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Dette publique– la dérive jusqu’à quand ?

Dette publique– la dérive jusqu’à quand ?

En 2022 la dette représentée 111,6% du PIB, celle de l’Allemagne 66,3%. Avant la crise financière de 2007, ces ratios étaient respectivement de 65% et 64%.
La trajectoire de la dette en France est bien plus alarmante qu’il n’y paraît. Explications d’après Marc Guyot et Radu Vranceanu, Professeurs à l’Essec
Marc Guyot et Radu Vranceanu Dans la Tribune

Fin 2022, la dette publique de la France au sens de Maastricht représentait la bagatelle de 2.950 milliards d’euros (INSEE) soit 111,6% du PIB, dont 2.300 milliards euros de dette négociable de l’État (France Trésor). Pour avoir un ordre de grandeur réel de cette somme, elle correspond à 350 centrales nucléaires nouvelle génération. De son côté, la dette publique de l’Allemagne représente 66,3% de son PIB alors qu’en 2007, avant la grande crise, les dettes françaises et allemandes étaient respectivement 65% et 64% du PIB.

Faut-il s’inquiéter de la dynamique d’endettement de la France ? Comme l’a rappelé Olivier Blanchard dans son discours en tant que Président de l’Association américaine de Sciences économiques en 2019, si le ratio de la dette en proportion du PIB demeure stable ou diminue, le niveau de la dette lui-même ne devrait pas être un sujet d’inquiétude. Tant que la dette n’est pas remboursée, elle augmente tous les ans du montant du taux d’intérêt auquel le pays s’est endetté. De son côté, le PIB en valeur augmente naturellement à un certain taux de croissance, qui combine inflation et croissance réelle. Ainsi, en l’absence de déficit public, le ratio de la dette en proportion du PIB diminue si la vitesse d’augmentation de la dette est plus faible que la vitesse d’augmentation du PIB, c’est-à-dire si le taux d’intérêt est plus faible que le taux de croissance du PIB. En présence d’un déficit public positif mais stable, le ratio de la dette au PIB ne diminue pas, mais fini par se stabiliser si le taux d’intérêt est plus faible que le taux de croissance.

A ce jour, les taux d’intérêt des emprunts français à 10 ans seraient d’environ 3%, tandis que la croissance nominale (la croissance réelle augmentée de l’inflation) a été d’environ 8% en 2022. Peut-on conclure que la condition de stabilité est remplie ? Clairement non si on compare bien les taux d’intérêt futur et la croissance nominale future et non la croissance nominale passée.

Plus en détail, nous observons que la dette négociable de l’Etat français à une maturité d’environ 8,4 ans. Une partie de cette dette a été contractée à des taux proches de zéro, aussi, dans l’immédiat, l’inflation permet de réduire le ratio dette sur PIB. En revanche, cette logique ne n’applique pas aux 12% de cette dette composée d’obligations indexées sur l’inflation.

Le temps du repas gratuit est néanmoins compté. Le gouvernement doit emprunter tous les ans quelques centaines de milliards d’euros (270 milliards pour 2023) pour renouveler la part de la dette qui arrive à échéance. De leur côté, les taux longs (aujourd’hui proches des 3%) devraient augmenter car la BCE ne peut pas encore déclarer victoire dans la lutte contre l’inflation. En termes de croissance réelle, celle-ci devrait être faiblarde sur la décennie à venir. La vision optimiste de l’agence France-Trésor la situerait à un niveau légèrement inférieur à 2% jusqu’en 2027. La vision pessimiste comme suggéré par le scénario de Fitch la situe plutôt à un taux moyen de 1,1%. Bien que l’inflation reste encore élevée, elle devrait retomber vers la cible de 2% d’ici à trois ans (la Commission européenne prévoit 2,8% d’inflation en zone euro pour 2024). Avec ces données, la condition nécessaire d’un taux d’intérêt inférieur au taux de croissance nominal pour la stabilité de la dette n’est remplie que de justesse, avec des taux d’intérêt de 3% et une croissance nominale de 4% dans le scénario de Fitch). Dans ces conditions, l’émergence d’un doute sur la stabilité financière du pays suffirait à faire apparaitre une prime de risque à même de pousser les taux d’intérêt au-delà du taux de croissance nominal. Ce risque s’est d’ores et déjà matérialisé d’une part avec l’élargissement du spread avec l’Allemagne qui est passé à 0,5% contre 0,3% lors des 2 années précédentes. C’est cette logique qui est mise en avant par l’agence de notation Fitch quand elle a dégradé la dette française à AA- en avril.

Un autre argument sur lequel s’appuient les optimistes est la perte de valeur de marché des obligations de long terme lorsque les taux d’intérêt augmentent. Une hausse des taux longs de 3% correspond à une dépréciation de 25% des obligations d’Etat en tant qu’actif financier. Selon les optimistes, ceci devrait alléger le fardeau de l’Etat. En réalité, l’État français devra rembourser la dette à sa pleine valeur faciale puisqu’il ne compte pas la racheter avant échéance, en vendant par exemple, des actifs comme la Tour Eiffel ou le Palais de l’Elysée.

L’incapacité de la France à équilibrer ses comptes a souvent été présentée par les autorités françaises comme une posture raisonnable face à la nécessité d’assurer les investissements publics et un niveau de service public de qualité, notamment en termes de santé publique et d’éducation nationale. De fait, cela peut sembler plus important que suivre des règles budgétaires mesquines édictées par les technocrates sans âmes de Bruxelles. Malheureusement, ces dépenses vertueuses mises en avant pour justifier déficits et endettement cachent une réalité effrayante. En janvier 2023, le Fonds monétaire international (FMI) a publié un rapport sur l’efficacité de l’utilisation des dépenses publiques en France. La comparaison avec un groupe de pays européens de références est atterrante. Beaucoup de gaspillage dans l’utilisation des ressources et des objectifs qui ne sont pas atteints. Ce résultat est conforme au bon sens. Plus il est facile de s’endetter moins il y a de rigueur dans la dépense. Inversement la discipline budgétaire oblige à l’efficacité dans la dépense publique. Il est à craindre que ce gouvernement ne soit pas plus capable d’améliorer l’efficacité des services publics que ses prédécesseurs. En revanche, il veut nous en donner à croire avec sa campagne de communication baptisée « en avoir pour ses impôts ».

La réforme des retraites est emblématique de l’incapacité du gouvernement à maîtriser la dépense publique en dépit de sa touchante volonté d’y parvenir. Des mois de travail puis des mois de conflit à l’Assemblée et dans la rue, une grosse perte de popularité pour accoucher d’une réformette qui permettra d’économiser quelques dizaines de milliards. Le compte n’y est pas même si la bonne intention y est, et il faut reconnaitre que le signal est positif. En revanche, la réduction des impôts pour les classes moyennes et la « Bidenisation » de l’intervention publique avec déluge de subventions sur les secteurs décrétés priorité nationale vont dans le mauvais sens. Oui, la réindustrialisation du pays est un objectif important, mais cela passe d’abord par la réforme du marché du travail vers davantage de flexibilité et la simplification administrative et fiscale.

Dérive de la dette public : jusqu’à quand ?

Dérive de la dette public : jusqu’à quand ?

En 2022 la dette représentée 111,6% du PIB, celle de l’Allemagne 66,3%. Avant la crise financière de 2007, ces ratios étaient respectivement de 65% et 64%.
La trajectoire de la dette en France est bien plus alarmante qu’il n’y paraît. Explications d’après Marc Guyot et Radu Vranceanu, Professeurs à l’Essec
Marc Guyot et Radu Vranceanu Dans la Tribune

Fin 2022, la dette publique de la France au sens de Maastricht représentait la bagatelle de 2.950 milliards d’euros (INSEE) soit 111,6% du PIB, dont 2.300 milliards euros de dette négociable de l’État (France Trésor). Pour avoir un ordre de grandeur réel de cette somme, elle correspond à 350 centrales nucléaires nouvelle génération. De son côté, la dette publique de l’Allemagne représente 66,3% de son PIB alors qu’en 2007, avant la grande crise, les dettes françaises et allemandes étaient respectivement 65% et 64% du PIB.

