Les fournisseurs alternatifs d’électricité déboutée au conseil d’État
Jusque-là les fournisseurs alternatifs d’électricité s’étaient parfaitement accommodés des contrats d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) qui leur permettait de limiter le prix d’achat à UDF à 42 €/MWh. Un avantage certain alors que les prix de l’énergie sont le plus souvent supérieur à ce montant. Depuis le tassement économique et surtout depuis le Coronavirus les prix de l’électricité se sont écroulés atteignant même 37 euros: MWh le 17 mars. Du coup les distributeurs alternatifs veulent se désengager du contrat qui les tient avec EDF.
Un contrat très avantageux quand les prix mondiaux sont en hausse mais évidemment moins intéressant quand les prix mondiaux sont bas. En gros, les fournisseurs voudraient acheter à EDF davantage d’électricité et à bas prix quand les cours sont à un haut niveau, inversement il voudraient en acheter moins et à plus faible tarif quand les cours mondiaux sont bas. Notons que parmi ces fournisseurs alternatifs figurent des vendeurs d’électricité dite verte. En réalité, il n’existe pas d’électricité verte dans le réseau de distribution où tout est mélangé, donc la plupart du temps la très grosse partie vient du nucléaire. La vente d’électricité verte constitue donc une sorte d’escroquerie sauf quand elle peut être produite et consommée sur place, ce qui est très marginal. Notons qu’EDF est contrainte, elle, d’acheter de l’électricité verte à des tarifs prohibitifs. Une électricité souvent purement et simplement inutilisée et jetée compte-tenu de l’intermittence de cette fourniture.
L’ARENH (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique) est un dispositif permettant aux fournisseurs d’électricité concurrents d’EDF en France de racheter à l’électricien une partie de sa production nucléaire à un tarif de 42 €/MWh. Défini dans la loi NOME(1), ce mécanisme a été mis en place pour une période transitoire entre 2011 et 2025.
L’ARENH a été imaginé en 2009 par la Commission Champsaur dans le cadre de la libéralisation du marché électrique français. L’ouverture à la concurrence permet, depuis juillet 2007, à tous les consommateurs d’électricité de choisir leur fournisseur. Il a été considéré qu’EDF, en tant qu’exploitant de l’ensemble du parc nucléaire français (58 réacteurs) déjà « amorti », disposait d’un avantage par rapport à la concurrence.
Pour partager la « rente nucléaire » et assurer une juste concurrence sur le marché de l’électricité, la solution retenue a été de permettre aux fournisseurs alternatifs de racheter à EDF une partie de sa production nucléaire au tarif ARENH. Celui-ci a été fixé en avril 2011 par le gouvernement à 40 euros par MWh entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011 et à 42 euros par MWh après le 1er janvier 2012. Ce prix est depuis inchangé alors qu’il était initialement prévu de déterminer ultérieurement les nouvelles modalités de calcul de l’ARENH.
Le code de l’énergie prévoit initialement que la demande totale d’électricité des fournisseurs dans le cadre de l’ARENH ne peut pas excéder 100 TWh par an (hors fourniture au titre de pertes par les gestionnaires de réseaux), soit près d’un quart de la production nucléaire d’EDF en France.
Dans le contexte de l’épidémie du nouveau coronavirus, des fournisseurs d’électricité, dont Total selon des sources, ont réclamé l’activation de la clause de force majeure dans leurs contrats d’approvisionnement auprès des centrales nucléaires d’EDF.Ces fournisseurs dits alternatifs estiment qu’avec la crise sanitaire, les prix de l’électricité sont tombés bien en deçà des tarifs prévus dans les contrats d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh).
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) avait déjà indiqué qu’elle n’était pas favorable au déclenchement de la clause de force majeure.
Dans une décision rendue vendredi, la plus haute juridiction administrative français a rejeté le recours contre la décision de la CRE, tout en indiquant que rien ne s’opposait à ce que les fournisseurs et EDF poursuivent les négociations afin d’alléger le fardeau des entreprises les plus petites et les plus vulnérables en particulier.