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Température-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

Température-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

par
Marianne Cohen
Professeure des universités en Géographie, Sorbonne Université

Laurence Eymard
Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l’environnement, Sorbonne Université

Romain Courault
Maître de conférences en Géographie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Serge Muller
Professeur émérite, chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
dans The Conversation

En compilant des données sur plus de 800 villes européennes, une récente étude scientifique a estimé que Paris était une des villes d’Europe les plus meurtrières en cas de canicule.

Pour comprendre pourquoi, il faut se pencher sur la notion d’îlot de chaleur urbain (ICU). Un phénomène bien connu des météorologues et qui exacerbe l’augmentation locale des températures avec la multiplication des pics de chaleur en période estivale.

Or toujours selon cette étude parue dans le Lancet Planetary Earth 90 % des Parisiens étaient exposés à un îlot de chaleur urbain de forte intensité (entre 3 et 6 °C de différence) et 10 % à un îlot de chaleur urbain de très forte intensité (plus de 6 °C de différence) en 2021.

Les villes ont d’abord été construites pour protéger leurs habitants avant d’intégrer des objectifs hygiénistes. Plus récemment, le pétrole bon marché et la voiture individuelle ont favorisé la mise en place de politiques familiales et d’aménagement facilitant l’étalement urbain.

À Paris, on qualifie de canicule un épisode d’au moins 3 jours consécutifs où les températures maximales dépassent 31 °C et les températures minimales 21 °C. Celle de 2003 a constitué un évènement extrême qui a suscité une prise de conscience européenne, vu son ampleur géographique et son impact sanitaire. Depuis, les canicules se succèdent et vont encore s’amplifier d’ici à 2050, sans réelle mise en débat politique des modèles d’urbanisation sauf exception.

Les vagues de chaleur représentent pourtant un danger direct pour la santé des populations, et affectent particulièrement des quartiers déjà vulnérables. Tâchons donc de comprendre d’abord pourquoi l’effet d’îlot de chaleur urbain est particulièrement néfaste en Île-de-France, avant de voir comment nous pourrions y remédier.

Toutes les surfaces artificielles génèrent de la chaleur en excédent, la température moyenne en ville étant supérieure de quelques dixièmes de degrés (bourg de petite taille) à plusieurs degrés (métropole) par rapport à celle de la campagne environnante. Par exemple, un écart de 4 °C a été observé entre le centre de Paris et les bois périphériques lors de la canicule de 2003.

Pour comprendre pourquoi, plusieurs facteurs sont à prendre en compte.

L’ICU augmente avec :

La chaleur due aux activités humaines (combustion, climatiseurs, chauffage, serveurs…).

La nature et la couleur des matériaux : béton, asphalte, tuiles et autres matériaux minéraux et synthétiques sombres qui absorbent l’énergie solaire le jour, et la réémettent la nuit (rayonnement thermique).

La hauteur et l’espacement entre les bâtiments : une forte densité de bâti piège l’air chaud et limite le refroidissement des surfaces et des murs. Les immeubles de haute taille et les extensions horizontales de la métropole provoquent un ralentissement aérodynamique, limitant l’évacuation de la chaleur.

À l’inverse, les facteurs d’atténuation sont :

Les sols naturels, la végétation et l’eau : un sol constitué de gravillons contient des poches d’air (isolantes), qui limitent l’absorption de chaleur et sa couleur claire réfléchit le rayonnement solaire. L’eau a, elle, un fort pouvoir rafraichissant, grâce à l’évaporation en surface. La végétation en bonne santé joue le même rôle, par sa transpiration. Elle peut se développer dans tous les interstices du bâti, plus facilement et durablement que des nappes d’eau.

L’ombre : les sols ombragés par les bâtiments riverains, des ombrières (structures destinées à fournir de l’ombre) ou par des arbres de haute taille accumulent moins de chaleur.

Les sols, murs et toits clairs réfléchissant la lumière du soleil. Ils emmagasinent donc moins de rayonnement que les matériaux sombres. En revanche, la réflexion du soleil peut aggraver la chaleur de l’air à proximité de la surface dans la journée.

Localement, les surfaces chaudes provoquent une dépression atmosphérique, qui favorise la circulation de l’air venant des périphéries plus fraîches (brise thermique nocturne.

De même, le relief favorise pendant la nuit la circulation de l’air vers le bas des pentes.

Les différents paramètres énoncés ci-dessus font que la Métropole du Grand Paris (MGP) présente un très fort îlot de chaleur urbain. Le tissu urbain continu autour de Paris intra muros aggrave encore plus cette situation.

Dans les quartiers périphériques où habitent les ménages les plus modestes, le bâti est mêlé à des zones industrielles et commerciales, et les températures diurnes atteignent des valeurs extrêmes dues à des revêtements imperméables et sombres prépondérants.

Au contraire, à l’ouest de Paris et dans la boucle de la Marne où vivent les ménages les plus aisés, les températures sont moindres, soit proches de la moyenne, soit plus fraîches, du fait de l’extension de zones pavillonnaires avec jardins, souvent situées à proximité de grands espaces verts.

La circulation de l’air y est également favorisée par les couloirs de fraîcheur rentrant dans la ville (air le long de la vallée de la Seine, ou venant des forêts proches sur les plateaux au Sud-Ouest). Inversement, la circulation de l’air est freinée dans le cœur de ville, dans les quartiers nord et de proches banlieues denses, par la minéralité et la hauteur des bâtiments (dont beaucoup d’immeubles sur dalle).

Certains modèles d’urbanisme, comme les cités-jardins ou les ceintures vertes, alternatives impulsées au tournant du XXe siècle pourraient être des sources d’inspiration, grâce à des surfaces plus importantes de végétation arborée, sols perméables, rivières et étangs pérennes, contribuant aussi au bien-être des habitants.

La cité jardin de Payret-Dortail au Plessis-Robinson : construite dans les années 1920, elle mêle petits collectifs et pavillons, séparés par des jardins et des rues arborées. Laurence Eymard, Fourni par l’auteur
C’est le cas pour le Grand Londres, qui en plus d’être bordé de zones humides et de grands réservoirs d’eau jouit de grands parcs et d’un réseau hydrographique accentuant la fraîcheur maritime. Du fait de son urbanisme moins dense et de sa situation légèrement plus septentrionale le Grand Londres connaît des températures bien moindres que le Grand Paris.

Comme le Grand Paris est déjà largement construit, il s’agit ici de proposer avant tout des solutions d’adaptation et d’atténuation aux canicules et autres extrêmes climatiques, le tout sans aggraver les inégalités existantes.

Un urbanisme à repenser face au changement climatique

Densifier encore fortement le tissu urbain, comme le prévoit le schéma directeur de l’Île-de-France aura pour effet d’augmenter la superficie du dôme de l’îlot de chaleur urbain, et exacerbera très probablement son intensité maximale au centre, étant donné que la circulation de l’air risque d’être bloquée en périphérie. Comme les Parisiens ont pu le vivre, notamment en 2022, le centre de la métropole deviendra invivable en période chaude. Cela conduira à une aggravation des inégalités sociales, sans résoudre les problèmes structurels de l’Île-de-France, puisque la seule issue des ménages est de partir en périphérie voire en province pour les plus chanceux.

Afin de garantir une qualité de vie satisfaisante sans accroître sa superficie et ses disparités sociales et spatiales, la piste la plus prometteuse est donc d’exploiter les sources internes de rafraîchissement et d’optimiser la circulation de l’air à toutes les échelles.

Ce qu’il faut préserver et améliorer
Les arbres existants, qu’ils soient implantés dans des espaces verts, le long d’alignements, ou dans des cités-jardins, de même que les zones perméables non recouvertes de bitume, les terrains de sport non recouverts de revêtements synthétiques, doivent être préservés, multipliés et étendus.

Le jardin du Trocadéro (Paris 16ᵉ), un espace vert à couvert végétal diversifié. Serge Muller, Fourni par l’auteur
Les zones agricoles situées à l’extérieur de la Métropole du Grand Paris pour la plupart (ex. Plateau de Saclay, Triangle de Gonesse), doivent aussi être conservées ou préservées, car les sols y sont perméables et relativement frais (hors longue période de sécheresse). À l’échelle du territoire, il est indispensable de conserver les zones de faible densité urbaine, car elles apportent une surface de sol naturel intéressante (jardins individuels ou de petits groupes d’immeubles), et un potentiel de circulation de l’air par la faible hauteur de bâti.

C’est pourtant l’inverse qui se produit dans la Métropole du Grand Paris. Les cités-jardins, du fait du vieillissement du bâti, sont menacées de destruction, alors qu’elles devraient être réhabilitées et classées, car ce modèle d’urbanisme est pertinent à la fois d’un point de vue social et bioclimatique. Les nouvelles constructions dans d’anciennes zones pavillonnaires classées comme des îlots d’habitats dans le Mode d’Occupation des Sols (Inventaire numérique de l’occupation des sols en Île-de-France établi par l’Institut Paris Région) occupent l’essentiel du terrain, les jardins étant détruits. La multiplication des infrastructures souterraines limite également les possibilités de végétalisation. Les aménagements pour les Jeux olympiques et paralympiques sont à cet égard insuffisamment vertueux.

Les projets urbains en cours de réalisation pour cette échéance ont été conçus il y a dix ans à une époque d’insouciance aujourd’hui révolue. En témoigne la récente remise à jour du Schéma directeur de la Région Île-de-France. Ces projets devraient ainsi être amendés pour réduire l’impact des vagues de chaleur (notamment prohiber les revêtements sombres des immeubles (murs, volets et toits), favoriser la circulation de l’air dans les appartements, isoler les murs par l’extérieur, espacer les immeubles et les entourer de jardins arborés de pleine terre. De même, les projections de croissance démographique et de besoins en logements de la Métropole du Grand Paris devraient être réactualisées à l’aune de l’ère post-pandémie de Covid-19, qui les a réduites.

Végétaliser certes, mais comment ?
La Métropole du Grand Paris est particulièrement dépourvue en végétation arborée, comme le montre la carte de l’Atelier parisien d’Urbanisme, mise à jour en 2021. Des compléments de plantations d’arbres sont donc hautement souhaitables, dans tous les espaces appropriés. Ces plantations devront être adaptées aux conditions climatiques des prochaines décennies. Elles pourront prendre des formes différentes et complémentaires en fonction des espaces :

Multiplication des plantations d’essences variées et adaptées le long des avenues afin d’accroître l’ombrage des chaussées et trottoirs, de constituer des corridors favorables à la circulation de la biodiversité et de favoriser des voitures moins climatisées. À l’origine, les plantations sur les grands boulevards ont été dominées par un petit nombre d’espèces. Sur 1900 arbres des Champs-Élysées, par exemple, 900 environ sont des marronniers et 560 des platanes. Ce type de monoculture n’est clairement pas à favoriser, de par le caractère d’adaptation limité de ces espèces face au dérèglement climatique, du danger que court une plantation avec seulement quelques espèces face à d’éventuelles menaces pathogènes et de la pauvreté de ce type de plantation pour la biodiversité.

Création et/ou extension de nouveaux parcs, jardins et squares urbains, sur le modèle multifonctionnel des parcs haussmanniens de Paris constituant des espaces de récréation (et de refuge, même nocturne lors des épisodes de canicules) pour les populations.

Accroissement de la végétalisation (avec l’inclusion de végétaux arbustifs et herbacés) sur les places minéralisées de la métropole, sur le modèle des plantations d’arbres réalisées à la place de la Comédie de Montpellier ou à la place de la gare de Strasbourg.

Maintien de friches spontanées, à l’image de celles qui se sont développées en bordure de la « petite ceinture parisienne ».

Création de nouvelles forêts ou de bosquets denses urbains, constituant des îlots de fraîcheur, à l’exemple des « micro-forêts Miyawaki » (de l’ordre de quelques centaines de m2) ou de projets sur des surfaces plus conséquentes (de l’ordre de l’hectare) comme celle en cours de réalisation de la place de Catalogne à Paris.

