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Russie: De très graves conséquences des sanctions (Coface)

Russie: De très graves conséquences des sanctions  (Coface)

 Dans un entretien à La Tribune, Bruno De Moura Fernandes, responsable de la recherche macroéconomique chez Coface, décrypte l’impact des sanctions occidentales contre la Russie sur l’économie russe mais aussi mondiale : inflation, banques, énergie, tensions sociales…, la guerre en Ukraine pourrait affecter durablement l’économie mondiale selon lui.

 

Bruno de Moura Fernandes économiste chez Coface. Le spécialiste de l’assurance-crédit alerte sur les risques économiques et sociaux de cette guerre d’ampleur. (Crédits : DR)

LA TRIBUNE-  »La Russie est en train d’être débranchée progressivement du reste du monde, notamment sur le plan économique, et cela va avoir un impact extrêmement lourd », a affirmé le secrétaire d’Etat aux affaires européennes, Clément Beaune en début de semaine. Quel pourrait être l’impact global des sanctions décidées par les puissances occidentales ces derniers jours sur l’économie russe et l’économie mondiale ?

BRUNO DE MOURA DE FERNANDES- Il est difficile à ce stade de chiffrer l’impact global sur le produit intérieur brut (PIB) russe car les sanctions sont encore en train d’évoluer et prennent diverses formes mais l’économie russe sera fortement impactée. L’Europe, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, le Japon ont décidé de bloquer les réserves de la Banque centrale russe. C’est l’une des mesures phares car elle réduit les possibilités de la banque centrale russe de limiter l’impact des sanctions sur l’économie russe.

Cette guerre aura également un impact sur l’économie mondiale. Certains pays ont annoncé qu’ils arrêteraient les exportations de certains biens, notamment technologiques vers la Russie. Ces pays étant importateurs de produits intermédiaires, leurs fournisseurs seront également affectés. Les chaînes de production étant mondiales, les effets se répercutent in fine dans un grand nombre de pays.

Enfin concernant les matières premières, nous voyons déjà un renchérissement des prix et donc du coût de production pour les entreprises. Les cours du gaz et de l’énergie en général ont augmenté. La hausse du prix des céréales affecte à la fois le consommateur et les éleveurs ou encore ceux qui font de la transformation. L’inflation en Europe s’accélère notamment en raison de la hausse des prix des matières premières. Cette hausse de l’inflation entraîne une baisse du pouvoir d’achat pour les consommateurs et une moindre consommation. Enfin, l’incertitude actuelle peut avoir des effets sur l’investissement. Chaque nouvelle sanction aura des répercussions sur l’activité alors même que pour l’instant, la Russie n’a pas encore annoncé de mesures de réciprocité.

 

Le rouble s’est effondré ce lundi et la Banque centrale russe a augmenté son taux directeur de 10 points. La Banque centrale russe a-t-elle encore des munitions pour faire face à l’inflation galopante ? La Russie peut-elle compenser les dégâts infligés par ces mesures ?

La situation est très compliquée pour la Banque centrale russe. Elle dispose d’importantes réserves en devises étrangères de l’ordre de 640 milliards de dollars mais selon les estimations de l’Union européenne, près de la moitié de ces réserves sont à l’étranger et donc actuellement bloquées. Cela limite leurs utilisations. En outre, une grande partie des réserves repose sur l’or qui n’est pas très liquide et dont une vente massive risquerait de faire chuter le cours. Une interrogation concerne aussi l’appui de la Chine : Pékin va-t-il fournir des liquidités à la Russie ? La Banque centrale russe a deux options : la première constitue à relever les taux ce qu’elle a fait. La deuxième solution pourrait être de contrôler les capitaux mais cela peut affecter lourdement l’activité.

 

L’exclusion du système de messagerie Swift de certaines banques russes a déjà plongé plusieurs établissements dans la faillite en Europe. Le système bancaire européen est-il grandement exposé en Russie ?

Certaines banques européennes pourraient pâtir de la situation car elles ont soit des filiales en local soit des expositions non négligeables. Mais le système européen est solide et à ce stade nous ne voyons pas le risque financier comme un des risques les plus importants pour l’Europe.

 

Sur le plan énergétique, l’Europe reste très dépendante du gaz russe. Cela ne pourrait-il pas limiter les conséquences des sanctions surtout que l’énergie bénéficie de certaines exemptions sur les sanctions ?

L’enjeu pour les Etats européens est de sanctionner efficacement la Russie sans se mettre trop en difficulté notamment sur les problématiques énergétiques. La Russie représente environ 50% des importations de gaz de l’Allemagne et de l’Italie. Il faut donc éviter une envolée des prix du gaz ou encore des problèmes d’approvisionnement. Toute la difficulté est de trouver un juste milieu sachant que la Russie devrait avoir intérêt à continuer d’exporter du gaz ou du pétrole pour enregistrer des entrées de devises.

 

Du côté européen, les milieux économiques et financiers s’inquiètent d’un prolongement et d’une possible intensification du conflit en Ukraine. Quelles pourraient être les répercussions d’une telle guerre à court terme sur l’économie européenne ? Face à toutes ces incertitudes, que peut faire la Banque centrale européenne (BCE) ?

Lors de la réunion du 10 mars prochain, la BCE fera face à un dilemme important. Faut-il remonter les taux et retirer le soutien monétaire afin de freiner une inflation accentuée par la hausse des prix des matières premières si les marchés sont extrêmement tendus et l’activité marque le pas ? Les marchés anticipent désormais une position attentiste de la BCE même s’il y a différents courants de pensée au sein des gouverneurs. La BCE pourrait décider de soutenir l’économie et de garantir une stabilité financière en maintenant un programme d’achats d’actifs et en ne remontant pas les taux rapidement. Il faudra rester attentif et observer comment évolue la situation dans les prochains jours.

Dans votre dernier baromètre dévoilé juste avant le déclenchement du conflit, vous évoquez un prolongement des perturbations sur les chaînes d’approvisionnement. Dans quelle mesure ce conflit risque-t-il d’amplifier ces difficultés en zone euro ?

Dans ce baromètre, nous tablions sur un prolongement pendant encore quelques mois des difficultés d’approvisionnement mais nous reconnaissions que ces difficultés avaient atteint un pic. Elles auraient dû diminuer progressivement pour se résorber d’ici à la fin de l’année dans la plupart des secteurs. Avec ce conflit, certains flux vers ou depuis la Russie vont être stoppés ou contrôlés. La Russie occupe une place stratégique mondiale dans la production de certains métaux comme le palladium, l’aluminium, le nickel ou encore le cuivre. On peut donc désormais s’attendre à plus de tensions sur ces métaux. De manière générale, cette situation va aggraver les difficultés sur les chaînes d’approvisionnement et avoir des répercussions négatives sur l’économie mondiale.

 

Dans le baromètre, vous rappelez également qu’il y a de vrais risques de tensions sociales dans le contexte de la pandémie. Comment ce conflit peut-il exacerber ces pressions sociales ?

La pandémie liée au Covid a exacerbé les pressions sociales en générant des inégalités et des frustrations. La hausse de l’inflation liée à la situation russo-ukrainienne va accentuer les tensions. Rappelons que la Russie et l’Ukraine sont des producteurs importants de céréales et que des fortes pressions sociales ont déjà eu lieu par exemple au Kenya ou au Malawi en raison de la hausse des prix de l’alimentation. Plus les prix de l’énergie et de l’alimentaire sont affectés, plus le risque des tensions sociales est important car cela entraîne mécaniquement une hausse de la pauvreté et des inégalités.

La Banque de France minimise les conséquences de la crise économique

La Banque de France minimise les conséquences de la crise économique

 

 

Comme le plus souvent, la Banque de France minimise les conséquences de la crise en Ukraine et de l’envolée de l’inflation en France. Pour schématiser la Banque de France envisage une perte de croissance de 1 % seulement. Au lieu des 4 % espérés,on serait autour de 3% .

