Mali : Ibrahim Boubacar Keïta en tête
. Les résultats provisoires et officiels doivent être publiés au plus tard vendredi, mais dès dimanche soir, de premiers résultats collectés par des journalistes maliens dans des bureaux de vote à travers le pays donnaient une nette avance à l’un des favoris, Ibrahim Boubacar Keïta. Ces résultats non officiels indiquent que M. Keita, 69 ans, pourrait même créer la surprise et l’emporter dès le premier tour. Dès que ces informations ont été diffusées par les radios locales, des milliers de partisans d’Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, se sont rendus au quartier général de son parti, le Rassemblement pour le Mali (RPM) et à son domicile de Bamako, fous de joie, a constaté un journaliste de l’AFP. Tous scandaient « IBK, l’homme qu’il nous faut ». « C’est le peuple qui a parlé ! » hurlait l’un d’eux. Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, ex-Premier ministre, cacique de la vie politique malienne, est l’un des deux grands favoris du scrutin avec Soumaïla Cissé, 63 ans, ancien ministre des Finances et ex-président de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Des observateurs nationaux indépendants ont constaté « une grande mobilisation des électeurs », surtout dans le Sud, où se trouve Bamako, où des journalistes de l’AFP ont aussi constaté une forte mobilisation pour ce vote auquel participaient 27 candidats. De son côté, le président français François Hollande a salué « le bon déroulement du scrutin présidentiel malien, marqué par une mobilisation importante et une absence d’incidents majeurs », dans un communiqué publié dans la nuit de dimanche à lundi. Dans les villes du Nord, Kidal, Gao et Tombouctou, région qui a subi en 2012 la violence et l’occupation de rebelles touareg et de groupes djihadistes liés à al-Qaida, le vote s’est tenu sous la surveillance de Casques bleus de la force de l’ONU, la Minusma, et de l’armée malienne, assistés par les 3 200 soldats français restés au Mali. Un des groupes djihadistes qui ont occupé le Nord, le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), avait menacé samedi de « frapper » les bureaux de vote et tenté de dissuader « les musulmans maliens » de prendre part au scrutin. Après avoir voté à Bamako, entouré d’une cohorte de partisans, Ibrahim Boubacar Keïta a affirmé qu’après cette élection, « seul le Mali sera gagnant » pour « oublier le cauchemar » qu’il vient de vivre. « Aujourd’hui, il faut tourner la page », a de son côté déclaré Soumaïla Cissé en votant dans la capitale. « Il faut retourner dans le calme à des institutions républicaines. » Le président par intérim, Dioncounda Traoré, qui ne se présentait pas, a affirmé en votant que c’était « le meilleur scrutin » que le Mali ait organisé depuis son indépendance de la France en 1960. Encore incertain à quelques jours du scrutin, le vote a finalement pu se tenir à Kidal, bastion des Touareg et de leur rébellion dans le nord-est du pays où les tensions entre communautés touareg et noires restent vives. Mais la participation y a été très faible, a constaté l’AFP, et une soixantaine de partisans de la rébellion ont manifesté pour « l’indépendance de l’Azawad », nom donné par les Touareg au nord du Mali. À l’entrée de chaque bureau de Kidal, chaque électeur était contrôlé et fouillé par des soldats togolais de la force de l’ONU au Mali, la Minusma. À Gao, la plus grande ville du nord du Mali qui avait été occupée par le Mujao, lequel a commis plusieurs attentats-suicides après la libération de la ville fin janvier par des soldats français et africains, le scrutin était également très surveillé par les forces de sécurité maliennes et la Minusma. À Tombouctou, ville qui a elle aussi payé un lourd tribut à l’occupation djihadiste, de nombreux électeurs ont cherché en vain leur nom sur les listes, car, selon un observateur national, « le travail d’identification n’a pas été fait, des électeurs ne savent pas où voter ». La présidentielle doit rétablir l’ordre constitutionnel interrompu le 22 mars 2012 par un coup d’État qui a précipité la chute du nord du Mali aux mains de groupes islamistes de la mouvance al-Qaida, alliés dans un premier temps à la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Le scrutin intervient six mois après le début en janvier d’une intervention militaire internationale menée par la France pour stopper une avancée vers le sud des islamistes armés et les chasser du nord qu’ils occupaient depuis neuf mois. Si aucun des candidats n’obtient la majorité absolue, un second tour entre les deux arrivés en tête dimanche aura lieu le 11 août.