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« Hyperloop, une chimère,  » (Yves Crozet)

« Hyperloop,  une chimère,  » (Yves Crozet)

INTERVIEW

Yves Crozet, chercheur au Laboratoire Aménagement Economie Transport à Sciences Po Lyon, sans doute l’un des meilleurs experts en France, s’interroge sur l’utilité et la faisabilité de Hyperloop.  

 

. Est-il réaliste d’envisager un voyage à bord d’Hyperloop dans la prochaine décennie? 
Ces prévisions sont extrêmement optimistes. Les tests actuels s’effectuent sur des distances d’à peine un kilomètre… Et il y a beaucoup d’obstacles techniques à surmonter, par exemple celui de l’étanchéité parfaite des tubes (les navettes sont censées se mouvoir dans des tunnels vides d’air, NDLR). Il y a 10 ans, des ingénieurs suisses ont dû abandonner un précédent projet de train lui aussi à sustentation magnétique, Swissmetro, devant les échecs techniques. Plus globalement, la question des infrastructures toute entière reste une inconnue : comment construire les pylônes et les tubes en un laps de temps si court? Il a fallu 7 ans pour construire la ligne de TGV Tours-Bordeaux, et il ne s’agissait en comparaison que de remblais et de rails… Le projet Hyperloop est encore hors d’atteinte.

 

Et à plus long terme, Hyperloop est-il un investissement intéressant en France? 
A l’origine, l’idée d’un Hyperloop a été suggérée par Elon Musk pour concurrencer le projet d’une ligne de train à grande vitesse en Californie, dont le coût estimé était de dizaines de milliards de dollars. Musk a trouvé cela délirant, beaucoup trop cher. Il a proposé une alternative deux fois moins chère et deux fois plus rapide, forcément intrigant et attractif. Aujourd’hui, en France, les termes ne sont pas du tout les mêmes, que ce soit en terme de vitesse ou de coûts. En gros, le prix de base ne change pas mais la vitesse de l’Hyperloop a été divisée par deux. Une note a été présentée à l’Assemblée nationale sur le sujet, dans laquelle on évoque une vitesse d’environ 600 km/h, loin du projet initial de Musk qui ne promettait rien de moins que la vitesse du son, 1200 km/h. Prenons l’exemple d’une hypothétique liaison Lyon-Paris : à 600 km/h on gagnerait à peine une heure par rapport aux deux heures actuelles de trajet. Hyperloop est au mieux une chimère, au pire une escroquerie.

Même réduite de moitié, la vitesse d’Hyperloop reste significative…
La vitesse n’est pas forcément un progrès. Pour qu’elle marque un mieux dans la mobilité, il faut qu’elle puisse être accessible au plus grand nombre possible, comme l’automobile et le TGV. Quand un mode de transport ne peut pas être démocratisé, il n’a aucune chance de fonctionner. En France, un certain nombre de projets passés en témoignent : on peut prendre l’exemple de l’aérotrain, abandonné avant même d’être en service, puis du Concorde, qui n’a volé que quelques années… Les deux avaient en commun de battre des records de vitesse, mais avec un nombre de voyageurs très limité à bord. Et alors qu’une rame de TGV transporte environ 1.000 passagers, une navette Hyperloop en compterait au maximum une cinquantaine… Ce qui compte à la fin pour la collectivité, ce n’est pas la vitesse, c’est le débit.

 

En multipliant les départs en Hyperloop ne peut-on pas obtenir un nombre de passagers transportés équivalents? 
Un TGV peut transporter 1.000 voyageurs, et un train peut passer toutes les trois ou quatre minutes. C’est une question de sécurité, pour que dans le cas où un problème survient sur le trajet, la rame qui suit ait le temps de s’arrêter. Et à l’arrivée, il faut bien un quai où les usagers puissent débarquer. Même en réduisant l’intervalle de passage à dix secondes, les navettes auraient un débit de voyageurs inférieur à celui potentiel des TGV.