En fait,  il ne s’agit  pas vraiment de prévisions mais plutôt de scénarios qui pourraient être loin de la vérité. Le premier scénario, dit « conventionnel », qui prend pour hypothèse un prix du baril de brent à 93 dollars en moyenne sur l’année et un prix du mégawattheure de gaz de 102 euros, table sur une croissance du PIB en moyenne annuelle de 3,4 % en 2022. Le second, dit « dégradé », avec un prix moyen du baril de brent à 119 dollars et un prix du gaz à 181 euros, affiche une croissance de 2,8 % sur l’année.

La vérité sans doute c’est que la croissance va surtout être affectée par l’envol de l’inflation qui pourrait dépasser 5 %. Un scénario que minimise la Banque de France pour n’avoir pas à recommander une réévaluation des revenus notamment des salaires, des pensions et de l’épargne.Au-delà de la croissance, l’inflation va, elle, grimper en 2022. Dans le meilleur des cas, elle devrait avoisiner les 3,7 % en moyenne sur l’année et, dans le pire, 4,4 %.

Le seul problème c’est que ces perspectives d’inflation ne tiennent pas compte d’une part de la hausse des prix déjà enregistrés aussi bien pour les produits industriels que pour l’alimentation. Des perspectives qui ne tiennent pas compte du faite que les dépenses carburant et chauffage risque d’augmenter de près de 50 % !

 

Il ne s’agit donc pas de projections ou de prospective mais de scénarios qui régulièrement seront révisés à la hausse pour l’inflation et la croissance.

Quelles conséquences économiques de la guerre en Ukraine pour l’Europe

Quelles conséquences  économiques de la guerre en Ukraine pour l’Europe 

L‘aspect le plus caractéristique de cette crise pourrait bien être une envolée de l’inflation du fait d’un choc d’offre.

La guerre menée par Vladimir Poutine contre l’Ukraine et la réponse apportée par l’Europe et l’Amérique sous forme de sanctions redistribuent les cartes sur le plan économique pour l’ensemble des pays européens. Par Marc Guyot et Radu Vranceanu, Professeurs à l’ESSEC.( dans la Tribune) 

L’invasion de l’Ukraine par la Russie est un acte de guerre d’une violence inouïe dont nul ne peut encore prédire la durée. Notre propos est de nous cantonner strictement à notre domaine de compétence et de ne traiter que les perspectives macroéconomiques de cette guerre pour l’économie européenne.

En premier lieu, cette guerre va profondément modifier les vieux arbitrages budgétaires en termes de dépenses militaires dans de nombreux pays européens. En effet, la relative faiblesse des forces armées des pays européens a été mise en lumière ainsi que le coût géopolitique de cette faiblesse. Le réarmement général est à l’ordre du jour, tout comme la réindustrialisation était une priorité en 2020. En particulier, l’Allemagne a d’ores et déjà annoncé un objectif budgétaire de dépenses militaires de l’ordre de 2% de son PIB, comparé à 1,2% par an dans la décennie 2010-2020 (Données SIPRI). Ce passage à une économie de préparation à la guerre renforce le poids de l’État dans l’économie via la redirection de ressources directement vers la base industrielle de défense. 

Sur plan strictement macroéconomique, les conséquences économiques d’une guerre s’apparentent aux conséquences économiques d’une pandémie mortelle. Comme la guerre contre le Covid-19, la guerre en Ukraine va générer à la fois un choc de demande et un choc d’offre.

Le choc de demande vient principalement de la réaction des consommateurs et des investisseurs à la forte montée de l’incertitude.  La consommation des ménages diminue au profit de l’épargne. L’investissement diminue également, les entreprises passant dans une posture prudente et attentiste, excepté dans les secteurs liés à la défense. L’évolution des bourses européennes depuis le début du conflit reflète bien ce climat. La demande nette de l’étranger risque également de se détériorer. Côté exportations, la détérioration est portée par la même logique que la baisse de la demande intérieure. Côté importations, l’augmentation des prix de l’énergie, des minerais et de certains produits agricoles va fortement augmenter la facture.

Le choc d’offre vient essentiellement de la hausse des coûts de l’énergie, le pétrole ayant déjà augmenté de 20% contre 80% pour le prix du gaz depuis une semaine. Le Brent est passé de 91 dollars à 111 dollars et le prix spot du gaz en Allemagne est passé de 95 euros/MWh à 175 euros/MWh. Il en va de même avec un certain nombre de métaux pour lesquels la Russie est un producteur majeur comme le palladium, le vanadium ou le titane, des métaux indispensables notamment pour les industries automobiles et aéronautiques. L’Ukraine est un gros exportateur de blé et 36% des échanges mondiaux de blé (et 80% de l’huile de tournesol) passent par la Mer Noire. Les chaînes d’approvisionnement vont subir de nouvelles désorganisations qui vont générer la hausse de coûts de production.

En effet, de nombreux sous-équipementiers de l’industrie d’Europe de l’Est sont installées en Ukraine et ne peuvent plus fournir leurs clients européens. Les filiales d’entreprises européennes installées en Russie (de même que les filières installées en Europe d’entreprises russes) vont fermer, la Russie se retrouvant confinée. Enfin, les coûts de transport devraient augmenter également, notamment le fret aérien avec l’Asie du fait des interdictions de survol de la Russie mais aussi le fret maritime.

Ces deux chocs – offre et demande – vont se renforcer mutuellement dans leur impact négatif sur l’activité économique. En revanche, l’effet net sur les prix va dépendre de leur taille relative l’un par rapport à l’autre. En effet, un choc de demande a un effet dépressif sur les prix alors qu’un choc d’offre à un impact inflationniste. Notre intuition serait que le choc d’offre va être plus important.

Les dirigeants européens se trouvent confrontés à une situation économique complexe, car un choc d’offre amène toujours avec lui le difficile arbitrage entre l’inflation et le chômage. Le problème est que les options sont maintenant réduites par les conséquences des arbitrages passés en faveur du chômage pendant la crise du Covid-19. C’est dans un contexte d’inflation déjà galopante à 5,8% dans la zone euro et un endettement public élevé (100% du PIB dans la zone euro) que ce nouveau choc d’offre se présente. En revanche, les pays européens sont revenus à leur niveau de production et de chômage relativement bas d’avant la crise du Covid-19.

La situation externe et interne ne permet pas d’envisager une baisse des dépenses publiques dans le court terme mais plutôt une hausse, et cela devrait conduire à une augmentation de l’endettement des États. Elle ne permet pas non plus d’envisager un changement de l’objectif de stabilité des prix de la Banque centrale européenne (BCE). Celle-ci doit s’attaquer à l’inflation sans plus attendre pour empêcher les anticipations d’inflation de se dégrader de manière permanente. Il serait aventureux pour la BCE de chercher à soutenir un peu plus l’activité et l’endettement en maintenant son taux directeur à zéro et son programme de rachat d’actifs. Laisser filer l’inflation pose un danger structurel trop grand et représente un poids trop élevé sur le pouvoir d’achat des classes moyennes et des classes populaires, phénomène qui empoisonne actuellement la présidence américaine. Cet arbitrage pourrait néanmoins changer si la situation de conflit avec la Russie devait s’étendre et tourner à la course aux armements. La priorité politique deviendrait alors le soutien à l’activité économique et à la défense, « quoi qu’il en coûte ».

Il ne nous parait pas judicieux de limiter par restrictions administratives la hausse des prix du gaz, pétrole et l’énergie dans la mesure où celle-ci ne serait pas une situation provisoire mais malheureusement une situation durable. Une telle mise en place de subventions pour l’énergie serait bien trop couteuse pour les finances publiques du fait même de son aspect non-transitoire. De même, cette limitation stimulerait la consommation de gaz et pétrole, au moment où stratégiquement il serait bon de la stabiliser voire la réduire.