Ensemble végétal structuré avec strates arborescente, arbustive et herbacée, rue Vercingétorix (Paris 14ᵉ). Serge Muller, Fourni par l’auteur
L’ensemble de ces formations végétales, complémentaires et adaptées à chaque situation locale, contribuera à accroître l’indice global de canopée de la Métropole du Grand Paris et à tendre vers une réelle « forêt urbaine » qui constitue la meilleure adaptation possible des villes aux canicules à venir.

Il est aussi important, à l’échelle régionale, de relier ces zones végétalisées par des corridors de fraîcheur, orientés de façon à optimiser la circulation des brises dominantes arrivant des zones agricoles, forestières ou humides plus fraîches situées en périphérie.

Climat-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

Climat-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

par
Marianne Cohen
Professeure des universités en Géographie, Sorbonne Université

Laurence Eymard
Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l’environnement, Sorbonne Université

Romain Courault
Maître de conférences en Géographie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Serge Muller
Professeur émérite, chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
dans The Conversation

En compilant des données sur plus de 800 villes européennes, une récente étude scientifique a estimé que Paris était une des villes d’Europe les plus meurtrières en cas de canicule.

Pour comprendre pourquoi, il faut se pencher sur la notion d’îlot de chaleur urbain (ICU). Un phénomène bien connu des météorologues et qui exacerbe l’augmentation locale des températures avec la multiplication des pics de chaleur en période estivale.

Or toujours selon cette étude parue dans le Lancet Planetary Earth 90 % des Parisiens étaient exposés à un îlot de chaleur urbain de forte intensité (entre 3 et 6 °C de différence) et 10 % à un îlot de chaleur urbain de très forte intensité (plus de 6 °C de différence) en 2021.

Les villes ont d’abord été construites pour protéger leurs habitants avant d’intégrer des objectifs hygiénistes. Plus récemment, le pétrole bon marché et la voiture individuelle ont favorisé la mise en place de politiques familiales et d’aménagement facilitant l’étalement urbain.

À Paris, on qualifie de canicule un épisode d’au moins 3 jours consécutifs où les températures maximales dépassent 31 °C et les températures minimales 21 °C. Celle de 2003 a constitué un évènement extrême qui a suscité une prise de conscience européenne, vu son ampleur géographique et son impact sanitaire. Depuis, les canicules se succèdent et vont encore s’amplifier d’ici à 2050, sans réelle mise en débat politique des modèles d’urbanisation sauf exception.

Les vagues de chaleur représentent pourtant un danger direct pour la santé des populations, et affectent particulièrement des quartiers déjà vulnérables. Tâchons donc de comprendre d’abord pourquoi l’effet d’îlot de chaleur urbain est particulièrement néfaste en Île-de-France, avant de voir comment nous pourrions y remédier.

Toutes les surfaces artificielles génèrent de la chaleur en excédent, la température moyenne en ville étant supérieure de quelques dixièmes de degrés (bourg de petite taille) à plusieurs degrés (métropole) par rapport à celle de la campagne environnante. Par exemple, un écart de 4 °C a été observé entre le centre de Paris et les bois périphériques lors de la canicule de 2003.

Pour comprendre pourquoi, plusieurs facteurs sont à prendre en compte.

L’ICU augmente avec :

La chaleur due aux activités humaines (combustion, climatiseurs, chauffage, serveurs…).

La nature et la couleur des matériaux : béton, asphalte, tuiles et autres matériaux minéraux et synthétiques sombres qui absorbent l’énergie solaire le jour, et la réémettent la nuit (rayonnement thermique).

La hauteur et l’espacement entre les bâtiments : une forte densité de bâti piège l’air chaud et limite le refroidissement des surfaces et des murs. Les immeubles de haute taille et les extensions horizontales de la métropole provoquent un ralentissement aérodynamique, limitant l’évacuation de la chaleur.

À l’inverse, les facteurs d’atténuation sont :

Les sols naturels, la végétation et l’eau : un sol constitué de gravillons contient des poches d’air (isolantes), qui limitent l’absorption de chaleur et sa couleur claire réfléchit le rayonnement solaire. L’eau a, elle, un fort pouvoir rafraichissant, grâce à l’évaporation en surface. La végétation en bonne santé joue le même rôle, par sa transpiration. Elle peut se développer dans tous les interstices du bâti, plus facilement et durablement que des nappes d’eau.

L’ombre : les sols ombragés par les bâtiments riverains, des ombrières (structures destinées à fournir de l’ombre) ou par des arbres de haute taille accumulent moins de chaleur.

Les sols, murs et toits clairs réfléchissant la lumière du soleil. Ils emmagasinent donc moins de rayonnement que les matériaux sombres. En revanche, la réflexion du soleil peut aggraver la chaleur de l’air à proximité de la surface dans la journée.

Localement, les surfaces chaudes provoquent une dépression atmosphérique, qui favorise la circulation de l’air venant des périphéries plus fraîches (brise thermique nocturne.

De même, le relief favorise pendant la nuit la circulation de l’air vers le bas des pentes.

Les différents paramètres énoncés ci-dessus font que la Métropole du Grand Paris (MGP) présente un très fort îlot de chaleur urbain. Le tissu urbain continu autour de Paris intra muros aggrave encore plus cette situation.

Dans les quartiers périphériques où habitent les ménages les plus modestes, le bâti est mêlé à des zones industrielles et commerciales, et les températures diurnes atteignent des valeurs extrêmes dues à des revêtements imperméables et sombres prépondérants.

Au contraire, à l’ouest de Paris et dans la boucle de la Marne où vivent les ménages les plus aisés, les températures sont moindres, soit proches de la moyenne, soit plus fraîches, du fait de l’extension de zones pavillonnaires avec jardins, souvent situées à proximité de grands espaces verts.

La circulation de l’air y est également favorisée par les couloirs de fraîcheur rentrant dans la ville (air le long de la vallée de la Seine, ou venant des forêts proches sur les plateaux au Sud-Ouest). Inversement, la circulation de l’air est freinée dans le cœur de ville, dans les quartiers nord et de proches banlieues denses, par la minéralité et la hauteur des bâtiments (dont beaucoup d’immeubles sur dalle).

Certains modèles d’urbanisme, comme les cités-jardins ou les ceintures vertes, alternatives impulsées au tournant du XXe siècle pourraient être des sources d’inspiration, grâce à des surfaces plus importantes de végétation arborée, sols perméables, rivières et étangs pérennes, contribuant aussi au bien-être des habitants.

La cité jardin de Payret-Dortail au Plessis-Robinson : construite dans les années 1920, elle mêle petits collectifs et pavillons, séparés par des jardins et des rues arborées. Laurence Eymard, Fourni par l’auteur
C’est le cas pour le Grand Londres, qui en plus d’être bordé de zones humides et de grands réservoirs d’eau jouit de grands parcs et d’un réseau hydrographique accentuant la fraîcheur maritime. Du fait de son urbanisme moins dense et de sa situation légèrement plus septentrionale le Grand Londres connaît des températures bien moindres que le Grand Paris.

Comme le Grand Paris est déjà largement construit, il s’agit ici de proposer avant tout des solutions d’adaptation et d’atténuation aux canicules et autres extrêmes climatiques, le tout sans aggraver les inégalités existantes.

Un urbanisme à repenser face au changement climatique

Densifier encore fortement le tissu urbain, comme le prévoit le schéma directeur de l’Île-de-France aura pour effet d’augmenter la superficie du dôme de l’îlot de chaleur urbain, et exacerbera très probablement son intensité maximale au centre, étant donné que la circulation de l’air risque d’être bloquée en périphérie. Comme les Parisiens ont pu le vivre, notamment en 2022, le centre de la métropole deviendra invivable en période chaude. Cela conduira à une aggravation des inégalités sociales, sans résoudre les problèmes structurels de l’Île-de-France, puisque la seule issue des ménages est de partir en périphérie voire en province pour les plus chanceux.

Afin de garantir une qualité de vie satisfaisante sans accroître sa superficie et ses disparités sociales et spatiales, la piste la plus prometteuse est donc d’exploiter les sources internes de rafraîchissement et d’optimiser la circulation de l’air à toutes les échelles.

Ce qu’il faut préserver et améliorer
Les arbres existants, qu’ils soient implantés dans des espaces verts, le long d’alignements, ou dans des cités-jardins, de même que les zones perméables non recouvertes de bitume, les terrains de sport non recouverts de revêtements synthétiques, doivent être préservés, multipliés et étendus.

Le jardin du Trocadéro (Paris 16ᵉ), un espace vert à couvert végétal diversifié. Serge Muller, Fourni par l’auteur
Les zones agricoles situées à l’extérieur de la Métropole du Grand Paris pour la plupart (ex. Plateau de Saclay, Triangle de Gonesse), doivent aussi être conservées ou préservées, car les sols y sont perméables et relativement frais (hors longue période de sécheresse). À l’échelle du territoire, il est indispensable de conserver les zones de faible densité urbaine, car elles apportent une surface de sol naturel intéressante (jardins individuels ou de petits groupes d’immeubles), et un potentiel de circulation de l’air par la faible hauteur de bâti.

C’est pourtant l’inverse qui se produit dans la Métropole du Grand Paris. Les cités-jardins, du fait du vieillissement du bâti, sont menacées de destruction, alors qu’elles devraient être réhabilitées et classées, car ce modèle d’urbanisme est pertinent à la fois d’un point de vue social et bioclimatique. Les nouvelles constructions dans d’anciennes zones pavillonnaires classées comme des îlots d’habitats dans le Mode d’Occupation des Sols (Inventaire numérique de l’occupation des sols en Île-de-France établi par l’Institut Paris Région) occupent l’essentiel du terrain, les jardins étant détruits. La multiplication des infrastructures souterraines limite également les possibilités de végétalisation. Les aménagements pour les Jeux olympiques et paralympiques sont à cet égard insuffisamment vertueux.

Les projets urbains en cours de réalisation pour cette échéance ont été conçus il y a dix ans à une époque d’insouciance aujourd’hui révolue. En témoigne la récente remise à jour du Schéma directeur de la Région Île-de-France. Ces projets devraient ainsi être amendés pour réduire l’impact des vagues de chaleur (notamment prohiber les revêtements sombres des immeubles (murs, volets et toits), favoriser la circulation de l’air dans les appartements, isoler les murs par l’extérieur, espacer les immeubles et les entourer de jardins arborés de pleine terre. De même, les projections de croissance démographique et de besoins en logements de la Métropole du Grand Paris devraient être réactualisées à l’aune de l’ère post-pandémie de Covid-19, qui les a réduites.

Végétaliser certes, mais comment ?
La Métropole du Grand Paris est particulièrement dépourvue en végétation arborée, comme le montre la carte de l’Atelier parisien d’Urbanisme, mise à jour en 2021. Des compléments de plantations d’arbres sont donc hautement souhaitables, dans tous les espaces appropriés. Ces plantations devront être adaptées aux conditions climatiques des prochaines décennies. Elles pourront prendre des formes différentes et complémentaires en fonction des espaces :

Multiplication des plantations d’essences variées et adaptées le long des avenues afin d’accroître l’ombrage des chaussées et trottoirs, de constituer des corridors favorables à la circulation de la biodiversité et de favoriser des voitures moins climatisées. À l’origine, les plantations sur les grands boulevards ont été dominées par un petit nombre d’espèces. Sur 1900 arbres des Champs-Élysées, par exemple, 900 environ sont des marronniers et 560 des platanes. Ce type de monoculture n’est clairement pas à favoriser, de par le caractère d’adaptation limité de ces espèces face au dérèglement climatique, du danger que court une plantation avec seulement quelques espèces face à d’éventuelles menaces pathogènes et de la pauvreté de ce type de plantation pour la biodiversité.

