« Schengen : pour des règles communes dignes du XXIe siècle »
Dacian Ciolos , député européen, estime indispensable de clarifier les règles de Schengen dans une chronique à l’Opinion
Timidement, les 440 millions d’Européens ont retrouvé la possibilité de franchir librement les frontières intérieures de l’espace européen. Les formulaires administratifs à remplir exigeant des raisons impérieuses pour les traverser et les longues files de voitures et de camions nous ont rappelé la valeur de ce droit fondamental qu’est la libre circulation, droit écorné par des mois de restrictions, rendues nécessaires par la crise du Coronavirus.
L’unité européenne passe par un retour à un espace Schengen pleinement fonctionnel, tirant les leçons de la crise. Aucun Etat ne peut être laissé en quarantaine à l’écart de cette liberté. C’est une des clefs de la résilience de nos pays.
Plus que jamais, l’interdépendance économique des Etats membres est une réalité manifeste, y compris à travers des travailleurs qui ne font jamais la Une des journaux : les travailleurs saisonniers, pourtant indispensables pour les secteurs agricole et alimentaire, le transport, la construction, les services sociaux, le tourisme, mais aussi d’autres secteurs moins connus pour cela tels que certains services informatiques, de soin aux personnes ou bien d’autres.
Ces travailleurs ont été le symbole d’une Europe plus que nécessaire et interdépendante, mais aussi des limites et des dérives dès lors que nous ne disposons pas de règles suffisamment claires, appliquées uniformément. Comme souvent, ce n’est pas l’excès d’Europe, mais le manque d’Europe qui nous fait défaut.
La mort, le 11 avril, de Nicolae Bahan, cueilleur d’asperges en Allemagne a mis le doigt et alerté l’opinion publique sur les conditions désastreuses dans lesquelles travaillent certains saisonniers. Ils ont été, eux aussi, aux côtés de nos agriculteurs, des maillons stratégiques de notre sécurité alimentaire quotidienne pendant la crise.
Manque de coordination entre les organismes de santé, méconnaissance des droits sociaux de base, non-respect du principe d’égalité des droits entre salariés sans discrimination de nationalité sont quelques-unes des failles mises en lumière
Normes sociales. Manque de coordination entre les organismes de santé, méconnaissance des droits sociaux de base, non-respect du principe d’égalité des droits entre salariés sans discrimination de nationalité, défauts dans la mise en œuvre des règles existantes, et manque de coordination avec les partenaires sociaux des pays d’accueil sont quelques-unes des failles mises en lumière. Celles-ci étaient bien connues avant la crise mais, avec la pandémie, elles ont entraîné des drames.
Pour les salariés, comme pour les employeurs, il est urgent d’offrir la clarté nécessaire, les règles et les modalités administratives simples et digitalisées dignes du XXIe siècle.
Le plan de reconstruction ouvre un vaste chantier européen. Il nous permettra tous ensemble de relancer nos économies et d’être plus forts. Il passe par de l’investissement massif dans nos secteurs stratégiques, mais aussi par l’approfondissement du projet européen, y compris des droits et normes sociales au bénéfice de l’ensemble des Européens quel que soit leur pays d’origine.
Dacian Ciolos est député européen, président du groupe centriste et libéral Renew Europe depuis 2019. Il est ancien Premier ministre de Roumanie. Sa chronique «Europa» est publiée en alternance avec celle de Manfred Weber, président du groupe PPE, chaque dimanche sur lopinion.fr et le lundi dans le journal.