Emmanuel Macron a pris les devants et a commencé à préparer l’opinion publique en évoquant le coût substantiel qu’aura la guerre en Ukraine sur notre société.

Si ce conflit avec la Russie est bien destiné à se prolonger, les gouvernements européens ne pourront pas faire l’économie d’une réflexion sur l’augmentation de la fiscalité. Qui dit guerre, dit effort de guerre et contributions de guerre. Une telle mesure qui va détourner des ressources de la consommation privée vers la consommation et l’investissement public aura par ailleurs un effet plutôt déflationniste.

Pour nous, il est préférable d’augmenter les impôts et de répartir équitablement la charge de la guerre sur l’ensemble des Français plutôt que faire peser la charge sur les catégories les plus pauvres par le biais de l’inflation ou des éventuelles pénuries liées aux prix administrés.

 

Marc Guyot et Radu Vranceanu 

Guerre Ukraine : très graves conséquences pour l’économie d’après le FMI

Guerre Ukraine : très graves conséquences pour l’économie d’après le FMI

Les conséquences de la guerre en Ukraine risquent d’être catastrophiques pour l’économie mondiale d’après le Fonds monétaire international. Les experts commencent à mesurer les dégâts de la folle entreprise de la Russie et les conséquences des sanctions prises à son égard. La conséquence la plus spectaculaire pourrait être une envolée de l’inflation qui était déjà menaçante avant la déclaration de guerre suite à la reprise économique. Avec le pétrole aujourd’hui près de 120 $, le blé passé de 280 à 410 € en une semaine,  l’explosion des prix de toutes les matières premières y compris des denrées alimentaires, le pouvoir d’achat des ménages va plomber la consommation en même temps que la production.

« Le bond des prix aura des effets dans le monde entier, en particulier sur les ménages modestes pour lesquels les dépenses alimentaires et d’énergie représentent une proportion plus importante » de leur budget que la moyenne, anticipe le FMI.

La facture ne sera pas « indolore » pour les Français avait prévenu la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili vendredi sur France Info. En France par exemple, l’assureur-crédit Euler Hermes estime que les dépenses énergétiques des ménages français pourraient s’envoler de 400 euros cette année, pour atteindre 2.800 euros.

Ukraine : quelles conséquences pour la France ?

Ukraine : quelles conséquences pour la France ?

 

 

Au-delà de l’émotion que suscite, jusqu’en Russie elle-même, le spectacle poignant d’un peuple vivant sous les bombardements, la question politique centrale qui se pose nécessairement à nos gouvernants est la suivante : quelles sont les conséquences pour  la France et pour les Français des événements qui se déroulent aujourd’hui aux portes  de l’Europe ? Par André Yché, Président du conseil de surveillance chez CDC Habitat.

 En préambule, il convient de rappeler brièvement quels sont les ressorts essentiels  d’un enchaînement apparemment irrationnel dont les causes profondes ont toutes les  chances de le rendre durable

Au cours des siècles, les territoires situés à l’ouest de l’actuelle Russie, depuis les  pays baltes jusqu’à l’Ukraine en passant par la Biélorussie ont tenu lieu d’espaces tampons vis-à-vis des envahisseurs venus d’Occident, notamment Suédois et Allemands  (chevaliers Teutoniques et Porte-Glaives) au Nord, Lituano-Polonais au centre, qui ont  même occupé Moscou entre 1610 et 1612 et Smolensk et Kiev beaucoup plus longtemps.

De ce fait, les grandes batailles de la Russie se sont toujours déroulées contre les  Occidentaux : contre les chevaliers Teutoniques en 1242 sur le lac Peïpous, bataille  remportée par Alexandre Nevski ; puis contre les Suédois en 1709 avec la victoire de  Pierre le Grand à Poltava ; contre la Grande Armée en 1812 est contre la Wehrmacht en  1942/44.

Au cours de ce dernier épisode, un fort courant ukrainien s’est allié à l’envahisseur  allemand, multipliant les exactions contre les populations civiles (juives notamment), de  telle sorte que cet épisode marque encore profondément la mémoire russe.

Entre 1989 et 1991, l’effondrement de l’URSS s’est accompagné de la libération des  États-Nations d’Europe centrale, mais aussi de l’indépendance des nations-sœurs de la  Russie, essentiellement la Biélorussie et l’Ukraine, mais aussi la Géorgie et la Moldavie.  Aujourd’hui, la volonté du pouvoir russe est manifestement de reconstituer un ensemble  géopolitique correspondant à la « Grande Russie » dont il convient de rappeler que Kiev  fut la première capitale, au moment même de la conversion du peuple russe au  christianisme sous le règne de Vladimir, à la fin du Xe siècle.

Ainsi donc, les événements qui ensanglantent l’Ukraine viennent de très loin et la  mémoire russe, marquée par deux siècles et demi de joug mongol, demeure partagée  entre l’attraction de l’Occident (et l’amour persistant des élites et du peuple russe pour la  France) et une dimension asiatique viscérale qui s’est traduite par l’émergence de  Moscou, contre la Russie kiéviste, dès le XIIIe siècle.

Quel que soit le dénouement de l’épisode dramatique auquel nous assistons, que la  résistance des Ukrainiens et les premiers résultats de l’offensive russe rendent peu  prévisible, la crise sera durable car la perspective d’un accord russo-occidental sur la  sécurité en Europe, pourtant indispensable, vient de s’éloigner drastiquement.

Dès lors, la question qui se pose est celle des conséquences qui en résultent pour  l’Occident et, plus particulièrement, pour la France

Les sanctions économiques, l’isolement diplomatique et culturel correspondent à une  réaction d’urgence, dont l’efficacité reste à démontrer : la dépendance aux exportations  de blé du monde arabe, celle de l’Europe au gaz russe permettent d’en douter, de telle  sorte que la seule réplique convaincante consiste, de fait, dans la réévaluation de notre  posture de défense

  • À très court terme, il s’agira de combler nos principales lacunes opérationnelles : les  stocks de munitions guidées et de missiles de croisière à rehausser ; peut-être aussi nos capacités d’artillerie (et notamment de feux de contrebatteries qui reposent sur les  systèmes héliportés de détection des départs de tir), mais aussi d’hélicoptères de combat  et d’assaut à renforcer.
  • À plus long terme, c’est la force nationale stratégique qui est en jeu, s’agissant  notamment de la protection des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) vis-à-vis des risques de détection satellitaires ou autres (par observation des anomalies du  champ magnétique terrestre, par exemple) et de prise en chasse par des sous-marins  nucléaires d’attaque (SNA, dits hunter-killer) armés de torpilles hyper-véloces. Bref, les  économies budgétaires ne proviendront plus des « dividendes de la paix ».

Le retour de la sécurité extérieure de l’Europe au premier rang des priorités devrait  avoir pour effet de modifier le rapport des forces entre la France et l’Allemagne dans la  construction européenne, notre pays détenant la seule force de dissuasion nucléaire  autonome sur le continent européen (pour mémoire, l’engagement des moyens  britanniques demeure sous contrôle américain par le biais du système de « double clef »)  ainsi que le seul siège permanent du continent européen (hors Russie) au conseil de  sécurité de l’ONU.

Dans cette perspective, il est probable que la doctrine allemande quant aux règles  d’équilibre budgétaire connaisse un certain assouplissement, en considération de l’intérêt  collectif lié à la maintenance et à la modernisation des deux composantes, aérienne et  sous-marine, de la force de frappe nucléaire.

A ce propos, la rapidité de l’annonce, par le Chancelier fédéral, d’un programme de  réarmement incluant le rehaussement du budget de défense à plus de 2% du PIB ainsi  que d’une enveloppe exceptionnelle de remise à niveau de 100 milliards d’euros dénote  une prise de conscience de l’ensemble des enjeux intérieurs à l’Europe aussi bien  qu’extérieurs qui vaut référence pour l’ensemble de l’Union.