Création et/ou extension de nouveaux parcs, jardins et squares urbains, sur le modèle multifonctionnel des parcs haussmanniens de Paris constituant des espaces de récréation (et de refuge, même nocturne lors des épisodes de canicules) pour les populations.

Accroissement de la végétalisation (avec l’inclusion de végétaux arbustifs et herbacés) sur les places minéralisées de la métropole, sur le modèle des plantations d’arbres réalisées à la place de la Comédie de Montpellier ou à la place de la gare de Strasbourg.

Maintien de friches spontanées, à l’image de celles qui se sont développées en bordure de la « petite ceinture parisienne ».

Création de nouvelles forêts ou de bosquets denses urbains, constituant des îlots de fraîcheur, à l’exemple des « micro-forêts Miyawaki » (de l’ordre de quelques centaines de m2) ou de projets sur des surfaces plus conséquentes (de l’ordre de l’hectare) comme celle en cours de réalisation de la place de Catalogne à Paris.

Ensemble végétal structuré avec strates arborescente, arbustive et herbacée, rue Vercingétorix (Paris 14ᵉ). Serge Muller, Fourni par l’auteur
L’ensemble de ces formations végétales, complémentaires et adaptées à chaque situation locale, contribuera à accroître l’indice global de canopée de la Métropole du Grand Paris et à tendre vers une réelle « forêt urbaine » qui constitue la meilleure adaptation possible des villes aux canicules à venir.

Il est aussi important, à l’échelle régionale, de relier ces zones végétalisées par des corridors de fraîcheur, orientés de façon à optimiser la circulation des brises dominantes arrivant des zones agricoles, forestières ou humides plus fraîches situées en périphérie.

Température-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

Température-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

par
Marianne Cohen
Professeure des universités en Géographie, Sorbonne Université

Laurence Eymard
Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l’environnement, Sorbonne Université

Romain Courault
Maître de conférences en Géographie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Serge Muller
Professeur émérite, chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
dans The Conversation

En compilant des données sur plus de 800 villes européennes, une récente étude scientifique a estimé que Paris était une des villes d’Europe les plus meurtrières en cas de canicule.

Pour comprendre pourquoi, il faut se pencher sur la notion d’îlot de chaleur urbain (ICU). Un phénomène bien connu des météorologues et qui exacerbe l’augmentation locale des températures avec la multiplication des pics de chaleur en période estivale.

Or toujours selon cette étude parue dans le Lancet Planetary Earth 90 % des Parisiens étaient exposés à un îlot de chaleur urbain de forte intensité (entre 3 et 6 °C de différence) et 10 % à un îlot de chaleur urbain de très forte intensité (plus de 6 °C de différence) en 2021.

Les villes ont d’abord été construites pour protéger leurs habitants avant d’intégrer des objectifs hygiénistes. Plus récemment, le pétrole bon marché et la voiture individuelle ont favorisé la mise en place de politiques familiales et d’aménagement facilitant l’étalement urbain.

À Paris, on qualifie de canicule un épisode d’au moins 3 jours consécutifs où les températures maximales dépassent 31 °C et les températures minimales 21 °C. Celle de 2003 a constitué un évènement extrême qui a suscité une prise de conscience européenne, vu son ampleur géographique et son impact sanitaire. Depuis, les canicules se succèdent et vont encore s’amplifier d’ici à 2050, sans réelle mise en débat politique des modèles d’urbanisation sauf exception.

Les vagues de chaleur représentent pourtant un danger direct pour la santé des populations, et affectent particulièrement des quartiers déjà vulnérables. Tâchons donc de comprendre d’abord pourquoi l’effet d’îlot de chaleur urbain est particulièrement néfaste en Île-de-France, avant de voir comment nous pourrions y remédier.

Toutes les surfaces artificielles génèrent de la chaleur en excédent, la température moyenne en ville étant supérieure de quelques dixièmes de degrés (bourg de petite taille) à plusieurs degrés (métropole) par rapport à celle de la campagne environnante. Par exemple, un écart de 4 °C a été observé entre le centre de Paris et les bois périphériques lors de la canicule de 2003.

Pour comprendre pourquoi, plusieurs facteurs sont à prendre en compte.

L’ICU augmente avec :

La chaleur due aux activités humaines (combustion, climatiseurs, chauffage, serveurs…).

La nature et la couleur des matériaux : béton, asphalte, tuiles et autres matériaux minéraux et synthétiques sombres qui absorbent l’énergie solaire le jour, et la réémettent la nuit (rayonnement thermique).

La hauteur et l’espacement entre les bâtiments : une forte densité de bâti piège l’air chaud et limite le refroidissement des surfaces et des murs. Les immeubles de haute taille et les extensions horizontales de la métropole provoquent un ralentissement aérodynamique, limitant l’évacuation de la chaleur.

À l’inverse, les facteurs d’atténuation sont :

Les sols naturels, la végétation et l’eau : un sol constitué de gravillons contient des poches d’air (isolantes), qui limitent l’absorption de chaleur et sa couleur claire réfléchit le rayonnement solaire. L’eau a, elle, un fort pouvoir rafraichissant, grâce à l’évaporation en surface. La végétation en bonne santé joue le même rôle, par sa transpiration. Elle peut se développer dans tous les interstices du bâti, plus facilement et durablement que des nappes d’eau.

L’ombre : les sols ombragés par les bâtiments riverains, des ombrières (structures destinées à fournir de l’ombre) ou par des arbres de haute taille accumulent moins de chaleur.

Les sols, murs et toits clairs réfléchissant la lumière du soleil. Ils emmagasinent donc moins de rayonnement que les matériaux sombres. En revanche, la réflexion du soleil peut aggraver la chaleur de l’air à proximité de la surface dans la journée.

Localement, les surfaces chaudes provoquent une dépression atmosphérique, qui favorise la circulation de l’air venant des périphéries plus fraîches (brise thermique nocturne.

De même, le relief favorise pendant la nuit la circulation de l’air vers le bas des pentes.

Les différents paramètres énoncés ci-dessus font que la Métropole du Grand Paris (MGP) présente un très fort îlot de chaleur urbain. Le tissu urbain continu autour de Paris intra muros aggrave encore plus cette situation.

Dans les quartiers périphériques où habitent les ménages les plus modestes, le bâti est mêlé à des zones industrielles et commerciales, et les températures diurnes atteignent des valeurs extrêmes dues à des revêtements imperméables et sombres prépondérants.

Au contraire, à l’ouest de Paris et dans la boucle de la Marne où vivent les ménages les plus aisés, les températures sont moindres, soit proches de la moyenne, soit plus fraîches, du fait de l’extension de zones pavillonnaires avec jardins, souvent situées à proximité de grands espaces verts.

La circulation de l’air y est également favorisée par les couloirs de fraîcheur rentrant dans la ville (air le long de la vallée de la Seine, ou venant des forêts proches sur les plateaux au Sud-Ouest). Inversement, la circulation de l’air est freinée dans le cœur de ville, dans les quartiers nord et de proches banlieues denses, par la minéralité et la hauteur des bâtiments (dont beaucoup d’immeubles sur dalle).

Certains modèles d’urbanisme, comme les cités-jardins ou les ceintures vertes, alternatives impulsées au tournant du XXe siècle pourraient être des sources d’inspiration, grâce à des surfaces plus importantes de végétation arborée, sols perméables, rivières et étangs pérennes, contribuant aussi au bien-être des habitants.

La cité jardin de Payret-Dortail au Plessis-Robinson : construite dans les années 1920, elle mêle petits collectifs et pavillons, séparés par des jardins et des rues arborées. Laurence Eymard, Fourni par l’auteur
C’est le cas pour le Grand Londres, qui en plus d’être bordé de zones humides et de grands réservoirs d’eau jouit de grands parcs et d’un réseau hydrographique accentuant la fraîcheur maritime. Du fait de son urbanisme moins dense et de sa situation légèrement plus septentrionale le Grand Londres connaît des températures bien moindres que le Grand Paris.

Comme le Grand Paris est déjà largement construit, il s’agit ici de proposer avant tout des solutions d’adaptation et d’atténuation aux canicules et autres extrêmes climatiques, le tout sans aggraver les inégalités existantes.

Un urbanisme à repenser face au changement climatique

Densifier encore fortement le tissu urbain, comme le prévoit le schéma directeur de l’Île-de-France aura pour effet d’augmenter la superficie du dôme de l’îlot de chaleur urbain, et exacerbera très probablement son intensité maximale au centre, étant donné que la circulation de l’air risque d’être bloquée en périphérie. Comme les Parisiens ont pu le vivre, notamment en 2022, le centre de la métropole deviendra invivable en période chaude. Cela conduira à une aggravation des inégalités sociales, sans résoudre les problèmes structurels de l’Île-de-France, puisque la seule issue des ménages est de partir en périphérie voire en province pour les plus chanceux.

Afin de garantir une qualité de vie satisfaisante sans accroître sa superficie et ses disparités sociales et spatiales, la piste la plus prometteuse est donc d’exploiter les sources internes de rafraîchissement et d’optimiser la circulation de l’air à toutes les échelles.

Ce qu’il faut préserver et améliorer
Les arbres existants, qu’ils soient implantés dans des espaces verts, le long d’alignements, ou dans des cités-jardins, de même que les zones perméables non recouvertes de bitume, les terrains de sport non recouverts de revêtements synthétiques, doivent être préservés, multipliés et étendus.

Le jardin du Trocadéro (Paris 16ᵉ), un espace vert à couvert végétal diversifié. Serge Muller, Fourni par l’auteur
Les zones agricoles situées à l’extérieur de la Métropole du Grand Paris pour la plupart (ex. Plateau de Saclay, Triangle de Gonesse), doivent aussi être conservées ou préservées, car les sols y sont perméables et relativement frais (hors longue période de sécheresse). À l’échelle du territoire, il est indispensable de conserver les zones de faible densité urbaine, car elles apportent une surface de sol naturel intéressante (jardins individuels ou de petits groupes d’immeubles), et un potentiel de circulation de l’air par la faible hauteur de bâti.

C’est pourtant l’inverse qui se produit dans la Métropole du Grand Paris. Les cités-jardins, du fait du vieillissement du bâti, sont menacées de destruction, alors qu’elles devraient être réhabilitées et classées, car ce modèle d’urbanisme est pertinent à la fois d’un point de vue social et bioclimatique. Les nouvelles constructions dans d’anciennes zones pavillonnaires classées comme des îlots d’habitats dans le Mode d’Occupation des Sols (Inventaire numérique de l’occupation des sols en Île-de-France établi par l’Institut Paris Région) occupent l’essentiel du terrain, les jardins étant détruits. La multiplication des infrastructures souterraines limite également les possibilités de végétalisation. Les aménagements pour les Jeux olympiques et paralympiques sont à cet égard insuffisamment vertueux.

Les projets urbains en cours de réalisation pour cette échéance ont été conçus il y a dix ans à une époque d’insouciance aujourd’hui révolue. En témoigne la récente remise à jour du Schéma directeur de la Région Île-de-France. Ces projets devraient ainsi être amendés pour réduire l’impact des vagues de chaleur (notamment prohiber les revêtements sombres des immeubles (murs, volets et toits), favoriser la circulation de l’air dans les appartements, isoler les murs par l’extérieur, espacer les immeubles et les entourer de jardins arborés de pleine terre. De même, les projections de croissance démographique et de besoins en logements de la Métropole du Grand Paris devraient être réactualisées à l’aune de l’ère post-pandémie de Covid-19, qui les a réduites.