 

Notre-Dame-des-Landes- le mensonge : « Une opération urbaine, pas aéroportuaire » (Yves Crozet)

 

Alors que les experts transport (souvent autoproclamés) se succèdent pour expliquer que annulation de NNDL est une grave erreur, le discret directeur d’un des meilleurs laboratoires d’expertise scientifique (LETT à Lyon) rappelait que NDDL n’est pas une opération aéroportuaire mais urbaine.

 

 Construit-on aujourd’hui beaucoup d’aéroports?

Non, c’est rare. Mais à la différence d’une ligne TGV, par exemple, ce type de projet n’a pas besoin de larges subventions publiques. Les privés savent qu’ils rentreront dans leurs frais.

Un aéroport est-il donc toujours rentable?

Oui. Les taxes aéroportuaires paient la sécurité, les tours de contrôle, le ravitaillement des avions, etc. Et les recettes non aéronautiques, celles des duty free et des parkings, sont très lucratives.

La collectivité met quand même la main à la poche…

Mais elle récupérera l’emprise de Nantes-Atlantique, en zone urbaine. En termes de plus-value foncière, c’est une très bonne affaire. Cet équipement est essentiellement une opération urbaine, pas une opération aéroportuaire.

Et que faites-vous de la saturation à venir de Nantes-Atlantique, dont parlent les défenseurs de Notre-Dame-des-Landes?

Avec une seule piste, l’aéroport de Manchester accueille plus de 15 millions de voyageurs par an, Genève ou Nice environ 10 millions… Nantes-Atlantique, qui en comptera bientôt 4, pourrait sans doute, au prix de lourds travaux, doubler sa capacité dans les quinze ans. A mon sens, la question essentielle n’est pas celle de la capacité.

Pourquoi les promoteurs du transfert la mettent-ils alors en avant?

Ils n’ont aucune raison d’être de bonne foi. Sur un tel projet, l’argument technique est plus facile à vendre que l’argument politique. Il est difficile d’expliquer qu’on déplace l’aéroport parce qu’il gêne les projets des élus. Cet enjeu n’en est pas moins valable. Nantes va gagner des habitants : repousser son aéroport dans une zone qui freinera moins son développement n’est pas stupide. C’est une bonne raison d’effectuer le transfert…

Existe-t-il une bonne raison de ne pas l’effectuer ?

L’importance du coût des infrastructures qui entourent l’aéroport, éventuellement. Mais encore une fois, l’ancien aéroport est récupéré… Si la priorité est le développement de Nantes, Notre-Dame-des-Landes n’est qu’un sous-produit, qui doit être globalement financé par le projet principal…

Y compris au détriment de 1 600 hectares de terres agricoles?

C’est anecdotique. Ce qu’il faut comparer, c’est la valeur ajoutée des différentes activités. Si je trouve du pétrole dans mon jardin où je produisais cinq kilos de tomates, le choix sera vite fait.

Existe-t-il une mauvaise raison de ne pas construire cet aéroport?

Oui : celle qui stigmatise le transport aérien. L’avion a une zone de pertinence avec laquelle le TGV ne rivalise pas. Le potentiel de développement est très fort. Les écologistes ont raison de vouloir faire payer au transport aérien des taxes sur le carburant. Mais quand bien même le prix du billet augmenterait de 30 % maximum, cela ne dissuaderait pas grand-monde.

Un nouvel aéroport dynamiserait-il l’Ouest en termes d’emplois?

Pas forcément, les infrastructures de transport n’apportent pas, en général, de surcroît de croissance économique… Les élus ont beau le clamer, on assiste plutôt à un déménagement d’emplois et à des transferts d’activité. C’est très largement un jeu à somme nulle.

De bonnes infrastructures de transport ne favorisent-elles pas la croissance?

