Bettencourt et l’Elysée : petits dons entre amis
Énième épisode dans l’affaire Bettencourt. Selon Libération daté de jeudi, le juge d’instruction bordelais Jean-Michel Gentil se penche sur les rendez-vous ayant eu lieu à l’Elysée en 2008, avec Liliane Bettencourt et l’un de ses proches. Toujours selon le quotidien, ces rencontres coïncideraient avec les retraits d’argents sur les comptes suisses de la milliardaire. « En novembre 2008, Nicolas Sarkozy reçoit successivement Mme Liliane Bettencourt le 5, puis Patrice de Maistre le 13″, peut-on lire selon les extraits des procès-verbaux rapportés par le journal. Un autre rendez-vous aurait eu lieu entre Nicolas Sarkozy et Patrice de Maistre, alors gestionnaire de la fortune de la milliardaire. « Après ce rendez-vous, Monsieur de Maistre se rend à Genève pour commander deux opérations de mise à disposition d’espèces de 1.000.000 d’euros le 8 décembre », est-il inscrit sur le procès-verbal. Une révélation qui intervient alors que ce jeudi, quatre des mis en examen de l’affaire Bettencourt contesteront devant la cour d’appel de Bordeaux différents points de procédure. Les demandes, qu’examinera jeudi matin la chambre de l’instruction de la cour d’appel, émanent du photographe François-Marie Banier, de son compagnon Martin d’Orgeval, de l’ancien ministre et ex-trésorier de l’UMP Eric Woerth et de Patrice de Maistre, l’ancien homme de confiance des Bettencourt. Tous sont soupçonnés d’avoir abusé de l’état de faiblesse psychologique de Liliane Bettencourt depuis fin 2006 pour en obtenir de l’argent, ou d’avoir recelé – c’est le cas d’Eric Woerth – des sommes provenant d’un tel abus de faiblesse. Les quatre mis en examen, qui ne seront pas présents à l’audience, devraient poser à la chambre de l’instruction de la cour d’appel la question de la validité des enregistrements du majordome de Liliane Bettencourt, qui avait capté dans le salon de cette dernière de mi-2009 à mi-2010 des conversations dont la teneur a abouti plus ou moins directement à leur mise en cause dans cette affaire. Saisie par Liliane Bettencourt, partie civile, cette chambre de l’instruction avait jugé en juin 2011 que ces enregistrements étaient utilisables par la justice comme « moyen de preuve » dans ce dossier d’ordre pénal. Cette fois, les quatre mis en examen devraient soulever « l’insécurité » juridique, selon une source proche du dossier, de voir cohabiter dans le droit français la possibilité d’utiliser de tels enregistrements en matière pénale et l’impossibilité de le faire en droit civil, et en appeler à une « harmonisation » des positions. Les avocats de Banier, d’Orgeval et de Maistre devraient également contester la validité des mandats d’amener délivrés par le juge Gentil pour se faire présenter leurs clients, en décembre 2011. La décision de la cour d’appel sera mise en délibéré. De son côté, le tribunal semble se préparer pour une audition, à partir de la semaine prochaine, de Nicolas Sarkozy par le juge Jean-Michel Gentil. Cette convocation, vraisemblablement comme témoin assisté, permettrait au juge d’interroger Nicolas Sarkozy sur un possible financement illicite de sa campagne de 2007. Il s’agirait de l’étape la plus spectaculaire de cette affaire dans laquelle 14 personnes ont été mises en examen depuis décembre 2011.