Retraites : Une réforme précipitée et mal évaluée (Raymond Soubie, Président d’Alexio )
Raymond Soubie, Président d’Alexio et ancien conseiller social de Nicolas Sarkozy, a estimé lors du club de l’économie du monde du 19 décembre que la réforme avait été mal préparée et qu’on avait surtout mal évalué ses conséquences.
« Depuis vingt ans, toutes les réformes des retraites ont eu les mêmes objectifs et les mêmes conséquences sociales. Le premier objectif consiste à trouver les ressources nécessaires à l’équilibre financier des régimes. La réforme de 2002 a porté sur l’allongement de la cotisation. Celle de 2010 a reporté l’âge de départ de 60 à 62 ans, la réforme de Marisol Touraine, en 2013, toujours en cours, a été un allongement de la durée de cotisation jusqu’en 2035. L’autre objectif a été de rapprocher progressivement les régimes de retraite entre eux.
Aujourd’hui il y a deux sujets. L’un était voulu, l’autre ne l’était pas. Durant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a été séduit par la réforme systémique portée par quelques économistes. Elle présentait le mérite d’être universelle et d’une certaine manière hégélienne. Elle portait en elle la fin de l’histoire et promettait le basculement dans un système idéal. Emmanuel Macron a eu un coup de foudre intellectuel. Entre parenthèses, la CFDT a eu ce même coup de foudre. Et, déjà, en 2010, son secrétaire général, François Chérèque, prédécesseur de Laurent Berger, a défendu devant moi ce système.
La réforme a été très étudiée par le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye, mais il n’y a pas eu d’analyse suffisamment précise des conséquences sur les différentes catégories professionnelles. Le gouvernement a été précipité dans ce sujet sans l’avoir préparé. Dorénavant, sa priorité absolue est d’arrêter le mouvement à la RATP et la SNCF. L’âge pivot est un sujet intéressant, mais ce n’est pas là que se joue le conflit.
Le mouvement n’est pas parti des syndicats, mais de la base. Le problème de Laurent Escure, secrétaire général de l’UNSA, comme de Laurent Berger, est de savoir jusqu’où ils peuvent s’engager. Ils ne sont pas certains que les bases l’acceptent. Certains prétendent que les négociations sont à Matignon. C’est inexact. Elles se passent entre les dirigeants des entreprises et les syndicats de la SNCF et de la RATP. C’est le cœur du sujet. »