Non, sauf marginalement. L’Espagne a un réseau TGV plus étendu que le réseau français, mais le trafic représente un quart du seul trafic entre Paris et Lyon. Et elle ne parvient pas à amortir ses investissements…

 

Notre-Dame-des-Landes: « Une opération urbaine, pas aéroportuaire » (Yves Crozet)

 

Notre-Dame-des-Landes: « Une opération urbaine, pas aéroportuaire » (Yves Crozet)

Pour Yves Crozet, directeur du Laboratoire d’aménagement et économie des transports (un des meilleurs centres de recherche en transport et aménagement) expliquait dans une interview à l’Express  que Notre dames des Landes était essentiellement uen opération d’urbanisme.

Construit-on aujourd’hui beaucoup d’aéroports?

Non, c’est rare. Mais à la différence d’une ligne TGV, par exemple, ce type de projet n’a pas besoin de larges subventions publiques. Les privés savent qu’ils rentreront dans leurs frais.

Un aéroport est-il donc toujours rentable?

Oui. Les taxes aéroportuaires paient la sécurité, les tours de contrôle, le ravitaillement des avions, etc. Et les recettes non aéronautiques, celles des duty free et des parkings, sont  très lucratives.

La collectivité met quand même la main à la poche…

Mais elle récupérera l’emprise de Nantes-Atlantique, en zone urbaine. En termes de plus-value foncière, c’est une très bonne affaire. Cet équipement est essentiellement une opération urbaine, pas une opération aéroportuaire.

Et que faites-vous de la saturation à venir de Nantes-Atlantique, dont parlent les défenseurs de Notre-Dame-des-Landes?

Avec une seule piste, l’aéroport de Manchester accueille plus de 15 millions de voyageurs par an, Genève ou Nice environ 10 millions… Nantes-Atlantique, qui en comptera bientôt 4, pourrait sans doute, au prix de lourds travaux, doubler sa capacité dans les quinze ans. A mon sens, la question essentielle n’est pas celle de la capacité.

Pourquoi les promoteurs du transfert la mettent-ils alors en avant?

Ils n’ont aucune raison d’être de bonne foi. Sur un tel projet, l’argument technique est plus facile à vendre que l’argument politique. Il est difficile d’expliquer qu’on déplace l’aéroport parce qu’il gêne les projets des élus. Cet enjeu n’en est pas moins pour certains de s valable. Nantes va gagner des habitants : repousser son aéroport dans une zone qui freinera moins son développement n’est pas stupide. C’est une bonne raison d’effectuer le transfert…

Existe-t-il une bonne raison de ne pas l’effectuer ?

L’importance du coût des infrastructures qui entourent l’aéroport, éventuellement. Mais encore une fois, l’ancien aéroport est récupéré… Si la priorité est le développement de Nantes, Notre-Dame-des-Landes n’est qu’un sous-produit, qui doit être globalement financé par le projet principal…

Y compris au détriment de 1 600 hectares de terres agricoles?

C’est anecdotique. Ce qu’il faut comparer, c’est la valeur ajoutée des différentes activités. Si je trouve du pétrole dans mon jardin où je produisais cinq kilos de tomates, le choix sera vite fait.

Existe-t-il une mauvaise raison de ne pas construire cet aéroport?

Oui : celle qui stigmatise le transport aérien. L’avion a une zone de pertinence avec laquelle le TGV ne rivalise pas. Le potentiel de développement est très fort. Les écologistes ont raison de vouloir faire payer au transport aérien des taxes sur le carburant. Mais quand bien même le prix du billet augmenterait de 30 % maximum, cela ne dissuaderait pas grand-monde.

Un nouvel aéroport dynamiserait-il l’Ouest en termes d’emplois?

Pas forcément, les infrastructures de transport n’apportent pas, en général, de surcroît de croissance économique… Les élus ont beau le clamer, on assiste plutôt à un déménagement d’emplois et à des transferts d’activité. C’est très largement un jeu à somme nulle.

De bonnes infrastructures de transport ne favorisent-elles pas la croissance?

Non, sauf marginalement. L’Espagne a un réseau TGV plus étendu que le réseau français, mais le trafic représente un quart du seul trafic entre Paris et Lyon. Et elle ne parvient pas à amortir ses investissements…

 




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