Corse : Quand la société civile se lève contre la mafia
L’ancien leader nationaliste Leo Battesti décrit dans son livre l’emprise, encore souvent niée, de la violence exercée par un pouvoir mafieux sur le territoire insulaire français et la naissance des mouvements citoyens qui la rejettent.( dans Le Monde)
Longtemps, en Corse, l’idée de l’existence d’une mafia a été rejetée ou niée. Il a fallu attendre l’automne 2019 pour que naissent deux collectifs antimafia, dont celui auquel appartient M. Battesti. Issue de la société civile, cette parole publique est venue valider la réalité d’une violence organisée ayant pris en otage une population et un bout de territoire français. L’Etat, lui, en tant qu’institution, ne prend toujours pas cette emprise mafieuse pour un fait. Si quelques hiérarques magistrats ou policiers assument publiquement l’existence d’une mafia insulaire, d’autres la démentent.
L’auteur décrit la genèse de ce rassemblement de citoyens aux profils très divers qui se lèvent contre un pouvoir mafieux dont la seule légitimité est la violence. Il relate les difficultés de faire vivre en Corse un tel mouvement et répond aux attaques dont il est lui-même l’objet sur ces liens avec certains personnages controversés. Il évoque les dossiers sensibles liés aux marchés publics, au foncier, pour montrer comment la mafia corse fait pression sur l’économie et la démocratie locale.
Mais l’originalité de ce texte ne réside pas tant dans la description de la mafia, qui n’est que survolée, l’auteur reconnaissant qu’il n’est « ni journaliste ni historien » : elle tient surtout au discours qu’il développe sur la place de la violence en Corse. Fort de son expérience de la prison et de militant clandestin rompu aux actions armées, il assure que la dérive mortifère du mouvement nationaliste a favorisé l’émergence d’un système mafieux sur l’île. « L’avènement de la loi des armes, écrit-il, était le prélude au règne de la voyoucratie et la voie était dégagée pour la mafia au sein de la société corse. »