Végétaliser certes, mais comment ?
La Métropole du Grand Paris est particulièrement dépourvue en végétation arborée, comme le montre la carte de l’Atelier parisien d’Urbanisme, mise à jour en 2021. Des compléments de plantations d’arbres sont donc hautement souhaitables, dans tous les espaces appropriés. Ces plantations devront être adaptées aux conditions climatiques des prochaines décennies. Elles pourront prendre des formes différentes et complémentaires en fonction des espaces :

Multiplication des plantations d’essences variées et adaptées le long des avenues afin d’accroître l’ombrage des chaussées et trottoirs, de constituer des corridors favorables à la circulation de la biodiversité et de favoriser des voitures moins climatisées. À l’origine, les plantations sur les grands boulevards ont été dominées par un petit nombre d’espèces. Sur 1900 arbres des Champs-Élysées, par exemple, 900 environ sont des marronniers et 560 des platanes. Ce type de monoculture n’est clairement pas à favoriser, de par le caractère d’adaptation limité de ces espèces face au dérèglement climatique, du danger que court une plantation avec seulement quelques espèces face à d’éventuelles menaces pathogènes et de la pauvreté de ce type de plantation pour la biodiversité.

Création et/ou extension de nouveaux parcs, jardins et squares urbains, sur le modèle multifonctionnel des parcs haussmanniens de Paris constituant des espaces de récréation (et de refuge, même nocturne lors des épisodes de canicules) pour les populations.

Accroissement de la végétalisation (avec l’inclusion de végétaux arbustifs et herbacés) sur les places minéralisées de la métropole, sur le modèle des plantations d’arbres réalisées à la place de la Comédie de Montpellier ou à la place de la gare de Strasbourg.

Maintien de friches spontanées, à l’image de celles qui se sont développées en bordure de la « petite ceinture parisienne ».

Création de nouvelles forêts ou de bosquets denses urbains, constituant des îlots de fraîcheur, à l’exemple des « micro-forêts Miyawaki » (de l’ordre de quelques centaines de m2) ou de projets sur des surfaces plus conséquentes (de l’ordre de l’hectare) comme celle en cours de réalisation de la place de Catalogne à Paris.

Ensemble végétal structuré avec strates arborescente, arbustive et herbacée, rue Vercingétorix (Paris 14ᵉ). Serge Muller, Fourni par l’auteur
L’ensemble de ces formations végétales, complémentaires et adaptées à chaque situation locale, contribuera à accroître l’indice global de canopée de la Métropole du Grand Paris et à tendre vers une réelle « forêt urbaine » qui constitue la meilleure adaptation possible des villes aux canicules à venir.

Il est aussi important, à l’échelle régionale, de relier ces zones végétalisées par des corridors de fraîcheur, orientés de façon à optimiser la circulation des brises dominantes arrivant des zones agricoles, forestières ou humides plus fraîches situées en périphérie.

Climat-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

Climat-Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

par
Marianne Cohen
Professeure des universités en Géographie, Sorbonne Université

Laurence Eymard
Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l’environnement, Sorbonne Université

Romain Courault
Maître de conférences en Géographie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Serge Muller
Professeur émérite, chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
dans The Conversation

En compilant des données sur plus de 800 villes européennes, une récente étude scientifique a estimé que Paris était une des villes d’Europe les plus meurtrières en cas de canicule.

Pour comprendre pourquoi, il faut se pencher sur la notion d’îlot de chaleur urbain (ICU). Un phénomène bien connu des météorologues et qui exacerbe l’augmentation locale des températures avec la multiplication des pics de chaleur en période estivale.

Or toujours selon cette étude parue dans le Lancet Planetary Earth 90 % des Parisiens étaient exposés à un îlot de chaleur urbain de forte intensité (entre 3 et 6 °C de différence) et 10 % à un îlot de chaleur urbain de très forte intensité (plus de 6 °C de différence) en 2021.

Les villes ont d’abord été construites pour protéger leurs habitants avant d’intégrer des objectifs hygiénistes. Plus récemment, le pétrole bon marché et la voiture individuelle ont favorisé la mise en place de politiques familiales et d’aménagement facilitant l’étalement urbain.

À Paris, on qualifie de canicule un épisode d’au moins 3 jours consécutifs où les températures maximales dépassent 31 °C et les températures minimales 21 °C. Celle de 2003 a constitué un évènement extrême qui a suscité une prise de conscience européenne, vu son ampleur géographique et son impact sanitaire. Depuis, les canicules se succèdent et vont encore s’amplifier d’ici à 2050, sans réelle mise en débat politique des modèles d’urbanisation sauf exception.

Les vagues de chaleur représentent pourtant un danger direct pour la santé des populations, et affectent particulièrement des quartiers déjà vulnérables. Tâchons donc de comprendre d’abord pourquoi l’effet d’îlot de chaleur urbain est particulièrement néfaste en Île-de-France, avant de voir comment nous pourrions y remédier.

Toutes les surfaces artificielles génèrent de la chaleur en excédent, la température moyenne en ville étant supérieure de quelques dixièmes de degrés (bourg de petite taille) à plusieurs degrés (métropole) par rapport à celle de la campagne environnante. Par exemple, un écart de 4 °C a été observé entre le centre de Paris et les bois périphériques lors de la canicule de 2003.

Pour comprendre pourquoi, plusieurs facteurs sont à prendre en compte.

L’ICU augmente avec :

La chaleur due aux activités humaines (combustion, climatiseurs, chauffage, serveurs…).

La nature et la couleur des matériaux : béton, asphalte, tuiles et autres matériaux minéraux et synthétiques sombres qui absorbent l’énergie solaire le jour, et la réémettent la nuit (rayonnement thermique).

La hauteur et l’espacement entre les bâtiments : une forte densité de bâti piège l’air chaud et limite le refroidissement des surfaces et des murs. Les immeubles de haute taille et les extensions horizontales de la métropole provoquent un ralentissement aérodynamique, limitant l’évacuation de la chaleur.

À l’inverse, les facteurs d’atténuation sont :

Les sols naturels, la végétation et l’eau : un sol constitué de gravillons contient des poches d’air (isolantes), qui limitent l’absorption de chaleur et sa couleur claire réfléchit le rayonnement solaire. L’eau a, elle, un fort pouvoir rafraichissant, grâce à l’évaporation en surface. La végétation en bonne santé joue le même rôle, par sa transpiration. Elle peut se développer dans tous les interstices du bâti, plus facilement et durablement que des nappes d’eau.

L’ombre : les sols ombragés par les bâtiments riverains, des ombrières (structures destinées à fournir de l’ombre) ou par des arbres de haute taille accumulent moins de chaleur.

Les sols, murs et toits clairs réfléchissant la lumière du soleil. Ils emmagasinent donc moins de rayonnement que les matériaux sombres. En revanche, la réflexion du soleil peut aggraver la chaleur de l’air à proximité de la surface dans la journée.

Localement, les surfaces chaudes provoquent une dépression atmosphérique, qui favorise la circulation de l’air venant des périphéries plus fraîches (brise thermique nocturne.

De même, le relief favorise pendant la nuit la circulation de l’air vers le bas des pentes.

Les différents paramètres énoncés ci-dessus font que la Métropole du Grand Paris (MGP) présente un très fort îlot de chaleur urbain. Le tissu urbain continu autour de Paris intra muros aggrave encore plus cette situation.

Dans les quartiers périphériques où habitent les ménages les plus modestes, le bâti est mêlé à des zones industrielles et commerciales, et les températures diurnes atteignent des valeurs extrêmes dues à des revêtements imperméables et sombres prépondérants.

Au contraire, à l’ouest de Paris et dans la boucle de la Marne où vivent les ménages les plus aisés, les températures sont moindres, soit proches de la moyenne, soit plus fraîches, du fait de l’extension de zones pavillonnaires avec jardins, souvent situées à proximité de grands espaces verts.

La circulation de l’air y est également favorisée par les couloirs de fraîcheur rentrant dans la ville (air le long de la vallée de la Seine, ou venant des forêts proches sur les plateaux au Sud-Ouest). Inversement, la circulation de l’air est freinée dans le cœur de ville, dans les quartiers nord et de proches banlieues denses, par la minéralité et la hauteur des bâtiments (dont beaucoup d’immeubles sur dalle).

Certains modèles d’urbanisme, comme les cités-jardins ou les ceintures vertes, alternatives impulsées au tournant du XXe siècle pourraient être des sources d’inspiration, grâce à des surfaces plus importantes de végétation arborée, sols perméables, rivières et étangs pérennes, contribuant aussi au bien-être des habitants.

La cité jardin de Payret-Dortail au Plessis-Robinson : construite dans les années 1920, elle mêle petits collectifs et pavillons, séparés par des jardins et des rues arborées. Laurence Eymard, Fourni par l’auteur
C’est le cas pour le Grand Londres, qui en plus d’être bordé de zones humides et de grands réservoirs d’eau jouit de grands parcs et d’un réseau hydrographique accentuant la fraîcheur maritime. Du fait de son urbanisme moins dense et de sa situation légèrement plus septentrionale le Grand Londres connaît des températures bien moindres que le Grand Paris.

Comme le Grand Paris est déjà largement construit, il s’agit ici de proposer avant tout des solutions d’adaptation et d’atténuation aux canicules et autres extrêmes climatiques, le tout sans aggraver les inégalités existantes.

Un urbanisme à repenser face au changement climatique

Densifier encore fortement le tissu urbain, comme le prévoit le schéma directeur de l’Île-de-France aura pour effet d’augmenter la superficie du dôme de l’îlot de chaleur urbain, et exacerbera très probablement son intensité maximale au centre, étant donné que la circulation de l’air risque d’être bloquée en périphérie. Comme les Parisiens ont pu le vivre, notamment en 2022, le centre de la métropole deviendra invivable en période chaude. Cela conduira à une aggravation des inégalités sociales, sans résoudre les problèmes structurels de l’Île-de-France, puisque la seule issue des ménages est de partir en périphérie voire en province pour les plus chanceux.

Afin de garantir une qualité de vie satisfaisante sans accroître sa superficie et ses disparités sociales et spatiales, la piste la plus prometteuse est donc d’exploiter les sources internes de rafraîchissement et d’optimiser la circulation de l’air à toutes les échelles.

Ce qu’il faut préserver et améliorer
Les arbres existants, qu’ils soient implantés dans des espaces verts, le long d’alignements, ou dans des cités-jardins, de même que les zones perméables non recouvertes de bitume, les terrains de sport non recouverts de revêtements synthétiques, doivent être préservés, multipliés et étendus.

Le jardin du Trocadéro (Paris 16ᵉ), un espace vert à couvert végétal diversifié. Serge Muller, Fourni par l’auteur
Les zones agricoles situées à l’extérieur de la Métropole du Grand Paris pour la plupart (ex. Plateau de Saclay, Triangle de Gonesse), doivent aussi être conservées ou préservées, car les sols y sont perméables et relativement frais (hors longue période de sécheresse). À l’échelle du territoire, il est indispensable de conserver les zones de faible densité urbaine, car elles apportent une surface de sol naturel intéressante (jardins individuels ou de petits groupes d’immeubles), et un potentiel de circulation de l’air par la faible hauteur de bâti.

C’est pourtant l’inverse qui se produit dans la Métropole du Grand Paris. Les cités-jardins, du fait du vieillissement du bâti, sont menacées de destruction, alors qu’elles devraient être réhabilitées et classées, car ce modèle d’urbanisme est pertinent à la fois d’un point de vue social et bioclimatique. Les nouvelles constructions dans d’anciennes zones pavillonnaires classées comme des îlots d’habitats dans le Mode d’Occupation des Sols (Inventaire numérique de l’occupation des sols en Île-de-France établi par l’Institut Paris Région) occupent l’essentiel du terrain, les jardins étant détruits. La multiplication des infrastructures souterraines limite également les possibilités de végétalisation. Les aménagements pour les Jeux olympiques et paralympiques sont à cet égard insuffisamment vertueux.

Les projets urbains en cours de réalisation pour cette échéance ont été conçus il y a dix ans à une époque d’insouciance aujourd’hui révolue. En témoigne la récente remise à jour du Schéma directeur de la Région Île-de-France. Ces projets devraient ainsi être amendés pour réduire l’impact des vagues de chaleur (notamment prohiber les revêtements sombres des immeubles (murs, volets et toits), favoriser la circulation de l’air dans les appartements, isoler les murs par l’extérieur, espacer les immeubles et les entourer de jardins arborés de pleine terre. De même, les projections de croissance démographique et de besoins en logements de la Métropole du Grand Paris devraient être réactualisées à l’aune de l’ère post-pandémie de Covid-19, qui les a réduites.