Faut-il s’inquiéter de la dynamique d’endettement de la France ? Comme l’a rappelé Olivier Blanchard dans son discours en tant que Président de l’Association américaine de Sciences économiques en 2019, si le ratio de la dette en proportion du PIB demeure stable ou diminue, le niveau de la dette lui-même ne devrait pas être un sujet d’inquiétude. Tant que la dette n’est pas remboursée, elle augmente tous les ans du montant du taux d’intérêt auquel le pays s’est endetté. De son côté, le PIB en valeur augmente naturellement à un certain taux de croissance, qui combine inflation et croissance réelle. Ainsi, en l’absence de déficit public, le ratio de la dette en proportion du PIB diminue si la vitesse d’augmentation de la dette est plus faible que la vitesse d’augmentation du PIB, c’est-à-dire si le taux d’intérêt est plus faible que le taux de croissance du PIB. En présence d’un déficit public positif mais stable, le ratio de la dette au PIB ne diminue pas, mais fini par se stabiliser si le taux d’intérêt est plus faible que le taux de croissance.

A ce jour, les taux d’intérêt des emprunts français à 10 ans seraient d’environ 3%, tandis que la croissance nominale (la croissance réelle augmentée de l’inflation) a été d’environ 8% en 2022. Peut-on conclure que la condition de stabilité est remplie ? Clairement non si on compare bien les taux d’intérêt futur et la croissance nominale future et non la croissance nominale passée.

Plus en détail, nous observons que la dette négociable de l’Etat français à une maturité d’environ 8,4 ans. Une partie de cette dette a été contractée à des taux proches de zéro, aussi, dans l’immédiat, l’inflation permet de réduire le ratio dette sur PIB. En revanche, cette logique ne n’applique pas aux 12% de cette dette composée d’obligations indexées sur l’inflation.

Le temps du repas gratuit est néanmoins compté. Le gouvernement doit emprunter tous les ans quelques centaines de milliards d’euros (270 milliards pour 2023) pour renouveler la part de la dette qui arrive à échéance. De leur côté, les taux longs (aujourd’hui proches des 3%) devraient augmenter car la BCE ne peut pas encore déclarer victoire dans la lutte contre l’inflation. En termes de croissance réelle, celle-ci devrait être faiblarde sur la décennie à venir. La vision optimiste de l’agence France-Trésor la situerait à un niveau légèrement inférieur à 2% jusqu’en 2027. La vision pessimiste comme suggéré par le scénario de Fitch la situe plutôt à un taux moyen de 1,1%. Bien que l’inflation reste encore élevée, elle devrait retomber vers la cible de 2% d’ici à trois ans (la Commission européenne prévoit 2,8% d’inflation en zone euro pour 2024). Avec ces données, la condition nécessaire d’un taux d’intérêt inférieur au taux de croissance nominal pour la stabilité de la dette n’est remplie que de justesse, avec des taux d’intérêt de 3% et une croissance nominale de 4% dans le scénario de Fitch). Dans ces conditions, l’émergence d’un doute sur la stabilité financière du pays suffirait à faire apparaitre une prime de risque à même de pousser les taux d’intérêt au-delà du taux de croissance nominal. Ce risque s’est d’ores et déjà matérialisé d’une part avec l’élargissement du spread avec l’Allemagne qui est passé à 0,5% contre 0,3% lors des 2 années précédentes. C’est cette logique qui est mise en avant par l’agence de notation Fitch quand elle a dégradé la dette française à AA- en avril.

Un autre argument sur lequel s’appuient les optimistes est la perte de valeur de marché des obligations de long terme lorsque les taux d’intérêt augmentent. Une hausse des taux longs de 3% correspond à une dépréciation de 25% des obligations d’Etat en tant qu’actif financier. Selon les optimistes, ceci devrait alléger le fardeau de l’Etat. En réalité, l’État français devra rembourser la dette à sa pleine valeur faciale puisqu’il ne compte pas la racheter avant échéance, en vendant par exemple, des actifs comme la Tour Eiffel ou le Palais de l’Elysée.

L’incapacité de la France à équilibrer ses comptes a souvent été présentée par les autorités françaises comme une posture raisonnable face à la nécessité d’assurer les investissements publics et un niveau de service public de qualité, notamment en termes de santé publique et d’éducation nationale. De fait, cela peut sembler plus important que suivre des règles budgétaires mesquines édictées par les technocrates sans âmes de Bruxelles. Malheureusement, ces dépenses vertueuses mises en avant pour justifier déficits et endettement cachent une réalité effrayante. En janvier 2023, le Fonds monétaire international (FMI) a publié un rapport sur l’efficacité de l’utilisation des dépenses publiques en France. La comparaison avec un groupe de pays européens de références est atterrante. Beaucoup de gaspillage dans l’utilisation des ressources et des objectifs qui ne sont pas atteints. Ce résultat est conforme au bon sens. Plus il est facile de s’endetter moins il y a de rigueur dans la dépense. Inversement la discipline budgétaire oblige à l’efficacité dans la dépense publique. Il est à craindre que ce gouvernement ne soit pas plus capable d’améliorer l’efficacité des services publics que ses prédécesseurs. En revanche, il veut nous en donner à croire avec sa campagne de communication baptisée « en avoir pour ses impôts ».

La réforme des retraites est emblématique de l’incapacité du gouvernement à maîtriser la dépense publique en dépit de sa touchante volonté d’y parvenir. Des mois de travail puis des mois de conflit à l’Assemblée et dans la rue, une grosse perte de popularité pour accoucher d’une réformette qui permettra d’économiser quelques dizaines de milliards. Le compte n’y est pas même si la bonne intention y est, et il faut reconnaitre que le signal est positif. En revanche, la réduction des impôts pour les classes moyennes et la « Bidenisation » de l’intervention publique avec déluge de subventions sur les secteurs décrétés priorité nationale vont dans le mauvais sens. Oui, la réindustrialisation du pays est un objectif important, mais cela passe d’abord par la réforme du marché du travail vers davantage de flexibilité et la simplification administrative et fiscale.

Société-Bolloré et médias, la dérive démocratique

Société-Bolloré et médias, la dérive démocratique

 

 

Ce qu’il a entrepris dans le domaine de l’information (déjà Canal +, CNews ou Prisma Media, et Europe 1, Le Journal du dimanche, Paris Match sur lesquels il a commencé d’imprimer sa « patte ») constituait déjà un gisement d’inquiétudes. Ce qu’il prépare dans le secteur de l’édition – résultant de l’OPA qu’il mène sur le groupe Lagardère propriétaire de Hachette – semble moins spectaculaire aux yeux de l’opinion ; or les effets industriels, intellectuels, éthiques, ne s’annoncent pas moins préoccupants. Le raid de Vincent Bolloré constitue une menace pour la salubrité du débat d’idées, qu’il soit public (dans le cas des médias) ou intime (dans celui de l’édition d’essais et de fiction). Et donc un risque démocratique. 

C’est l’histoire d’un essayiste aguerri qui compose son premier roman. Nommons-le Pierre. Il le sait, dénicher un éditeur dans une discipline où il est novice ne sera pas un long fleuve tranquille, et même davantage : il s’engage dans un parcours du combattant à l’issue très incertaine, tant les embuches s’amoncellent dès la ligne de départ. Comment faire exister un manuscrit parmi les 2.000 à 4.000 réceptionnés chaque année par des maisons qui n’en sélectionnent, au final, qu’une à quelques poignées ? Et dans ces conditions, comment espérer qu’il rencontre la sensibilité d’une femme ou d’un homme qui l’aura miraculeusement pioché dans la pile avant de le transmettre au comité ad hoc chargé de lire puis d’élire ? La (petite) notoriété, les (solides) réseaux, la foi immarcescible de l’auteur suffiront-elles ? Non, il en est conscient, et le facteur chance, par nature imprévisible, devrait constituer l’arbitre final. Final, vraiment ? Pas tout à fait.