Par ailleurs, l’indépendance stratégique de l’Europe dans les deux domaines sensibles  que sont l’énergie et l’agroalimentaire nécessitera des investissements massifs,  notamment dans la filière nucléaire et dans la « politique agricole commune ». Il n’en  demeure pas moins qu’à l’échéance de l’horizon prévisible, l’augmentation des prix dans  le secteur de l’énergie et dans celui de l’alimentation soulèvera la question du pouvoir  d’achat avec une acuité accrue, de telle sorte que la mise en œuvre du revenu universel  d’activité devient de plus en plus probable.

L’ensemble de ces contraintes conduiront nécessairement à l’adaptation des  modalités de déploiement de l’État-Providence, s’agissant des régimes de retraite, de  l’assurance santé, mais aussi de la prise en charge du vieillissement (maintien à domicile,  encadrement de la gestion des EPHAD) ainsi que, bien sûr, de la politique du logement.

Dans cette perspective, alors que certains dispositifs récents (zéro artificialisation des  sols, normes de performance énergétique) réclament la mise en place de mesures  d’accompagnement, les diverses propositions émises dans des tribunes antérieures trouveront toute leur portée : territorialisation de la programmation, refondation de  ministères « politiques », structuration de filières de production, constitution  d’«opérateurs globaux», concessions de service public de longue durée.

En d’autres termes, la redécouverte de l’importance de l’État-Nation dans ses missions  régaliennes imposera de repenser l’organisation de l’État-Providence : en termes de  philosophie politique, la carte « vitale » ne saurait se substituer à la carte d’électeur.

Guerre Ukraine : des conséquences économiques graves pour l’Afrique

Guerre Ukraine : des conséquences économiques graves pour l’Afrique

L’économiste Rabah Arezki met en garde contre un « choc majeur » pour les ménages du continent, du fait des répercussions de l’offensive russe sur les marchés.

 

Tribune. Les prix de l’énergie et des produits alimentaires connaissent une envolée spectaculaire. Le baril de pétrole brent a franchi la barre des 100 dollars, seuil qu’il n’avait pas atteint depuis 2014. Les prix des produits céréaliers, laitiers et des huiles alimentaires sont à des niveaux records, proches de ceux de l’année 2011, laquelle avait été marquée par des périodes de soulèvements populaires en Afrique et au Moyen-Orient.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a accentué la tendance à la hausse, déjà bien prononcée, des prix de l’énergie et des produits alimentaires. En plus d’être producteurs de gaz naturel et de pétrole, la Russie et l’Ukraine comptent ensemble pour à peu près 30 % de la production globale de blé et 80 % de l’huile de tournesol.

 

Du point de vue macroéconomique, les balances courantes des pays africains sont très vulnérables à l’évolution des marchés des produits de base, même s’ils ne sont pas tous logés à la même enseigne. Par exemple, les pays dépendant des importations d’huile alimentaire et de blé ont été beaucoup plus touchés que les pays importateurs de riz, comme la Côte d’Ivoire, du fait du différentiel de prix entre ces produits.

Les exportateurs de pétrole et de gaz naturel, de plus en plus nombreux sur le continent, bénéficient de la hausse des prix de leurs exportations, qui a contribué à atténuer le choc négatif sur les termes de l’échange découlant de l’augmentation des prix des denrées alimentaires.

Les pays importateurs à la fois d’énergie et de produits alimentaires sont, eux, dans une situation difficile, car leurs déficits extérieurs se creusent de façon abyssale. Au-delà de l’accélération de la hausse des prix liée à la guerre, les pays d’Afrique du Nord comme l’Egypte, la Tunisie et l’Algérie, qui dépendent de l’importation de blé venant directement de l’Ukraine et de la Russie, risquent des ruptures d’approvisionnement.

Au niveau microéconomique, l’impact de la hausse des prix des produits énergétiques et alimentaires sur les populations africaines est sévère. Le continent, qui abrite 67 % des plus pauvres du monde, y est grandement vulnérable. D’autant que les pénuries de produits alimentaires liées aux événements météorologiques extrêmes, comme la sécheresse dans la Corne de l’Afrique et à Madagascar, viennent aggraver les conditions de vie, en particulier pour les groupes économiquement marginalisés.

Economie-Guerre en Ukraine : des conséquences pour la France

Economie-Guerre en Ukraine : des conséquences pour la France

Il est clair que la France comme d’autres pays dans le monde sera affectée par la guerre en d’Ukraine. La première conséquence sera une entrave au commerce international. La seconde concernera l’envolée supplémentaire de l’inflation du fait de l’augmentation des prix des matières premières et de l’énergie. La France pourrait perdre 1 à 2 % de croissance au lieu des 4% prévus initialement. Il s’agit évidemment des scénarios très approximatifs car  personnes aujourd’hui n’est en état de mesurer l’extension possible de la guerre en Ukraine et ses conséquences. Officieusement, les experts espèrent que le conflit sera contenue en Ukraine. Mais aucune certitude n’est possible tellement est imprévisible la réaction du dictateur Poutine aujourd’hui isolé au plan international et même contesté dans son pays même si toute contestation est complètement muselée.

 

Guerre en Ukraine : des conséquences économiques pour la France

Guerre en Ukraine : des conséquences économiques pour la France

Il est clair que la France comme d’autres pays dans le monde sera affectée par la guerre en d’Ukraine. La première conséquence sera une entrave au commerce international. La seconde concernera l’envolée supplémentaire de l’inflation du fait de l’augmentation des prix des matières premières et de l’énergie. La France pourrait perdre 1 à 2 % de croissance au lieu des 4%prévus initialement. Il s’agit évidemment des scénarios très approximatifs car  personnes aujourd’hui n’est en état de mesurer l’extension possible de la guerre en Ukraine et ses conséquences. Officieusement, les experts espèrent que le conflit sera contenue en Ukraine. Mais aucune certitude n’est possible tellement est imprévisible la réaction du dictateur Poutine aujourd’hui isolé au plan international et même contesté dans son pays même si toute contestation est complètement muselée.

 

Un observatoire des conséquences environnementales du numérique

Un observatoire des conséquences environnementales du numérique

 

Dans le cas d’un récent débat sur la problématique numérique et environnement, le Parlement vient d’adopter la création d’un « observatoire des impacts environnementaux du numérique » afin d’établir des données plus précises sur cette problématique. Il prévoit également une formation de sensibilisation aux conséquences environnementales du numérique et à la « sobriété numérique » dans le primaire et le secondaire. Le texte favorise par ailleurs des centres de données et des réseaux moins gourmands en électricité et renforce la lutte contre l’obsolescence programmée en l’étendant aux logiciels.

Selon les travaux d’une mission d’information sénatoriale, si rien n’est fait, le numérique sera à l’horizon 2040 à l’origine de 24 millions de tonnes équivalent carbone, soit environ 7% des émissions de gaz à effet de serre de la France, contre 2% aujourd’hui.

La consommation par exemple des bitcoins en énergie peut laisser perplexe En effet, un ménage américain consomme environ 900 kWh par mois, cela signifie qu’une seule opération en bitcoin utilise autant d’électricité qu’un foyer américain en 7 jours. L’énergie consommée en un an par la monnaie virtuelle pourrait faire vivre, en terme d’énergie, 2.35 millions de ménages américains, ou une maison consommant de l’énergie pendant une semaine.