Végétaliser certes, mais comment ?
La Métropole du Grand Paris est particulièrement dépourvue en végétation arborée, comme le montre la carte de l’Atelier parisien d’Urbanisme, mise à jour en 2021. Des compléments de plantations d’arbres sont donc hautement souhaitables, dans tous les espaces appropriés. Ces plantations devront être adaptées aux conditions climatiques des prochaines décennies. Elles pourront prendre des formes différentes et complémentaires en fonction des espaces :

Multiplication des plantations d’essences variées et adaptées le long des avenues afin d’accroître l’ombrage des chaussées et trottoirs, de constituer des corridors favorables à la circulation de la biodiversité et de favoriser des voitures moins climatisées. À l’origine, les plantations sur les grands boulevards ont été dominées par un petit nombre d’espèces. Sur 1900 arbres des Champs-Élysées, par exemple, 900 environ sont des marronniers et 560 des platanes. Ce type de monoculture n’est clairement pas à favoriser, de par le caractère d’adaptation limité de ces espèces face au dérèglement climatique, du danger que court une plantation avec seulement quelques espèces face à d’éventuelles menaces pathogènes et de la pauvreté de ce type de plantation pour la biodiversité.

Création et/ou extension de nouveaux parcs, jardins et squares urbains, sur le modèle multifonctionnel des parcs haussmanniens de Paris constituant des espaces de récréation (et de refuge, même nocturne lors des épisodes de canicules) pour les populations.

Accroissement de la végétalisation (avec l’inclusion de végétaux arbustifs et herbacés) sur les places minéralisées de la métropole, sur le modèle des plantations d’arbres réalisées à la place de la Comédie de Montpellier ou à la place de la gare de Strasbourg.

Maintien de friches spontanées, à l’image de celles qui se sont développées en bordure de la « petite ceinture parisienne ».

Création de nouvelles forêts ou de bosquets denses urbains, constituant des îlots de fraîcheur, à l’exemple des « micro-forêts Miyawaki » (de l’ordre de quelques centaines de m2) ou de projets sur des surfaces plus conséquentes (de l’ordre de l’hectare) comme celle en cours de réalisation de la place de Catalogne à Paris.

Ensemble végétal structuré avec strates arborescente, arbustive et herbacée, rue Vercingétorix (Paris 14ᵉ). Serge Muller, Fourni par l’auteur
L’ensemble de ces formations végétales, complémentaires et adaptées à chaque situation locale, contribuera à accroître l’indice global de canopée de la Métropole du Grand Paris et à tendre vers une réelle « forêt urbaine » qui constitue la meilleure adaptation possible des villes aux canicules à venir.

Il est aussi important, à l’échelle régionale, de relier ces zones végétalisées par des corridors de fraîcheur, orientés de façon à optimiser la circulation des brises dominantes arrivant des zones agricoles, forestières ou humides plus fraîches situées en périphérie.

Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

Paris, une des villes les plus chaudes en Europe

par
Marianne Cohen
Professeure des universités en Géographie, Sorbonne Université

Laurence Eymard
Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l’environnement, Sorbonne Université

Romain Courault
Maître de conférences en Géographie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Serge Muller
Professeur émérite, chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
dans The Conversation

En compilant des données sur plus de 800 villes européennes, une récente étude scientifique a estimé que Paris était une des villes d’Europe les plus meurtrières en cas de canicule.

Pour comprendre pourquoi, il faut se pencher sur la notion d’îlot de chaleur urbain (ICU). Un phénomène bien connu des météorologues et qui exacerbe l’augmentation locale des températures avec la multiplication des pics de chaleur en période estivale.

Or toujours selon cette étude parue dans le Lancet Planetary Earth 90 % des Parisiens étaient exposés à un îlot de chaleur urbain de forte intensité (entre 3 et 6 °C de différence) et 10 % à un îlot de chaleur urbain de très forte intensité (plus de 6 °C de différence) en 2021.

Les villes ont d’abord été construites pour protéger leurs habitants avant d’intégrer des objectifs hygiénistes. Plus récemment, le pétrole bon marché et la voiture individuelle ont favorisé la mise en place de politiques familiales et d’aménagement facilitant l’étalement urbain.

À Paris, on qualifie de canicule un épisode d’au moins 3 jours consécutifs où les températures maximales dépassent 31 °C et les températures minimales 21 °C. Celle de 2003 a constitué un évènement extrême qui a suscité une prise de conscience européenne, vu son ampleur géographique et son impact sanitaire. Depuis, les canicules se succèdent et vont encore s’amplifier d’ici à 2050, sans réelle mise en débat politique des modèles d’urbanisation sauf exception.

Les vagues de chaleur représentent pourtant un danger direct pour la santé des populations, et affectent particulièrement des quartiers déjà vulnérables. Tâchons donc de comprendre d’abord pourquoi l’effet d’îlot de chaleur urbain est particulièrement néfaste en Île-de-France, avant de voir comment nous pourrions y remédier.

Toutes les surfaces artificielles génèrent de la chaleur en excédent, la température moyenne en ville étant supérieure de quelques dixièmes de degrés (bourg de petite taille) à plusieurs degrés (métropole) par rapport à celle de la campagne environnante. Par exemple, un écart de 4 °C a été observé entre le centre de Paris et les bois périphériques lors de la canicule de 2003.

Pour comprendre pourquoi, plusieurs facteurs sont à prendre en compte.

L’ICU augmente avec :

La chaleur due aux activités humaines (combustion, climatiseurs, chauffage, serveurs…).

La nature et la couleur des matériaux : béton, asphalte, tuiles et autres matériaux minéraux et synthétiques sombres qui absorbent l’énergie solaire le jour, et la réémettent la nuit (rayonnement thermique).

La hauteur et l’espacement entre les bâtiments : une forte densité de bâti piège l’air chaud et limite le refroidissement des surfaces et des murs. Les immeubles de haute taille et les extensions horizontales de la métropole provoquent un ralentissement aérodynamique, limitant l’évacuation de la chaleur.

À l’inverse, les facteurs d’atténuation sont :

Les sols naturels, la végétation et l’eau : un sol constitué de gravillons contient des poches d’air (isolantes), qui limitent l’absorption de chaleur et sa couleur claire réfléchit le rayonnement solaire. L’eau a, elle, un fort pouvoir rafraichissant, grâce à l’évaporation en surface. La végétation en bonne santé joue le même rôle, par sa transpiration. Elle peut se développer dans tous les interstices du bâti, plus facilement et durablement que des nappes d’eau.

L’ombre : les sols ombragés par les bâtiments riverains, des ombrières (structures destinées à fournir de l’ombre) ou par des arbres de haute taille accumulent moins de chaleur.

Les sols, murs et toits clairs réfléchissant la lumière du soleil. Ils emmagasinent donc moins de rayonnement que les matériaux sombres. En revanche, la réflexion du soleil peut aggraver la chaleur de l’air à proximité de la surface dans la journée.

Localement, les surfaces chaudes provoquent une dépression atmosphérique, qui favorise la circulation de l’air venant des périphéries plus fraîches (brise thermique nocturne.

De même, le relief favorise pendant la nuit la circulation de l’air vers le bas des pentes.

Les différents paramètres énoncés ci-dessus font que la Métropole du Grand Paris (MGP) présente un très fort îlot de chaleur urbain. Le tissu urbain continu autour de Paris intra muros aggrave encore plus cette situation.

Dans les quartiers périphériques où habitent les ménages les plus modestes, le bâti est mêlé à des zones industrielles et commerciales, et les températures diurnes atteignent des valeurs extrêmes dues à des revêtements imperméables et sombres prépondérants.

Au contraire, à l’ouest de Paris et dans la boucle de la Marne où vivent les ménages les plus aisés, les températures sont moindres, soit proches de la moyenne, soit plus fraîches, du fait de l’extension de zones pavillonnaires avec jardins, souvent situées à proximité de grands espaces verts.

La circulation de l’air y est également favorisée par les couloirs de fraîcheur rentrant dans la ville (air le long de la vallée de la Seine, ou venant des forêts proches sur les plateaux au Sud-Ouest). Inversement, la circulation de l’air est freinée dans le cœur de ville, dans les quartiers nord et de proches banlieues denses, par la minéralité et la hauteur des bâtiments (dont beaucoup d’immeubles sur dalle).

Certains modèles d’urbanisme, comme les cités-jardins ou les ceintures vertes, alternatives impulsées au tournant du XXe siècle pourraient être des sources d’inspiration, grâce à des surfaces plus importantes de végétation arborée, sols perméables, rivières et étangs pérennes, contribuant aussi au bien-être des habitants.

La cité jardin de Payret-Dortail au Plessis-Robinson : construite dans les années 1920, elle mêle petits collectifs et pavillons, séparés par des jardins et des rues arborées. Laurence Eymard, Fourni par l’auteur
C’est le cas pour le Grand Londres, qui en plus d’être bordé de zones humides et de grands réservoirs d’eau jouit de grands parcs et d’un réseau hydrographique accentuant la fraîcheur maritime. Du fait de son urbanisme moins dense et de sa situation légèrement plus septentrionale le Grand Londres connaît des températures bien moindres que le Grand Paris.

Comme le Grand Paris est déjà largement construit, il s’agit ici de proposer avant tout des solutions d’adaptation et d’atténuation aux canicules et autres extrêmes climatiques, le tout sans aggraver les inégalités existantes.

Un urbanisme à repenser face au changement climatique

Densifier encore fortement le tissu urbain, comme le prévoit le schéma directeur de l’Île-de-France aura pour effet d’augmenter la superficie du dôme de l’îlot de chaleur urbain, et exacerbera très probablement son intensité maximale au centre, étant donné que la circulation de l’air risque d’être bloquée en périphérie. Comme les Parisiens ont pu le vivre, notamment en 2022, le centre de la métropole deviendra invivable en période chaude. Cela conduira à une aggravation des inégalités sociales, sans résoudre les problèmes structurels de l’Île-de-France, puisque la seule issue des ménages est de partir en périphérie voire en province pour les plus chanceux.

Afin de garantir une qualité de vie satisfaisante sans accroître sa superficie et ses disparités sociales et spatiales, la piste la plus prometteuse est donc d’exploiter les sources internes de rafraîchissement et d’optimiser la circulation de l’air à toutes les échelles.

Ce qu’il faut préserver et améliorer
Les arbres existants, qu’ils soient implantés dans des espaces verts, le long d’alignements, ou dans des cités-jardins, de même que les zones perméables non recouvertes de bitume, les terrains de sport non recouverts de revêtements synthétiques, doivent être préservés, multipliés et étendus.

Le jardin du Trocadéro (Paris 16ᵉ), un espace vert à couvert végétal diversifié. Serge Muller, Fourni par l’auteur
Les zones agricoles situées à l’extérieur de la Métropole du Grand Paris pour la plupart (ex. Plateau de Saclay, Triangle de Gonesse), doivent aussi être conservées ou préservées, car les sols y sont perméables et relativement frais (hors longue période de sécheresse). À l’échelle du territoire, il est indispensable de conserver les zones de faible densité urbaine, car elles apportent une surface de sol naturel intéressante (jardins individuels ou de petits groupes d’immeubles), et un potentiel de circulation de l’air par la faible hauteur de bâti.

C’est pourtant l’inverse qui se produit dans la Métropole du Grand Paris. Les cités-jardins, du fait du vieillissement du bâti, sont menacées de destruction, alors qu’elles devraient être réhabilitées et classées, car ce modèle d’urbanisme est pertinent à la fois d’un point de vue social et bioclimatique. Les nouvelles constructions dans d’anciennes zones pavillonnaires classées comme des îlots d’habitats dans le Mode d’Occupation des Sols (Inventaire numérique de l’occupation des sols en Île-de-France établi par l’Institut Paris Région) occupent l’essentiel du terrain, les jardins étant détruits. La multiplication des infrastructures souterraines limite également les possibilités de végétalisation. Les aménagements pour les Jeux olympiques et paralympiques sont à cet égard insuffisamment vertueux.

