D’inspiration libérale, les adeptes de la politique de l’offre considèrent que pour obtenir une forte croissance à moyen ou long terme il faut aider les entreprises à améliorer leur offre de biens et de services pour conquérir de nouveaux marchés. Pour augmenter les profits, ils préconisent de supprimer le maximum de freins fiscaux (impôts, taxes et charges sociales) qui entravent leurs développements dans une économie mondialisé.
L’ancien chancelier allemand, Helmut Schmidt résumait cette politique : « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ».
Avec l’ancien Président français Valéry Giscard d’Estaing il a appuyé la mise en place de l’Europe politique et du Système monétaire européen. Mais les entreprises ont-elles réellement investi pour développer la productivité ?
- C’est quoi une politique économique pro-européenne ?
De nombreuses économies de l’Union ont été et sont encore soumises à des processus d’ajustement visant à corriger les déséquilibres macroéconomiques accumulés dans le passé, beaucoup devant également composer avec un faible potentiel de croissance. Cette situation est souvent le résultat de retards ou d’insuffisances dans la mise en œuvre de réformes structurelles dans ces économies.
L’Union a fait de la mise en œuvre des réformes structurelles une de ses priorités d’action, afin de donner un caractère durable à la reprise, de libérer le potentiel de croissance nécessaire pour renforcer la capacité d’ajustement, et de soutenir le processus de convergence », Commission européenne.
Il existe de nombreuses manières de réaliser des réformes structurelles : des réglementations allant dans le sens d’une plus grande flexibilité des marchés du travail, une libération du marché des biens et services, une simplification des régimes fiscaux, une réduction globale du poids des dépenses publique en particulier sociale, etc.
Ces réformes structurelles, de tendance libérale, sont souvent critiquées dans plusieurs pays européens quant à leur efficacité. Les critiques portent surtout sur les efforts d’extrême rigueurs demandées à certaines populations et de leurs conséquences dramatiques sur le plan social. La mise en œuvre de telles politiques d’austérité, de manière simultanée, dans tous les pays européens, est-elle considérée comme une erreur de politique économique ?
Le traité de Lisbonne encadre actuellement le fonctionnement de l’Union européenne. Après le rejet, par la France et les Pays-Bas (référendums de 2005), du traité établissant une Constitution pour l’Europe rédigé par la convention sur l’avenir de l’Europe, le traité a été signé lors du Conseil européen de Lisbonne du 13 décembre 2007 et a été ratifié par tous les États membres.
La France et les Pays-Bas ont rejeté, par référendums en 2005, ce traité établissant une Constitution pour l’Europe rédigée par la convention sur l’avenir de l’Europe. Il a alors été signé lors du Conseil européen de Lisbonne du 13 décembre 2007 puis ratifié par tous les États membres.
Il y a donc 16 ans, après la signature de ce traité, la production de richesse européenne était de 10,36% supérieure à celle des États-Unis alors qu’en 2023 elle était de 48,77% inférieure. Le PIB de l’Union européenne a augmenté de 2008 à 2023 de 12,58% (mesuré en dollars courant), pour la France c’est 3,41% soit 0,213% par an, contre 84,83 % pour les États-Unis et 287,58% pour la Chine (source Banque mondiale).
- C’est quoi une politique économique pro-business ?
Avec 82,52 milliards d’euros en 2008 et 156,88 milliards d’euros versés en 2019, les subventions aux entreprises sont devenues le premier poste de dépenses de l’État français. Les aides publiques aux entreprises sont en principe interdites (sauf cas particuliers) par le droit européen car elles « faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions » (article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). Avec le déploiement massif des aides en réponse à la pandémie, cette aide s’est élevée à près de 175 milliards d’euros en 2022. En 15 ans elle a augmenté de 112,07%.
En comparant l’évolution de cette aide annuelle moyenne de 7,47% à la croissance annuelle moyenne de 0,213%, l’aide publique n’a pas réellement profité aux investissements et à la croissance. Déjà en 2021, un rapport de l’observatoire des multinationales révélait que les « entreprises se sont servies des aides publiques versées par l’État pour faire face à la crise sanitaire pour rémunérer les actionnaires, tout en supprimant des emplois ».