Si l’on réfléchit, non pas en terme de foyers, mais en émissions de CO2, le bitcoin est également en position délicate. En effet, selon Digiconomist, qui a pris pour exemple une mine de la monnaie virtuelle, bitcoin en Mongolie. La mine est alimentée au charbon, et chaque bitcoin consommé aurait pour conséquence 8 000 à 13 000 kilogrammes de CO2 par bitcoin. Et donc, entre 24 000 et 40 000 kilogrammes pour chaque heure d’activité. En comparaison, une voiture en Europe, émet 0.1181 kilogramme de CO2 a chaque kilomètre parcouru. Ainsi, la mine en Mongolie produit, chaque heure l’équivalent, en émission de CO2, de 203 000 kilomètres parcourus en voiture. La preuve s’il en fallait que nouvelles technologies et économies d’énergie ne sont pas toujours compatibles

 

Pour aller plus loin

Si l’on prend le réseau Visa (serveur – banque) au niveau mondial. Ce dernier a réalisé en 2016, 82.3 millions de transactions bancaires, et ainsi Visa a une consommation électrique similaire à 50 000 foyers américains. Ainsi, il pourrait alimenter un foyer américain pendant 19 secondes. Alors que si l’on prend l’exemple de bitcoin, il pourrait alimenter 5.60 foyers pendant une journée.

En conclusion, la consommation électrique du bitcoin a un impact écologique important. Mais, nous pouvons nous poser la question des monnaies fiduciaires. Sont-elles autant énergivores que les monnaies virtuelles, comme le bitcoin ? Car si l’on se penche sur la question, l’extraction d’or est tout aussi néfaste pour l’environnement, car elle a besoin de ressources naturelles, contrairement au bitcoin qui utilise de l’électricité.

Défense: Conséquences de l’alliance entre l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni

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Au-delà des sensibilités françaises, la nouvelle alliance anglo-saxonne créée pour faire face à la Chine pose des questions existentielles à l’Europe

 

Editorial du « Monde » (extrait .)

 

La colère du ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, à propos de l’abandon par Canberra du contrat signé avec la France sur la fourniture de sous-marins conventionnels à l’Australie est justifiée. L’alliance conclue par les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie, rendue publique mercredi 15 septembre, afin de développer des sous-marins australiens à propulsion nucléaire pour contrer l’ascension de la Chine dans le Pacifique, est bien, comme il l’a dit, un « coup dans le dos » de la France, à laquelle aussi bien Canberra que Washington ont caché tous les préparatifs de cette opération.

C’est surtout un coup dur révélateur des risques auxquels s’exposent les puissances qui jouent au-dessus de leurs capacités. Au-delà de cette mauvaise manière faite à un pays qui, jusqu’à nouvel ordre, est un allié, trois leçons peuvent déjà être dégagées de la naissance de l’Aukus, sigle donné à ce nouveau pacte de sécurité sur la base de l’acronyme Australia-United Kingdom-United States.

La première porte sur la relation transatlantique. Pour ceux qui en doutaient encore, l’administration Biden ne diffère pas, sur ce point, de l’administration Trump : les Etats-Unis passent avant tout, qu’il s’agisse de leur intérêt stratégique, économique, financier ou sanitaire. « America first » reste la ligne directrice de la politique extérieure de la Maison Blanche.

La création de l’Aukus n’est pas dirigée contre la France, mais qu’elle lui inflige au passage un cinglant revers diplomatique et économique n’a aucune importance pour Washington, qui n’a que l’objectif chinois en ligne de mire. Certains voyaient dans les professions de foi multilatéralistes de Joe Biden et la francophilie de son secrétaire d’Etat, Antony Blinken, la promesse d’une coopération plus équilibrée : ils sont aujourd’hui ramenés à la réalité.

 

La deuxième leçon concerne Londres. Pour la diplomatie post-Brexit, cet accord marque une étape majeure. Il place la Grande-Bretagne dans le grand bain indo-pacifique, là où, seule, elle n’y serait pas arrivée. Mais surtout il remet les Britanniques dans la roue des Américains. « Global Britain » se cherchait : elle s’est trouvée, dans l’alignement sur Washington. L’amertume qui avait explosé sur les bancs de la Chambre des communes au moment du retrait américain d’Afghanistan, organisé sans consultation avec les alliés présents sur le terrain depuis vingt ans, est effacée, moins d’un mois plus tard, par la grâce de l’Aukus.

 

La troisième leçon est à la fois plus importante et plus complexe, car elle s’adresse à l’Europe. Au-delà des sensibilités françaises, c’est bien la place de l’Europe et son rôle dans le monde qui se trouvent ici remis en question. Où veut-elle se situer dans le réalignement mondial qui s’opère à l’ombre de l’affrontement sino-américain ? Peut-elle y agir en tant que puissance autonome, ou bien les pays européens vont-ils assister en ordre dispersé à ce réalignement, sacrifiant tout espoir d’y exercer une quelconque influence et d’y défendre leurs intérêts ?

L’UE a  singulièrement manqué de cohérence et de colonne vertébrale dans sa gestion de l’ascension chinoise, notamment sous l’influence de Berlin. Elle le paie chèrement aujourd’hui.

Hyper Incendie : Des conséquences très durables

Hyper Incendie : Des conséquences très durables 

 

Le biologiste Romain Garrouste, spécialiste de l’écologie et de l’évolution des insectes, explique, dans une tribune au « Monde », pourquoi le ravage par les flammes du massif des Maures aura des conséquences catastrophiques. (Extrait)

 

Tribune.

 

Depuis lundi 16 août, le massif des Maures (Var) brûle et avec lui l’un des joyaux de la biodiversité méditerranéenne, la plaine des Maures, qui héberge une réserve naturelle unique en Europe : la réserve naturelle nationale de la plaine des Maures. Un incendie d’origine humaine compliqué et difficile à maîtriser dans le contexte climatique hors norme (température de 40 °C, vent apocalyptique) a traversé le massif et continue à brûler le territoire de la réserve, entre Le Cannet-des-Maures, Vidauban et Les Mayons (le village est évacué à l’heure où ces lignes sont écrites).

Aujourd’hui, une nouvelle soirée d’effroi et de tristesse se prépare, les équipes de la réserve sont contraintes de respecter les consignes incendies et les moyens ont été concentrés pour défendre les régions littorales où brûlent des campings et des maisons. Ce qui menace autant d’écosystèmes uniques et précieux que dans la réserve nationale, avec une réserve biologique intégrale gérée par l’Office national des forêts (ONF) au cœur du massif. Un terrible bilan se prépare, entre drames humains intolérables et catastrophes économiques et écologiques. Je connais des gens qui ont perdu leur maison aujourd’hui.

Permettez-moi de réagir viscéralement à cette catastrophe en tant que scientifique engagé dans la gestion de cette réserve et, plus largement, dans la conservation des milieux méditerranéens.

Ici, point de liste d’espèces ni d’indicateurs écologiques, juste le ressenti d’années d’efforts partagés entre les habitants, les gestionnaires et les scientifiques pour trouver l’équilibre difficile de la cogestion, entre conflits d’intérêts multiples et références culturelles éloignées voire disjointes.

Au moment où j’écris ces lignes, nous pleurons la disparition de paysages parmi les plus beaux de France, entre pins à pignons séculaires et chênes hors d’âge, où s’étiraient des vignes et quelques oliveraies, de profondes ripisylves, des dalles de grès rouge presque exotiques. La fierté de toute une région, parcourue par de superbes sentiers, le tout d’une naturalité unique et sauvage.

L’heure était pourtant au bilan de plusieurs années de ce difficile équilibre qui devait amener à de nouvelles orientations et concessions de part et d’autre, tous animés par la passion de ce territoire unique. Tout est remis à zéro, au propre comme au figuré, car la gestion future de cet espace ne pourra être dévolue qu’à un plan de sauvegarde et de restauration écologique. A inventer.

Conséquences de la mutation du Bac

 La mutation du Bac

 

Directeur de Sciences-Po Lille, Pierre Mathiot avait été missionné dès 2017 par Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, pour réformer lycée et bac. La première édition de cet examen intervient cette année. Y est maintenue la traditionnelle épreuve de philosophie qui a lieu ce jeudi. Pierre Mathiot copilote désormais le comité de suivi de la réforme.