Lorsqu’il pense avoir triomphé des obstacles les plus aigus et que ses pérégrinations semblent proches d’aboutir, voilà que Pierre se confronte à d’autres écueils, ceux-là tout à fait imprévus. Chez telle prestigieuse enseigne, après avoir franchi avec succès le seuil le plus délicat, il s’entend signifier qu’il est trop âgé, la décision ultime privilégiant un « auteur plus jeune » qui générera un plus sûr retour sur investissement. Dans telle autre grande maison, le retour enthousiaste du sommet de la pyramide passant le relais à une collaboratrice promet la lumière ; peine perdue, les « équipes commerciales préfèrent renoncer, faute de savoir comment traiter cet « alien » ». Ici, la détermination de l’auteur de rester imperméable aux réseaux sociaux est jugée rédhibitoire « puisqu’aujourd’hui sans stratégie Instagram, Twitter, Facebook, impossible de lancer un livre ». Là, le comité de lecture estime le texte « trop sombre » pour être populaire. Le pire peut-être, introduit par différents interlocuteurs sans relation entre eux : « Il faudrait revoir l’organisation du texte, afin que l’intrigue surgisse dans les quinze premières pages. C’est une règle : au-delà, on perd le lecteur », synthétise, en substance, l’un d’eux. « Mais vous avez conscience que la première partie est volontairement étirée, lente, descriptive, pour donner à l’irruption puis au développement de l’intrigue conclue dans l’épilogue, sa force psychologique, son mystère, sa dramaturgie ? », se défend l’auteur. « Bien sûr. Vous avez raison. Malheureusement, ce qui tranche au final, c’est la loi du marketing ».

Médias et Vincent Bolloré: La dérive démocratique

Médias  et Vincent Bolloré: La dérive démocratique

 

Ce qu’il a entrepris dans le domaine de l’information (déjà Canal +, CNews ou Prisma Media, et Europe 1, Le Journal du dimanche, Paris Match sur lesquels il a commencé d’imprimer sa « patte ») constituait déjà un gisement d’inquiétudes. Ce qu’il prépare dans le secteur de l’édition – résultant de l’OPA qu’il mène sur le groupe Lagardère propriétaire de Hachette – semble moins spectaculaire aux yeux de l’opinion ; or les effets industriels, intellectuels, éthiques, ne s’annoncent pas moins préoccupants. Le raid de Vincent Bolloré constitue une menace pour la salubrité du débat d’idées, qu’il soit public (dans le cas des médias) ou intime (dans celui de l’édition d’essais et de fiction). Et donc un risque démocratique. Au Festival du livre de Paris (22 – 24 avril), le sujet sera dans toutes les bouches.( papier de « la Tribune »)

C’est l’histoire d’un essayiste aguerri qui compose son premier roman. Nommons-le Pierre. Il le sait, dénicher un éditeur dans une discipline où il est novice ne sera pas un long fleuve tranquille, et même davantage : il s’engage dans un parcours du combattant à l’issue très incertaine, tant les embuches s’amoncellent dès la ligne de départ. Comment faire exister un manuscrit parmi les 2.000 à 4.000 réceptionnés chaque année par des maisons qui n’en sélectionnent, au final, qu’une à quelques poignées ? Et dans ces conditions, comment espérer qu’il rencontre la sensibilité d’une femme ou d’un homme qui l’aura miraculeusement pioché dans la pile avant de le transmettre au comité ad hoc chargé de lire puis d’élire ? La (petite) notoriété, les (solides) réseaux, la foi immarcescible de l’auteur suffiront-elles ? Non, il en est conscient, et le facteur chance, par nature imprévisible, devrait constituer l’arbitre final. Final, vraiment ? Pas tout à fait.

Lorsqu’il pense avoir triomphé des obstacles les plus aigus et que ses pérégrinations semblent proches d’aboutir, voilà que Pierre se confronte à d’autres écueils, ceux-là tout à fait imprévus. Chez telle prestigieuse enseigne, après avoir franchi avec succès le seuil le plus délicat, il s’entend signifier qu’il est trop âgé, la décision ultime privilégiant un « auteur plus jeune » qui générera un plus sûr retour sur investissement. Dans telle autre grande maison, le retour enthousiaste du sommet de la pyramide passant le relais à une collaboratrice promet la lumière ; peine perdue, les « équipes commerciales préfèrent renoncer, faute de savoir comment traiter cet « alien » ». Ici, la détermination de l’auteur de rester imperméable aux réseaux sociaux est jugée rédhibitoire « puisqu’aujourd’hui sans stratégie Instagram, Twitter, Facebook, impossible de lancer un livre ». Là, le comité de lecture estime le texte « trop sombre » pour être populaire. Le pire peut-être, introduit par différents interlocuteurs sans relation entre eux : « Il faudrait revoir l’organisation du texte, afin que l’intrigue surgisse dans les quinze premières pages. C’est une règle : au-delà, on perd le lecteur », synthétise, en substance, l’un d’eux. « Mais vous avez conscience que la première partie est volontairement étirée, lente, descriptive, pour donner à l’irruption puis au développement de l’intrigue conclue dans l’épilogue, sa force psychologique, son mystère, sa dramaturgie ? », se défend l’auteur. « Bien sûr. Vous avez raison. Malheureusement, ce qui tranche au final, c’est la loi du marketing ».

 

« Les Républicains » : mettre fin à la dérive identitaire entamée par Nicolas Sarkozy ?

« Les Républicains » : mettre fin à la dérive identitaire entamée par Nicolas Sarkozy ? 

 

En acceptant de faire sien le terreau idéologique de l’extrême droite, comme en atteste le discours prononcé par Valérie Pécresse en février au Zénith de Paris, la droite de Jacques Chirac a moralement sombré, estime, dans une tribune au « Monde », Gaël Perdriau, maire (Les Républicains) de Saint-Etienne.

 

Tribune

. Le 11 mars 2007, au moment où il s’apprête à quitter l’Elysée, Jacques Chirac s’adresse une dernière fois à la nation. Ses mots résonnent, aujourd’hui, tel un avertissement : « Ne composez jamais avec l’extrémisme, le racisme, l’antisémitisme, ou le rejet de l’autre. » « Composer » reviendrait à accepter ce poison pervers qui conduit à la fois à la division de la France, donc des Français, et au reniement de l’héritage républicain que tant d’hommes et de femmes, au travers des siècles, ont défendu au prix de leur vie.

Au cours de cette campagne présidentielle, il y a eu un avant et un après 13 février 2022. Ce jour-là, au cours de son premier grand meeting, au Zénith de Paris, Valérie Pécresse a parlé des « Français de papier », expression née dans les colonnes du quotidien antisémite d’Edouard Drumont (1844-1917), La Libre Parole. En affirmant dans le même discours qu’il n’y a de « fatalité ni au grand déclassement ni au grand remplacement », elle s’est également référée à la fumeuse théorie du « grand remplacement » de l’écrivain Renaud Camus, figure de l’extrême droite identitaire.

La candidate à l’élection présidentielle cautionnait ainsi, explicitement, cette théorie absurde dont le racisme est le seul fondement. Tout l’héritage, transmis par Jacques Chirac en 2007, s’effondrait sur un simple effet de communication. La course à l’Elysée valait-elle de brader toutes les valeurs républicaines ? Ce 13 février, la droite républicaine, alliée aux centristes, a sombré moralement en acceptant de faire sien le terreau idéologique de l’extrême droite.

Hypnotisés par un discours identitaire qui hante, depuis 2007, une frange de la droite, tombée sous la coupe de Patrick Buisson [ancien conseiller de Nicolas Sarkozy], les responsables de la campagne de Valérie Pécresse se sont montrés incapables de répondre aux attentes authentiques de Français sur le pouvoir d’achat, le développement durable, la sécurité, la sauvegarde de notre modèle social ou le rétablissement des valeurs de la République. Ils ont préféré courir derrière les délires d’un ancien polémiste issu des plateaux de télévision.