À titre indicatif, le CAC40 a progressé de 16,95% de 2008 à 2023. Le taux d’évolution de la distribution de dividendes entre 2008 (43 milliards d’euros) et 2023 (67,8 milliards d’euros) est de 57,67%. La moyenne des dividendes versés par les sociétés françaises du CAC40 selon la capitalisation boursière de 2008 est de 3,6% (source Banque de France).
Les Premiers ministres de gauche ou de droite sont tous pro-business.
Manuel Valls : « my government is pro-business », Elisabeth Borne : « oui, nous menons une politique pro-business » et le nouveau premier ministre Michel Barnier, l’ancien commissaire européen, souhaite appliquer une politique économique de l’offre, pro-business et pro-européenne.
Quelle politique économique est la plus adaptée pour la France ?
Pour les défenseurs de la politique économique libérale de l’offre, l’État est la cause de tous les problèmes et la solution doit être de réduire son influence sur l’économie. En France le budget mis en place est en contradiction avec cette thèse et les aides aux entreprises deviennent irraisonnables au regard du droit européen.
Mais lorsque la machine économique est en panne, il faut la relancer soit par la politique économique de l’offre, soit par la politique monétaire, soit par l’économie de la demande.
En Europe, la politique monétaire est de la responsabilité de la Banque centrale européenne BCE. La France n’a pas la main sur la stabilité de l’euro, ni sur la création de liquidités, ni sur les taux directeurs et ni sur les taux d’intérêt du marché monétaire, etc. La première mission de la BCE est de maintenir la stabilité des prix. Du fait des crises financières, avec les politiques monétaires non conventionnelles, la stabilité financière a supplanté celle des prix. Cette politique est au détriment de la croissance, des revenus des ménages, de la crise immobilière, etc.
Concernant la politique de la demande pour créer de la croissance, en augmentant par exemple le SMIC ou le salaire des fonctionnaires, etc., le gouvernement agirait sur la demande pour relancer l’emploi et la production. Ces augmentations induiraient une hausse des dépenses ou une baisse des recettes. Ce mécanisme peut mener à une récession ou à des déficits financés par l’emprunt. Pour combler ce déficit, le gouverneur de la Banque de France recommande une combinaison de réductions des dépenses publiques et de hausses d’impôts ciblées.
Pour la Chine le modèle économique de croissance est en adéquation avec la théorie de l’offre de Schumpeter. Elle est basée sur une création de crédit extrêmement élevé par les Banques, avec une prise en main des entreprises chinoises, publiques comme privées, par les organes du Parti communiste. Ceci n’a pas évité la crise immobilière actuelle, le chômage des jeunes, etc.
Pour les États-Unis, les banques américaines ont accordé massivement des prêts immobiliers aux particuliers à faibles revenus. Ces prêts, à taux variables sont soutenus par les pouvoirs publics. Ils voient dans la construction immobilière un moyen pour dynamiser l’économie à court terme. Et c’est la crise des subprimes 2007-2008. En 10 ans, cette crise financière a coûté approximativement 1 541 Md€ à la France en termes de produit intérieur brut (PIB) selon les calculs d’Eric Dor, directeur des études économiques à IESEG School of Management.
Quant à la France et à l’Europe, malgré toutes les aides, la productivité s’effondre. Entre l’année 2000 et 2022 la croissance du PIB par heure travaillée en Europe a été uniquement de 1,2%. De 1990 à 2022, la France a gagné en 33 ans en moyenne 0,85% par an.
Forcée de rester dans l’Europe et dans la zone euro, la France ne peut plus rétablir sa compétitivité et sa croissance, sauf si elle adapte fortement sa politique de l’offre, pro-européenne et pro-business. La leçon apprise des grandes crises passées est de ne pas réduire brutalement les déficits publics, les dettes publiques, les aides aux entreprises, les droits sociaux, etc.
Quelques propositions :
- Attribuer au mieux les aides aux entreprises.
