Conférence sociale : le calendrier : emploi, précarité, sécu et beaucoup de flou
Comme d’habitude en France, on réfléchit vite mais il faut du temps ; Première séquence on salue le climat de la conférence sociale, deuxième on analyse, troisième on évalue. Nous sommes dans la seconde séquence. On est en train de s’apercevoir qu’en fait il y bien peu de convergences chez les acteurs sociaux. Exemple sur la précarisation, les syndicats sont pour, les syndicats patronaux contre. Pour les sites qui ferment, l’obligation de recherche d’un repreneur n’a pas beaucoup de sens pour le cédant (qui forcément le plus souvent en a recherché avant de fermer un site). De même pourquoi une nouvelle loi sur la revalorisation du SMIC ? Pour les retraites on revoit à une commission ad hoc. On parlera plus tard des plans sociaux, des licenciements bousiers et d’autres problèmes qui fâchent davantage. Bref beaucoup de flou.
• Un programme chargé sur l’emploi, la priorité
Le gouvernement conduira «au cours de l’été» une consultation sur les emplois d’avenir (pour les jeunes peu qualifiés) pour présenter un texte en octobre. Il demande aux partenaires sociaux de s’entendre «d’ici la fin 2012» sur les modalités du contrat de génération (associant jeunes et seniors) qui doit entrer en vigueur début 2013.
Il transmettra aux syndicats et au patronat en septembre un document d’orientation sur l’emploi afin qu’ils ouvrent une négociation sur «les conditions d’une meilleure sécurisation des parcours professionnels». Avec les objectifs de «lutter contre la précarité» (temps partiel, CDD…) et de «trouver les moyens d’accompagner les mutations économiques» afin de «tout faire pour maintenir l’emploi». Il s’agira aussi d’«encadrer les licenciements abusifs» et de «créer une obligation de recherche de repreneur en cas de projet de fermeture de site». Sur ces points, les partenaires sociaux devront arriver à un accord avant la fin du premier trimestre 2013.
• Pas de nouvelle loi sur la formation professionnelle
Le premier ministre veut déployer «un plan d’action» concret avec les régions à destination des jeunes qui décrochent, des salariés menacés par des mutations économiques et des chômeurs.
• Suppression de la «prime dividendes» de Sarkozy
Un groupe de travail va réfléchir à un meilleur ajustement des critères de revalorisation du smic en lien avec la croissance, pour voter une loi avant la fin de l’année. Un autre texte visant les rémunérations abusives des grands patrons sera arrêté dans les mêmes délais. Quant à la «prime dividendes», mise en place par Nicolas Sarkozy, elle sera supprimée.
• Financement de la Sécu et retraites en 2013
Jean-Marc Ayrault saisira bien à la rentrée le Haut Conseil du financement de la protection sociale afin qu’il réalise un diagnostic et propose des évolutions «en termes de diversification de recettes». Le gouvernement engagera ensuite «une concertation avec les partenaires sociaux avec pour objectif une réforme législative en 2013». S’agissant des retraites, le Conseil d’orientation des retraites devra rendre son état des lieux avant la fin de l’année afin qu’une «commission ad hoc» propose début 2013 des pistes de réforme sur l’évolution du système à long terme. Le gouvernement lancera ensuite une vaste concertation avec les partenaires sociaux.
• Peu d’espoir laissé sur les salaires des fonctionnaires
Concertations sur les moyens des syndicats, sur la diversité, le handicap, les jeunes, les seniors, négociations sur la carrière des syndicalistes et l’égalité hommes femmes, bilan sur les conditions de travail, la pénibilité, les risques psychosociaux… Les dossiers annoncés dans la fonction publique sont multiples. Mais Jean-Marc Ayrault est resté flou sur la rémunération - il promet de se pencher sur les bas salaires, les déroulés de carrière, mais ne parle pas du point d’indice - et muet sur la baisse des effectifs dans les ministères non prioritaires.
Maladie, dépendance, licenciements boursiers, pouvoir d’achat: les oublis
Le premier ministre a fait l’impasse sur les réformes du système de soins ou de l’Assurance-maladie, bien que sa ministre de la Santé, Marisol Touraine, compte ouvrir rapidement de premiers chantiers (dépassements d’honoraires). Silence également sur la dépendance. Enfin, pas un mot sur une loi d’interdiction des «licenciements boursiers» pourtant maintes fois annoncée ces dernières semaines. Le gouvernement a sans doute entendu les observations de François Chérèque (CFDT) sur la difficulté juridique - et l’absurdité économique - de les interdire.
Chérèque jubile, Parisot fulmine
Mis à part Bernard Thibault (CGT) qui s’est plaint de l’absence de mesures d’urgence contre les plans sociaux, les autres leaders syndicaux sont plutôt satisfaits de «la feuille de route sociale» du premier ministre. «Il y a beaucoup d’éléments positifs», admet Jean-Claude Mailly (FO). «C’est un beau programme, juge François Chérèque (CFDT). On est toujours content quand le gouvernement nous demande de négocier sur des thèmes qu’on a proposés».
Dans le camp d’en face, Jean Lardin (UPA) a jugé que «les grandes priorités sont à la bonne place». Seule Laurence Parisot (Medef) a manifesté son mécontentement. «Nous sommes étonnés que le premier ministre ne tienne pas compte des réalités économiques des PME», a-t-elle fustigé en s’élevant contre l’orientation donnée à la future négociation sur l’emploi. «L’approche n’est pas conforme à ce que nous vivons. Nous sommes préoccupés par comment embaucher, comment maintenir l’emploi» et non par les conditions de licenciement des salariés. Laurence Parisot va en discuter avec Michel Sapin «pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïtés», laissant planer le risque d’un «clash».