Les projets urbains en cours de réalisation pour cette échéance ont été conçus il y a dix ans à une époque d’insouciance aujourd’hui révolue. En témoigne la récente remise à jour du Schéma directeur de la Région Île-de-France. Ces projets devraient ainsi être amendés pour réduire l’impact des vagues de chaleur (notamment prohiber les revêtements sombres des immeubles (murs, volets et toits), favoriser la circulation de l’air dans les appartements, isoler les murs par l’extérieur, espacer les immeubles et les entourer de jardins arborés de pleine terre. De même, les projections de croissance démographique et de besoins en logements de la Métropole du Grand Paris devraient être réactualisées à l’aune de l’ère post-pandémie de Covid-19, qui les a réduites.

Végétaliser certes, mais comment ?
La Métropole du Grand Paris est particulièrement dépourvue en végétation arborée, comme le montre la carte de l’Atelier parisien d’Urbanisme, mise à jour en 2021. Des compléments de plantations d’arbres sont donc hautement souhaitables, dans tous les espaces appropriés. Ces plantations devront être adaptées aux conditions climatiques des prochaines décennies. Elles pourront prendre des formes différentes et complémentaires en fonction des espaces :

Multiplication des plantations d’essences variées et adaptées le long des avenues afin d’accroître l’ombrage des chaussées et trottoirs, de constituer des corridors favorables à la circulation de la biodiversité et de favoriser des voitures moins climatisées. À l’origine, les plantations sur les grands boulevards ont été dominées par un petit nombre d’espèces. Sur 1900 arbres des Champs-Élysées, par exemple, 900 environ sont des marronniers et 560 des platanes. Ce type de monoculture n’est clairement pas à favoriser, de par le caractère d’adaptation limité de ces espèces face au dérèglement climatique, du danger que court une plantation avec seulement quelques espèces face à d’éventuelles menaces pathogènes et de la pauvreté de ce type de plantation pour la biodiversité.

Création et/ou extension de nouveaux parcs, jardins et squares urbains, sur le modèle multifonctionnel des parcs haussmanniens de Paris constituant des espaces de récréation (et de refuge, même nocturne lors des épisodes de canicules) pour les populations.

Accroissement de la végétalisation (avec l’inclusion de végétaux arbustifs et herbacés) sur les places minéralisées de la métropole, sur le modèle des plantations d’arbres réalisées à la place de la Comédie de Montpellier ou à la place de la gare de Strasbourg.

Maintien de friches spontanées, à l’image de celles qui se sont développées en bordure de la « petite ceinture parisienne ».

Création de nouvelles forêts ou de bosquets denses urbains, constituant des îlots de fraîcheur, à l’exemple des « micro-forêts Miyawaki » (de l’ordre de quelques centaines de m2) ou de projets sur des surfaces plus conséquentes (de l’ordre de l’hectare) comme celle en cours de réalisation de la place de Catalogne à Paris.

Ensemble végétal structuré avec strates arborescente, arbustive et herbacée, rue Vercingétorix (Paris 14ᵉ). Serge Muller, Fourni par l’auteur
L’ensemble de ces formations végétales, complémentaires et adaptées à chaque situation locale, contribuera à accroître l’indice global de canopée de la Métropole du Grand Paris et à tendre vers une réelle « forêt urbaine » qui constitue la meilleure adaptation possible des villes aux canicules à venir.

Il est aussi important, à l’échelle régionale, de relier ces zones végétalisées par des corridors de fraîcheur, orientés de façon à optimiser la circulation des brises dominantes arrivant des zones agricoles, forestières ou humides plus fraîches situées en périphérie.

Démocraties en Europe: un besoin de légitimité

Démocraties en Europe: un besoin de légitimité

par
Pierre Bréchon
Professeur émérite de science politique, Sciences Po Grenoble, Auteurs historiques, The Conversation France

Avec l’usage fréquent depuis 2022 de l’article 49.3 de la Constitution pour faire plus facilement adopter des lois contestées, beaucoup de Français estiment que notre système politique est peu démocratique. Plusieurs pays européens ont vu se développer depuis deux décennies des systèmes politiques plus ou moins autoritaires, notamment en Pologne et en Hongrie. Des partis politiques de droite radicale sont de plus en plus implantés dans le paysage politique de presque tous les pays. Dans le même temps, les élites politiques, notamment les parlementaires, sont fortement critiquées : elles seraient corrompues, trop coupées du peuple, incapables d’entendre ses besoins et de faire adopter des lois efficaces. Plusieurs pays, dont la France, ont connu des révoltes de jeunes qui seraient le signe d’un mal-être sociétal. Sans compter les attentats terroristes qui fragilisent aussi les sociétés européennes. Les démocraties européennes seraient donc en crise. Au-delà des événements sur lesquels les médias concentrent leur attention, que peut-on savoir des valeurs des Européens et plus particulièrement de leur attachement à la démocratie ?

Un nombre important de pays européens sont membres de l’Union européenne. Ils sont donc censés s’organiser en conformité avec des principes fondamentaux énoncés dans les traités de l’Union. Selon l’article 2 :

« L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes ».
Beau programme, mais les enquêtes faites auprès des Européens montrent que ceux-ci sont loin d’être des citoyens aussi vertueux dans le soutien aux valeurs qui fondent l’Union que les traités l’affirment. L’ouvrage collectif que je viens de coordonner, Les Européens et leurs valeurs. Entre individualisme et individualisation, le montre clairement. Il est bâti sur l’analyse des résultats de la European Values Studies (EVS), une grande enquête faite par des chercheurs européens tous les neuf ans pour analyser les transformations des valeurs dans les différentes parties du continent (près de 60 000 interviewés dans 34 pays entre 2017 et 2020).

Les données révèlent que, contrairement à ce que beaucoup pensent, les valeurs de solidarité se développent – lentement – face aux tentations de repli individualiste. Les volontés d’autonomie et de libre choix de leur vie par les individus s’affirment très fortement dans le domaine familial, politique, dans les rapports au travail et même à la religion.

Mais l’attachement des Européens à la démocratie, question centrale de cet article, est moins évident. Plusieurs questions permettent de l’évaluer. Certes, pratiquement tous les Européens se disent adeptes du système démocratique et les trois quarts jugent important de vivre dans un pays organisé sur cette base. 57 % voudraient pouvoir davantage faire entendre leurs besoins au travail et dans leur environnement quotidien. Les attentes de démocratie sont donc élevées. Mais les critiques et l’insatisfaction domine : seulement un tiers des Européens jugent que leur pays est gouverné démocratiquement et seulement 20 % sont satisfaits du fonctionnement du système politique. Ceci est le signe d’une crise de la représentation.

Seulement 38 % de « démocrates exclusifs »

L’enthousiasme apparent des Européens à l’égard du système démocratique doit être fortement relativisé. En effet, pour beaucoup, le choix du système démocratique n’est pas exclusif. 52 % d’entre eux accepteraient un gouvernement d’experts qui prennent les décisions, 32 % trouveraient bon le pouvoir d’un leader autoritaire et 14 % pourraient même soutenir un régime militaire. Au total, il n’y a que 38 % de « démocrates exclusifs » qui trouvent bonne la démocratie mais mauvais les autres systèmes. Dans une assez large partie de la population, les valeurs démocratiques ne sont donc pas profondément ancrées. Lorsqu’une crise politique survient, la tentation peut être forte d’encourager un système anti-démocratique.

Si beaucoup d’Européens considèrent positivement la démocratie, ils n’en ont pas tous la même conception. Des caractéristiques centrales de la démocratie représentative (élections libres, droits civiques, égalité des hommes et des femmes) sont jugées essentielles par le plus grand nombre.

Certains sont aussi attachés à des aspects économiques. Pour eux, l’aide aux chômeurs, la redistribution par l’impôt, l’égalisation des revenus sont aussi des dimensions essentielles d’une démocratie. Ces attentes économiques sont plus importantes en Europe du Sud et en Russie.

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Enfin, l’enquête testait trois caractéristiques habituellement considérées comme non démocratiques : l’obéissance aux gouvernants, l’armée prenant le pouvoir, la régulation du politique par le pouvoir religieux. Certes, ces valeurs ne sont pas souvent considérées comme essentielles à une démocratie. Mais obéir aux gouvernants est considéré par 57 % de Russes et 45 % d’Européens du Sud comme une caractéristique forte de la démocratie. L’obéissance de principe aux gouvernants ne permet pas de les critiquer et de protester, ce qui est pourtant un droit fondamental dans une démocratie.

Où est-on le plus attaché à la démocratie ?

Les démocrates exclusifs sont nettement plus nombreux dans les pays nordiques, en Europe de l’Ouest et du Sud qu’à l’est du continent, notamment dans des pays qui ont adhéré à l’Union au début des années 2000. Et l’attachement exclusif à la démocratie ne semble pas avoir beaucoup varié en 20 ans.

D’après la carte, la démocratie semble assez solide en Tchéquie, Lituanie et Estonie, elle est beaucoup plus fragile en Croatie et Roumanie (seulement 10 % et 8 % de démocrates exclusifs). Cela pose particulièrement question puisqu’il s’agit de deux pays membres de l’Union, qui doivent donc respecter ses valeurs.

En Europe de l’Ouest, les Allemands et les Suisses sont nettement plus attachés à la démocratie que les Français. Ceux-ci ne sont guère plus démocrates exclusifs que la moyenne des Européens : si 89 % jugent que la démocratie est un bon système, 48 % disent la même chose pour un gouvernement des experts, 23 % pour le pouvoir autoritaire d’un homme fort et 13 % pour un gouvernement de l’armée.

En Russie, au vu du leadership poutinien, les résultats de l’enquête peuvent étonner. Le niveau de démocrates exclusifs est aussi élevé en Russie (41 %) que dans plusieurs autres pays européens, notamment la France (40 %). 81 % des Russes considèrent en effet la démocratie comme un bon système. 32 % d’entre eux accepteraient le gouvernement d’un leader autoritaire et 19 % des militaires. Le niveau de soutien à un régime d’experts est particulièrement bas par rapport à beaucoup de pays, seuls 38 % l’accepteraient, ce qui sonne comme un désaveu des technocrates de l’entourage présidentiel, jugés responsable de tout ce qui va mal.

Au total, la démocratie est donc plus fragile qu’on ne le croit dans beaucoup de pays de l’Union européenne. Les responsables politiques et les acteurs de la société civile devraient réfléchir aux moyens de renforcer l’attachement des citoyens au système démocratique. Dans un contexte où les élus sont très fortement critiqués, les démocraties ont besoin de se relégitimer.

Economie- Inflation Europe : Encore loin de 2 %

Economie- Inflation Europe : Encore loin de 2 %

L’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) a grimpé à 8,4% en moyenne dans l’Union monétaire et pourrait descendre à 5,4% en 2023 selon les dernières projections de la Banque centrale européenne (BCE). L’inflation ne se rapprocherait de sa cible (2%) qu’à partir de 2025. En clair, cela devrait donner des raisons à la banque centrale européenne de poursuivre la hausse des taux.