En présentant la réforme du lycée en 2018, vous vouliez « restaurer la crédibilité » du bac. L’édition 2021, certes touchée par la Covid, n’est-elle pas dévalorisée ? Notes et appréciations surévaluées, épreuves de philo et du grand oral allégées : le taux de réussite va s’approcher des 100 %…

Le bac cette année ne correspond effectivement pas à ce qui était prévu par la réforme, mais il n’est pas dévalorisé. Il faudra cependant attendre 2023 (année du bac pour les élèves en première à la prochaine rentrée) pour avoir une vision plus complète. Il faut comprendre que le bac n’est plus cet examen qui a longtemps mis fin à un cursus. En 1985, 30 % d’une génération avait le niveau bac, avec un taux de réussite de 66 %. Aujourd’hui, c’est 80 % d’une classe d’âge et 95 % de réussite en 2020. La place du bac a changé, il faut l’accepter.

Le bac arrive après Parcoursup. Beaucoup de lycéens sont admis dans le supérieur avant même de passer l’examen. N’est-il pas en voie de marginalisation ?

Parcoursup a effectivement de plus en plus d’importance en terminale. Le moment clé de l’année, ce n’est plus la philo en juin mais la mi-mars, moment où les lycéens déposent leurs vœux sur la plateforme. La réforme a justement pour but qu’au moment de ces vœux, deux tiers des notes entrant dans le calcul du bac soient déjà prises en compte dans l’application. Avec Jean-Michel Blanquer, nous pensons que c’est le meilleur moyen de restaurer la centralité du bac dans le cursus du lycée. Cursus qui doit s’inscrire dans un continuum : de bac – 3 à bac +3, voire bac + 5, au moins pour les bacheliers généraux.

Parmi les objectifs de la réforme du lycée, il y avait la volonté d’élargir l’éventail des cursus ouverts aux élèves, de sortir des couloirs tracés par les filières S (maths, physique-chimie), ES (sciences éco + maths), L (littéraire)… Est-ce atteint ?

Le « nouveau » lycée offre effectivement une plus grande liberté de choix avec des enseignements de spécialité (trois à choisir en première, deux à conserver en terminale) qui s’ajoutent au tronc commun. Déjà, plus de la moitié des « triplettes » formées par les élèves ne correspondent pas aux anciennes séries. La discipline privilégiée reste les maths, mais ensuite les choix sont équilibrés entre plusieurs matières. Et c’est la spécialité Sciences économiques et sociales qui est la plus conservée en terminale. La spécialité Humanités, littérature et philosophie est suivie par 23 % des lycéens alors qu’ils n’étaient que 15 % à faire L. Un rééquilibrage est donc en train de s’opérer.

Mais la spécialité « Maths » semble rester la voie royale…

Elle est choisie par 62 % des lycéens mais, auparavant, la filière S était suivie par 52 % d’entre eux, dont une grande partie ne poursuivaient pas leur cursus par des études scientifiques. S et ES regroupaient 85 % des élèves. Le vrai enjeu sera celui des critères appliqués par les formations de l’enseignement supérieur pour choisir leurs élèves. Il faut que le supérieur joue le jeu et valorise la diversité des parcours lycéens.

Quelles réticences se manifestent ?

On va regarder lors des résultats de Parcoursup. Mais il est vrai que les prépas scientifiques ont l’habitude de privilégier trois matières scientifiques. Les études de santé aussi. Il sera intéressant de voir si à l’avenir, elles préfèrent récupérer de très bons élèves ou des scientifiques moyens. C’est vraiment l’enseignement supérieur qui va façonner la réforme.

Quelles améliorations sont envisagées ?

Il faut tirer les leçons du contrôle continu quasi intégral imposé par la Covid. Il convient de savoir ce que l’on doit entendre par contrôle continu, quelles règles collectives on doit instaurer, quels effets celui-ci a sur l’organisation des lycées, quels effets aussi sur les relations professeurs/élèves/familles, quel rôle donner à l’harmonisation académique… Donner plus de place au contrôle continu, aujourd’hui fixée à 40 %, peut être une piste de réflexion.

Au risque de braquer les enseignants qui y sont souvent hostiles ?

Les enseignants expriment des craintes qu’il faut entendre sur un contrôle continu « intégral » car la note en France est une sorte d’institution et comme le contrôle continu est pris en compte dans le calcul du bac et dans Parcoursup, les réactions des élèves et de leurs familles face à des notes moyennes ou médiocres peuvent rendre leur métier difficile.

Pour les enseignants, le contrôle continu est source d’inégalités. Et les harmonisations de notes sont souvent vues comme des « magouilles »…

Il est faux de parler de magouilles. Il est tout à fait normal de regarder au niveau académique les écarts aberrants à la moyenne dans la notation d’un lycée ou d’un professeur. Il faut donc travailler le sujet de l’harmonisation. En fait, il faut dépassionner le débat et rendre routinier le contrôle continu !

Combien de temps faudra-t-il à la réforme pour s’installer ?

Il faudra sans doute cinq ans pour qu’elle se déploie, prendre de nouvelles habitudes, permettre aussi à l’enseignement supérieur de se l’approprier afin de diversifier ses profils de recrutement. Un gros effort doit aussi être mené sur l’orientation pour mieux accompagner les élèves, depuis le choix de leurs spécialités dès la fin de la seconde jusqu’à l’expression de leurs vœux sur Parcoursup, en terminale.

Démantèlement des GAFA: Quelles conséquences sur les consommateurs ?

Démantèlement des GAFA: Quelles conséquences sur les consommateurs ?

Scinder les activités de Facebook, Apple, Amazon et Google pourrait favoriser la concurrence et l’innovation estimeChristopher Mims Dans le Wall Street Journal entre parenthèses (extrait)

Les entreprises, leurs lobbyistes et leurs alliés s’opposent déjà avec force à ces législations et à la nouvelle directrice de la Commission fédérale du commerce (FTC), Lina Khan, une opposante aux géants de la tech. La décision d’un juge fédéral, la semaine dernière, de rejeter les poursuites antitrust contre Facebook au motif qu’elles étaient « juridiquement insuffisantes » laisse penser que la mise en œuvre de règles plus strictes ne sera pas chose aisée.

Il existe peu de précédents permettant de se faire une idée claire de ce que serait la situation pour les utilisateurs en cas de démantèlement majeur d’Amazon, ou si Apple était contraint de se défaire de son App Store

Mais il y a de plus en plus de chances que les dispositions de ces projets de loi deviennent les règles auxquelles les grandes entreprises technologiques auront à se conformer. Cela pourrait passer par le biais d’une législation du Congrès, de lois à l’échelon des Etats, de procès, d’une nouvelle génération de régulateurs comme Mme Khan ou d’une volonté politique bipartisane de lutter contre le secteur de la tech.

Il  est intéressant d’imaginer comment les choses pourraient se passer. Après avoir parlé avec des spécialistes de l’histoire des batailles antitrust, de l’impact de la concentration du marché sur la concurrence et des effets de la réglementation sur les entreprises en position dominante, ainsi qu’avec des sociétés elles-mêmes, voici quelques pistes.

Amazon

Tous les projets de loi proposés par la Chambre semblent viser Amazon d’une manière ou d’une autre. Mais le plus important d’entre eux, le Ending Platform Monopolies Act, permettrait à la FTC de démanteler les géants de la tech si elle estime que leurs produits et services sont susceptibles de concurrencer ceux vendus par d’autres entreprises sur les plateformes de ces mastodontes.

Si cela semble couvrir de nombreuses activités de ces plateformes et que nous considérons comme normales — des applications préinstallées sur l’iPhone aux produits de marques distributeurs comme Kindle et Amazon Basics sur Amazon — c’est parce que le projet de loi est rédigé en des termes très généraux.

