Affaire de Rugy : » des repas professionnels, sur quels critères ? » (Anticor)
À juste titre l’association anti corruption Anticor s’interroge à propos de l’enquête de l’Assemblée nationale qui considérerait que les repas fastueux de Rugy étaient de nature professionnelle. Mais cette fameuse enquête n’indique nullement qu’elle était l’identité et la légitimité de ces invités. Tout cela donne l’impression qu’on a obtenu la démission de de Rugy en lui promettant de passer un coup d’éponge sur ses frasques. « On conclut à des repas professionnels mais en fonction de quels critères ? Le problème de cette affaire, c’est qu’il n’y aucun critère, il n’y a pas de règles très claires », a répliqué vendredi 19 juillet sur franceinfo, Jean-Christophe Picard, président d’Anticor, après les premiers éléments de l’enquête de l’Assemblée nationale sur les dîners polémiques de François de Rugy. Selon une source proche de l’enquête, il s’agit bien de dîners professionnels. L’ensemble des résultats seront connu mardi.
Franceinfo : Que pensez-vous de cette première conclusion de l’enquête de l’Assemblée nationale qui conclut au caractère professionnel des repas donnés par François de Rugy ?
Jean-Christophe Picard : On conclut à des repas professionnels mais en fonction de quels critères ? Le problème de cette affaire, c’est qu’il n’y a aucun critère, il n’y a pas de règles très claires. Ce qui est écrit dans le règlement de l’Assemblée, c’est qu’il y a une enveloppe pour les frais de réception du président de l’Assemblée nationale, on n’encadre rien, il n’y a pas de nombre de repas maximum, de nombre de convives maximum, il n’y a pas de plafond pour les bouteilles de vin, il n’y a pas de procédure de traçabilité de l’objet des repas ou de l’identité des convives. Au-delà du caractère personnel et professionnel qui est très compliqué à établir, on peut quand même encadrer le coût des mets. On peut peut-être plafonner le coût des bouteilles, le nombre de repas et le nombre de convives. On peut avoir des règles qui encadrent tout ça, pour avoir des dépenses raisonnables. Le gros souci, c’est qu’aujourd’hui, il n’y a rien, il n’y aucune règle déontologique qui encadre tout ça.
Cette enquête de l’Assemblée nationale a statué sur une situation qui est très floue au départ ?
Les règles sont très floues, c’est d’ailleurs pour ça qu’Anticor n’a pas porté plainte, ni fait de signalement au procureur. On estimait que c’était impossible de démontrer le caractère complètement privé d’un repas, en l’état des précisions déontologiques en vigueur. Je ne crois pas que c’est cette histoire de repas qui ait déclenché la démission de François de Rugy. Ce qui pose vraiment un gros problème, c’est cette affaire d’IRFM. Il a utilisé ses frais de mandat pour financer son parti, il a obtenu des déductions fiscales grâce à ce dispositif, alors que c’était clairement interdit. Le Conseil constitutionnel l’avait rappelé en 2013. C’est une règle clairement violée. A mon avis, ça a été la goutte d’eau qui a provoqué la démission. C’était un peu compliqué pour lui d’argumenter.
Faut-il que la Cour des comptes soit associée à cet encadrement du train de vie du président de l’Assemblée nationale ?
Il y a quand même une déontologue, trois questeurs, une commission spéciale, s’ils n’arrivent pas à contrôler ces dépenses, c’est inquiétant. Soit, on supprime tout ça et on crée autre chose, soit on demande aux gens à qui dont c’est le job qui sont rémunérés et bien rémunérés pour ça, les questeurs sont parmi les postes les mieux rémunérés de la République, de faire leur travail. Il faut que chacun prenne ses responsabilités. Il faut remettre à plat, repréciser les règles déontologiques, mettre en place un contrôle effectif. Que ceux qui font la loi arrivent à contrôler leurs propres dépenses. Ce serait un bon début pour crédibiliser leurs fonctions. Lorsque le pays traverse une mauvaise passe financière, lorsqu’on demande aux Français de se serrer la ceinture, c’est la moindre des choses de faire attention aux dépenses. Est-ce qu’on est obligés de servir du homard, des bouteilles à 600 euros. Je pense qu’on peut avoir des dépenses plus raisonnables par rapport aux efforts qu’on demande aux Français.
De Rugy : comment ne pas payer d’impôts avec un revenu de plus de 11 000 euros ?
De Rugy : comment ne pas payer d’impôts avec un revenu de plus de 11 000 euros ?
Comment ne pas payer d’impôt avec un revenu de plus de 11 000 €. C’est la question qui se pose puisque le ministre de l’écologie a réussi à ne pas être imposable en 2015 et cela paraît-il en toute légalité. Or de Rugy touche pas moins de 11.552 euros par mois : 7.209,74 euros bruts chaque mois, plus la jolie indemnité de frais de mandat qui s’élève à 5.770 euros, que chaque député peut dépenser comme il le souhaite, excepté pour acheter un bien immobilier et pour participer à une campagne électorale. Il faut donc que disposer d’un très compétent conseiller fiscal pour parvenir à éviter l’imposition. Nombre de français dont le salaire représente 15 à 20 % du revenu du ministre de l’écologie sont pourtant condamnés à payer cet impôt sur le revenu. On objectera sans doute que nombreux de dirigeants de grandes entreprises sollicitent aussi l’évitement fiscal par exemple en se faisant rémunérer par des filiales à l’étranger dont la fiscalité est faible voir nulle. Les sommes sont à leur considérables. Cela aussi en toute légalité. Cela vaut pour les individus chefs d’entreprise mais aussi pour l’imposition des sociétés. La combine la plus légale consiste à externaliser les profits dans des filiales situées dans des pays à très faible fiscalité ou sans fiscalité du tout et inversement à internaliser les pertes dans les sociétés en sur facturant les filiales françaises. Il existe bien d’autres mécanismes. La fraude légale ou pas porterait sur une somme de l’ordre de 50 milliards. Une somme en réalité très approximative car par définition on ne dispose pas de chiffres pertinents dans ce domaine. Bien sûr les sommes économisées par de Rugy en 2015 n’ont rien à voir avec les fraudes qui viennent d’être évoquées. Pour autant c’est parce qu’elle présente un caractère d’exemplarité que cette affaire choque. Cela d’autant plus que Macron et de Rugy en particulier dés le début du mandat ont affirmé le principe de la transparence et de la rigueur. Une rigueur qu’on applique aux autres mais pas à soi-même. En fait il n’y rien il n’y a rien de nouveau sous le soleil mais aujourd’hui compte tenu du contexte d’une part et des millions d’observateurs des réseaux sociaux les petites combines sont de plus en plus difficile à dissimuler.