 12 heures par jour. La responsabilité en incombe aussi aux patients eux-mêmes et à leurs familles. Souvent au moindre petit bobo par exemple dans les maisons de retraite (là aussi au manque d’infirmières et de médecins), on oriente vers le service des urgences. Un service des urgences devenues une véritable cour des miracles des auteurs et victimes de brutalité, des clochards, des blessés légers et de vraies pathologies graves. Le système de santé est en cause, la société également mais l’organisation des hôpitaux aussi ; en effet ce n’est pas parce que le service des urgences est débordé qu’il faut s’interdire de faire un audit sur le fonctionnement d’un hôpital devenu le plus souvent une sorte d’usine sans cohérence de gestion ou les difficultés du personnel soignant cachent parfois l’improductivité de nombre d’autres agents.