 

Dans le passé, les spécialistes de la lutte antitrust ont proposé de scinder Amazon en au moins quatre sociétés, en séparant les éléments qui constituent les piliers de sa domination : son activité principale de vente au détail, sa marketplace où des vendeurs tiers opèrent, sa division extrêmement rentable de services de cloud et ses services de traitement de commandes et de logistique.

Même si le géant de Seattle ne devait se séparer que de sa marketplace, les effets pourraient être perceptibles pour les consommateurs. Amazon a déclaré le mois dernier que les projets de loi pourraient l’amener à interdire aux vendeurs tiers l’accès à sa plateforme, alors qu’ils y proposent la majorité des articles. Ce serait comme si Amazon était scindé en deux, avec d’un côté une division de vente au détail fonctionnant comme Walmart — avec ses marques distributeur et les articles d’autres sociétés qu’il propose directement — et, de l’autre, une marketplace distincte comme eBay.

Dans ce même communiqué, Amazon indique que tout cela « aurait des effets négatifs importants sur les centaines de milliers de petites et moyennes entreprises américaines qui commercialisent leurs produits dans notre magasin, et sur les dizaines de millions de consommateurs qui les achètent sur Amazon ».

Il est difficile d’évaluer l’impact potentiel d’un tel démantèlement et téméraire de professer des certitudes à ce sujet — l’Amérique n’a rien vu de tel depuis la scission de Bell System. Amazon affirme que cela signifierait la fin de prestations comme la livraison gratuite. Mais les programmes de la société destinés à proposer aux vendeurs tiers le même service de livraison gratuite que Prime sans l’aide des départements logistiques d’Amazon, laissent penser que l’entreprise pourrait, malgré tout, trouver un moyen de poursuivre ses activités.

Apple

Une autre proposition de loi, l’American Choice and Innovation Online Act, poursuit un objectif similaire. Elle vise à empêcher les entreprises qui possèdent de grandes plateformes dominant le marché de donner à leurs propres services et produits qui y sont vendus un avantage injustifié sur leurs concurrents. L’App Store, via lequel Apple contrôle 100 % du marché des applications pour iPhone, pourrait ainsi être ciblé. C’est un marché lucratif. Un expert, sollicité comme témoin par Epic Games dans son récent litige judiciaire avec la firme à la pomme, a estimé que les marges d’exploitation de l’App Store pouvaient atteindre 80 %.

Dans une lettre au Congrès et un rapport qu’elle a publié sur la sécurité, Apple explique que les attaques contre sa situation de monopole sur la distribution des applications pour ces appareils menacent sa capacité à assurer leur sécurité

Apple conteste qu’elles soient aussi élevées, mais a refusé de communiquer un chiffre. Le géant de Cupertino a déclaré au cours du procès que sa marge globale en 2020 avait été de 20,9 % et que sa boutique d’applications ne devrait pas être examinée séparément de ses pertes et profits totaux.

Le système d’exploitation mobile d’Apple est utilisé sur six appareils mobiles sur dix aux Etats-Unis.

Dans une lettre au Congrès et un rapport qu’elle a publié sur la sécurité, Apple explique que les attaques contre sa situation de monopole sur la distribution des applications pour ces appareils menacent sa capacité à assurer leur sécurité.

L’impact potentiel pourrait être plus important, à la fois pour Apple et pour ses clients. Cela pourrait conduire au démantèlement du très rentable « jardin clos » — constitué de matériel, de logiciels et de services — qui rend ses produits relativement pratiques pour les utilisateurs, mais qui limite également leurs choix.

De nouvelles règles et de nouveaux régulateurs pourraient contraindre Apple à décloisonner ce système, en cédant son App Store ou en laissant les consommateurs installer des applications depuis n’importe quel endroit. Cela pourrait faciliter l’accès des utilisateurs d’iPhone aux produits d’autres entreprises, mais aussi les exposer aux menaces de rançongiciels ou d’usurpation d’identité numérique.

Facebook

Le Platform Competition and Opportunity Act, un troisième projet de loi, est plus ou moins conçu pour interdire ce qui a été la marque de fabrique de Facebook : acquérir un concurrent avant qu’il ne devienne une menace.

La plainte de la FTC contre Facebook qui figurait parmi celles qui ont été rejetées la semaine dernière, accusait l’entreprise de pratiques anticoncurrentielles lors des rachats de WhatsApp et Instagram. Si la nouvelle législation devait être adoptée, il pourrait être beaucoup plus facile pour la FTC de gagner ce type de procès.

Facebook a déclaré qu’il serait, par exemple, plus difficile pour les utilisateurs de poster des publications partagées à la fois sur Instagram et Facebook. D’autre part, le dossier complet dont dispose Facebook sur chacun d’entre nous, qu’il vend aux annonceurs — sous une forme toutefois de plus en plus anonyme — serait beaucoup plus difficile à constituer pour l’entreprise.

Un porte-parole de Facebook a qualifié ces projets de « remède empoisonné pour le secteur américain de la tech à un moment où notre économie peut le moins se le permettre ».

Un autre projet de loi, l’Augmenting Compatibility and Competition by Enabling Service Switching Act, est censé permettre aux utilisateurs d’échanger des messages entre n’importe quels services, ou du moins de faire migrer leur activité sur un réseau social vers une autre plateforme, en obligeant des entreprises comme Facebook à ne pas se limiter à nous remettre nos données lorsque nous le demandons, mais à en faciliter la transmission, sans les altérer, à d’autres sociétés.

Les avantages en matière de protection de la vie privée n’ont peut-être pas d’importance pour de nombreux consommateurs, mais ils pourraient figurer parmi les conséquences les plus immédiates de ce projet de loi pour les plus de 2,8 milliards de personnes qui utilisent chaque mois l’un des produits de Facebook.

Alphabet (Google)

L’empire de Google dans le secteur des moteurs de recherche — où il contrôle 92 % du marché à l’échelle mondiale — serait également touché par l’American Choice and Innovation Online Act. La société affirme que l’impossibilité de privilégier ses propres services impliquerait qu’ils n’apparaissent plus en tête des résultats de recherche.

Il est clair que toute action contre les Big Tech nécessitera encore beaucoup de temps pour avoir un impact sur les consommateurs. Le litige gouvernement fédéral contre Microsoft, par exemple, s’est prolongé sous trois administrations présidentielles, de 1991 à 2001. A la fin, le gouvernement a préféré conclure un accord plutôt que de tenter de faire démanteler l’entreprise

A court terme, ne plus voir les résultats de Google Maps lorsqu’ils font une recherche pourrait perturber les utilisateurs, mais de nombreux concurrents seraient enthousiastes à l’idée d’occuper cette place, notamment Yelp, qui lutte depuis des années contre le géant de Mountain View et la prédominance de son moteur de recherche. On pourrait dire la même chose de la plupart des autres services que Google et ses lobbyistes ont cités comme étant des outils que les consommateurs considèrent actuellement comme normaux — et qui vont des paroles de chansons aux vidéos YouTube apparaissant en haut dans les résultats de recherche.

« Nous ne sommes pas opposés à un examen antitrust ou à une réglementation mise à jour sur des questions spécifiques, assure Mark Isakowitz, vice-président en charge des relations avec les pouvoirs publics chez Google. Mais les consommateurs et les petites entreprises américaines seraient choqués de voir comment ces projets de loi mettraient fin à nombre de leurs services préférés. »

Il est clair que toute action contre les Big Tech nécessitera encore beaucoup de temps pour avoir un impact sur les consommateurs. Le litige gouvernement fédéral contre Microsoft, par exemple, s’est prolongé sous trois administrations présidentielles, de 1991 à 2001. A la fin, le gouvernement a préféré conclure un accord plutôt que de tenter de faire démanteler l’entreprise.