Le naufrage du premier tour n’a donc rien d’étonnant, puisque la candidate, d’une part, a tourné le dos à notre culture politique et, d’autre part, s’est montrée incapable de porter un programme cohérent pour la France. Désormais, il ne restait plus qu’à parachever ce « triomphe » en refusant d’appeler à voter clairement pour Emmanuel Macron afin de faire barrage à Marine Le Pen [Valérie Pécresse, au soir du 10 avril, a déclaré qu’elle « voterait en conscience Emmanuel Macron » tout en précisant qu’elle n’était pas « propriétaire » de ses voix].

Mali: la dérive de Poutine aussi

Mali: la dérive de Poutine aussi

 

Les autorités maliennes ont annoncé le 18 mars « suspendre » la diffusion des programmes de Radio France internationale (RFI) et de France 24. Au moment où des mercenaires russes défendent le pouvoir en place à Bamako, cette censure des médias français laisse le champ libre à Moscou pour investir l’espace médiatique et continuer de déstabiliser l’Afrique.(papier du « Monde »).

 

 

Vitrine de la démocratisation de l’Afrique de l’Ouest après la fin d’une longue dictature en 1991, le Mali a commencé à se décomposer dans les années 2010, affaibli par la corruption de son régime et ébranlé par une rébellion touareg alliée aux islamistes, renforcée par les combattants et les armes « libérés » par la chute du colonel Kadhafi en Libye. L’intervention militaire française, déclenchée en 2013 à la demande de Bamako, a sans doute empêché le pays de tomber, jusqu’à présent, entre les mains des djihadistes.

Mais son échec, sanctionné par la décision de retrait annoncée le 17 février par Emmanuel Macron, accélère le raidissement de la junte qui a pris le pouvoir en mai 2021, dans le sens d’une rupture brutale avec la France, d’un rapprochement avec la Russie et d’un écrasement des libertés.

La décision, annoncée le 18 mars par les autorités maliennes, de « suspendre » la diffusion des programmes de Radio France internationale (RFI) et de la chaîne France 24 est la dernière en date des manifestations de cette inquiétante dérive. Le motif invoqué par les militaires maliens est la retransmission de reportages où s’expriment des victimes d’exactions commises par l’armée malienne et, probablement, par des mercenaires du groupe privé russe Wagner. Or ces actes de torture et ces meurtres visant des civils sont documentés tant par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies, qui les a qualifiés de « graves violations du droit international », que par des enquêtes du Monde et de Jeune Afrique.

La coupure des émissions des chaînes françaises accusées par la junte de chercher à la « déstabiliser » s’inscrit dans un climat marqué par la multiplication des menaces visant à faire taire toutes les voix critiques et les opposants. Les militaires au pouvoir, qui ont privé d’accès aux soins l’ancien premier ministre Boubèye Maïga qu’ils avaient fait incarcérer, ont une part de responsabilité dans son décès, lundi 21 mars.

Alarmante, l’atteinte à la liberté d’information cible aussi les médias maliens, auxquels les militaires interdisent de relayer les enquêtes de RFI et de France 24. Le silence imposé à ces médias très populaires vise à priver les Maliens d’informations fiables, pour mieux imposer la propagande antifrançaise des militaires et leur alliance avec Moscou.

De fait, la censure des programmes français marque une nouvelle avancée de l’influence russe en Afrique de l’Ouest. La junte malienne joue sur la frange de l’opinion prompte à justifier sa décision par le « précédent » que constituerait l’interdiction par l’Union européenne des outils de propagande russes que sont RT et Sputnik, au titre de sanction contre l’agression de l’Ukraine. Alors que des mercenaires russes défendent le pouvoir en place à Bamako, la coupure de RFI et de France 24 laisse le champ libre à Moscou pour investir l’espace médiatique laissé vacant.

Le refus de certains pays africains de condamner la guerre en Ukraine à l’ONU encourage la Russie à pousser ses pions en Afrique en cherchant à attiser la colère contre l’ex-colonisateur. Dans les années 1950-1990, la guerre froide Est-Ouest a alimenté les conflits en Afrique. Le retour d’un climat comparable ne fait que compliquer l’équation de la politique de la France à l’égard de l’Afrique. S’ajoutant aux appétits chinois et à l’agressivité des djihadistes, les ambitions de Vladimir Poutine, accueillies avec bienveillance par certains Africains, pèsent désormais aussi sur le continent.

Reconnaissance faciale: Risque de dérive antidémocratique

  Reconnaissance faciale:  Risque de dérive antidémocratique

 

Lucie Audibert, avocate chez Privacy International, se réjouit, dans une tribune au « Monde », de la mise en demeure, le 16 décembre 2021, de l’entreprise américaine Clearview AI par la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

 

Tribune. 

 

Etes-vous au courant que toutes les photos de vous qui se trouvent sur les réseaux sociaux ou ailleurs sur le Web public peuvent être récoltées et stockées dans la base de données privée d’une compagnie que vous ne connaissez ni d’Eve ni d’Adam ? Et que cette compagnie vend l’accès à cette base de données à la police, à des gouvernements et à d’autres sociétés dans le monde ?

Ce système de surveillance de masse est le produit de l’entreprise américaine Clearview AI, dont l’existence fut révélée en janvier 2020 par une enquête du New York Times. A l’aide d’un outil automatisé parcourant le Web, Clearview récolte toutes les images détectées comme contenant des visages humains (plus de 10 milliards de photos stockées à ce jour), et permet à ses clients, grâce à son algorithme de reconnaissance faciale, d’identifier les individus apparaissant dessus. Elle stocke aussi toute information liée à ces photos, notamment le lien URL de la page où elles se trouvent – qui contient souvent des noms et autres informations personnelles. Objectif officiel : aider la police à identifier des criminels.

C’est une technologie sans précédent, qui a attiré l’attention de nombreuses autorités de protection de la vie privée autour du monde, et à raison. Le 16 décembre 2021, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a mis la compagnie en demeure, lui ordonnant de supprimer toutes les photos et autres informations personnelles récoltées en France. En effet, la loi européenne sur la protection des données, en vigueur depuis 2018, nous protège contre une utilisation abusive de nos informations personnelles – telle que la récolte et la vente de nos photos sans nous en informer ni demander notre consentement. La décision de la CNIL suit de près une décision similaire prise par son homologue britannique, et d’autres en Australie et au Canada.

L’impact de ces décisions dépendra de la volonté de l’entreprise, et de celle de ses investisseurs, à reconnaître les dangers considérables de sa technologie et l’aberration qu’elle constitue dans une société démocratique et protectrice des libertés fondamentales (quand les institutions fonctionnent). Notamment car l’entreprise est installée aux Etats-Unis, où les poursuites engagées contre elle par l’Union américaine pour les libertés civiles sont limitées par le manque de loi fédérale sur la vie privée.

Mais ce désaveu massif est l’exemple d’une réponse efficace de démocraties modernes à l’innovation et la recherche du profit débridées – une réponse trop souvent absente face aux géants du Web et qu’il faut célébrer. Les technologies comme celle de Clearview menacent la notion de vie privée dans les espaces publics en ligne et hors ligne, qui n’est pas forcément intuitive mais qu’il est essentiel de protéger. En effet, cette notion nous permet de sortir de chez nous à visage découvert sans que n’importe qui, en un clic, puisse nous identifier, trouver notre nom, notre profession, les photos de nos dernières vacances ou de notre dernière participation à une manifestation.

 

Climat: la dérive judiciaire

Climat:  la dérive judiciaire

Gilles Savary dénonce dans le journal l’opinion l’emprise grandissante du système judiciaire sur la société concernant le climat.

