Le déficit 2014 va déraper à 4%
Finalement l’austérité n’aura servi à rien, ni à la croissance et à l’emploi, ni à la réduction des déficits. Le déficit public de la France risque en effet d’atteindre 4,0% du PIB fin 2014, voire davantage si la croissance économique est inférieure au 1% sur lequel table le gouvernement, estime la Cour des comptes. Le gouvernement prévoit quant à lui de ramener le déficit à 3,8% à la fin de l’année, après 4,3% fin 2013 ou 4,2% selon la récente réévaluation du produit intérieur brut par l’Insee. « L’objectif de déficit pour 2014, déjà révisé à la hausse en mai, risque d’être dépassé », a dit le premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, en présentant mardi le rapport annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques. « Le déficit des administrations publiques pourrait dépasser l’objectif de 3,8% et être proche de 4%, voire légèrement supérieur si la prévision de croissance du gouvernement ne se réalisait pas », a-t-il ajouté. Le Haut conseil des finances publiques (HCFP), présidé par Didier Migaud, a estimé la semaine dernière que « sans être hors d’atteinte, la prévision de croissance du gouvernement pour 2014 paraît désormais élevée ». La Cour des comptes estime en outre que des risques pèsent sur l’objectif de ramener le déficit à 3% du PIB fin 2015 comme le gouvernement s’est engagé à le faire devant ses partenaires européens. Elle souligne que l’objectif d’économies pour l’an prochain est très ambitieux et, plus globalement, que sur les 50 milliards d’euros d’économies prévus par le gouvernement entre 2015 et 2017, 30 milliards sont peu documentés et une partie est incertaine. La Cour souligne en effet que certaines relèvent d’institutions qui ne sont pas contrôlées par l’Etat comme les collectivités territoriales ou l’assurance chômage. Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, deuxième texte financier mettant en œuvre le pacte de responsabilité et de solidarité du gouvernement sera présenté mercredi en conseil des ministres. Combiné au projet de loi de finances rectificative présenté la semaine dernière, ces textes prévoient 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires pour cette année, qui visent à tenir l’objectif de ramener le déficit à 3,8%. Selon la Cour des comptes, « il subsiste, en plus du risque tenant aux hypothèses économiques, un risque à la baisse de 2 à 3 milliards d’euros sur la prévision d’élasticité des prélèvements obligatoires » qui pourrait se traduire par autant de recettes en moins pour l’Etat cette année. Quant à ses dépenses, le risque de dépassement est estimé à un à 3 milliards d’euros, qui devraient pouvoir être compensés par des annulations de crédits en fin d’année. En effet, le gouvernement disposera encore d’une réserve de précaution de plus de 6 milliards d’euros pour financer les dépenses non budgétées de l’Etat comme le coût des opérations militaires extérieures et l’aider à tenir ses dépenses. « Même s’ils ne laissent aucune marge de sécurité pour des dépenses imprévues, les nouveaux objectifs de dépenses de l’Etat peuvent et doivent être atteints », estime la Cour des comptes. Les dépenses de sécurité sociale devraient pouvoir être conformes aux prévisions, tandis que celles de l’assurance chômage pourraient être supérieures et que « les prévisions de croissance des dépenses des administrations publiques locales (…) paraissent encore sous-estimées, notamment la masse salariale et les prestations sociales ». La Cour des comptes souligne que même si les objectifs sont tenus, la dette publique dépassera le cap symbolique des 2.000 milliards d’euros à la fin de l’année. Pour l’année suivante, qui pâtirait en plus d’un éventuel dépassement de l’objectif de déficit en 2014, « les objectifs d’économies pour 2015 sont très ambitieux et les économies identifiées à ce jour dans le cadre de la modernisation de l’action publique ne sont pas à la hauteur de cet enjeu ». Et pour la suite, le HCFP « a aussi jugé optimiste le scénario macroéconomique pour 2016-2017″, souligne la Cour. « Si les prévisions du gouvernement s’avéraient surestimées, les recettes publiques seraient plus faibles qu’anticipé. » Elle explique qu’avec les 50 milliards d’euros d’économies programmés sur 2015-2017, la dépense publique devrait croître au total de 62 milliards d’euros entre 2014 et 2017. La Cour souligne que ces 50 milliards s’entendent par rapport à la croissance tendancielle des dépenses publiques estimée par le gouvernement qui « repose sur des méthodes et conventions diverses et fragiles ». Pour réaliser des économies, elle propose d’agir notamment sur la masse salariale publique, les dépenses d’assurance maladie et celles des collectivités territoriales. Concernant la masse salariale, elle estime que « la baisse des effectifs, en complément des efforts sur les rémunérations, constitue un levier porteur d’économies importantes » et qu’ »une hausse de la durée effective du travail dans les administrations pourrait permettre de diminuer les effectifs sans réduire la quantité et la qualité des services ». Pour les dépenses d’assurance maladie, elle souligne que la consommation française de médicaments est encore de 22% supérieure en volume à celle des pays voisins et cite notamment les dépenses d’analyses médicales et de transports.