Décret de Trump : inquiétudes de patrons américains
A peine arrivé à la Maison Blanche, Donald Trump durcit la politique d’immigration des Etats-Unis. Un décret signé par le président fraichement élu, le 27 janvier, interdit l’arrivée de ressortissants de sept pays musulmans (sauf les diplomates et les officiels), pendant trois mois. Ces pays sont l’Irak, l’Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et le Yémen. Le but de l’administration Trump serait d’empêcher l’entrée éventuelle de « terroristes islamiques radicaux » aux Etats-Unis. Quelques heures après la signature de ce décret, les ténors de la Silicon Valley, Facebook et Google, ont réagi. Sur son profil Facebook, Mark Zuckerberg a publié une réaction très personnelle, rappelant que sa femme, Priscilla Chan, est une fille d’immigrés :
« Mes arrière-grands-parents sont venus d’Allemagne, d’Autriche et de Pologne. Les parents de Priscilla étaient des réfugiés de Chine et du Vietnam. Les États-Unis sont une nation d’immigrants, et nous devrions en être fiers. Comme beaucoup d’entre vous, je suis préoccupé par l’impact des récentes ordonnances signées par le président Trump. Nous devons garder ce pays en sécurité, mais nous devrions le faire en nous concentrant sur les personnes qui constituent une menace. Le fait d’étendre l’application de la loi au-delà des personnes qui sont de véritables menaces rendrait tous les Américains moins en sécurité en détournant des ressources, alors que des millions de personnes sans papiers qui ne représentent pas une menace vivront dans la peur de l’expulsion. Nous devrions également garder nos portes ouvertes aux réfugiés et à ceux qui ont besoin d’aide. C’est ce que nous sommes. Si nous avions refusé les réfugiés il y a quelques décennies, la famille de Priscilla ne serait pas ici aujourd’hui. »
Quant à Google, il serait directement touché par le décret, étant donné qu’il emploie des personnes de différentes nationalités. Sundar Pichai, le PDG de la firme de Mountain View, aurait décidé de rappeler des employés partis à l’étranger, que ce soit pour des raisons personnelles ou professionnelles. Dans un mémo, il déplore également « le coût personnel de cet ordre exécutif » sur ses collègues. Dès que le décret a été signé, celui-ci serait immédiatement entré en application. De nombreux employés de Google concernés auraient pu regagner les USA rapidement. Mais selon Engadget, « tout le monde n’est pas parvenu à revenir à temps ». Selon un porte-parole de Google, la firme craint que ce durcissement de la politique d’immigration puisse « imposer des restrictions aux Googlers (ndlr, les employés de Google) et à leurs familles », en plus d’empêcher « de grands talents de venir aux Etats-Unis ». Parlant d’une « triste semaine », Reed Hastings, directeur général de Netflix, a jugé « le moment venu de (se) donner la main pour défendre les valeurs américaines de liberté et d’opportunité ». « Ce n’est pas une politique que nous soutenons », écrit quant à lui Tim Cook, son homologue d’Apple, dans une lettre adressée à ses employés. « Nous avons pris contact avec la Maison blanche pour expliquer ses effets néfastes pour nos collaborateurs et notre entreprise », poursuit-il, promettant d’aider les victimes du décret. Elon Musk, fondateur de Tesla et de SpaceX qui a récemment rencontré Donald Trump, estime sur Twitter que « l’interdiction générale du territoire pour les citoyens d’un certain nombre de pays majoritairement musulmans n’est pas le meilleur moyen de relever les défis » qui se présentent. « Ne pas autoriser (les ressortissants) de certains pays ou les réfugiés à venir en Amérique n’est pas correct et nous devons épauler ceux qui sont affectés », a pour sa part déclaré Brian Chesky, cofondateur et directeur général d’Airbnb, qui a promis d’héberger gratuitement les étrangers refoulés. Aaron Levie, patron de Box Inc, juge quant à lui le décret sur l’immigration « immoral et contraire à nos valeurs ». Alphabet, maison mère de Google, a rappelé d’urgence les membres de son personnel qui se trouvaient à l’étranger et a invité ceux qui pourraient être concernés par le décret à ne pas quitter les Etats-Unis. Une centaine d’employés en ont déjà été victimes, dit le directeur général, Sundar Pichai, dans un courrier électronique interne, selon un membre de la direction. Un employé iranien de Google disposant d’un permis de séjour permanent est parvenu à regagner les Etats-Unis juste avant la décision de Donald Trump, a-t-il ajouté. « Nous sommes inquiets des conséquences de ce décret et de toute proposition susceptible d’affecter les Googlers et leurs familles, ou qui pourrait empêcher de grands talents de venir aux Etats-Unis », dit l’entreprise dans un communiqué. Selon Brad Smith, président et directeur juridique de Microsoft, 76 employés de la firme viennent des sept pays concernés par le décret. « En tant qu’entreprise, Microsoft croit à une immigration équilibrée et hautement qualifiée (…) Nous croyons à l’importance de protéger les réfugiés reconnus comme tels et respectueux de la loi dont les vies peuvent être menacées par les procédures d’immigration », ajoute-t-il dans un courriel. Travis Kalanick, patron d’Uber Technologie, qui fait partie d’un comité de conseil du président, promet dans un communiqué de dédommager les chauffeurs qui ne pourraient pas regagner les Etats-Unis. Une douzaine serait selon lui dans ce cas. « Cette interdiction aura des conséquences pour beaucoup d’innocents – un problème que j’évoquerai vendredi quand j’irai à Washington pour la première réunion du groupe de conseillers business du président Trump », ajoute-t-il.