 

Sur saisine de l’association Les Amis de la Terre, le Conseil d’Etat a condamné le gouvernement à une astreinte de 10 millions d’euros pour carences récurrentes de sa politique de « qualité de l’air ​» en regard des objectifs européens. Six agglomérations françaises sont encore exposées à des dépassements de seuils légaux d’émissions polluantes.

Sans contester les failles et les atermoiements de la France, tous gouvernements confondus, à se donner les moyens de ses engagements écologiques ni même le rôle d’aiguillon du Conseil d’Etat, on éprouve un malaise à ce que ce soit le juge, hors contentieux individuel, qui sanctionne une politique publique plutôt que le citoyen électeur.

D’abord, parce que cette dérive conforte l’idée déresponsabilisante et mystique, certes hypertrophiée dans notre pays, que l’Etat et ses gouvernements sont les uniques responsables du destin des décisions publiques. Il n’est pas utile d’avoir poussé la formation en sciences politiques au niveau de nos vénérables conseillers d’Etat, pour savoir qu’il n’y a pas de réforme réussie, fut-elle votée par les chambres, sans consentement collectif à sa mise en œuvre. Et il n’y a guère plus systémique que la question environnementale, en particulier celle de la qualité de l’air qui engage indistinctement une chaîne de responsabilités et de comportements individuels et collectifs sur lesquels les Etats ne disposent pas d’un pouvoir de contrainte illimité.

On prétend même que le bassin parisien souffre d’épisodes polluants venus de pays voisins. Le sud de la France est habitué à des épisodes de dépôts de sables sahariens. Il n’y a guère que les radiations de Tchernobyl qui se sont accommodées de frontières nationales…

Responsabilité. Un gouvernement peut être animé, en toute bonne foi, des meilleures intentions du monde et de la plus grande détermination à les mettre en œuvre, et devoir y renoncer la mort dans l’âme face à des impondérables ou à des résistances inattendues du corps social de son pays.

Les gouvernements qui ont fait le choix de renoncer à l’écotaxe en 2016, ou à l’augmentation de la taxe carbone sur le carburant en 2018, face aux risques d’escalade des manifestations de Bonnets rouges et de Gilets jaunes, ne l’ont pas fait de bonne grâce, mais en considération de risques collectifs qu’ils jugeaient démesurés pour le pays. On peut leur contester ces renoncements, mais ils procèdent d’une responsabilité imprescriptiblement et honorablement politique, qui ne peut être appréciée, et encore moins jugée, à l’aune exclusif d’objectifs écologiques.

Notre pays, qui s’est toujours montré réfractaire à l’évaluation des politiques publiques, épouse l’air du temps qui consiste à en judiciariser les résultats

La qualité de l’air à Paris, Lyon ou Toulouse dépend tout autant de décisions locales d’urbanisme, de politiques de transports publics et de mesures de police de la circulation que de décisions gouvernementales centralisées. En quoi le gouvernement est-il responsable du fait qu’aucune agglomération ne se soit portée volontaire pour expérimenter des péages urbains, comme l’autorise la loi française ?

Notre pays, qui s’est toujours montré réfractaire à l’évaluation des politiques publiques, épouse l’air du temps qui consiste à en judiciariser les résultats. Opérée ces dernières années sous la pression d’influentes ONG, cette dérive judiciaire dévalue la sanction électorale et entretient un sentiment délétère d’inutilité et d’impuissance de la classe politique, même si cette dernière y prête inconsidérément la main dans l’élaboration des lois.

On peut s’en consoler en constatant que l’amende qui frappe le gouvernement français est très largement recyclée dans des agences étatiques, sans grande incidence finale pour le budget de l’Etat.

Gilles Savary est ancien député PS de la Gironde et délégué général de Territoires de progrès

Tunisie : démocratie ou dérive autoritaire

Tunisie : démocratie ou dérive autoritaire

Si le président Kaïs Saïed a bénéficié du soutien populaire, son incapacité à répondre aux demandes sociales qu’il a encouragées pourrait l’entraîner vers une dérive autoritaire, analyse l’historienne et politiste Sophie Bessis dans une tribune au « Monde ».(extrait)

Tribune

 

 

 

Est-ce dû à la centralité de l’idée constitutionnelle dans son histoire politique depuis plus d’un siècle et demi ? Il semble en tout cas que la Tunisie se soit spécialisée dans une modalité particulière de prise du pouvoir, celle du coup d’Etat constitutionnel. L’ex-président Ben Ali y avait eu recours pour renverser le vieux leader Habib Bourguiba, le 7 novembre 1987.

Trente-quatre ans et une révolution plus tard, c’est également en invoquant la Constitution que le président Kaïs Saïed a réalisé, le dimanche 25 juillet, un coup de force en s’accaparant, en vertu d’une lecture très personnelle de l’article 80 de la Loi fondamentale, la totalité du pouvoir. Avec le feu vert de l’armée, il concentre désormais entre ses mains les fonctions exécutive, législative et judiciaire que la Constitution de 2014 avait pris soin de séparer, et même de fragmenter en ce qui concerne l’exécutif.

 

La question est désormais de savoir s’il s’agit d’une panne passagère dans la construction chaotique mais obstinée de la démocratie tunisienne ou d’un coup d’arrêt durable donné à cette dernière. M. Saïed attendait en fait impatiemment de franchir le Rubicon. Depuis son élection, en octobre 2019, il n’a cessé de vouloir étendre ses prérogatives et d’appeler à une modification de la Constitution qui donnerait le pouvoir au peuple dont il se réclame.

L’occasion de passer à l’acte lui a été fournie par la descente aux abîmes d’une classe politique ayant fait depuis la révolution de 2011, mais surtout depuis deux ans, la preuve de son incapacité à relever les défis posés par un pays en pleine déconfiture politique, économique et sociale.

De fait, M. Saïed a bénéficié d’un alignement des planètes exceptionnellement favorable pour passer à l’acte. Le parti islamiste Ennahda a été totalement discrédité par ses pratiques clientélistes et prébendières et un exercice du pouvoir qu’il monopolise pratiquement depuis octobre 2011. Centré sur ses seuls intérêts, celui-ci a provoqué en moins de dix ans un rejet radical dont témoignent les saccages qu’ont subis ses locaux un peu partout dans le pays, y compris dans ses fiefs, lors des manifestations du 25 juillet. Il était donc facile pour le chef de l’Etat de lui donner le coup de grâce.

Les classes populaires, épuisées par l’augmentation du coût de la vie, la permanence d’un chômage de masse, l’extension de la corruption, auxquelles est venue s’ajouter la gravité de la crise sanitaire, écœurées par le comportement de ses élus et sensibles à la rhétorique populiste du chef de l’Etat, ne pouvaient par ailleurs qu’approuver son intention déclarée de mettre fin à la gabegie.

Société- Pegasus : La dérive totalitaire (Le Monde)

Société- Pegasus  : La dérive totalitaire (Le Monde)

 

Les révélations publiées au long de cette semaine par « Le Monde » et seize rédactions associées au sein du « Projet Pegasus » prouvent, de manière incontestable, qu’en matière de cybersurveillance l’abus est la règle, et non l’exception ‘ (édito du monde).

 

Depuis des années, des réponses invariablement lénifiantes sont opposées aux nombreuses inquiétudes sur les dérives potentiellement liberticides rendues possibles par les outils créés par l’industrie de la surveillance numérique. Les entreprises de ce secteur, comme les Etats qui font appel à leurs services, assurent que les risques sont infimes, les usages encadrés, les engagements respectés. Depuis des années, les doutes sont balayés au nom de l’intérêt supérieur des sécurités nationales, et de la lutte contre le terrorisme ou le crime organisé.

Cette négation de l’évidence sera désormais beaucoup plus compliquée. Les révélations publiées au long de cette semaine par Le Monde et seize rédactions associées au sein du « Projet Pegasus », coordonnées par l’organisation Forbidden Stories, en partenariat avec Amnesty International, prouvent, de manière incontestable, qu’en matière de cybersurveillance l’abus est la règle, et non l’exception.