À garder dans les aides publiques aux entreprises les subventions pour la recherche et le développent, pour l’investissement immatériel en capital (c’est-à-dire la propriété intellectuelle, la R&D, les logiciels, la technologie, le capital humain…), pour un budget total dépassant les 3% du PIB et allant jusqu’à 4,5% à 5%. Les subventions doivent être en proportion du chiffre d’affaires réalisé en France, par des sociétés ayant leurs sièges sociaux en France.
Toutes les sociétés qui ont recours aux aides publiques doivent obligatoirement respecter la « règle des trois tiers » après acquittement des impôts : un tiers pour les actionnaires, un tiers pour le réinvestissement et un tiers en prime pour les salariés ou dans un cadre d’un plan d’épargne salariale.
- Financer les fonds propres des entreprises par la Bourse.
La Bourse ne finance que les riches. Pourtant elle peut jouer un rôle primordial pour trouver les capitaux nécessaires à l’expansion surtout des entreprises de tailles intermédiaires ETI. Malgré l’effort d’Euronext, une majorité de ces entreprises n’y a pas encore accès en raison de coûts administratifs et financiers trop élevés. Longue, ardue, plutôt coûteuse et très encadrée, la procédure a pourtant un intérêt vital : permettre aux dirigeants d’obtenir un financement en fonds propres. Certaines entreprises pourraient faire faillite après l’arrêt des aides de l’État.
- Créer 3.5 millions de petites et moyennes entreprises PME en 5 ans.
Aux États-Unis, la candidate démocrate à la présidentielle américaine a promis, en cas de victoire, la création de 25 millions de nouvelles petites entreprises en quatre ans. En France il faudrait créer 700 000 entreprises innovantes et régionales par an.
La France doit comme l’Allemagne compter plusieurs caisses de crédit publiques en plus des banques commerciales privées et des banques coopératives pour financer des prêts participatifs.
La principale force de l’économie allemande est ce que l’on appelle le «Mittelstand» soit 3,5 millions d’entreprises familiales innovantes. Par contre la France a choisi de développer des champions nationaux côtés en Bourse (uniquement 25% de l’activité des entreprises cotées au CAC40 est réalisé en France). Les PME du Mittelstand se financent en majorité via 500 caisses d’épargnes publiques (2.492,8 milliards d’euros).
Les Caisses de crédit publiques ainsi créées pourront emprunter directement à la Banque centrale européenne BCE. Du point de vue des Traités européens, « il n’existe aucune barrière juridique à un prêt de la BCE à un établissement public de crédit ». C’est l’article 123-2 traité de Lisbonne.
- Financer les investissements productifs par l’épargne. Cette idée, qui ne plait pas beaucoup aux banques commerciales, vise à stimuler la croissance de l’industrie française et à éviter que les capitaux se tournent vers des pays économiquement plus attractifs. Une grande partie de l’épargne française dort ou est placée dans des projets climaticides, etc.
Selon l’INSEE, en 2023, le taux d’épargne des ménages est égal à 16,9%. Il a atteint 20,4% en 2020 (pandémie). En revanche le taux d’investissement des ménages est de nouveau en forte baisse (-8,5%)
Avec une épargne financière estimée à 4 427,7 milliards d’euros en 2023 et 935,5 milliards d’euros déposés sur les produits d’épargne réglementée ; un encours des dépôts à vue des particuliers au mois de juillet 2024 de 478 milliards d’euros ; une partie de cette manne peut être utilisée pour créer un nouveau livret d’épargne réglementé. Ce fonds servira à des investissements productifs dans la transition écologique, etc., au lieu d’exporter cette épargne, via les banques commerciales, pour acheter des titres de dettes étrangers. Avec des plafonds de versement, le nouveau produit d’épargne serait garanti et rémunéré. Le nouveau contrat devrait présenter plusieurs atouts pour les consommateurs : flexibilité, frais de gestion nuls, pas de frais de transfert, avantages fiscaux, etc.
Dans un budget, il faut tout simplement arrêter de gaspiller les ressources :
« Ne dépensez jamais votre argent avant de l’avoir » Thomas Jefferson.