Record mondial de chaleur (Étienne Kapikian)
Étienne Kapikian, prévisionniste à Météo France, explique qu’il. « Il faut prendre conscience que c’est ce qui nous attend de plus en plus dans le futur », sur à franceinfo.
Franceinfo : Quels sont les endroits du globe touchés par ces fortes chaleurs ?
Étienne Kapikian : En France, on traverse un épisode caniculaire qui va sans doute se prolonger jusqu’au début du mois d’août. Mais nous sommes loin d’être les seuls concernés. Au mois de juillet, on constate une chaleur persistante avec des températures largement au-dessus des moyennes dans de nombreuses zones de la planète. Depuis le 14 juillet, le Japon connaît des températures inédites, autour de 40°C : c’est un record national. La chaleur humide y a déjà fait énormément de victimes. La Scandinavie également, en incluant la Finlande, a connu un trimestre exceptionnel, bien au-dessus de leurs moyennes de saison. Le nord-ouest de la Russie, et notamment la région de Mourmansk, a dépassé les 30°C plusieurs jours d’affilée. Il y a aussi eu des extrêmes thermiques en Algérie. Au sud de l’Atlas, on va dépasser les 50°C certains jours.
En Asie centrale, c’est moins médiatisé, mais ils connaissent un mois de juillet exceptionnel entre le pourtour de la mer Caspienne et sur une partie de l’Iran et de l’Afghanistan avec des records absolus. À Erevan, la capitale de l’Arménie, on a atteint des records absolus, avec plusieurs jours au-dessus de 40°C. Le 4 juillet, à Bakou, en Azerbaïdjan, on a atteint 42,7°C.
Enfin, la Californie vit en ce moment même un épisode de chaleur spectaculaire. Au début du mois de juillet, il a fait 49°C en banlieue. Mardi 24 juillet, la vallée de la Mort a atteint les 59°C.
À quoi sont dûs ces records de température ?
Ils sont liés à des situations de blocage anticyclonique. Un peu partout dans le monde, des bulles de haute pression entretiennent des masses d’air très chaudes. C’est notamment le cas de l’Europe du Nord. Au Japon, c’est aussi un phénomène de dômes d’air chaud qui entretient des températures caniculaires. Et puis, bien sûr, le réchauffement climatique entraîne des canicules de plus en plus fortes.
Quant aux nombreux feux de forêt qui se sont déclenchés en Grèce mais aussi dans plusieurs pays d’Europe du Nord, ils sont le résultat d’une forte sécheresse persistante et de l’absence de pluie.
Une végétation sèche à laquelle vous apportez des températures très élevées : ce sont les ingrédients classiques pour favoriser la propagation d’incendies.
Va-t-il falloir s’habituer à ces épisodes de fortes chaleurs ?
C’est certain, oui. Il faut prendre conscience que c’est ce qui nous attend de plus en plus dans le futur. On s’apprête à battre de nouveaux records dans les années à venir. Les quatre années les plus chaudes sont les dernières : 2015, 2016, 2017, 2018. 2018 n’est pas terminée, mais on est parti pour figurer parmi les années les plus chaudes. Les modèles climatiques prévoient notamment que le réchauffement sera très fort dans les hautes altitudes soit dans les régions autour de l’Arctique.
La canicule n’est certes pas un phénomène nouveau : il y avait déjà des épisodes caniculaires au début du 20e siècle. Mais si on bat des records depuis quelques années, c’est parce que le climat se réchauffe. Et dans un climat plus chaud, on va forcément atteindre des températures plus élevées. À l’inverse, on aura de plus en plus de mal à battre les records de froid. Sur beaucoup de régions du globe, il va être difficile de continuer à vivre. Il y aura des conséquences sur l’être humain et sur l’agriculture.