Cette démonstration provient de l’examen approfondi d’une liste de plus de 50 000 numéros de téléphone visés depuis 2016 – sans que tous aient été infectés – par les clients d’un puissant logiciel espion, baptisé « Pegasus », développé par l’entreprise israélienne NSO Group pour le compte d’une dizaine de gouvernements. Ce travail dévoile l’ampleur du dévoiement de cette arme informatique, si puissante qu’elle peut aspirer toutes les données d’un smartphone en toute discrétion, et ce, jusqu’à présent, en toute impunité. Car ce ne sont pas des groupes terroristes ou criminels qui apparaissent principalement dans cette liste, dûment authentifiée par des mois d’enquête. Dans les faits, Pegasus est couramment utilisé contre des journalistes, des avocats, des militants des droits de l’homme, des opposants politiques, des médecins, théoriquement protégés par la convention de Genève.


Comment aurait-il pu en être autrement ? Comment pouvait-on sérieusement faire mine de croire une entreprise qui vend son outil de surveillance numérique à des régimes autoritaires, tels que l’Azerbaïdjan, tout en affirmant, la main sur le cœur, qu’elle est très attentive au respect des droits de l’homme ? Le coût modique de Pegasus place cet outil à la portée de tous les Etats et permet à des pays comme le Maroc ou la Hongrie, dont les capacités « cyber » en propre sont faibles, d’avoir instantanément accès à de très puissantes capacités d’espionnage, et à toutes les tentations qu’elles permettent.

Selon NSO, une quarantaine de pays ont fait l’acquisition de ce système. Combien d’entre eux s’en servent pour contourner l’Etat de droit et se livrer à des surveillances contraires au droit international ? Les enquêtes du « Projet Pegasus » conduisent à répondre « tous ou presque », démocraties comprises. Le gouvernement israélien, qui valide chacune des ventes opérées par NSO, fait d’ailleurs l’aveu indirect de sa connaissance des abus permis par cet outil, puisqu’il bloque les tentatives de surveillance en Chine, aux Etats-Unis ou encore en Russie.

 

Car, contrairement à ce qu’affirment NSO comme ses clients, il n’existe quasiment aucune forme de contrôle sur l’utilisation qui est faite de Pegasus, une fois le dispositif déployé. Les opérateurs pris en flagrant délit voient, au pire, suspendre leur accès, quand leurs actions ont déclenché un scandale mondial, comme dans le dossier de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. La vente de ces armes numériques, pudiquement appelées « biens à double usage » dans le jargon technique, est régie par l’arrangement de Wassenaar, un accord très peu contraignant qui n’interdit rien et oblige simplement ses signataires – Israël n’en fait pas partie – à un peu de transparence.


Les logiciels espions sont pourtant bien plus intrusifs que les écoutes téléphoniques, strictement encadrées au moins dans nos démocraties. Et, à la différence de la plupart des autres armes, elles sont à 99 % utilisées contre des civils. Il est grand temps de prendre conscience de ce scandale, de constater les abus que nos révélations portent à la connaissance de tous, et de lancer le débat sur un contrôle réel et efficace de ces techniques.

La sécurité de nos concitoyens peut certes rendre nécessaires des opérations de surveillance drastiquement délimitées. Mais cet impératif ne saurait en rien justifier la violation massive et systématique du secret de nos vies et de nos échanges privés, comme de la confidentialité de nos opinions.

Pegasus : La dérive totalitaire

Pegasus  : La dérive totalitaire (Le Monde)

 

Les révélations publiées au long de cette semaine par « Le Monde » et seize rédactions associées au sein du « Projet Pegasus » prouvent, de manière incontestable, qu’en matière de cybersurveillance l’abus est la règle, et non l’exception ‘ (édito du monde).

 

Depuis des années, des réponses invariablement lénifiantes sont opposées aux nombreuses inquiétudes sur les dérives potentiellement liberticides rendues possibles par les outils créés par l’industrie de la surveillance numérique. Les entreprises de ce secteur, comme les Etats qui font appel à leurs services, assurent que les risques sont infimes, les usages encadrés, les engagements respectés. Depuis des années, les doutes sont balayés au nom de l’intérêt supérieur des sécurités nationales, et de la lutte contre le terrorisme ou le crime organisé.

Cette négation de l’évidence sera désormais beaucoup plus compliquée. Les révélations publiées au long de cette semaine par Le Monde et seize rédactions associées au sein du « Projet Pegasus », coordonnées par l’organisation Forbidden Stories, en partenariat avec Amnesty International, prouvent, de manière incontestable, qu’en matière de cybersurveillance l’abus est la règle, et non l’exception.


Cette démonstration provient de l’examen approfondi d’une liste de plus de 50 000 numéros de téléphone visés depuis 2016 – sans que tous aient été infectés – par les clients d’un puissant logiciel espion, baptisé « Pegasus », développé par l’entreprise israélienne NSO Group pour le compte d’une dizaine de gouvernements. Ce travail dévoile l’ampleur du dévoiement de cette arme informatique, si puissante qu’elle peut aspirer toutes les données d’un smartphone en toute discrétion, et ce, jusqu’à présent, en toute impunité. Car ce ne sont pas des groupes terroristes ou criminels qui apparaissent principalement dans cette liste, dûment authentifiée par des mois d’enquête. Dans les faits, Pegasus est couramment utilisé contre des journalistes, des avocats, des militants des droits de l’homme, des opposants politiques, des médecins, théoriquement protégés par la convention de Genève.


Comment aurait-il pu en être autrement ? Comment pouvait-on sérieusement faire mine de croire une entreprise qui vend son outil de surveillance numérique à des régimes autoritaires, tels que l’Azerbaïdjan, tout en affirmant, la main sur le cœur, qu’elle est très attentive au respect des droits de l’homme ? Le coût modique de Pegasus place cet outil à la portée de tous les Etats et permet à des pays comme le Maroc ou la Hongrie, dont les capacités « cyber » en propre sont faibles, d’avoir instantanément accès à de très puissantes capacités d’espionnage, et à toutes les tentations qu’elles permettent.

Selon NSO, une quarantaine de pays ont fait l’acquisition de ce système. Combien d’entre eux s’en servent pour contourner l’Etat de droit et se livrer à des surveillances contraires au droit international ? Les enquêtes du « Projet Pegasus » conduisent à répondre « tous ou presque », démocraties comprises. Le gouvernement israélien, qui valide chacune des ventes opérées par NSO, fait d’ailleurs l’aveu indirect de sa connaissance des abus permis par cet outil, puisqu’il bloque les tentatives de surveillance en Chine, aux Etats-Unis ou encore en Russie.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  « Projet Pegasus » : comment la société israélienne NSO Group a révolutionné l’espionnage

Car, contrairement à ce qu’affirment NSO comme ses clients, il n’existe quasiment aucune forme de contrôle sur l’utilisation qui est faite de Pegasus, une fois le dispositif déployé. Les opérateurs pris en flagrant délit voient, au pire, suspendre leur accès, quand leurs actions ont déclenché un scandale mondial, comme dans le dossier de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. La vente de ces armes numériques, pudiquement appelées « biens à double usage » dans le jargon technique, est régie par l’arrangement de Wassenaar, un accord très peu contraignant qui n’interdit rien et oblige simplement ses signataires – Israël n’en fait pas partie – à un peu de transparence.


Les logiciels espions sont pourtant bien plus intrusifs que les écoutes téléphoniques, strictement encadrées au moins dans nos démocraties. Et, à la différence de la plupart des autres armes, elles sont à 99 % utilisées contre des civils. Il est grand temps de prendre conscience de ce scandale, de constater les abus que nos révélations portent à la connaissance de tous, et de lancer le débat sur un contrôle réel et efficace de ces techniques.

