« Pas d’excuses pour le complotisme »
En ruinant toute possibilité d’un « monde commun », d’une réalité factuelle autour de laquelle peut s’organiser la confrontation d’opinions contradictoires, le complotisme met la démocratie en péril, souligne Rudy Reichstadt, directeur du site Conspiracy Watch.(Interview dans le Monde)
Rudy Reichstadt, créateur et directeur du site Conspiracy Watch. Yann Legendre
Directeur du site Conspiracy Watch (L’Observatoire du conspirationnisme) qu’il a créé en 2007, membre de l’Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean Jaurès, Rudy Reichstadt est l’auteur de L’Opium des imbéciles (Grasset, 2019), un essai sur la question complotiste.
Le succès massif et foudroyant du pseudo-documentaire « Hold-up », concentré d’irrationalité et de conspirationnisme, vous a-t-il surpris ?
Pas vraiment. C’est un produit qui répond à une demande sociale de conspirationnisme dont il est difficile de ne pas voir qu’elle est croissante. Avec quelques-uns, nous nous époumonons à le dire depuis des années : l’imaginaire du complot influence nos représentations collectives, plus qu’il ne l’a jamais fait dans notre histoire récente. Les théories du complot ne sont pas nouvelles. Mais la technologie leur a offert une chance historique, en démultipliant leurs possibilités de se diffuser à grande échelle.
Le succès d’audience de ce film, devenu sujet médiatique et politique de premier plan, tient à ce qu’il entre en résonance avec une attente sociale formée par des mois de désinformation sur la pandémie de Covid-19. Il montre que la désinformation est loin d’être un objet abstrait : on en voit aujourd’hui les ravages dans une partie du public.