En juin 2023, l’indice des prix à la consommation (IPC) augmente de 0,2 % sur un mois, après ‑0,1 % en mai. Les prix de l’énergie sont quasi stables (+0,1 % après ‑3,0 % en mai), avec un léger rebond des produits pétroliers (+0,3 % après ‑5,9 %). Les prix de l’alimentation augmentent au même rythme que le mois précédent (+0,3 %) et ceux des produits manufacturés restent quasi stables (+0,1 % après +0,0 %). Les prix des services ralentissent légèrement (+0,2 % après +0,3 %) du fait du repli des prix des services de communication (‑3,0 % après +0,2 %) et de la moindre hausse de ceux des « autres services » (+0,4 % après +0,6 %).
En France, l’inflation pourrait ralentir à 5,6% (IPCH) en 2023 après 5,9% en 2022. Les prix pourraient frôler la cible de la BCE de 2% à partir de 2024 (2,4%) et 2025 (1,9%) d’après la Banque de France. Sur le Vieux continent, le coup de frein brutal de l’inflation à 2% en Espagne a laissé espérer un retour durable de la baisse des prix. Mais il reste encore beaucoup d’incertitudes.

L’inflation sous-jacente qui correspond à l’indice des prix sans les produits les plus volatils, comme l’énergie ou l’alimentation, reste à des niveaux élevés. Dans l’Hexagone, elle pourrait atteindre 4,4% à la fin de l’année 2023. Dans ce contexte, les craintes d’un niveau des prix durablement plus élevé s’amplifient.

Le détail de l’indice général montre que les prix continuent de rester à des niveaux très élevés pour certaines catégories de biens ou services. Le coup de frein dans la surchauffe des prix en est grande partie liée à la baisse des tarifs dans l’énergie ( mais qui est en train de remonter). Au moment de l’éclatement de la guerre en Ukraine, les prix du gaz et du pétrole avaient considérablement flambé sur le Vieux continent compte tenu de la dépendance de certains pays comme l’Allemagne. Le problème est qu’ils repartent nettement la hausse.

Inflation Europe : Encore loin de 2 %

Inflation Europe : Encore loin de 2 %

L’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) a grimpé à 8,4% en moyenne dans l’Union monétaire et pourrait descendre à 5,4% en 2023 selon les dernières projections de la Banque centrale européenne (BCE). L’inflation ne se rapprocherait de sa cible (2%) qu’à partir de 2025. En clair, cela devrait donner des raisons à la banque centrale européenne de poursuivre la hausse des taux.

En juin 2023, l’indice des prix à la consommation (IPC) augmente de 0,2 % sur un mois, après ‑0,1 % en mai. Les prix de l’énergie sont quasi stables (+0,1 % après ‑3,0 % en mai), avec un léger rebond des produits pétroliers (+0,3 % après ‑5,9 %). Les prix de l’alimentation augmentent au même rythme que le mois précédent (+0,3 %) et ceux des produits manufacturés restent quasi stables (+0,1 % après +0,0 %). Les prix des services ralentissent légèrement (+0,2 % après +0,3 %) du fait du repli des prix des services de communication (‑3,0 % après +0,2 %) et de la moindre hausse de ceux des « autres services » (+0,4 % après +0,6 %).
En France, l’inflation pourrait ralentir à 5,6% (IPCH) en 2023 après 5,9% en 2022. Les prix pourraient frôler la cible de la BCE de 2% à partir de 2024 (2,4%) et 2025 (1,9%) d’après la Banque de France. Sur le Vieux continent, le coup de frein brutal de l’inflation à 2% en Espagne a laissé espérer un retour durable de la baisse des prix. Mais il reste encore beaucoup d’incertitudes.

L’inflation sous-jacente qui correspond à l’indice des prix sans les produits les plus volatils, comme l’énergie ou l’alimentation, reste à des niveaux élevés. Dans l’Hexagone, elle pourrait atteindre 4,4% à la fin de l’année 2023. Dans ce contexte, les craintes d’un niveau des prix durablement plus élevé s’amplifient.

Le détail de l’indice général montre que les prix continuent de rester à des niveaux très élevés pour certaines catégories de biens ou services. Le coup de frein dans la surchauffe des prix en est grande partie liée à la baisse des tarifs dans l’énergie. Au moment de l’éclatement de la guerre en Ukraine, les prix du gaz et du pétrole avaient considérablement flambé sur le Vieux continent compte tenu de la dépendance de certains pays comme l’Allemagne. Le problème est qu’ils repartent nettement la hausse.

Zone euro : L’inflation à un pic en Europe ?

Zone euro : L’inflation à un pic en Europe ?

La banque centrale européenne affirme que l’inflation sous-jacente à atteint son pic, ce qui permettrait d’éviter de nouvelles hausses des taux. L ’inflation sous-jacente exclut les prix très volatils comme l’énergie et l’alimentation et permet ainsi de dégager une tendance de fond de l’évolution des prix.

C’est la trajectoire de l’inflation sous-jacente qui dicte la politique monétaire de la BCE. Tant qu’une décrue franche n’est pas observée, la banque centrale entend poursuivre la remontée des taux.

Mais le concept même d’inflation sous-jacente dite aussi de long terme parce désaisonnalisée est discutable. Pour l’instant en effet, il évacue les hausses de l’énergie et de l’alimentation considérée comme exceptionnelle et conjoncturelle.

Toute la question est de savoir ce qui est conjoncturel et structurel. Rien n’indique que le pétrole par exemple ou l’électricité vont diminuer bien au contraire. De la même manière, que n’indique que les prix de l’alimentation vont diminuer car certaines hausses sont structurelles.

En début de semaine, alors que les spéculations se poursuivent autour d’une éventuelle pause sur la hausse des taux après septembre, Christine Lagarde, présidente de l’institution bancaire européenne, n’a pas pris position clairement. « Il y aura peut-être une nouvelle augmentation des taux directeurs, ou peut-être une pause », a-t-elle déclaré

« Une pause, quelle qu’en soit la date, en septembre ou plus tard, ne revêtirait pas nécessairement un caractère définitif », a toutefois tempéré la responsable de la BCE. Pour envisager une pause, il faudrait, selon elle, que « l’inflation soit durablement ramenée à sa cible » de 2%.

Fiscalité : la France en tête en Europe

Fiscalité : la France en tête en Europe

En Europe, la France demeure l’un des pays dans lesquels les prélèvements obligatoires sont les plus importants. Elle se hisse même au sommet du classement en zone euro, et en deuxième place dans l’UE – derrière le Danemark -, selon une étude du site spécialisé Fipeco, publiée mardi.

Au total, en 2021, le taux des prélèvements obligatoires en France – qui inclut les impôts, les taxes et les cotisations sociales – représentait 47% du PIB, selon Eurostat. Soit 4,8 points de plus que la moyenne de la zone euro (42,2%) et 4,6 points de plus que l’Allemagne (42,4%). L’Hexagone reste toutefois 1,8 point en deçà du Danemark, dont le taux s’établit à 48,8%.

Dans le détail, si la France reste au-dessus de presque tous ses voisins européens, c’est en grande partie en raison des impôts sur la production que l’État collecte. «Les impôts sur la production, qui forment un ensemble hétérogène, restaient la principale source d’écart entre les taux de prélèvements obligatoires en France et dans la zone euro en 2021», note Fipeco. Ils représentaient 4,5% du PIB dans l’Hexagone en 2021, soit 2,2 points de plus que la moyenne de la zone euro, et 3,5 points de plus que l’Allemagne.

L’étude du site d’informations sur les finances publiques constate par ailleurs que la France reste assez largement au-dessus de ses voisins européens concernant les impôts sur la consommation : 12,3% du PIB en 2021 contre 11,1% en zone euro et 10,1% en Allemagne. «Cela tient assez peu à la TVA, dont le poids n’était que légèrement supérieur en France (de 0,2 point par rapport à la moyenne de la zone), et bien plus aux taxes spécifiques à des produits particuliers (écart de 1,0 point de PIB avec la moyenne de la zone euro) : énergie, tabacs, alcools, assurances etc.», explique l’étude.

Quant aux impôts sur les revenus des ménages, leur poids a augmenté en France avec la hausse de la CSG en 2018. Il se situe désormais à un niveau comparable à celui de la moyenne européenne (9,4% en France contre 9,7% en zone euro). «L’impôt sur le revenu au sens strict reste cependant bien plus faible en France (3,3 % du PIB)», souligne Fipeco. Enfin, si «le poids des cotisations sociales a nettement diminué en France ces dernières années», il continue à expliquer une part non négligeable de l’écart fiscal entre l’Hexagone et le reste de la zone euro (1,3 point). À noter qu’il est désormais largement inférieur à celui de l’Allemagne (15,5% contre 17,6%).

Classement criminalité en Europe: la France en tête

Classement criminalité en Europe: la France en tête

La France est très mal classée dans l’Union européenne en matière de sécurité des biens et des personnes. En moyenne en 2016-2018, avant la crise du Covid, la France était le deuxième pays le plus mal placé des 27 de l’Union européenne en matière de vol qualifié, le troisième pays le plus mal classé en matière de vol de voitures. Le nombre de vols qualifiés en France se situait à 150 pour 100.000 habitants contre moins de 50, en Allemagne, en Italie, dans le nord de l’Europe et dans la plupart des pays de l’Est! Il en est de même pour le vol des voitures, près de 250 vols de voitures pour 100.000 habitants en France, moins du tiers en Espagne, en Allemagne et dans les pays du Nord de l’UE.

Pays Indice de Criminalité ( 2022)
1 Bélarus 58,41
2 France 52,41
3 Suède 49,00
4 Moldavie 47,44
5 Grèce 47,41
6 Ukraine 46,94
7 Royaume-Uni 46,47
8 Albanie 46,08
10 La Belgique 45,38
11 Italie 45,20
12 Kosovo 42,29
13 Bosnie Herzégovine 42,23
14 Monténégro 41,10
15 Macédoine du Nord 40,87
16 Malte 40,82
17 Russie 39,62
18 Bulgarie 38,74
19 Lettonie 38,65
20 Serbie 38,29
21 Allemagne 36,37
22 Luxembourg 35,71
23 Hongrie 34,29
24 Espagne 33,87
25 Norvège 33,85
26 Lituanie 33,28
27 Portugal 30,58
28 Slovaquie 30,18
29 Pologne 29,79
30 Roumanie 28,79

Classement indice de criminalité en Europe: la France en tête de l’UE

Classement indice de criminalité en Europe

La France est très mal classée dans l’Union européenne en matière de sécurité des biens et des personnes. En moyenne en 2016-2018, avant la crise du Covid, la France était le deuxième pays le plus mal placé des 27 de l’Union européenne en matière de vol qualifié, le troisième pays le plus mal classé en matière de vol de voitures. Le nombre de vols qualifiés en France se situait à 150 pour 100.000 habitants contre moins de 50, en Allemagne, en Italie, dans le nord de l’Europe et dans la plupart des pays de l’Est! Il en est de même pour le vol des voitures, près de 250 vols de voitures pour 100.000 habitants en France, moins du tiers en Espagne, en Allemagne et dans les pays du Nord de l’UE.

Pays Indice de Criminalité ( 2022)
1 Bélarus 58,41
2 France 52,41
3 Suède 49,00
4 Moldavie 47,44
5 Grèce 47,41
6 Ukraine 46,94
7 Royaume-Uni 46,47
8 Albanie 46,08
10 La Belgique 45,38
11 Italie 45,20
12 Kosovo 42,29
13 Bosnie Herzégovine 42,23
14 Monténégro 41,10
15 Macédoine du Nord 40,87
16 Malte 40,82
17 Russie 39,62
18 Bulgarie 38,74
19 Lettonie 38,65
20 Serbie 38,29
21 Allemagne 36,37
22 Luxembourg 35,71
23 Hongrie 34,29
24 Espagne 33,87
25 Norvège 33,85
26 Lituanie 33,28
27 Portugal 30,58
28 Slovaquie 30,18
29 Pologne 29,79
30 Roumanie 28,79

Quel impact des feux de forêt canadiens en Europe ?

Quel impact des feux de forêt canadiens en Europe ?

La fumée de plus d’une centaine de feux de forêt au Canada s’est répandue jusque dans les villes nord-américaines, pourtant situées loin des foyers. Le 7 juin 2023, New York et Detroit ont ainsi été classées parmi les cinq villes les plus polluées du monde à cause de ces lointains incendies. La fumée de ces mégafeux traverse maintenant l’Atlantique vers l’Europe – avec un pic attendu en France mercredi ou jeudi.