La sécurité de nos concitoyens peut certes rendre nécessaires des opérations de surveillance drastiquement délimitées. Mais cet impératif ne saurait en rien justifier la violation massive et systématique du secret de nos vies et de nos échanges privés, comme de la confidentialité de nos opinions.

Politique- L’abstention témoigne d’une démocratie à la dérive

Politique- L’abstention témoigne d’une démocratie à la dérive

 

Par Gaston René Bessay, Expert Consultant international

Certes l’abstention aux régionales a été exceptionnellement massive. Cependant ce mouvement n’est pas nouveau , il affecte à peu près toutes les élections dans des proportions cependant différentes. Cela témoigne à l’évidence d’une sorte de désintérêt voire de mépris vis-à-vis de la chose publique et surtout du système politique.

Globalement les Français ne croient pas en la capacité des responsables politiques à faire changer de manière significative et positivement l’environnement social, économique, ou sociétal. Ce n’est pas seulement du désenchantement mais une sorte de rejet pour un système démocratique usé jusqu’à la corde.

Pour résumer,  les échéances électorales sont à peu près le seul acte démocratique qui permet à tous les électeurs de s’exprimer. En gros, une sorte de vision très primaire de la démocratie : on dépose une fois de temps en temps un bulletin de vote dans l’urne, ensuite les élus font ce qu’ils veulent, ce qu’ils peuvent ou rien du tout.

De toute évidence,  il manque l’essentiel, c’est-à-dire de la chair autour de la démocratie, c’est-à-dire une capacité permanente à associer les acteurs aux actions d’intérêt général. Pour faire semblant on crée sans arrêt de nouvelles ministructures où sont désignés dans la plupart des cas des incompétents notoires, des arrivistes ou encore des bobos.

On reproche à ces s institutions de concertation l’insuffisance de leurs travaux. Ce n’est pas sans raison. Ceci étant lorsque les réflexions et propositions sont pertinentes, elles sont rarement prises en compte. Cela vaut surtout pour le niveau national mais tout autant pour les autres échelons de décision y compris le niveau local.

Le sommet de l’hypocrisie est sans doute atteint lorsque à l’initiative d’élus écolos ou de macronistes, on désigne au hasard des citoyens pour siéger dans ces organismes de concertation. Du coup on a vite fait de démonter les propositions ésotériques de ces organismes.

La période se caractérise en effet par une grande complexification des problématiques économique, technologique, environnementale et sociétale.En plus avec des interactions systémiques multiples qui échappent aux analyses simplistes

L’étude trop fragmentée et  trop partisane des phénomènes constitue un des facteurs explicatifs essentiels  de l’incompréhension des transformations structurelles que nous vivons.  La compréhension de la  complexité des transformations en cours implique une dépassement des clivages partisans , une  ouverture d’esprit aux idées différentes. La pluralité des approches permet d’éviter le sectarisme.  L’indépendance et la pertinence de l’information constituent un enjeu stratégique pour comprendre les mutations actuelles et au-delà pour les maîtriser. Autant d’exigences qui échappent  le plus souvent aux grilles d’analyse obsolète de nombre de partis politiques.

Une nouvelle démocratie passe aussi par une modification du processus d’émergence des futurs élus..

Aujourd’hui n’importe qui peut se présenter sans aucune compétence, sans aucune expérience, sans aucune légitimité. Ainsi par exemple un énarque peut se parachuter dans une région dont il ne connaît rien pour devenir député. C’est aussi le même phénomène souvent rencontré aux autres niveaux d’élection où n’importe quel citoyen lambda prétend pouvoir diriger une communauté de citoyens alors qu’il n’a préalablement aucun passé social. C’est ainsi l’occasion pour nombre d’opportunistes de faire des petites carrières politiques bien rémunérées.

Difficile de comprendre ce simplisme dans l’émergence des candidats à la candidature. En général dans les organisations sociales,  on estime qu’il faut presque 10 ans pour former un responsable  national. En politique en quelques mois n’importe qui peut se parachuter et devenir responsable du pays.

Autre élément complexe de la problématique démocratique , la contradiction permanente entre le souci de plaire à l’électeur pour être élu et l’efficacité. Une contradiction permanente gérée par la démagogie et le mensonge. De ce point de vue, un minimum d’éthique serait nécessaire. Cette contradiction centrale alimente tous les rejets du politique.

Il faut aussi convenir que les médias et autres institutions intermédiaires ne jouent pas suffisamment leur rôle de filtre d’évaluation et d’animation du débat. Pas étonnant, la plupart des médias nationaux comme régionaux dépendent d’intérêts financiers qui soutiennent des candidats qui leur sont proches. Le pire est sans doute atteint avec la presse régionale et locale dont la ligne éditoriale se résume à la tribune des chats écrasés, des louanges éhontés en faveur des élus en place et à la reprise bête et méchante des informations des agences. Les autres médias ne sont guère non plus à la hauteur qu’il s’agisse de la télévision, des radios ou même d’Internet où la pire côtoie le meilleur surtout en plus avec l’anonymat qui encourage n’importe quelle dérive.

Pour tout dire, ce ne sont pas simplement les modalités d’élections qui sont à revoir ( vote obligatoire, vote par Internet etc.) mais le contenu même et les modalités de gestion d’une démocratie vivante. Ce n’est pas le référendum à tout faire qui réglera cette question complexe mais sans doute un long débat, profond, argumentée, large pour moderniser un système démocratique demeuré à l’èré néandertalienne.

 

L’abstention témoigne d’une démocratie à la dérive

L’abstention témoigne d’une démocratie à la dérive

 

Par Gaston René Bessay, Expert international en prospective

Certes l’abstention aux régionales a été exceptionnellement massive. Cependant ce mouvement n’est pas nouveau , il affecte à peu près toutes les élections dans des proportions cependant différentes. Cela témoigne à l’évidence d’une sorte de désintérêt voire de mépris vis-à-vis de la chose publique et surtout du système politique.

Globalement les Français ne croient pas en la capacité des responsables politiques à faire changer de manière significative et positivement l’environnement social, économique, ou sociétal. Ce n’est pas seulement du désenchantement mais une sorte de rejet pour un système démocratique usé jusqu’à la corde.

Pour résumer,  les échéances électorales sont à peu près le seul acte démocratique qui permet à tous les électeurs de s’exprimer. En gros, une sorte de vision très primaire de la démocratie : on dépose une fois de temps en temps un bulletin de vote dans l’urne, ensuite les élus font ce qu’ils veulent, ce qu’ils peuvent ou rien du tout.

De toute évidence,  il manque l’essentiel, c’est-à-dire de la chair autour de la démocratie, c’est-à-dire une capacité permanente à associer les acteurs aux actions d’intérêt général. Pour faire semblant on crée sans arrêt de nouvelles ministructures où sont désignés dans la plupart des cas des incompétents notoires, des arrivistes ou encore des bobos.

On reproche à ces s institutions de concertation l’insuffisance de leurs travaux. Ce n’est pas sans raison. Ceci étant lorsque les réflexions et propositions sont pertinentes, elles sont rarement prises en compte. Cela vaut surtout pour le niveau national mais tout autant pour les autres échelons de décision y compris le niveau local.

Le sommet de l’hypocrisie est sans doute atteint lorsque à l’initiative d’élus écolos ou de macronistes, on désigne au hasard des citoyens pour siéger dans ces organismes de concertation. Du coup on a vite fait de démonter les propositions ésotériques de ces organismes.

La période se caractérise en effet par une grande complexification des problématiques économique, technologique, environnementale et sociétale.En plus avec des interactions systémiques multiples qui échappent aux analyses simplistes

L’étude trop fragmentée et  trop partisane des phénomènes constitue un des facteurs explicatifs essentiels  de l’incompréhension des transformations structurelles que nous vivons.  La compréhension de la  complexité des transformations en cours implique une dépassement des clivages partisans , une  ouverture d’esprit aux idées différentes. La pluralité des approches permet d’éviter le sectarisme.  L’indépendance et la pertinence de l’information constituent un enjeu stratégique pour comprendre les mutations actuelles et au-delà pour les maîtriser. Autant d’exigences qui échappent  le plus souvent aux grilles d’analyse obsolète de nombre de partis politiques.