Même si ces bouleversements n’auront pas lieu de sitôt, les utilisateurs doivent pourtant se préparer à des modifications de ces services. Ces changements pourraient conduire à une concurrence accrue et, en fin de compte, à de l’innovation.

 

Ordinateur quantique : des conséquences pour toute l’industrie

Ordinateur quantique : des conséquences pour toute l’industrie

 

 

 

Les capacités de calcul inédites que promet cette technologie encore en développement vont faire surgir des applications nouvelles, note Nozha Boujemaa, Spécialiste d’IA responsable, membre du réseau d’experts en IA de l’OCDE (ONE AI),  dans le « Monde », qui rappelle que la France dispose de scientifiques de grand talent dans ce domaine.

 

L’infiniment petit ne finit pas de nous surprendre et de nous émerveiller. Au tout début de ma carrière, je construisais à la main des lasers dits à « échos de photons » et c’était magique de voir jaillir une lumière cohérente puissante avec un minimum de maîtrise de physique quantique. L’analogie avec les « échos de spin » dans le domaine magnétique m’a amenée vers l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et ses passionnantes applications en imagerie médicale.

Ces propriétés quantiques de la matière reviennent sur le devant de la scène des sciences et technologies du numérique. Cette dualité « onde-matière », ô combien intrigante tout au long de l’histoire des sciences, stipule qu’une particule est soumise à un principe de dualité qui défie les logiques de l’échelle macroscopique et échappe à l’intuition du monde réel : un objet peut être dans plusieurs états tant qu’on ne l’a pas mesuré (la superposition quantique) ; deux objets peuvent s’influencer à distance sans aucune communication (principe de non-localité ou d’intrication quantique).

 

L’ordinateur d’aujourd’hui fonctionne avec des bits (binary digits) à deux états, 0 et 1. L’informatique quantique fonctionne avec des qubits constitués par des superpositions d’états entre 0 et 1, où N qubits sont équivalents à 2N états. 70 bits quantiques superposés contiennent 270 informations (1 zettabit), ce qui équivaut à toute l’information produite par l’humanité. Cet effet exponentiel a un impact fort sur la quantité de données qui sera gérée en même temps.

On ne maîtrise pas encore la réalisation technologique d’un ordinateur quantique. Le fait même d’observer un système quantique le perturbe et génère des erreurs nécessitant des conditions de stabilisation utilisant des températures de − 273 °C environ avec un matériel de refroidissement très encombrant. Nous ne sommes qu’à l’aube d’une nouvelle ère numérique qui a besoin de progrès technologiques gigantesques (comme pour les premiers transistors).

La réalisation effective de l’ordinateur quantique nous laisse cependant entrevoir une révolution de rupture qui touchera tous les domaines industriels. Ses capacités de traitement de l’information à large échelle pourront par exemple casser tous les codes secrets – on parle déjà de cryptologie post-quantique –, optimiser des parcours en logistique, simuler la mécanique des fluides ou l’écoulement de l’air sur l’aile d’un avion. Les transports bénéficieront évidemment de ces applications. L’informatique quantique s’attaquera à tout ce qui nécessite des calculs intensifs habituellement irréalisables dans des temps raisonnables par un ordinateur binaire limité dans l’exploration informationnelle.


Evidemment, l’intelligence artificielle, qui est l’art et la manière de traiter utilement une quantité importante de données, se verra boostée avec un saut vers des capacités dont on ignore aujourd’hui les limites et les implications dans la vie des humains. Cela a un côté extraordinaire, mais c’est aussi un saut vers l’inconnu, même si l’humanité n’en est pas à sa première aventure fantastique avec des technologies transformantes.

La course vers la suprématie quantique est active chez beaucoup d’acteurs publics et privés dans le monde entier comme Google, IBM, Atos, D-Wave et bien d’autres. Le président de la République a annoncé, début 2021, un plan d’investissement dans le quantique de 1,8 milliard d’euros sur cinq ans. La France dispose des meilleurs spécialistes en physique quantique, dont une bonne représentation sur le plateau de Saclay.

Le chemin vers la réalisation de l’ordinateur quantique sera long mais les technologies développées en cours de route seront elles aussi bénéfiques pour la compréhension de notre monde, avec un impact dans des domaines d’application inattendus.

Quoi qu’il en coûte: limites et conséquences (Gilles Savary)

  • Quoi qu’il en coûte: limites et conséquences (Gilles Savary)

 

Gilles Savary s’inquiète des conséquences après la retombée inévitable  du quoi qu’il en coûte dans une tribune de l’Opinion.

 

Tribune

 

A l’issue du confinement drastique de mars 2020, le gouvernement a abordé le déconfinement avec une prudence de Sioux. Jean Castex, chargé de l’opération, y a gagné ses galons de Premier ministre. Nous étions encore habités de l’esprit de 14 et le gouvernement s’efforçait de conjurer les pièges politiques d’une sortie d’état d’urgence sanitaire qu’il croyait définitive. En fait de guerre éclair, nous y sommes encore et nous avons gagné en fatalisme et même, plus insoupçonnable, en discipline collective.

  • Ce n’est plus simplement en regard de l’épidémie, désormais bien installée dans le paysage et les esprits, que se gère le prochain déconfinement, mais de la course de vitesse vaccinale et de ses aléas d’approvisionnementOn déconfinera donc avec pragmatisme, en tolérant une part de risque sanitaire en regard de l’aspiration générale à retrouver dès que possible une vie sociale normale.
  • Les Français eux-mêmes sont devenus acteurs de la gestion de la crise sanitaire en intégrant dans leurs comportements et leurs choix vaccinaux la part d’aléa, de compromis et d’adaptation qui s’imposent aux stratégies gouvernementales. Mais la durée et les rebonds interminables de la crise sanitaire sont contrebalancés par l’espoir ardent, véhiculé par le vaccin, d’un retour à la normale progressif et empirique, et accepté comme tel.
  • Epreuve de vérité. Infiniment plus redoutable s’annonce le désarmement de l’épais rempart de protections publiques mises en place en France avec une générosité et un volontarisme sans équivalent dans le monde. La couverture exceptionnelle de chômage partiel, le fonds de solidarité éligible aux TPE et PME de tous les secteurs d’activité, les Prêts garantis par l’Etat, les aides exceptionnelles aux ménages fragiles ou aux jeunes ont creusé un endettement public et privé et des déficits budgétaires et sociaux qui ne sont pas un puits sans fond.
  • Ce manteau d’aides publiques indifférenciées constitue un écran trompe-l’œil de la situation réelle de notre économie et de nos entreprises et alimente une redoutable dépendance à l’argent magique de l’Etat. Il a permis en 2020 le tour de force d’augmenter le pouvoir d’achat des ménages de 0,6 % dans un contexte de récession de la production nationale de 8,2 % ! On estime à 60 % le nombre de petits commerces qui ont dégagé, grâce au Fonds de solidarité, un excédent brut égal ou supérieur à celui de l’avant covid, sans qu’un retour à la normale leur garantisse une viabilité économique certaine.
  • Toutes proportions gardées, l’équivalent du plan de relance des Etats-Unis est chez nous d’ores et déjà stocké dans un volant d’épargne des ménages de l’ordre de 120 milliards d’euros privatisés, dont on ne sait s’il contribuera à la relance de la consommation ou se figera dans une épargne de précaution inégalement répartie.
  • Pour le moment, le gouvernement reste évasif sur sa stratégie de sevrage de cette manne artificielle dont tout laisse penser que le ressac laissera de nombreuses victimes, entreprises et salariés, échouées sur la grève. Il ne pourra guère différer plus longtemps cette épreuve de vérité qui tombe mal avec le calendrier électoral.
  • Gilles Savary est ancien député PS de la Gironde et délégué général de Territoires de progrès.
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