En août 2020, le président de la République, Emmanuel Macron, annonçait la relocalisation de la production de paracétamol en France avec un soutien massif de l’État. Quatre ans plus tard, Sanofi officialise la vente de sa filiale Opella, qui fabrique en France du paracétamol, au fonds d’investissement américain CD&R. Le rachat de ces activités critiques pour notre souveraineté sanitaire par un fonds américain représenterait une perte de souveraineté majeure, et pourrait contribuer à la recrudescence des pénuries de médicaments critiques.
Sanofi est entrée en négociations exclusives avec le fonds américain CD&R pour le rachat de ses activités de « santé grand public », regroupées dans la filiale Opella. Ces activités sont particulièrement stratégiques : Sanofi produit l’essentiel de la consommation française de paracétamol sous la marque Doliprane dans son usine de Lisieux. En 2022, ce sont 424 millions de boîtes de Doliprane, et environ 2 milliards et demi de comprimés, qui ont été fabriquées en France par Sanofi. Sanofi a également joué un rôle crucial dans la relocalisation de la production du principe actif du paracétamol en France : si l’investissement est porté par un de ses sous-traitants, la relocalisation en France de la production de paracétamol a été rendue possible par les engagements d’achat de long terme pris par Sanofi. Le passage sous contrôle américain de ces activités pourrait compromettre la relocalisation en France du paracétamol ; ce rachat pourrait également se traduire par de la casse sociale à Lisieux, alors que l’usine de Sanofi emploie 250 personnes.
Ce rachat intervient après plusieurs hivers marqués par des pénuries de paracétamol et d’autres médicaments essentiels. La fréquence des pénuries de médicaments a été multipliée par 20 en dix ans, comme conséquence de notre dépendance aux importations. Un rachat américain de la fabrication de Doliprane représenterait une perte de souveraineté aux conséquences très directes pour les Français, qui subiront de nouvelles pénuries en pharmacie.
Le gouvernement peut opposer son veto à ce rachat. Le décret Montebourg permet en effet au ministre chargé de l’économie d’opposer son veto au rachat de toute entreprise dont les activités sont essentielles pour garantir la protection de la santé publique. Des alternatives françaises existent, notamment avec le fonds d’investissement PAI Partners, dont Sanofi a refusé la proposition pour privilégier l’offre américaine dont le prix était plus élevé.
Alors que le Premier ministre Michel Barnier a indiqué dans son discours de politique générale que « notre pays doit amplifier son ambition industrielle », la cohérence s’impose. Le gouvernement doit refuser le rachat américain de l’usine de Lisieux de Sanofi, et imposer à Sanofi de préserver un contrôle national de ces activités indispensables pour notre souveraineté.