Une nouvelle démocratie passe aussi par une modification du processus d’émergence des futurs élus..

Aujourd’hui n’importe qui peut se présenter sans aucune compétence, sans aucune expérience, sans aucune légitimité. Ainsi par exemple un énarque peut se parachuter dans une région dont il ne connaît rien pour devenir député. C’est aussi le même phénomène souvent rencontré aux autres niveaux d’élection où n’importe quel citoyen lambda prétend pouvoir diriger une communauté de citoyens alors qu’il n’a préalablement aucun passé social. C’est ainsi l’occasion pour nombre d’opportunistes de faire des petites carrières politiques bien rémunérées.

Difficile de comprendre ce simplisme dans l’émergence des candidats à la candidature. En général dans les organisations sociales,  on estime qu’il faut presque 10 ans pour former un responsable  national. En politique en quelques mois n’importe qui peut se parachuter et devenir responsable du pays.

Autre élément complexe de la problématique démocratique , la contradiction permanente entre le souci de plaire à l’électeur pour être élu et l’efficacité. Une contradiction permanente gérée par la démagogie et le mensonge. De ce point de vue, un minimum d’éthique serait nécessaire. Cette contradiction centrale alimente tous les rejets du politique.

Il faut aussi convenir que les médias et autres institutions intermédiaires ne jouent pas suffisamment leur rôle de filtre d’évaluation et d’animation du débat. Pas étonnant, la plupart des médias nationaux comme régionaux dépendent d’intérêts financiers qui soutiennent des candidats qui leur sont proches. Le pire est sans doute atteint avec la presse régionale et locale dont la ligne éditoriale se résume à la tribune des chats écrasés, des louanges éhontés en faveur des élus en place et à la reprise bête et méchante des informations des agences. Les autres médias ne sont guère non plus à la hauteur qu’il s’agisse de la télévision, des radios ou même d’Internet où la pire côtoie le meilleur surtout en plus avec l’anonymat qui encourage n’importe quelle dérive.

Pour tout dire, ce ne sont pas simplement les modalités d’élections qui sont à revoir ( vote obligatoire, vote par Internet etc.) mais le contenu même et les modalités de gestion d’une démocratie vivante. Ce n’est pas le référendum à tout faire qui réglera cette question complexe mais sans doute un long débat, profond, argumentée, large pour moderniser un système démocratique demeuré à l’èré néandertalienne.

 

Société- La « dérive morale du monde occidental » ?

Société- La « dérive morale du monde occidental » ?

Auteur influent de la droite religieuse américaine, le journaliste pointe dans son ouvrage le recul des libertés imposé, selon lui, par les intellectuels d’une gauche qui prêche une transformation radicale de la société.

 

Livre ( Analyse du Monde). 

 

Journaliste et essayiste, Rod Dreher est l’un des auteurs les plus influents de la droite religieuse aux Etats-Unis. Face à une Amérique qui se sécularise, il défend le « localisme », un repli des chrétiens au sein de communautés où ils peuvent vivre en accord avec leur foi. C’était le thème principal de son Pari bénédictin (Artège, 2017). L’ouvrage qu’il propose aujourd’hui va plus loin, il souhaite, dans un livre proche du manuel, aider ses lecteurs à « résister au mensonge ».

A l’ère de la contre-vérité, de la désinformation, ce que l’on définit comme faux en dit beaucoup sur nos opinions politiques. Pour Rod Dreher, si les démocraties libérales tournent au « soft totalitarisme », diffusant des mensonges auxquels chacun est sommé d’adhérer, c’est qu’elles sont sous l’emprise du « wokisme » de la gauche radicale, férocement engagée contre le racisme. Encore récemment, on disait « politiquement correct ».

Dreher définit le phénomène en « un ensemble de croyances progressistes incompatibles avec la plus élémentaire logique – et certainement avec le christianisme ». Ce système de pensée ne serait cependant pas diffusé principalement par l’Etat, mais davantage par les grandes entreprises des nouvelles technologies, rassemblées sous l’acronyme Gafam, dont les salariés ont généralement étudié à l’université. C’est là que prospère « une mouvance qui cherche à réduire l’histoire de l’Occident à son seul passé colonial et esclavagiste ».

Le recul de la liberté ne peut être mieux compris que par ceux qui ont déjà vécu une telle régression. Rod Dreher se rend pour cette raison dans les anciens pays du bloc communiste. Il y multiplie les rencontres, Kamila Bendova, la veuve de Vaclav Benda (1946-1999), intellectuel et dissident tchèque, signataire de la Charte 77 qui donna naissance au mouvement de dissidence dans la Tchécoslovaquie soviétique ; un historien slovaque ; une famille russe orthodoxe habitant Moscou…

Chaque fois, la mise en garde est la même : lentement, sans que vous vous en aperceviez, ce qui s’est passé dans mon pays est en train de se produire chez vous. Le même zèle révolutionnaire s’est emparé des esprits, les intellectuels prêchent une transformation radicale de la société et imposent leur vision du monde par l’intimidation. Hier, c’était le mariage gay, demain ce sera pire encore, estiment-ils.

La « dérive morale du monde occidental » ?

 La « dérive morale du monde occidental » ?

Auteur influent de la droite religieuse américaine, le journaliste pointe dans son ouvrage le recul des libertés imposé, selon lui, par les intellectuels d’une gauche qui prêche une transformation radicale de la société.

 

Livre ( Analyse du Monde). Journaliste et essayiste, Rod Dreher est l’un des auteurs les plus influents de la droite religieuse aux Etats-Unis. Face à une Amérique qui se sécularise, il défend le « localisme », un repli des chrétiens au sein de communautés où ils peuvent vivre en accord avec leur foi. C’était le thème principal de son Pari bénédictin (Artège, 2017). L’ouvrage qu’il propose aujourd’hui va plus loin, il souhaite, dans un livre proche du manuel, aider ses lecteurs à « résister au mensonge ».

A l’ère de la contre-vérité, de la désinformation, ce que l’on définit comme faux en dit beaucoup sur nos opinions politiques. Pour Rod Dreher, si les démocraties libérales tournent au « soft totalitarisme », diffusant des mensonges auxquels chacun est sommé d’adhérer, c’est qu’elles sont sous l’emprise du « wokisme » de la gauche radicale, férocement engagée contre le racisme. Encore récemment, on disait « politiquement correct ».

Dreher définit le phénomène en « un ensemble de croyances progressistes incompatibles avec la plus élémentaire logique – et certainement avec le christianisme ». Ce système de pensée ne serait cependant pas diffusé principalement par l’Etat, mais davantage par les grandes entreprises des nouvelles technologies, rassemblées sous l’acronyme Gafam, dont les salariés ont généralement étudié à l’université. C’est là que prospère « une mouvance qui cherche à réduire l’histoire de l’Occident à son seul passé colonial et esclavagiste ».

Le recul de la liberté ne peut être mieux compris que par ceux qui ont déjà vécu une telle régression. Rod Dreher se rend pour cette raison dans les anciens pays du bloc communiste. Il y multiplie les rencontres, Kamila Bendova, la veuve de Vaclav Benda (1946-1999), intellectuel et dissident tchèque, signataire de la Charte 77 qui donna naissance au mouvement de dissidence dans la Tchécoslovaquie soviétique ; un historien slovaque ; une famille russe orthodoxe habitant Moscou…

Chaque fois, la mise en garde est la même : lentement, sans que vous vous en aperceviez, ce qui s’est passé dans mon pays est en train de se produire chez vous. Le même zèle révolutionnaire s’est emparé des esprits, les intellectuels prêchent une transformation radicale de la société et imposent leur vision du monde par l’intimidation. Hier, c’était le mariage gay, demain ce sera pire encore, estiment-ils.

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