Chris Migliaccio, toxicologue à l’université du Montana, étudie l’impact de la fumée des incendies de forêt sur la santé humaine. Quels sont les risques auxquels on peut être confrontés, même à des centaines de kilomètres de distance ? dans The Conversation

Lorsque nous parlons de la qualité de l’air, nous parlons souvent des « PM2,5 ». Il s’agit de particules en suspension dans l’air d’un diamètre de 2,5 microns ou moins, suffisamment petites pour pénétrer profondément dans les poumons.

L’exposition aux PM2,5 provenant de la fumée, ou d’autres pollutions atmosphériques telles que les émissions des véhicules, peut exacerber des problèmes de santé tels que l’asthme et réduire la fonction pulmonaire. Ce qui peut aggraver les problèmes respiratoires existants de même que certaines maladies cardiaques.

Mais le terme PM2,5 ne renseigne que sur la taille : pas sur la composition – ce qui brûle dans l’incendie qui les libère peut faire une différence significative dans la chimie.

Dans le nord des Rocheuses, la plupart des incendies sont alimentés par la végétation, mais toutes les végétations ne sont pas identiques.

De plus, si l’incendie se situe dans les zones périurbaines, à la jonction entre ville et nature, les combustibles manufacturés provenant des habitations et des véhicules peuvent également brûler, ce qui va créer une autre chimie toxique. On peut mentionner les composés organiques volatils (COV), le monoxyde de carbone (CO) et les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) produits lors de la combustion qui sont susceptibles de nuire à la santé humaine.

Si vous avez déjà été près d’un feu de camp et que vous avez reçu un panache de fumée au visage, vous avez probablement ressenti une certaine gêne… L’exposition à la fumée des feux de forêt entraîne en effet une irritation du nez et de la gorge, voire une inflammation locale. Si vous êtes en bonne santé, votre corps sera bien sûr largement capable de le supporter.

Comme pour beaucoup de choses, c’est la dose qui fait le poison – presque tout peut être nocif à une certaine dose…

En général, les cellules immunitaires situées dans nos poumons, les macrophages, y ramassent les particules étrangères et les éliminent – jusqu’à une certaine dose, donc. C’est lorsque le système est débordé qu’il peut y avoir un problème.

Illustration d’une petite section de poumons montrant les alvéoles et, à l’intérieur des alvéoles, des macrophages
C’est au niveau des alvéoles pulmonaires que se font les échanges gazeux de la respiration. S’y trouvent également des cellules du système immunitaire : des macrophages. P. Brieux, Anatomy and Physiology, CC BY-SA
L’une des préoccupations est que la fumée peut neutraliser l’action des macrophages, ou tout du moins la modifier suffisamment pour que vous deveniez plus sensible aux infections respiratoires.

Une étude sur le temps de latence dans l’effet de l’exposition à la fumée des feux de forêt a montré une augmentation des cas de grippe après une mauvaise saison d’incendies. D’autres, menées dans les pays en développement, ont de la même façon révélé une augmentation des infections respiratoires chez les personnes qui cuisinent sur des feux ouverts dans les maisons.

Le stress d’une réaction inflammatoire peut également exacerber des problèmes de santé existants. Le fait d’être exposé à la fumée de bois ne provoquera pas en soi une crise cardiaque… mais si une personne présente des facteurs de prédisposition sous-jacents, tels qu’une accumulation importante de plaques d’athérome en cas de cholestérol, le stress supplémentaire peut augmenter le risque.

Les chercheurs étudient aussi les effets potentiels sur le cerveau et le système nerveux des particules inhalées.

Lorsque la fumée se propage sur de longues distances, sa toxicité change-t-elle ?
Nous savons que la chimie de la fumée des incendies de forêt change. Plus elle reste longtemps dans l’atmosphère, plus elle sera altérée par la lumière ultraviolette. Nous avons encore toutefois beaucoup à apprendre sur le sujet.

Les chercheurs ont tout de même constaté qu’il semble y avoir un niveau d’oxydation plus élevé : plus la fumée reste longtemps dans l’air, plus des oxydants et des radicaux libres sont générés. Si les effets spécifiques sur la santé ne sont pas encore clairs, il semble qu’une plus grande exposition entraîne des effets plus importants.

L’hypothèse est que plus la fumée est exposée aux rayons UV, plus il y a de radicaux libres formés, et plus le risque d’effets nocifs est élevé. Là encore, il s’agit en grande partie d’une question de dose.

Denver a été classée parmi les villes les plus polluées au monde le 19 mai 2023, en grande partie à cause de la fumée des incendies de forêt en provenance de l’Alberta, au Canada. Colorado Air Pollution Control Division
Si vous êtes en bonne santé, il est plus que probable qu’une promenade à vélo ou une randonnée dans une fumée légère ne soit pas un problème pour vous : votre corps sera parfaitement capable de récupérer.

En revanche… si vous faites cela tous les jours pendant un mois dans la fumée d’un incendie, cela soulève d’autres questions.

J’ai ainsi participé à des études avec des habitants de Seeley Lake, dans le Montana, qui ont été exposés à des niveaux dangereux de PM2,5 provenant de la fumée des incendies de forêt pendant 49 jours en 2017. Un an plus tard, nous constations toujours une diminution de leur fonction pulmonaire. Personne n’a dû être placé sous oxygène, mais il y avait une baisse significative.

Il s’agit d’un domaine de recherche relativement nouveau, et nous avons encore beaucoup à apprendre, en particulier avec l’augmentation de l’activité des feux de forêt à mesure que la planète se réchauffe.

S’il y a de la fumée dans l’air, la seule chose à faire est d’essayer de réduire votre exposition.

Peut-on éviter la fumée ? Non, à moins d’être dans une maison hermétiquement fermée ou que vous disposiez d’un très bon système de chauffage, ventilation et climatisation, disposant par exemple de filtres MERV 15 ou supérieurs.

Les niveaux de particules ne sont en effet généralement pas très différents à l’intérieur et à l’extérieur. Mais le fait d’être à l’intérieur diminue votre activité : votre rythme respiratoire est donc plus lent et la quantité de fumée que vous inhalez est probablement plus faible.

Au Canada et au nord des États-Unis, le grand public a ressorti les masques pour se protéger des fumées. lev radin/Shutterstock
Nous avons également tendance à conseiller aux personnes potentiellement plus vulnérables, comme les asthmatiques, de créer un espace sûr à la maison et au bureau avec un système de filtration d’air autonome de haut niveau pour créer un espace où l’air est plus pur.

Certains masques peuvent aider. Un masque FFP2 (bien connu depuis le Covid) ne fait pas de mal par exemple. Par contre, un simple masque en tissu ne sera pas d’une grande utilité.

La plupart des États, dont la France, disposent de moniteurs de qualité de l’air qui peuvent vous donner une idée de la qualité de l’air, alors vérifiez ces sites et agissez en conséquence.

Europe: réforme a minima de l’asile

Europe: réforme a minima de l’asile

Les ministres européens de l’Intérieur ont trouvé, jeudi 8 juin, un accord sur deux volets clés d’une réforme de la politique migratoire. Cette dernière prévoit un système de solidarité entre Etats membres dans la prise en charge des réfugiés et un examen accéléré des demandes d’asile de certains migrants aux frontières.

« Ce ne sont pas des décisions faciles pour tous ceux qui sont autour de la table, mais ce sont des décisions historiques », a salué la ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser. Ce feu vert ouvre ainsi la voie à des pourparlers avec le Parlement européen, en vue d’une adoption de la réforme avant les élections européennes de juin 2024.

La commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, s’est pour sa part réjouie d’une « étape très importante » pour le Pacte sur l’asile et la migration, présenté en septembre 2020. La présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a salué une « percée », soulignant que son institution était prête à commencer les pourparlers. La Pologne et la Hongrie ont voté contre ces propositions, tandis que la Bulgarie, Malte, la Lituanie et la Slovaquie se sont abstenues, a appris l’AFP auprès de la présidence suédoise du Conseil de l’UE, qui a mené les longues et complexes négociations.


Première décision: l’accélération, à 12 semaines maximum, du traitement des demandes d’asile aux frontières extérieures de l’UE. But: refouler plus rapidement, vers leur pays d’origine ou des pays tiers jugés «sûrs», les demandeurs qui ne répondent pas aux critères pour recevoir la protection de l’Europe. Deuxième décision: les ministres se sont entendus sur un mécanisme de solidarité pour soulager les pays européens qui sont confrontés à des arrivées importantes de migrants.

Europe : 1 milliard à la Tunisie pour freiner l’immigration

Europe : 1 milliard à la Tunisie pour freiner l’immigration

Pour faire face à la crise économique grave, l’Union européenne a proposé « un renforcement du partenariat » avec la Tunisie à travers un programme incluant une possible aide financière de long terme de 900 millions d’euros et une aide additionnelle de 150 millions à injecter « immédiatement » dans le budget.

Ursula von der Leyen a indiqué avoir proposé un programme en cinq points, incluant aussi un soutien à la lutte contre l’immigration clandestine et a souhaité la signature d’un accord entre la Tunisie et l’UE d’ici au prochain sommet européen à la fin du mois. Ce programme prévoit notamment un renforcement des investissements en Tunisie, en particulier dans le numérique et les énergies renouvelables ainsi qu’une extension à la Tunisie du programme européen d’échanges d’étudiants Erasmus, doté d’une enveloppe de 10 millions d’euros. L’un des volets importants du « package » européen concerne la lutte contre le « business cynique » de l’immigration clandestine, pour laquelle l’UE fournira « cette année à la Tunisie 100 millions d’euros pour le contrôle de ses frontières, la recherche et sauvetage » de migrants, a indiqué Ursula von der Leyen.

« Il est de notre intérêt commun de renforcer notre relation et d’investir dans la stabilité et la prospérité, c’est pour cela que nous sommes là », a-t-elle déclaré, disant agir au nom de la « Team Europe » et qui était accompagnée dans sa visite par les Premiers ministres d’Italie, Giorgia Meloni, et des Pays-Bas, Mark Rutte. Affirmant que l’Union européenne est le « premier partenaire commmercial et premier investisseur » en Tunisie, la présidente de la Commission a rappelé que l’Europe a « soutenu le parcours de la Tunisie dans la démocratie depuis 2011 (et la Révolution qui a renversé le dictateur Zine El Abidine Ben Ali, ndlr), une route longue et difficile ».

Le pays nord-africain, très endetté (80% du PIB), est en difficiles pourparlers avec le FMI pour un nouveau prêt de près de deux milliards de dollars. Les discussions achoppent sur le refus du président Saied de réformes comme la restructuration de la centaine d’entreprises publiques surendettées et la levée des subventions étatiques à des produits de base comme les carburants.

Dernier rebondissement et très mauvaise nouvelle pour le pays, dans la nuit de samedi à dimanche, l’agence de notation Fitch a baissé d’un cran la note de la Tunisie la passant de CCC+ à CCC-, à cause des délais dans les négociations pour obtenir un nouveau prêt du Fonds monétaire international (FMI).

Cette dégradation de la note de l’endettement à long terme du pays « reflète l’incertitude autour de la capacité de la Tunisie à réunir des fonds suffisants pour répondre à ses besoins financiers conséquents », a expliqué Fitch dans un communiqué. La Tunisie faisait déjà partie des émetteurs présentant des risques réels de non-remboursement, selon l’institution. « Notre principal scénario table sur un accord entre la Tunisie et le FMI d’ici la fin de l’année, mais c’est beaucoup plus tard que nous ne l’attendions auparavant et les risques restent élevés », a précisé Fitch. L’agence rappelle que le budget du gouvernement dépend de plus de 5 milliards de dollars de fonds externes (10% du PIB) des financements qui ne seront pas débloqués tant qu’il n’y aura pas d’accord avec le FMI.

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