Environnement–La destruction des écosystèmes continue
Dans un rapport publié ce mardi, WWF dont rend compte les Echos rappelle le rôle crucial de ces étendues naturelles dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’ONG défend leur intégration, au même titre que les forêts, au projet de règlement de l’UE visant à interdire l’importation de produits liée à la déforestation.
Entre 1985 et 2020, plus de 26 millions d’hectares ont été perdus dans le Cerrado, c’est près de la moitié de superficie de la France métropolitaine. Bien moins médiatisée que l’Amazonie, cette immense savane en grande partie brésilienne est l’un des biomes les plus menacés d’Amérique du sud. Les taux de conversion, due en grande partie à l’extension de la culture du soja et du bétail, ont dépassé ceux de l’Amazonie, pointe du doigt l’association de défense de l’environnement WWF dans un rapport publié ce mardi.
« Depuis 2006 et le moratoire sur le soja en Amazonie, la déforestation y a baissé de moitié. Malheureusement, cette amélioration s’est faite au détriment de l’augmentation de la déforestation dans la Cerrado qui a été multipliée par six », explique Véronique Andrieux, la directrice générale de WWF, pour qui « protéger uniquement les forêts transfère la pression sur les écosystèmes voisins », entraînant une accélération de la déforestation sur ces milieux-là.
Ecosystèmes « oubliés »
Dans le monde, les savanes, les prairies, les zones humides, les mangroves ou les tourbières sont des écosystèmes détruits « à un rythme alarmant », rappelle l’ONG. De son côté, l’association Canopée a estimé récemment qu’en moyenne 140.000 hectares de végétation étaient convertis chaque année au Cerrado.
Ces milieux sont pourtant une aide matérielle cruciale, notamment pour lutter contre le réchauffement climatique : en termes de surface, les prairies et les savanes stockent, par exemple, deux fois plus de carbone que les forêts tropicales. Ils jouent aussi un rôle essentiel pour la population et pour la nature -huit des douze plus grands fleuves du Brésil prennent ainsi leur source dans le Cerrado.
En important des produits issus de la déforestation dans le monde (par sa consommation de soja, de boeuf ou de cacao), l’Union européenne joue indirectement un rôle dans la conversion de ces milieux naturels, soulignent les auteurs du rapport.
Alors que la Commission européenne a présenté en novembre une proposition de loi pour mettre fin à cette déforestation dans le cadre du « Green Deal » -un texte ambitieux salué par de nombreuses organisations environnementales-, le WWF veut avec ce rapport « s’assurer que ces écosystèmes oubliés soient intégrés dès l’adoption de la législation et non pas deux ans plus tard, après une révision » de la loi, comme dessiné jusqu’à présent, plaide Véronique Andrieux. « Pour le Cerrado, attendre deux ans serait l’équivalent des émissions de la France sur un an », assure-t-elle.
. L’ONG rappelle que certaines grandes entreprises qui vendent au sein de l’UE des produits à risque de déforestation ont mis en place des outils pour assurer une traçabilité sur leur chaîne d’approvisionnement en couvrant l’ensemble des écosystèmes naturels. En mai dernier, plusieurs dizaines d’entreprises européennes avaient appelé à s’attaquer à la fois à la déforestation et à la conversion d’autres écosystèmes. « Il serait difficilement acceptable que l’UE soit en deçà des pratiques de certains acteurs du secteur privé », argue Véronique Andrieux.